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17/07/2020 | FRANCE | N°18MA02101

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 17 juillet 2020, 18MA02101


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune du Vigan a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 21 octobre 2015 par laquelle le service départemental d'incendie et de secours du Gard a fixé le montant de la contribution communale à son budget, ensemble le rejet du recours gracieux formé à l'encontre de cette décision, de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement

n° 1601334 du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la déci...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune du Vigan a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler la décision du 21 octobre 2015 par laquelle le service départemental d'incendie et de secours du Gard a fixé le montant de la contribution communale à son budget, ensemble le rejet du recours gracieux formé à l'encontre de cette décision, de mettre à la charge du service départemental d'incendie et de secours du Gard une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1601334 du 16 mars 2018, le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 21 octobre 2015 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard a notifié le montant de la contribution de la commune du Vigan au budget du service pour l'année 2016, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux formé à son encontre.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2018 et le 23 juin 2020, le service départemental d'incendie et de secours du Gard, représenté par la SELARL A...-Tardivel, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 16 mars 2018 ;

2°) de rejeter les conclusions de la commune du Vigan ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Vigan la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier faute d'avoir mis au contradictoire la note en délibéré de la commune qu'il a utilisé pour son jugement ;

- la demande de première instance n'était pas recevable dès lors que l'acte attaqué ne fait pas grief ;

- la contribution mise à la charge de la commune du Vigan est contraire au principe d'égalité devant les charges publiques.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mars 2020, la commune du Vigan, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du SDIS du Gard une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le tribunal administratif n'a commis aucune irrégularité ;

- la requête est recevable ;

- les autres moyens soulevés par le SDIS ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant le SDIS d'Occitanie, et de Me C..., représentant la commune du Vigan.

Considérant ce qui suit :

1. Par un courrier du 20 octobre 2015, le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours (SDIS) du Gard a notifié à la commune du Vigan le montant de sa contribution au budget du service pour l'année 2016, tel qu'arrêté par délibération du conseil du 5 octobre 2015, s'élevant à 235 146,05 euros. Le SDIS du Gard relève appel du jugement du 16 mars 2018 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a annulé la décision du 21 octobre 2015 par laquelle le président du conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours du Gard a notifié le montant de la contribution de la commune du Vigan au budget du service pour l'année 2016, ainsi que la décision rejetant le recours gracieux formé à son encontre.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort de la note en délibéré produite par la commune du Vigan en première instance que le tribunal administratif de Nîmes ne s'est fondé sur aucun des éléments qui y figurait. Dès lors, il n'a commis aucune irrégularité en s'abstenant de la communiquer ou de rouvrir l'instruction.

3. Aux termes de l'article L. 1424-35 du code général des collectivités territoriales : " La contribution du département au budget du service départemental d'incendie et de secours est fixée, chaque année, par une délibération du conseil départemental au vu du rapport sur l'évolution des ressources et des charges prévisibles du service au cours de l'année à venir, adopté par le conseil d'administration de celui-ci. / .... Les modalités de calcul et de répartition des contributions des communes et des établissements publics de coopération intercommunale compétents pour la gestion des services d'incendie et de secours au financement du service départemental d'incendie et de secours sont fixées par le conseil d'administration de celui-ci. ... Le conseil d'administration peut... prendre en compte la situation des communes et des établissements publics de coopération intercommunale situés dans les zones rurales ou comptant moins de 5 000 habitants. ...La présence d'agents publics titulaires ou non titulaires ayant la qualité de sapeur-pompier volontaire parmi les effectifs des communes membres de cet établissement peut être prise en compte pour le calcul du montant global de la contribution qu'il verse.....Avant le 1er janvier de l'année en cause, le montant prévisionnel des contributions mentionnées aux quatrième et cinquième alinéas, arrêté par le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours, est notifié aux maires et aux présidents des établissements publics de coopération intercommunale....". Par une délibération du 5 octobre 2015, le conseil d'administration du SDIS du Gard a décidé, " pour l'année 2016 (que) les modalités de calcul de la répartition des contributions entre les communes, sont maintenues ", " de ne pas appliquer l'augmentation de l'indice... " et que " le montant total des contributions des communes ... s'élève à 28 453 150,99 euros " ; un tableau annexé indique la contribution par commune. Par une lettre du 20 octobre 2015 adressée à la commune du Vigan, le président du conseil d'administration du SDIS du Gard a mentionné le montant de 235 146,05 euros du montant de la contribution due par la commune pour l'année 2016. Cette lettre du 20 octobre 2015, qui constitue l'exécution par le président du SDIS du Gard de la délibération du conseil d'administration de cet établissement et qui doit être notifiée à la commune du Vigan, en application de l'article L. 1424-35 précité du code général des collectivités territoriales, ne présente pas, contrairement à ce que soutient le requérant, le caractère d'un simple acte confirmatif de la délibération, mais une décision administrative individuelle faisant grief susceptible de recours contentieux, comme l'a jugé le tribunal administratif de Nîmes qui n'a, ainsi, pas commis d'irrégularité.

Sur la recevabilité :

4. Comme il vient d'être dit, les conclusions de la commune dirigées contre la décision du 20 octobre 2015 sont recevables.

5. La commune dispose d'un intérêt lui donnant qualité pour agir contre l'acte mentionné au paragraphe 4, quand bien même elle aurait été destinataire d'un titre exécutoire, devenu définitif, mettant à sa charge sa contribution au titre de l'année 2016.

Sur le bien-fondé de la demande :

6. Le principe d'égalité ne s'oppose pas à ce que l'autorité investie du pouvoir réglementaire règle de façon différente des situations différentes ni à ce qu'elle déroge à l'égalité pour des raisons d'intérêt général, pourvu que la différence de traitement qui en résulte soit, dans l'un comme l'autre cas, en rapport avec l'objet de la norme qui l'établit et ne soit pas manifestement disproportionnée au regard des différences de situation susceptibles de la justifier.

7. Par sa délibération du 5 octobre 2015, le conseil d'administration du service départemental d'incendie et de secours a fixé les modalités de calcul et de répartition des contributions en renvoyant à celles arrêtées pour l'année 2015, elles-mêmes identiques à celles retenues pour l'année 2014. Pour chaque commune, le montant de cette contribution correspond ainsi, aux termes des délibérations adoptées les années précédentes, à un pourcentage de ses dépenses réelles constatées au compte administratif pour l'année 2000, pondéré selon le taux de subvention départemental, et fixé soit entre 3,62 et 3,92%, soit entre 4,29 et 4,59%, selon qu'un centre d'incendie et de secours est présent ou non sur son territoire, puis revalorisé de 6,30% pour l'année 2002 et en fonction de l'augmentation de l'indice des prix pour chacune des années suivantes jusqu'à l'année 2014.

8. La commune du Vigan a fait notamment valoir, sans être contredite ni devant le tribunal administratif, ni devant la Cour, que ces modalités de calcul aboutissent à faire peser sur elle une charge par habitant plus de quatre fois supérieure à celle incombant à d'autres communes du département, disposant pourtant d'une population et de bases fiscales similaires. Si, contrairement à ce qu'elle soutient, ces communes, en l'occurrence Saint-Hilaire-de-Brethmas et Rousson, ne disposent pas comme elle d'un centre de secours sur leur territoire, et ne bénéficient donc pas d'un délai d'intervention aussi rapide qu'elle, cette différence de situation, et celle, à supposer qu'elle puisse être regardée comme ayant un rapport avec l'objet de la contribution en litige, tenant au montant des dépenses réelles de chacune des collectivités pour l'année 2000, ne sont pas de nature à justifier une disproportion si manifeste quant au taux de contribution par habitant qui leur est demandé, ce critère permettant, contrairement aux affirmations du SDIS d'apprécier la contribution au regard du principe d'égalité. Si le service départemental d'incendie et de secours soutient que d'autres différences de situation pourraient expliquer un tel écart, l'imprécision de son argumentation ne permet pas, en tout état de cause, d'en apprécier la portée. Dès lors, en l'état des pièces du dossier, la délibération du 5 octobre 2015 doit être regardée comme méconnaissant le principe d'égalité devant les charges publiques. Il y a dès lors lieu de l'annuler, en tant qu'elle fixe la contribution de la commune du Vigan.

Sur les frais du litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune du Vigan qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le service départemental d'incendie et de secours du Gard demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du SDIS une somme de 2 000 euros au titre de ces dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du SDIS du Gard est rejetée.

Article 2 : Il est mis à la charge du SDIS d'Occitanie, venant au droit du SDIS du Gard, une somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, à verser à la commune du Vigan.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune du Vigan et au service départemental d'incendie et de secours d'Occitanie.

Copie en sera adressée au préfet du Gard.

Délibéré après l'audience du 6 juillet 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. D..., président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 17 juillet 2020.

2

N° 18MA02101


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA02101
Date de la décision : 17/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Actes législatifs et administratifs - Validité des actes administratifs - violation directe de la règle de droit - Principes généraux du droit - Égalité devant le service public.

Collectivités territoriales - Dispositions générales - Services publics locaux - Dispositions particulières - Services d'incendie et secours.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS BLANC - TARDIVEL

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-07-17;18ma02101 ?
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