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22/06/2020 | FRANCE | N°19MA04565-19MA04564

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 22 juin 2020, 19MA04565-19MA04564


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Corse-du-Sud a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2017 par lequel le maire de Porto-Vecchio a accordé un permis de construire à M. B... A... pour l'édification d'un bâtiment comprenant quatre locaux commerciaux sur un terrain cadastré section G, parcelles n°s 1302, 1303 et 1305, situé lieu-dit " Bonifazinco " à Porto-Vecchio.

Par un jugement n° 1800164 du 22 août 2019, le tribunal administratif de Bastia a annulé cet arrêté.
>Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2019 sous le n° ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Le préfet de la Corse-du-Sud a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler l'arrêté du 28 novembre 2017 par lequel le maire de Porto-Vecchio a accordé un permis de construire à M. B... A... pour l'édification d'un bâtiment comprenant quatre locaux commerciaux sur un terrain cadastré section G, parcelles n°s 1302, 1303 et 1305, situé lieu-dit " Bonifazinco " à Porto-Vecchio.

Par un jugement n° 1800164 du 22 août 2019, le tribunal administratif de Bastia a annulé cet arrêté.

Procédure devant la Cour :

I. Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2019 sous le n° 19MA04564 et un mémoire, enregistré le 23 janvier 2020, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) de prononcer le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bastia du 22 août 2019 ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'exécution du jugement risque d'entraîner des conséquences difficilement réparables ;

- il a développé des moyens sérieux d'annulation dans sa requête au fond.

Par un mémoire en défense, enregistré le 11 décembre 2019, le préfet de la Corse-du-Sud conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par l'appelant n'est fondé.

II. Par une requête, enregistrée le 21 octobre 2019 sous le n° 19MA04565, M. A..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 22 août 2019 du tribunal administratif de Bastia ;

2°) de rejeter le recours présenté par le préfet de la Corse-du-Sud devant le tribunal administratif de Bastia ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le projet ne méconnaît pas l'article L. 121-8 du code de l'urbanisme tel qu'interprété par le PADDUC, dès lors que le projet répond aux critères posés par le PADDUC pour définir une agglomération ;

- le projet doit être regardé comme le renforcement de l'agglomération constituée par le secteur existant, déjà urbanisé, caractérisé par un nombre et une densité significatifs de constructions et jouant une fonction structurante ;

- l'espace dans lequel se situe le projet constitue également un " espace urbanisé n'admettant pas d'extension de l'urbanisation mais nécessitant un renforcement urbain " tel que prévu par le volet littoral du PADDUC ;

- le projet est conforme tant à l'ancien règlement du PLU de la commune qu'au futur PLU ;

- le projet ne méconnaît pas l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 décembre 2019, le préfet de la Corse-du-Sud conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le projet méconnaît les dispositions de l'article L. 128-1 du code de l'urbanisme ainsi que le PADDUC ;

- le projet méconnaît l'article R. 111-27 du code de l'urbanisme.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 23 janvier 2020, M. A... conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens, augmente le montant de ses conclusions fondées sur l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la somme de 3 000 euros et ajoute que des permis de construire ont été délivrés dans ce secteur avec avis conforme favorable du préfet.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a déposé une demande de permis de construire en vue de la construction d'un bâtiment comprenant quatre locaux commerciaux sur un terrain situé lieu-dit Bonifazinco à Porto-Vecchio cadastré section G n°s 1302, 1303 et 1305. Il relève appel, par une première requête enregistrée sous le n° 19MA04565, du jugement du 22 août 2019 par lequel le tribunal administratif de Bastia, sur déféré du préfet de la Corse-du-Sud, a annulé l'arrêté du 28 novembre 2017 par lequel le maire de Porto-Vecchio lui a délivré ce permis. Par une seconde requête, enregistrée sous le n° 19MA04564, il demande la suspension de l'exécution de ce jugement.

2. Les deux requêtes susvisées sont dirigées contre le même jugement. Il y a lieu de les joindre pour y statuer par un seul arrêt.

Sur les conclusions de la requête n° 19MA04565 tendant à l'annulation du jugement du 22 août 2019 :

3. L'article L. 121-8 du code de l'urbanisme dispose dans sa version applicable que : " L'extension de l'urbanisation se réalise soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement ". Il résulte de ces dispositions que les constructions peuvent être autorisées dans les communes littorales en continuité avec les agglomérations et villages existants, c'est-à-dire avec les zones déjà urbanisées caractérisées par un nombre et une densité significatifs de constructions, mais que, en revanche, aucune construction ne peut être autorisée, même en continuité avec d'autres, dans des zones d'urbanisation diffuse éloignées de ces agglomérations et villages.

4. En outre, le plan d'aménagement et de développement durable de la Corse (PADDUC) rappelle le régime de l'extension de l'urbanisation prévu par l'article L.121-8 du code de l'urbanisme et définit les critères et indicateurs constituant un faisceau d'indices de nature à permettre d'identifier et de délimiter les agglomérations et villages en Corse. A cet effet, le PADDUC prévoit que, dans le contexte géographique, urbain et socioéconomique de la Corse, une agglomération est identifiée selon des critères tenant au caractère permanent du lieu de vie qu'il constitue, à l'importance et à la densité significative de l'espace considéré et à la fonction structurante qu'il joue à l'échelle de la micro-région ou de l'armature urbaine insulaire. Pour le village, celui-ci est identifié selon des critères tenant à la trame et la morphologie urbaine, aux indices de vie sociale dans l'espace considéré et au caractère stratégique de celui-ci pour l'organisation et le développement de la commune. Le PADDUC prévoit en outre la possibilité de permettre le renforcement et la structuration, sans extension de l'urbanisation, des espaces urbanisés qui ne constituent ni une agglomération ni un village ainsi caractérisés, sous réserve qu'ils soient identifiés et délimités dans les documents d'urbanisme locaux. L'ensemble de ces prescriptions, qui apportent des précisions au sens des dispositions du I de l'article L. 4424-11 du code général des collectivités territoriales et qui ne sont pas incompatibles avec les dispositions du code de l'urbanisme particulières au littoral, sont applicables.

5. Il ressort des pièces du dossier que le secteur dans lequel se trouve le terrain d'assiette du projet se situe à plusieurs kilomètres au sud-est de Porto-Vecchio, le long de la RT 10. Ainsi que le fait valoir à juste titre le préfet, et ainsi que cela ressort des pièces du dossier, le nord et l'est du terrain sont vierges de tout bâti, tandis qu'à l'ouest, il existe de vastes zones agricoles avec du bâti disséminé. Le préfet soutient en outre sans être contredit qu'une partie du terrain d'assiette du projet se situe en espace ressource pastoralisme et arboriculture traditionnelle du PADDUC. Si plusieurs constructions sont situées au sud, elles sont disséminées et ne forment pas un ensemble d'une densité telle que le secteur puisse être considéré comme un village ou une agglomération au sens des dispositions précitées. Si la RT 10, qui permet la liaison entre Bastia et Bonifacio représente un axe structurant du réseau routier corse et possède un rôle économique de grande importance, il n'est pas démontré que le boulevard urbain sud de Porto-Vecchio jouerait à la date de l'arrêté en litige un rôle structurant à l'échelle de la micro-région ou de l'armature urbaine insulaire, malgré la volonté de la collectivité territoriale de Corse et des rédacteurs du futur plan local d'urbanisme (PLU) de la commune de Porto-Vecchio d'aménager ce secteur et malgré la compatibilité du projet avec le règlement de l'ancien PLU de la commune, dont l'annulation juridictionnelle a été prononcée par un arrêt définitif de la cour administrative de Marseille du 30 juillet 2013. Enfin, le procès-verbal de constat d'huissier en date du 22 janvier 2020 produit par M. A..., s'il a pour objet de démontrer que le terrain d'assiette du projet se situe dans le périmètre de l'agglomération administrative de Porto-Vecchio, n'établit pas qu'il se situe au sein d'une agglomération au sens de la loi Littoral.

6. Par ailleurs, ainsi que l'a jugé à bon droit le tribunal administratif, les prescriptions du PADDUC invoquées par M. A..., qui concernent les espaces urbanisés n'admettant pas d'extension de l'urbanisation mais justifiant un renforcement urbain, nécessitent que ces espaces soient précisément identifiés dans des documents d'urbanisme locaux, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a annulé l'arrêté du maire de Porto-Vecchio du 28 novembre 2017.

Sur les conclusions de la requête n° 19MA04564 à fin de sursis à exécution du jugement :

8. Le présent arrêt statue sur la demande d'annulation du jugement attaqué. Les conclusions tendant au sursis à exécution de ce jugement sont donc devenues sans objet.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans les présentes instances, le versement d'une somme à M. A..., au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... enregistrée sous le n° 19MA04565 est rejetée.

Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions à fin de sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Bastia du 22 août 2019 présentées par M. A... dans la requête n° 19MA04564.

Article 3 : Les conclusions présentées par M. A... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative dans l'instance n° 19MA04564 sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., au préfet de la Corse-du-Sud et à la commune de Porto-Vecchio.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme D..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 22 juin 2020.

La rapporteure,

signé

K. D...Le premier vice-président de la Cour,

Président de la 5ème chambre,

signé

Ph. BOCQUET

La greffière,

signé

C. PONS La République mande et ordonne à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N°s 19MA04564 - 19MA04565


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA04565-19MA04564
Date de la décision : 22/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-001-01-02-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles générales d'utilisation du sol. Règles générales de l'urbanisme. Prescriptions d'aménagement et d'urbanisme. Régime issu de la loi du 3 janvier 1986 sur le littoral.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : AMBROSELLI ; AMBROSELLI ; AMBROSELLI

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-22;19ma04565.19ma04564 ?
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