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16/06/2020 | FRANCE | N°19MA00129

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 16 juin 2020, 19MA00129


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1803573 du 21 septembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2019, M.

A... B..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal a...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... B... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1803573 du 21 septembre 2018, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 janvier 2019, M. A... B..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 21 septembre 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 novembre 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de l'admettre au séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une carte de séjour temporaire, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de l'expiration du délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de procéder à un nouvel examen de sa situation et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour à compter de l'expiration du délai de quinze jours suivant la notification du présent arrêt ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que le jugement du tribunal administratif de Marseille est irrégulier en ce que, en premier lieu, il a omis de se prononcer sur le moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet des Bouches-du-Rhône en n'étudiant pas sa demande formée sur le fondement de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, en second lieu, il a estimé à tort qu'une demande de renouvellement de titre de séjour ne pouvait avoir deux fondements différents.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée, le préfet des Bouches-du-Rhône n'ayant pas motivé le rejet de sa demande de titre de séjour sur le fondement de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, le préfet des Bouches-du-Rhône n'ayant pas examiné sa demande de titre effectuée sur ce fondement et les circonstances particulières de sa situation ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) étant irrégulier ;

- elle est entachée d'un vice de procédure, le préfet des Bouches-du-Rhône n'ayant pas pu s'assurer de la régularité de la procédure suivie à l'OFII préalablement à la prise de la décision contestée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit, le préfet des Bouches-du-Rhône n'ayant pas examiné sa demande de titre de séjour sur le fondement de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est insuffisamment motivée en tant qu'elle porte refus d'octroi d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours ;

- elle méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

M. A... B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien en matière de séjour et de travail du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les observations de Me D..., substituant Me E..., représentant M. A... B....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... B..., ressortissant tunisien né le 22 décembre 1991, fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 6 novembre 2017 du préfet des Bouches-du-Rhône refusant de l'admettre au séjour, lui faisant obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges ont indiqué, au point 3 du jugement attaqué, que M. A... B... ne pouvait simultanément demander le renouvellement d'un titre de séjour tant sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que sur celui de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien précédemment visé. Par suite, ils ont répondu au moyen tiré de l'erreur de droit qu'aurait commise le préfet des Bouches-du-Rhône en n'examinant pas la demande de titre de séjour dont il était saisi se référant à cet article 7 quater. M. A... B... n'est donc pas fondé à soutenir que le tribunal administratif de Marseille aurait omis de répondre à un moyen qui n'était pas inopérant.

3. L'erreur de droit qu'aurait commise le tribunal administratif de Marseille en écartant ainsi les moyens soulevés par M. A... B... relatifs à la demande de titre de séjour sur le fondement de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien est susceptible d'entacher le bien-fondé du jugement et non sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, M. A... B... a adressé au préfet des Bouches-du-Rhône une demande en date du 18 janvier 2017 qui, d'une part, tendait au renouvellement du titre de séjour obtenu sur le fondement du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, d'autre part, sollicitait également un examen au regard de son parcours d'étudiant et de sa capacité d'intégration en se référant à l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien aux termes duquel : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7 ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " ". Saisi ainsi d'une demande de renouvellement qui ne mentionnait que le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et renvoyait, pour le reste, sans précision à l'ensemble de la législation française relative aux titres portant la mention " vie privée et familiale " tout en mentionnant l'existence d'un parcours d'étudiant, le préfet des Bouches-du-Rhône a notamment visé l'accord franco-tunisien, la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a également précisé que l'état de santé de M. A... B... ne nécessitait pas son maintien sur le territoire français, que celui-ci n'établissait pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident ses parents et sa fratrie et qu'aucun motif exceptionnel ni considération humanitaire ne justifiait son admission au séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a ainsi énoncé les considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de sa décision de rejet de la demande de titre de séjour dont il était saisi. Le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit ainsi être écarté.

5. En deuxième lieu, il ressort notamment de la motivation de la décision portant refus de titre de séjour que le préfet des Bouches-du-Rhône a procédé à un examen particulier de la demande dont il était saisi sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et qui se référait également à l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien. Les moyens tirés de ce défaut d'examen doivent donc être écartés.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège (...) ". Il ressort des pièces du dossier que l'avis du 1er octobre 2017 a été rendu par un collège de trois médecins que le directeur général de l'OFII avait désignés par décision du 21 août 2017. M. A... B... ne produit aucun élément de nature à établir que l'attestation signée le 31 juillet 2018 par la directrice territoriale de l'OFII indiquant le nom du médecin ayant rédigé le rapport médical serait inexacte. En outre, la seule circonstance que le préfet des Bouches-du-Rhône aurait communiqué, au cours de la première instance, de tels documents ne suffit pas à établir qu'il n'aurait pas vérifié que l'avis du collège des médecins a été rendu conformément aux règles procédurales fixées par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et par l'arrêté du 27 décembre 2016 précédemment visé. Par suite, ces moyens tirés d'un vice de procédure doivent être écartés.

7. En quatrième lieu, le moyen tiré de la méconnaissance du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 7 du jugement attaqué.

8. En cinquième lieu, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges au point 9 du jugement attaqué.

9. En dernier lieu, pour les motifs mentionnés au point 7 du jugement attaqué, M. A... B... peut bénéficier effectivement, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Tunisie, d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, et pour les motifs également mentionnés au point 9 du jugement attaqué, la décision contestée n'est entachée d'aucune erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle du requérant.

En ce qui concerne la légalité de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours :

10. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification et peut solliciter, à cet effet, un dispositif d'aide au retour dans son pays d'origine. Eu égard à la situation personnelle de l'étranger, l'autorité administrative peut accorder, à titre exceptionnel, un délai de départ volontaire supérieur à trente jours (...) ".

11. Il ne ressort pas des pièces du dossier que M. A... B... ait sollicité l'obtention d'un délai de départ volontaire supérieur à trente jours. Par suite, le préfet des Bouches-du-Rhône n'était pas tenu de motiver la décision fixant à trente jours le délai laissé pour exécuter volontairement l'obligation de quitter le territoire français.

12. En second lieu, les moyens tirés de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours sur la situation personnelle de M. A... B... doivent être écartés pour les mêmes motifs que ceux mentionnés, respectivement, au point 7, au point 8 et au point 9 du présent arrêt.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

14. Le présent arrêt n'impliquant nécessairement aucune mesure d'exécution, les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte doivent être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, une somme à verser au conseil de M. A... B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... B..., à Me E... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 2 juin 2020, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. C..., président assesseur,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 16 juin 2020.

3

N° 19MA00129


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA00129
Date de la décision : 16/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: M. Alain BARTHEZ
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : SCP BOURGLAN - DAMAMME - LEONHARDT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-06-16;19ma00129 ?
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