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03/02/2020 | FRANCE | N°18MA03736

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 03 février 2020, 18MA03736


Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du commerce. ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me B... représentant la commune des Pennes-Mirabeau, et de Me A..., représentant la SNC Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Sodiplan demande à la Cour d'annuler la décision du 8 juin 2018 pa

r laquelle le maire des Pennes-Mirabeau a délivré un permis de construire valant autorisation d'exploitation à la SNC L...

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du commerce. ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. G...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me B... représentant la commune des Pennes-Mirabeau, et de Me A..., représentant la SNC Lidl.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Sodiplan demande à la Cour d'annuler la décision du 8 juin 2018 par laquelle le maire des Pennes-Mirabeau a délivré un permis de construire valant autorisation d'exploitation à la SNC Lidl un supermarché pour une surface de 1 759 m2.

2. Aux termes des dispositions de l'article R. 752-30 du code de commerce : " Le délai de recours contre une décision ou un avis de la commission départementale est d'un mois. Il court : 1er Pour le demandeur, à compter de la notification de la décision ou de l'avis[. .. ]". L'avis de la commission départementale d'aménagement commercial a été rendu le 14 décembre 2017 et notifié le 21 décembre suivant. Le recours du 18 janvier 2018 a donc été enregistré dans le délai prévu par les dispositions précitées.

3. Aux termes des dispositions de l'article R. 752-35 du code du commerce : " La commission nationale se réunit sur convocation de son président./ Cinq jours au moins avant la réunion, chacun des membres reçoit, par tout moyen, l'ordre du jour ainsi que, pour chaque dossier :1° L'avis ou la décision de la commission départementale ; 2° Le procès-verbal de la réunion de la commission départementale ;/ 3° Le rapport des services instructeurs départementaux ; / 4° Le ou les recours à l'encontre de l'avis ou de la décision ; / 5° Le rapport du service instructeur de la commission nationale. ". Il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire ni d'aucun principe que les décisions de la Commission nationale d'aménagement commercial doivent comporter des mentions attestant de la convocation régulière de ses membres ou de l'envoi dans les délais de l'ordre du jour et des documents nécessaires à ses décisions. Il ressort des pièces communiquées par la Commission nationale d'aménagement commercial que, conformément au règlement intérieur de la Commission nationale, ses membres ont été convoqués à la séance du 29 mars 2018 par un courrier du 14 mars 2018 envoyé sur leur messagerie électronique, auquel était joint un ordre du jour prévoyant, d'une part, l'examen du dossier n° 3551D01 portant création d'un magasin Lidl aux Pennes-Mirabeau dans les Bouches-du-Rhône et indiquant, d'autre part, que les documents relatifs aux dossiers soumis à la Commission seraient disponibles sur une plateforme de téléchargement cinq jours au moins avant la tenue de la séance, cet envoi étant attesté par l'organisme ayant réalisé cet envoi. Ces documents, qui peuvent être adressés aux membres de la commission par tout moyen, n'avaient pas à être joints à la convocation. Aucune pièce au dossier ne permet d'affirmer que ces pièces n'étaient pas disponibles dans les délais prévus par les dispositions de l'article R. 752-35 du code du commerce. Enfin, si la convocation a été signée par le secrétaire de la Commission et non par son président, il ne ressort d'aucune pièce, et il n'est d'ailleurs même pas soutenu, que cette irrégularité aurait eu une influence sur l'avis émis par la Commission. Par suite, les moyens tirés de la méconnaissance de l'article R. 752-35 du code du commerce doivent être écartés.

4. Aux termes de l'article R. 752-6 du code de commerce : " La demande d'autorisation prévue à l'article L. 752-1 et à l'article 30-2 du code de l'industrie cinématographique est présentée soit par le propriétaire de l'immeuble, soit par une personne justifiant d'un titre l'habilitant à construire sur le terrain ou à exploiter commercialement l'immeuble ". Il ressort des pièces du dossier, et notamment du plan de bornage réalisé à la diligence du pétitionnaire et communiqué par la commune et la société Lidl qui, bien que postérieur au permis attaqué peut être valablement produit à l'appui des prétentions des défendeurs, que les terrains d'assiette du projet autorisé par la Commission nationale ne comprennent pas la parcelle AM n° 462, dont l'appartenance ne ressort au demeurant d'aucune pièce du dossier soumis à la Cour, pas davantage qu'au dossier soumis à l'administration. Cette parcelle, de superficie d'environ 100 m2 est située au-delà-du projet, entièrement sur la route d'accès. Elle ne doit recevoir aucune des installations prévues par le projet. Le moyen invoqué, tiré du défaut de maîtrise foncière du pétitionnaire, ne peut donc qu'être écarté. Si la société requérante invoque le défaut d'information sur ce point de la Commission nationale d'aménagement commercial, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette dernière se serait méprise, compte tenu des pièces qui étaient à sa disposition et qui ne permettaient pas de regarder la société pétitionnaire comme dépourvue de la maîtrise foncière du projet.

5. Il résulte des dispositions de l'article L. 141-2 du code de l'urbanisme qu'à l'exception des cas limitativement prévus par la loi dans lesquels les schémas de cohérence territoriale peuvent contenir des normes prescriptives, ceux-ci, avec lesquels les autorisations délivrées par les commissions d'aménagement commercial doivent être compatibles en vertu de ce même article et du I de l'article L. 752-6 du code de commerce, doivent se borner à fixer des orientations et des objectifs. En matière d'aménagement commercial, s'il ne leur appartient pas, sous réserve des dispositions applicables aux zones d'aménagement commercial, d'interdire par des dispositions impératives certaines opérations de création ou d'extension relevant des qualifications et procédures prévues au titre V du livre VII du code de commerce, ils peuvent fixer des orientations générales et des objectifs d'implantations préférentielles des activités commerciales définis en considération des exigences d'aménagement du territoire, de protection de l'environnement ou de qualité de l'urbanisme. Si de tels objectifs peuvent être pour partie exprimés sous forme quantitative, il appartient aux commissions d'aménagement commercial non de vérifier la conformité des projets d'exploitation commerciale qui leur sont soumis aux énonciations des schémas de cohérence territoriale, mais d'apprécier la compatibilité de ces projets avec les orientations générales et les objectifs qu'ils définissent pris dans leur ensemble.

6. Le schéma de cohérence territoriale du Pays d'Aix approuvé le 17 décembre 2015, entré en vigueur à la date de délivrance du permis de construire contesté en application des dispositions de l'article L. 143-24 du code de l'urbanisme, inclut la zone de Plan de Campagne dans les " grands espaces périphériques " constitués et la qualifie d'espace à rayonnement métropolitain eu égard au rôle prépondérant qu'elle joue dans l'organisation économique du territoire. Le document d'orientations et d'objectifs du schéma préconise la modernisation et le renforcement de telles zones, notamment par l'optimisation de l'espace existant, l'amélioration de la qualité architecturale et paysagère et le développement de l'accès en transports. S'il prévoit que " les grands espaces périphériques commerciaux doivent pouvoir favoriser l'accueil des commerces de niveau " 3 à 5 " nécessitant généralement une accessibilité motorisée et des besoins importants ", cette orientation n'a pas pour objet d'interdire toute implantation d'une nouvelle surface commerciale à dominante alimentaire. Enfin, la circonstance que le document d'orientations et d'objectifs relève la nécessité d'améliorer l'accessibilité des zones commerciales telles que celle de Plan de Campagne en particulier par le développement des modes de transport collectifs, ne saurait non plus rendre par elle-même incompatible avec les orientations du schéma la création d'un magasin de détail essentiellement fréquenté par une clientèle utilisant son véhicule, laquelle doit au demeurant entraîner une hausse très modérée des flux automobiles dans la zone. Par suite, le moyen tiré de l'incompatibilité de l'autorisation contestée avec les orientations du schéma de cohérence territoriale du pays d'Aix doit être écarté.

7. Aux termes de l'article L. 752-6 du code de commerce : " I.- (...) La commission départementale d'aménagement commercial prend en considération : / 1° En matière d'aménagement du territoire : / a) La localisation du projet et son intégration urbaine ; / b) La consommation économe de l'espace, notamment en termes de stationnement ; / c) L'effet sur l'animation de la vie urbaine, rurale et dans les zones de montagne et du littoral ; / d) L'effet du projet sur les flux de transports et son accessibilité par les transports collectifs et les modes de déplacement les plus économes en émission de dioxyde de carbone ; / 2° En matière de développement durable : / a) La qualité environnementale du projet, notamment du point de vue de la performance énergétique, du recours le plus large qui soit aux énergies renouvelables et à l'emploi de matériaux ou procédés éco-responsables, de la gestion des eaux pluviales, de l'imperméabilisation des sols et de la préservation de l'environnement ; / b) L'insertion paysagère et architecturale du projet, notamment par l'utilisation de matériaux caractéristiques des filières de production locales ; / c) Les nuisances de toute nature que le projet est susceptible de générer au détriment de son environnement proche. (...) / 3° En matière de protection des consommateurs : / a) L'accessibilité, en termes, notamment, de proximité de l'offre par rapport aux lieux de vie ; / b) La contribution du projet à la revitalisation du tissu commercial, notamment par la modernisation des équipements commerciaux existants et la préservation des centres urbains ; / c) La variété de l'offre proposée par le projet, notamment par le développement de concepts novateurs et la valorisation de filières de production locales ; / d) Les risques naturels, miniers et autres auxquels peut être exposé le site d'implantation du projet, ainsi que les mesures propres à assurer la sécurité des consommateurs. / II.- A titre accessoire, la commission peut prendre en considération la contribution du projet en matière sociale ".

8. L'autorisation d'exploitation commerciale ne peut être refusée que si, eu égard à ses effets, le projet contesté compromet la réalisation des objectifs énoncés par la loi. Il appartient aux commissions d'aménagement commercial, lorsqu'elles statuent sur les dossiers de demande d'autorisation, d'apprécier la conformité du projet à ces objectifs, au vu des critères d'évaluation mentionnés à l'article L. 752-6 du code de commerce.

S'agissant du respect des objectifs en matière d'aménagement du territoire :

9. Le projet est situé dans une zone commerciale d'environ 500 boutiques comprenant plusieurs hypermarchés, supermarchés et magasins spécialisés, pour une surface de vente totale de l'ordre de 220 000 m². Il prévoit la création d'un supermarché " LIDL " de 1 759 m² de surface de vente au sein de la zone commerciale de Plan de Campagne, sur un terrain de 6 337 m² déjà urbanisé, à l'emplacement d'un ancien magasin non exploité depuis plus de 6 ans, d'une surface plancher de 4 125 m², devant être démoli. Il vient compléter une offre commerciale déjà importante, le magasin ne représentant que 7% de la surface des commerces alimentaires implantés dans la zone. Le projet ne devrait pas entrainer de conséquences notables sur les commerces des Pennes-Mirabeau et de Marseille. La circonstance que le projet ne soit pas situé à proximité de lieux de vie ne saurait constituer une atteinte aux objectifs fixés par les dispositions précitées. Il ne méconnait pas les objectifs en matières d'aménagement du territoire ou d'animation des centres villes.

10. Le projet sera desservi pour les véhicules de la clientèle et de livraison par le Chemin des Rigons. L'étude de trafic, qui n'est pas sérieusement contestée, et dont le caractère insuffisant ne ressort pas des pièces du dossier, relève que l'impact du projet sur la densité de la circulation sera faible à l'intérieur de la zone commerciale, et n'aura que peu d'influence sur les abords extérieurs, y compris les vendredi et samedi après-midi, période où la circulation est déjà difficile, et dont la moitié des clients l'aurait fréquenté en l'absence même du magasin projeté. Il ressort des pièces du dossier, que, eu égard à la configuration de la zone, les transports en commun sont utilisés principalement par les employés sur ladite zone, et faiblement par les clients des commerces de la zone. Au demeurant, le projet est desservi par une ligne de bus, avec des arrêts situés à 150 m et 300 m et la desserte doit être renforcée à moyen terme. Compte tenu des configurations de la zone commerciale qui privilégie les accès en automobiles, le caractère limité des accès en mode " doux " ne saurait caractériser une méconnaissance des dispositions précitées du code du commerce. Alors que le bâtiment démoli avait une surface de 4 125 m2, le nouveau bâtiment a une surface de 2 845,5 m2. 52 places de parkings seront de type " evergreen " sur les 67 places en extérieur. Par ailleurs, le projet prévoit 4 bornes de rechargement, 6 places de vélos et une surface en toiture de panneaux photovoltaïques de 500 m2 ; les espaces verts représentent environ 13 % de la surface du terrain. Le projet ne prévoit pas une consommation excessive d'espaces et, au total, ne méconnait ainsi pas l'objectif de développement durable. Si le projet sera sur deux niveaux, il ressort des pièces du dossier que son insertion paysagère est satisfaisante. Les modalités d'accès au magasin ne caractérisent aucun risque particulier pour les consommateurs, les voies d'accès ne présentant pas de danger particulier, et les voies piétonnes permettant l'accès entre les magasins de la zone étant sécurisés. Par ailleurs, si la société requérante soutient que le risque incendie serait insuffisamment pris en compte par le projet, il ressort des pièces du dossier que la commission de sécurité contre les risques d'incendie et de panique dans les établissements recevant du public a émis un avis favorable au projet le 8 septembre 2017. Le moyen ne pourra dès lors qu'être écarté. Si la société soutient également qu'il existe des risques pour la consommation en raison des livraisons, le projet prévoit que les livraisons seront réalisées en dehors des heures d'ouverture. Au total, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'existeraient des risques pour les consommateurs qui n'auraient pas été pris en compte.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la requête de la société Sodiplan ne peut qu'être rejetée.

Sur les frais du litige :

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative s'opposent à la demande de la société Sodiplan, dès lors que la SNC Lidl n'a pas la qualité de partie perdante à l'instance. Il y a lieu sur le fondement des mêmes dispositions de mettre à la charge de la société Sodiplan une somme de 2 000 euros au titre des mêmes dispositions à verser à la SNC Lidl, et 2 000 euros à verser à la commune des Pennes-Mirabeau.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la société Sodiplan est rejetée.

Article 2 : Il est mis à la charge de la société Sodiplan une somme de 2 000 euros à verser à la SNC Lidl et une somme de 2 000 euros à verser à la commune des Pennes-Mirabeau, au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Sodiplan, la SNC Lidl et à la commune des Pennes-Mirabeau.

Copie est sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial et au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 20 janvier 2020, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. G..., président assesseur,

- Mme H..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 3 février 2020.

6

N° 18MA03736


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA03736
Date de la décision : 03/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial - Procédure.

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial - Procédure - Commission nationale d`aménagement commercial.

Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique - Réglementation des activités économiques - Activités soumises à réglementation - Aménagement commercial - Règles de fond.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Régime d'utilisation du permis - Permis modificatif.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 11/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-02-03;18ma03736 ?
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