Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme A... B... ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2008 et des pénalités correspondantes.
Par les articles 1er et 2 du jugement n° 1504817 du 15 juin 2018, le tribunal administratif de Nice a réduit de 67 707,90 euros la base imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au titre de l'année 2008, a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondant à cette réduction ainsi que des pénalités pour manquement délibéré, par l'article 3 a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 août 2018, M. et Mme B..., représentés par Me C..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2018 du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- ils justifient le caractère professionnel des charges afférentes à la location de garages ;
- s'agissant du montant à retenir pour la détermination du résultat social à répartir entre les associés, les sommes en litige, qui ont été prélevées avant la clôture de l'exercice 2008 par un associé ou des tiers, ne constituent pas une partie du bénéfice mais constituent pour leurs bénéficiaires des avantages accordés par la société civile professionnelle et devraient être qualifiées de rémunérations occultes imposées entre les mains de ceux qui en ont eu la disposition ;
- à défaut, ils seront imposés sur un revenu supérieur à celui qu'ils ont réellement acquis et auront contribué à l'impôt au-delà de leurs facultés contributives, en méconnaissance de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
- la répartition du résultat rectifié aurait dû être conforme aux dispositions statutaires de la société, notamment l'article 23 qui prévoit que les bénéfices sont répartis entre les associés à hauteur de 10 % au profit des parts d'industrie, lesquelles ne participent pas au capital, et à concurrence de 90 % au profit des parts en capital, lorsque les bénéfices sont au moins égaux à 304 898 euros.
Par un mémoire en défense, enregistré le 4 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut à ce qu'il soit constaté qu'il n'y a pas lieu de statuer sur la requête à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance et au rejet du surplus des conclusions de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme B... à l'encontre de l'imposition restant en litige ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. La société civile professionnelle (SCP) Postillon-B...-Pujol-Thuret-Alpini-Bucceri-Caflers-Sauvage, dont M. B... est associé, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur la période du 1er janvier 2008 au 31 décembre 2009. M. et Mme B... ont également fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle. A l'issue de ces contrôles, M. et Mme B... ont été assujettis à une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu, assortie de pénalités, au titre de l'année 2008. Ils relèvent appel du jugement du 15 juin 2018 par lequel le tribunal administratif de Nice a réduit de 67 707,90 euros la base imposable à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux au titre de l'année 2008, a prononcé la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondant à cette réduction ainsi que des pénalités pour manquement délibéré et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.
Sur l'étendue du litige :
2. Par une décision du 2 octobre 2019, postérieure à l'introduction de la requête, l'administratrice générale des finances publiques de la direction de contrôle fiscal sud-est a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, de la cotisation d'impôt sur le revenu en litige à concurrence de 25 660 euros. Les conclusions de la requête de M. et Mme B... sont, dans cette mesure, devenues sans objet.
Sur le surplus de l'imposition contestée :
3. En premier lieu, aux termes de l'article 8 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " (...) les associés des sociétés en nom collectif et les commandités des sociétés en commandite simple sont, lorsque ces sociétés n'ont pas opté pour le régime fiscal des sociétés de capitaux, personnellement soumis à l'impôt sur le revenu pour la part de bénéfices sociaux correspondant à leurs droits dans la société. (...). Il en est de même, sous les mêmes conditions : / 1° Des membres des sociétés civiles qui ne revêtent pas, en droit ou en fait, l'une des formes de sociétés visées à l'article 206 1 et qui, sous réserve des exceptions prévues à l'article 239 ter, ne se livrent pas à une exploitation ou à des opérations visées aux articles 34 et 35 ; (...) ". Il résulte de ces dispositions que les bases d'imposition de chaque associé doivent être déterminées par référence à une répartition des résultats sociaux présumée faite conformément au pacte social, sauf dans le cas où un acte ou une convention passé avant la clôture de l'exercice a pour effet de conférer aux associés des droits dans les bénéfices sociaux différents de ceux qui résulteraient de la seule application du pacte social, auquel cas les bases d'imposition des associés doivent correspondre à cette nouvelle répartition des résultats sociaux. Il en découle que les impositions supplémentaires résultant des rehaussements apportés par l'administration fiscale aux bénéfices imposables de la société sont réparties entre les associés au prorata de leurs droits sociaux ainsi déterminés. Une modification du pacte social ne peut être purement tacite et résulter de la seule connaissance par les associés des agissements de l'un d'entre eux ayant une incidence sur la répartition des résultats et de leur carence à s'y opposer. Il faut en outre rechercher si les autres associés y ont donné leur consentement.
4. La SCP Postillon-B...-Pujol-Thuret-Alpini-Bucceri-Caflers-Sauvage est une société régie par les dispositions de l'article 8 du code général des impôts. Il ne résulte pas de l'instruction, et il n'est pas soutenu, qu'une décision ou un acte exprès des associés de la société Postillon-B...-Pujol-Thuret-Alpini-Bucceri-Caflers-Sauvage, ayant pour objet de modifier les règles de répartition du résultat de la société, serait intervenu avant la clôture de l'exercice le 31 décembre 2008. Par suite, l'administration, conformément aux dispositions citées, a réparti, comme elle était fondée à le faire, les rehaussements d'impôt sur le revenu auxquels était soumis chacun des associés, consécutivement aux rehaussements des résultats de la société, au prorata de leur part aux bénéfices sociaux. La circonstance qu'auraient été réintégrées au résultat imposable de la société des dépenses ayant bénéficié seulement à certains associés précisément identifiés est sans incidence sur le montant de l'imposition en litige. Ainsi, c'est à bon droit, que M. B... a été imposé à raison de la quote-part correspondant à ses droits dans la SCP Postillon-B...-Pujol-Thuret-Alpini-Bucceri-Caflers-Sauvage. Il résulte du dégrèvement prononcé en cours d'instance que l'administration a pris en compte la part de M. B... dans les bénéfices de la SCP en application des stipulations de l'article 23 des statuts de la société.
5. En second lieu, l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 dispose que : " Pour l'entretien de la force publique, et pour les dépenses d'administration, une contribution commune est indispensable : elle doit être également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ". Cette exigence ne serait pas respectée si l'impôt revêtait un caractère confiscatoire ou faisait peser sur une catégorie de contribuables une charge excessive au regard de leurs facultés contributives. En vertu de l'article 34 de la Constitution, il appartient au législateur de déterminer, dans le respect des principes constitutionnels et compte tenu des caractéristiques de chaque impôt, les règles selon lesquelles doivent être appréciées les facultés contributives. En particulier, pour assurer le respect du principe d'égalité, il doit fonder son appréciation sur des critères objectifs et rationnels en fonction des buts qu'il se propose. Cette appréciation ne doit cependant pas entraîner de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques.
6. M. et Mme B... ne peuvent utilement soutenir que l'impôt mis à leur charge dans l'hypothèse d'une réintégration au résultat de la société de dépenses personnelles d'un des associés est sans rapport avec leurs facultés contributives, dès lors que l'impôt est assis sur les bénéfices sociaux et non sur les sommes appréhendées par les associés. L'imposition de ces bénéfices entre les mains des associés à hauteur de leurs droits dans la société repose sur un critère objectif et rationnel et n'entraîne pas de rupture caractérisée de l'égalité devant les charges publiques. Par conséquent, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 13 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen doit être écarté.
7. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté leur demande de décharge des impositions restant en litige. Leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent, par voie de conséquence, être accueillies.
D É C I D E :
Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête tendant à la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et des pénalités correspondantes à laquelle M. et Mme B... ont été assujettis au titre de l'année 2008 à hauteur de 25 660 euros.
Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. et Mme B... est rejeté.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... B... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. Maury, premier conseiller,
- Mme D..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 21 janvier 2020.
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N° 18MA03718
nc