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06/01/2020 | FRANCE | N°17MA03126

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre, 06 janvier 2020, 17MA03126


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Gap a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 308 335, 90 euros HT émis à son encontre le 17 décembre 2014, relatif au calcul de la redevance syndicale due par la commune de Gap à l'association syndicale autorisée du Canal de Gap au titre de l'année 2014, d'enjoindre à l'association syndicale autorisée du Canal de Gap d'émettre un titre conforme aux stipulations de l'avenant n°3 du 22 juin 1985 à la convention du 28 janvier 1964 conclue

entre la ville de Gap et l'association syndicale autorisée du Canal de Gap...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Gap a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler le titre exécutoire d'un montant de 308 335, 90 euros HT émis à son encontre le 17 décembre 2014, relatif au calcul de la redevance syndicale due par la commune de Gap à l'association syndicale autorisée du Canal de Gap au titre de l'année 2014, d'enjoindre à l'association syndicale autorisée du Canal de Gap d'émettre un titre conforme aux stipulations de l'avenant n°3 du 22 juin 1985 à la convention du 28 janvier 1964 conclue entre la ville de Gap et l'association syndicale autorisée du Canal de Gap et de mettre à la charge de l'association syndicale autorisée du Canal de Gap la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1501307 du 19 mai 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 19 juillet 2017, la commune de Gap, représentée par la SELARL Pezet-Perez, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 19 mai 2017 ;

2°) d'annuler le titre exécutoire n°184, bordereau n°45 d'un montant de 335.499, 47 euros T.T.C, soit 308.355, 90 H.T émis le 17 décembre 2014 à l'encontre de la Commune de Gap par l'Association syndicale autorisée du canal de Gap ;

3°) d'enjoindre à l'association syndicale autorisée du canal de Gap sur le fondement des dispositions de l'article L. 911-1 du code de justice administrative d'émettre un titre exécutoire d'un montant de 280.971,56 euros H.T conforme aux stipulations de la convention en date du 28 janvier 1964, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) prononcer la décharge au profit de la commune de Gap de la somme de 335.499, 47 euros T.T.C mis à son débit par le titre en litige ;

5°) en tout état de cause, de décharger la commune de Gap de la somme de 27.384,34 euros HT correspondant à la différence entre la somme de 280.971, 56 euros H.T, d'ores et déjà acquittée et la somme de 308.355, 90 H.T appelée par le titre litigieux ;

6°) mettre à la charge de l'association syndicale autorisée du canal de Gap la somme de 2.500 € au titre des dispositions de l'article L761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le titre exécutoire est insuffisamment motivé ;

- la délibération du 17 décembre 2014 n'est pas opposable car elle n'est pas entrée en vigueur ;

- elle n'a pas été signé par deux membres du conseil syndical ;

- elle est illégale car non fondée sur les contrats liant à la commune à l'ASA.

Par un mémoire en défense, enregistré le 13 septembre 2017, l'association syndicale du canal de Gap, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Gap une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Gap ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ;

- le décret n° 2006-504 du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires ;

- le code général des collectivités territoriales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de M. Pecchioli, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., substituant Me A..., représentant la commune de Gap, et de Me B..., représentant l'association syndicale autorisée du canal de Gap.

Considérant ce qui suit :

1. La commune de Gap et l'association syndicale du canal de Gap ont conclu un premier contrat le 28 février 1949 de 99 ans afin de " permettre à la ville la réalisation du projet d'adduction d'eau qui prévoit l'utilisation alternée des eaux du torrent d'Ancelle et du canal de Gap... " ; qu'un deuxième contrat du 24 août 1961 a précisé que la ville s'engageait à louer " 1° les terrains nécessaires à la construction des ouvrages et à l'établissement de canalisations pour l'alimentation en eau de la ville de Gap/ 2° Un prélèvement sur la dotation du canal de Gap d'un débit maximum de 150 litres seconde dérivé au choix de la ville de Gap ... " et prévoit la contrepartie financière versée par la commune en fonction d'une annuité calculée en fonction de la taxe d'arrosage et d'une redevance fixe. L'avenant du 28 janvier 1964 prévoit que l'association syndicale prend en charge les travaux nécessaires à la livraison d'eau et que la rémunération versée par la commune sera égale à une indemnité égale à 2 fois la taxe d'arrosage calculée sur une surface de 150 hectares, et une redevance fixe destinée à alléger la charge des emprunts de l'association. Par un second avenant du 8 juin 1972, la dotation en eau est doublée, passant de 150 à 300 l/s. Par un 3ème avenant du 1er octobre 1983, la redevance a été fixée de manière forfaitaire à 360 000 francs pour 1982, et 510 000 et 700 000 francs pour les 2 années suivantes. Un 3ème avenant du 22 juin 1985, précise les prestations fournies par l'association syndicale et que la redevance versée par la commune sera proportionnelle à la consommation enregistrée au compteur. La commune de Gap relève appel du jugement du 19 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande d'annulation du titre exécutoire du 17 décembre 2014, d'un montant de 335.499, 47 euros T.T.C et de décharge de la somme à payer.

2. Aux termes de l'article 27 du décret n°2006-504 du 3 mai 2006 portant application de l'ordonnance n° 2004-632 du 1er juillet 2004 relative aux associations syndicales de propriétaires : " Les délibérations sont signées par le président et un autre membre du syndicat. ". Il résulte de l'instruction que la délibération du 17 décembre 2014, qui fixe le montant du rôle de l'année 2014, le montant de chaque classe de contributeurs, répartit les redevances dues à l'agence de l'eau Rhône Méditerranée Corse et autorise le président à viser les documents préparatoires à la préparation et à l'émission du rôle, est la base légale du titre en litige. Contrairement aux exigences des dispositions précitées de l'article 27 du décret du 3 mai 2006, cette délibération a été signée par le seul président du syndicat. Si l'association invoque que la délibération " publiée " comporte les deux signatures, la pièce transmise en annexe de la requête introductive d'instance correspond en réalité à une délibération du 23 mai 2013. A l'invitation de la cour, l'association a communiqué ultérieurement une délibération signée par un autre membre du syndicat, secrétaire de séance. Toutefois, cette même délibération mentionne que ledit signataire, signalé parmi les " présents " a donné son pouvoir au président. Cette pièce ne permet donc pas d'établir que le secrétaire de séance était effectivement présent lors des débats du 17 décembre 2014, dès lors qu'un membre présent à la séance ne peut donner pouvoir à un autre membre présent. La délibération est donc irrégulière et, par voie de conséquence, le titre exécutoire qui en résulte, et qui a été pris pour son application, ne peut être qu'annulé.

3. Aucun des autres moyens invoqués par la commune de Gap n'est de nature à entacher d'illégalité le titre exécutoire attaqué.

4. Il résulte de ce qui précède que la commune de Gap est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Sur la demande en décharge et en injonction :

5. L'annulation par une décision juridictionnelle d'un titre exécutoire pour un motif de régularité en la forme de l'acte sur lequel il est fondé n'implique pas nécessairement, compte tenu de la possibilité d'une régularisation éventuelle par l'administration, que les sommes perçues par l'administration sur le fondement du titre ainsi dépourvu de base légale soient immédiatement restituées à l'intéressé. Lorsqu'une juridiction est saisie de conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'administration de restituer des sommes perçues sur le fondement d'un titre de perception ainsi annulé, il lui appartient de prescrire la mesure demandée en fixant le délai au terme duquel l'administration devra restituer ces sommes, si elle n'a pas émis, avant l'expiration de ce délai, un nouveau titre de perception dans des conditions régulières.

6. En l'espèce, l'irrégularité qui fonde l'annulation est régularisable et le cas échéant, l'association syndicale autorisée serait fondée à émettre un nouveau titre exécutoire d'un même montant après qu'une nouvelle délibération de même portée que celle du 17 décembre 2014 serait légalement prise. Il y a dès lors lieu de prononcer la décharge de la somme de 308.355,90 euros, et d'ordonner sa restitution à la commune de Gap, sauf si, dans les 3 mois à compter de la notification du présent arrêt, l'association syndicale autorisée du canal de Gap a régularisé la situation en délibérant à nouveau régulièrement et en émettant un titre exécutoire régulier à destination de la commune.

Sur les frais du litige :

7. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 19 mai 2017 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : Le titre exécutoire du 17 décembre 2014 est annulé.

Article 3 : La commune de Gap est déchargée de la somme de 308.355, 90 euros H.T et l'association syndicale autorisée du canal de Gap procédera à la restitution de cette somme à la commune de Gap, sauf si, dans les 3 mois à compter de la notification du présent arrêt, l'association syndicale autorisée du canal de Gap a régularisé la situation en délibérant à nouveau régulièrement et en émettant un titre exécutoire régulier à destination de la commune.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la commune de Gap est rejeté.

Article 5 : Les conclusions de l'association syndicale autorisée du canal de Gap fondées sur les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Gap et à l'association syndicale autorisée du canal de Gap.

Copie en sera adressée au préfet des Hautes-Alpes.

Délibéré après l'audience du 16 décembre 2019, où siégeaient :

- M. D..., président-rapporteur,

- Mme E..., première conseillère,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 janvier 2020.

2

N° 17MA03126


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 17MA03126
Date de la décision : 06/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Associations syndicales - Questions communes - Ressources.

Comptabilité publique et budget - Créances des collectivités publiques - Recouvrement - Procédure - État exécutoire.


Composition du Tribunal
Président : M. MARCOVICI
Rapporteur ?: M. Laurent MARCOVICI
Rapporteur public ?: M. PECCHIOLI
Avocat(s) : SELARL PEZET ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2020-01-06;17ma03126 ?
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