Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... G... a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 13 mai 2014 par lequel le maire de Laroque-des-Albères a délivré à M. F... A... un permis de construire.
Par un jugement n° 1406013 du 9 décembre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a fait droit à sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés respectivement le 7 février 2017 et le 8 mai 2018, M. A..., représenté par la SCP d'Avocats Emeric B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 9 décembre 2016 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. G... devant le tribunal administratif de Montpellier ;
3°) de mettre à la charge de M. G... une somme de 3 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- le jugement est irrégulier faute de respecter les prescriptions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;
- il est également irrégulier en ce que les visas ne font pas apparaitre tous ses moyens, ceux omis n'ayant pas été examinés par les premiers juges ;
- M. G... n'avait pas intérêt pour agir à l'encontre du permis du 13 mai 2014 ;
- sa demande devant le tribunal était tardive ;
- le dossier de demande de permis était complet ;
- il n'avait pas besoin de recourir à un architecte en application de l'article R. 431-2 du code de l'urbanisme ;
- son projet consiste à reconstruire à l'identique un bâtiment préexistant ;
- l'article UA 11 n'est pas applicable sur le territoire de la commune de Laroque-des-Albères ;
- le permis en litige ne méconnait pas les stipulations de l'article UA 12 du plan local d'urbanisme ;
- le permis n'a pas été obtenu frauduleusement ;
- le maire n'a pas commis de détournement de pouvoir.
Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mars 2018, M. G..., représenté par Me C... conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la commune de Laroque-des-Albères d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
Par un mémoire en intervention volontaire, enregistré le 27 mars 2019, la commune de Laroque-des-Albères, représentée par la SCP Margall-d'Albenas, conclut à l'annulation du jugement du 9 décembre 2016 et à la mise à la charge de M. G... d'une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- son intervention volontaire est recevable ;
- la requête de première instance était tardive.
Vu les autres pièces du dossier ;
Vu :
- le code civil ;
- le code de l'urbanisme ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me B..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. Par un arrêté du 13 mai 2014, le maire de Laroque-des-Albères a accordé à M. A... un permis afin de reconstruire à l'identique un bâtiment. M. A... fait appel du jugement du 9 décembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a, à la demande de M. G..., annulé cet arrêté.
Sur les écritures de la commune de Laroque-des-Albères :
2. La commune de Laroque-des-Albères a produit à l'instance en concluant à l'annulation du jugement attaqué, au rejet de la demande présentée par M. G... devant le tribunal administratif et à sa condamnation au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Toutefois, son mémoire ne saurait être utilement regardé comme formant en réalité appel dès lors que ce dernier, enregistré au greffe de la cour le 27 mars 2019, soit postérieurement à l'expiration du délai d'appel fixé par l'article R. 811-2 du code de justice administrative, serait en tout état de cause tardif et, par suite, irrecevable. Ce mémoire ne saurait davantage être regardé comme constituant une intervention, la commune étant défenderesse devant le tribunal administratif et donc partie à l'instance portée devant cette juridiction, ne pouvant avoir la qualité pour intervenir devant la cour au soutien de l'appel interjeté par M. A.... Il résulte de ce qui précède que la commune de Laroque-des-Albères ne peut avoir d'autre qualité dans l'instance que celle d'observatrice à laquelle la cour n'était pas tenue de communiquer la procédure et que, à ce titre, si elle peut faire valoir tout éclaircissement de fait et de droit dans le cadre du débat contentieux, elle ne peut présenter des conclusions propres lesquelles sont, par suite, irrecevables.
Sur la régularité du jugement attaqué :
3. En premier lieu, il ressort de l'examen de la minute du jugement attaqué qu'elle comporte les signatures des trois personnes désignées par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative. La circonstance que ces trois signatures ne figurent pas sur l'expédition du jugement notifiée aux parties est sans incidence sur la régularité de celui-ci.
4. En second lieu, d'une part, les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à chaque argument de la défense de M. A..., se sont prononcés sur la fin de non-recevoir tirée du défaut d'intérêt pour agir de M. G.... D'autre part, la critique par le requérant de la motivation et des éléments retenus par le tribunal pour estimer en son point 11 que le projet de M. A... ne constitue pas une reconstruction à l'identique relève, non de la régularité du jugement, mais de son bien-fondé. Il en va de même de la circonstance que les premiers juges se seraient fondés au point 13 sur un texte inexistant. Dès lors, le requérant n'est pas fondé à soutenir que les dispositions de l'article L. 9 du code de justice administrative ont été méconnues.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
En ce qui concerne les fins de non-recevoir opposées à la demande de M. G... devant le tribunal :
5. En premier lieu, d'une part, aux termes de l'article R. 600-2 du code de l'urbanisme : " Le délai de recours contentieux à l'encontre (...) d'un permis de construire (...) court à l'égard des tiers à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain des pièces mentionnées à l'article R 424-15. ". Aux termes de l'article R. 424-15 du même code : " Mention du permis (...) doit être affichée sur le terrain, de manière visible de l'extérieur, par les soins de son bénéficiaire, dès la notification de l'arrêté (...) et pendant toute la durée du chantier. (...) Cet affichage mentionne également l'obligation, prévue à peine d'irrecevabilité par l'article R. 600-1, de notifier tout recours administratif ou tout recours contentieux à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. ". Aux termes de l'article A. 424-18 du code de l'urbanisme : " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent lisibles de la voie publique ou des espaces ouverts au public pendant toute la durée du chantier " et aux termes de l'article A 424-16 du code de l'urbanisme: " Le panneau prévu à l'article A. 424-1 indique le nom, la raison sociale ou la dénomination sociale du bénéficiaire, la date et le numéro du permis, la nature du projet et la superficie du terrain ainsi que l'adresse de la mairie où le dossier peut être consulté. / Il indique également, en fonction de la nature du projet : a) Si le projet prévoit des constructions, la superficie du plancher hors oeuvre nette autorisée ainsi que la hauteur de la ou des constructions, exprimée en mètres par rapport au sol naturel (...) ". L'article A. 424-17 prévoit que : " Le panneau d'affichage comprend la mention suivante : " Droit de recours : " Le délai de recours contentieux est de deux mois à compter du premier jour d'une période continue de deux mois d'affichage sur le terrain du présent panneau (art. R. 600-2 du code de l'urbanisme). " Tout recours administratif ou tout recours contentieux doit, à peine d'irrecevabilité, être notifié à l'auteur de la décision et au bénéficiaire du permis ou de la décision prise sur la déclaration préalable. Cette notification doit être adressée par lettre recommandée avec accusé de réception dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du recours (art. R. 600-1 du code de l'urbanisme). " L'article A. 424-18 indique que " Le panneau d'affichage doit être installé de telle sorte que les renseignements qu'il contient demeurent .... ". Il résulte des dispositions précitées que l'affichage continu et régulier sur le terrain de l'autorisation d'urbanisme enclenche le délai de deux mois de recours contentieux des tiers à son encontre. S'il incombe au bénéficiaire d'un permis de construire de justifier qu'il a bien rempli les formalités d'affichage prescrites par ces dispositions, le juge doit apprécier la conformité de l'affichage en examinant l'ensemble des pièces qui figure au dossier qui lui est soumis.
6. En l'espèce, M. A... ne produit aucune pièce afin d'établir la réalité de l'affichage du permis en litige. De surcroît, il ressort du constat d'huissier dressé le 17 août 2016 à la demande de M. G... que le panneau d'affichage de ce permis présent à cette date, et donc postérieurement à la demande de ce dernier devant le tribunal, non seulement était illisible depuis la voie publique mais encore ne comportait pas l'ensemble des mentions prescrites par les dispositions précitées.
7. D'autre part, si M. G... a, par lettre avec accusé de réception du 28 avril 2014, demandé à la commune de l'informer des " mesures prises par la commune " concernant les travaux effectués par M. A..., celui-ci ne peut utilement soutenir comme l'a fait la commune en première instance que dans ces conditions il a eu connaissance de l'arrêté " peu après sa demande " dès lors que l'arrêté en litige n'a été édicté que le 13 mai 2014. Par ailleurs, si M. G... indique effectivement dans ses écritures avoir eu communication de cet arrêté ainsi que de l'entier dossier de demande, cette seule circonstance, alors au demeurant que la date de cette communication n'est pas établie, n'est pas de nature à faire courir le délai de recours contentieux. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier et il n'est pas allégué que M. G... aurait exercé un recours gracieux à l'encontre de l'arrêté du 13 mai 2014. Il résulte de ce qui précède que la fin de non-recevoir tirée de la tardiveté de la demande de M. G... doit être écartée.
8. En second lieu, aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".
9. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.
10. En l'espèce, il ressort des pièces du dossier que le projet en litige va entrainer des vues plongeantes à partir du 2ème étage du bâtiment d'une hauteur de 8 m 60 sur la propriété située en contrebas de M. G... sur laquelle est implantée sa maison d'habitation, voisin immédiat du terrain d'assiette nonobstant la présence d'arbres qui ne présentent au demeurant pas de caractère pérenne et la distance séparant la construction à édifier et la maison de M. G.... Ainsi il apparait que la construction projetée est, eu égard à ses caractéristiques et à la configuration des lieux en cause, de nature à affecter directement les conditions de jouissance du bien de M. G... sans que M. A... puisse utilement se prévaloir des dispositions de l'article 678 du code civil ni de la circonstance que son voisin ne l'a pas assigné devant le tribunal de grande instance afin de faire établir contradictoirement l'existence de vues sur son fonds depuis la construction projetée. Il suit de là que le requérant n'est pas fondé à soutenir que M. G... n'a pas intérêt à agir à l'encontre de l'arrêté du 13 mai 2014.
11. Il résulte de tout ce qui précède que la demande de M. G... devant le tribunal était recevable.
En ce qui concerne la légalité de l'arrêté du 13 mai 2014 :
12. Pour prononcer l'annulation de l'arrêté du 13 mai 2014 le tribunal s'est fondé sur la violation des dispositions de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme, la méconnaissance des articles UA11 et UA 12 du règlement du plan local d'urbanisme et sur la circonstance que M. A... aurait obtenu son permis au terme de manoeuvres frauduleuses.
13. En premier lieu, aux termes du 1er alinéa de l'article L. 111-3 du code de l'urbanisme dont les dispositions sont aujourd'hui reprises à l'article L. 111-15 du même code : " La reconstruction à l'identique d'un bâtiment détruit ou démoli depuis moins de dix ans est autorisée nonobstant toute disposition d'urbanisme contraire, sauf si la carte communale, le plan local d'urbanisme ou le plan de prévention des risques naturels prévisibles en dispose autrement, dès lors qu'il a été régulièrement édifié. ".
14. En l'espèce, il ressort de la notice figurant dans le dossier de demande de permis de M. A... que des modifications de la structure du bâtiment sont prévues consistant notamment à poser des baies vitrées afin de fermer le bâtiment. Dans ces conditions eu égard à l'importance de ces modifications par rapport au bâtiment antérieur, et alors même que l'implantation et la hauteur du bâtiment doivent être les mêmes, le projet ne porte pas sur une reconstruction à l'identique. Ainsi, le maire de Laroque-des-Albères n'a pu légalement autoriser la reconstruction à l'identique sollicitée par M. A....
15. En deuxième lieu, la disposition de l'article UA 11 intitulé " Aspect extérieur " du plan local d'urbanisme adopté le 26 mars 2013 aux termes de laquelle : " Les constructions doivent présenter une unité d'aspect et de matériaux en harmonie avec les constructions environnantes ... " a été abrogée par la modification simplifiée n° 1 du 18 décembre 2013 du document local d'urbanisme. Il suit de là que c'est à tort que le tribunal a estimé que le moyen tiré de la méconnaissance de cette disposition était fondé.
16. En troisième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que, contrairement à ce que le tribunal a jugé, le permis en litige, dont le dossier mentionnait notamment expressément les modifications envisagées par rapport à la construction initiale, a été obtenu à la suite de manoeuvres de nature à induire en erreur l'administration.
17. En dernier lieu, aux termes du point 2 de l'article UA 12 du règlement du plan local d'urbanisme relatif au stationnement : " Il doit être aménagé : pour les constructions destinées à l'habitation : une place de stationnement par tranche de 60 m² de surface de plancher avec un minimum d'une place par logement. (...) ".
18. Il ressort du point 5.5 du formulaire Cerfa que le projet consiste par la fermeture du bâtiment en la création de 90 m² à destination d'habitation ce qui est confirmé par les mentions portées sur la déclaration des éléments nécessaires au calcul des impositions pour les demandes de permis de construire. Il suit de là que le projet qui ne prévoit pas la création d'une place de stationnement méconnaît, alors même qu'il ne crée pas un logement et que le local est destiné à abriter l'atelier de bricolage de M. A... dès lors que ce bâtiment est accessoire à la maison d'habitation dont il suit la destination, les dispositions précitées de l'article UA 12.
19. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a annulé l'arrêté du 13 mai 2014.
Sur les frais liés au litige :
20. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la commune de Laroque-des-Albères, qui n'est pas partie dans la présente instance, verse à M. G... la somme qu'il demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit à la demande de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
D É C I D E :
Article 1er : Les conclusions de la commune de Laroque-des-Albères sont rejetées.
Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.
Article 3 : Les conclusions de M. G... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A..., à M. E... G... et à la commune de Laroque-des-Albères.
Délibéré après l'audience du 10 décembre 2019, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- Mme D..., président-assesseur,
- Mme H..., première conseillère.
Lu en audience publique, le 19 décembre 2019.
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N° 17MA00524