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17/12/2019 | FRANCE | N°19MA02194

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 17 décembre 2019, 19MA02194


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1810692, 1810693 du 1er février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2019,

Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er février 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1810692, 1810693 du 1er février 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 mai 2019, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 1er février 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 décembre 2018 du préfet des Bouches-du-Rhône ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard et à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation personnelle dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler, et passé ce délai d'un mois, de l'y enjoindre sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 711-1 et du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que des stipulations de l'article 1er de la convention de Genève relative au statut des réfugiés, dès lors que sa famille et elle-même encourent de graves risques en cas de retour au Bangladesh ;

- cette décision méconnaît le 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'elle souffre d'une valvulopathie sévère ;

- elle peut bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 311-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cette décision méconnaît également l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la décision fixant le pays de renvoi méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- enfin, le refus de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours est insuffisamment motivé ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un tel délai.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 29 mars 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A..., ressortissante bangladaise née le 10 août 1984, relève appel du jugement du 1er février 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 5 décembre 2018 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction applicable : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) / 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité (...) ". L'article L. 743-3 du même code dispose que : " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé ou qui ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article L. 743-2 et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V et, le cas échéant, des pénalités prévues au chapitre Ier du titre II du livre VI. ".

3. Mme A..., dont la demande d'asile a été rejetée par l'Office de protection des réfugiés et apatrides le 12 mars 2018, puis par la Cour nationale du droit d'asile le 1er octobre 2018, se trouvait dans le cas prévu au 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile où l'autorité préfectorale peut obliger un étranger à quitter le territoire français.

4. En premier lieu, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée en méconnaissance des articles L. 211-2 et L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 8 du jugement attaqué.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 711-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La qualité de réfugié est reconnue à toute personne persécutée en raison de son action en faveur de la liberté ainsi qu'à toute personne sur laquelle le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés exerce son mandat aux termes des articles 6 et 7 de son statut tel qu'adopté par l'Assemblée générale des Nations unies le 14 décembre 1950 ou qui répond aux définitions de l'article 1er de la convention de Genève du 28 juillet 1951 relative au statut des réfugiés. ".

6. Mme A..., qui est entrée en France dans des circonstances indéterminées, a présenté une demande d'asile sur le fondement de l'article L. 741-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile le 5 septembre 2017, qui a été rejetée, comme il a été dit au point 3, par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 12 mars 2018, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 1er octobre 2018. Si elle soutient craindre, avec son époux et leurs enfants, pour leur vie en cas de retour au Bangladesh, où ils ont été persécutés par un neveu du leader de la ligue Awami, elle ne l'établit pas. Par suite, elle n'est pas fondée à soutenir que le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en prononçant à son encontre une obligation de quitter le territoire français, qu'il a méconnu les stipulations de l'article 1er de la convention de Genève ainsi que les dispositions de l'article L. 711-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et, en tout état de cause, les dispositions du 8° de l'article L. 314-11 du même code, l'intéressée n'ayant pas sollicité la délivrance d'une carte de résident sur le fondement ces dispositions.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

8. Il ressort des pièces du dossier et notamment des différents certificats médicaux produits que Mme A... présente une valvulopathie sévère à l'origine d'une fuite paraprothétique mitrale responsable d'une insuffisance cardiaque, nécessitant un suivi médical. Toutefois, aucune pièce n'est de nature à établir que le défaut de prise en charge de son état de santé serait susceptible d'entraîner pour Mme A... des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté. Pour les mêmes motifs, Mme A... n'est pas fondée à soutenir qu'elle devait bénéficier de plein droit d'un titre de séjour en application des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par ailleurs, la circonstance que Mme A... aurait déposé en vain une demande de titre de séjour pour ce motif auprès des services de la préfecture est sans incidence sur la légalité des décisions attaquées.

9. En quatrième lieu, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant, doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal respectivement aux points 11 et 13 du jugement attaqué.

Sur la décision fixant le pays de destination :

10. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 15 du jugement attaqué.

Sur la décision accordant un délai de départ volontaire :

11. Les moyens tirés de l'insuffisante motivation de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire supérieur à trente jours et de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet en ne lui accordant pas un tel délai doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par le tribunal au point 17 du jugement attaqué.

12. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées aux fins d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 3 décembre 2019, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 17 décembre 2019.

4

N° 19MA02194

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19MA02194
Date de la décision : 17/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : BRACCINI

Origine de la décision
Date de l'import : 14/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-12-17;19ma02194 ?
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