Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 1601032 le 5 avril 2016, M. A... D..., a demandé au tribunal administratif de Toulon, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011 et des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat les frais de procédure qu'il a engagés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 1601033 le 5 avril 2016, M. A... D..., a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 et des pénalités correspondantes, et de mettre à la charge de l'Etat les frais de procédure qu'il a engagés au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 1601032, 1601033 du 7 mai 2018, le tribunal administratif de Toulon a rejeté les deux demandes.
Procédure devant la Cour :
I. Par une requête, enregistrée sous le n° 18MA03097 le 4 juillet 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1601032, 1601033 du 7 mai 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011 et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le remboursement des frais de procédure au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 47 A et L. 74 du livre des procédures fiscales, la caisse de marque Casio type QT 600 qu'elle a utilisée ne peut être regardée comme un système informatisé, en l'absence de progiciel de comptabilité ;
- il n'y a pas eu opposition à contrôle fiscal, la majoration de 100 % de l'article 1732 du code général des impôts est injustifiée ;
- l'administration pouvait obtenir la documentation technique, auprès du concepteur de la caisse utilisée en application de l'article L. 96 J du livre des procédures fiscales ;
- l'administration ne pouvait lui reprocher de ne pas avoir utilisé la norme NF 525 logiciel de gestion d'encaissement dès lors qu'elle n'était pas obligatoire au titre des exercices vérifiés ;
- sa comptabilité étant sincère et probante, l'administration n'était pas en droit de la rejeter.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
II. Par une requête, enregistrée sous le n° 18MA03098 le 4 juillet 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1601032, 101033 du 7 mai 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre de l'année 2012 et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le remboursement des frais de procédures au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
Il soutient que :
- l'administration a méconnu les dispositions de l'article L. 47 A et L. 74 du livre des procédures fiscales, la caisse de marque Casio type QT 600 qu'elle a utilisé ne peut être regardée comme un système informatisé, en l'absence de progiciel de comptabilité ;
- il n'y a pas eu opposition à contrôle fiscal, la majoration de 100 % de l'article 1732 du code général des impôts est injustifiée ;
- l'administration pouvait obtenir la documentation technique, auprès du concepteur de la caisse utilisée en application de l'article L. 96 J du livre des procédures fiscales ;
- l'administration ne pouvait lui reprocher de ne pas avoir utilisé la norme NF 525 logiciel de gestion d'encaissement dès lors qu'elle n'était pas obligatoire au titre des exercices vérifiés ;
- sa comptabilité étant sincère et probante, l'administration n'était pas en droit de la rejeter.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 novembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.
Vu les autres pièces des dossiers.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... exploite un restaurant sous l'enseigne " La Tortue " à Toulon. L'entreprise a fait l'objet d'une vérification de comptabilité portant sur les exercices 2011 et 2012. A l'issue du contrôle, M. D... a été assujetti à des cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu au titre des exercices 2011 et 2012 et à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée se rattachant à la période correspondant à l'année 2011. Ces cotisations supplémentaires à l'impôt sur le revenu ont été assorties de la majoration de 100 % pour opposition à contrôle fiscal. M. D... a saisi le tribunal administratif de Toulon qui par jugement n° 1601032, 1601033 du 7 mai 2018, a rejeté ses demandes. C'est de ce jugement dont M. D... relève appel.
Sur la jonction :
2. Les requêtes n° 18MA03097 et n°18MA03098 présentent à juger les mêmes questions et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour qu'il y soit statué par le même arrêt.
Sur les conclusions en décharge :
3. D'une part, aux termes de l'article L. 67 du livre des procédures fiscales : " La procédure de taxation d'office prévue aux 1° et 4° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. Toutefois, le délai de régularisation est fixé à quatre-vingt-dix jours pour la présentation à l'enregistrement de la déclaration mentionnée à l'article 641 du code général des impôts. Il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure si le contribuable change fréquemment de lieu de séjour ou séjourne dans des locaux d'emprunt ou des locaux meublés, ou a transféré son domicile fiscal à l'étranger sans déposer sa déclaration de revenus, ou si un contrôle fiscal n'a pu avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers ". Aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. Ces dispositions s'appliquent en cas d'opposition à la mise en oeuvre du contrôle dans les conditions prévues au II de l'article L. 47 A ".
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 13 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Les agents de l'administration des impôts vérifient sur place, en suivant les règles prévues par le présent livre, la comptabilité des contribuables astreints à tenir et à présenter des documents comptables. Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contrôle porte sur l'ensemble des informations, données et traitements informatiques qui concourent directement ou indirectement à la formation des résultats comptables ou fiscaux et à l'élaboration des déclarations rendues obligatoires par le code général des impôts ainsi que sur la documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements ". Aux termes du I de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " I. - Lorsque la comptabilité est tenue au moyen de systèmes informatisés, le contribuable peut satisfaire à l'obligation de représentation des documents comptables mentionnés au premier alinéa de l'article 54 du code général des impôts en remettant, sous forme dématérialisée répondant à des normes fixées par arrêté du ministre chargé du budget, une copie des fichiers des écritures comptables définies aux articles 420-1 et suivants du plan comptable général. L'administration peut effectuer des tris, classements ainsi que tous calculs aux fins de s'assurer de la concordance entre la copie des enregistrements comptables et les déclarations fiscales du contribuable. L'administration restitue au contribuable, avant la mise en recouvrement, les copies des fichiers transmis et n'en conserve aucun double ". Doivent être regardés comme des systèmes informatisés de tenue de comptabilité, au sens de ces dispositions, dont les données sont soumises au contrôle qu'elles prévoient, les progiciels de comptabilité sur lesquels sont reportées les recettes journalières ainsi que les caisses ou équipements de nature comparable dotés de logiciels informatiques participant, même indirectement, à la centralisation des recettes journalières dès lors qu'ils concourent effectivement à l'établissement de la comptabilité. Est à cet égard sans incidence la circonstance que les données de ces caisses ou équipements ne soient pas transmises de manière informatique au progiciel de comptabilité. Enfin aux termes de l'article L. 102 B du même livre : " I. Les livres, registres, documents ou pièces sur lesquels peuvent s'exercer les droits de communication, d'enquête et de contrôle de l'administration doivent être conservés pendant un délai de six ans à compter de la date de la dernière opération mentionnée sur les livres ou registres ou de la date à laquelle les documents ou pièces ont été établis. / Sans préjudice des dispositions du premier alinéa, lorsque les livres, registres, documents ou pièces mentionnés au premier alinéa sont établis ou reçus sur support informatique, ils doivent être conservés sous cette forme pendant une durée au moins égale au délai prévu au premier alinéa de l'article L. 169. (...) / II. Lorsqu'ils ne sont pas déjà visés aux alinéas précédents, les informations, données ou traitements soumis au contrôle prévu au deuxième alinéa de l'article L. 13 doivent être conservés sur support informatique jusqu'à l'expiration du délai prévu au premier alinéa de l'article L. 169. La documentation relative aux analyses, à la programmation et à l'exécution des traitements doit être conservée jusqu'à l'expiration de la troisième année suivant celle à laquelle elle se rapporte. ".
5. Pour qualifier la caisse enregistreuse utilisée par M. D... en 2011 et 2012 de système informatisé, le vérificateur a relevé en pages 3 des propositions de rectification du 15 décembre 2014 pour l'année 2011 et du 13 avril 2015 pour l'année 2012, que la caisse Casio n'est pas reliée à un ordinateur, que la sauvegarde est réalisée sur un lecteur de carte type compact flash, et que les données sont saisies manuellement et quotidiennement dans un tableur et ensuite reprises en comptabilité mensuellement. Ces éléments sont, en outre, corroborés par une lettre adressée à M. D... le 5 janvier 2015 (p.7) par une responsable technique de la marque Casio qui précise notamment : " que les fonctionnalités de la caisse enregistreuse Casio QT 6000 ne permettent pas de tenir une comptabilité informatisée, qu'elle n'est pas reliée à un système informatisé, et qu'il faut ressaisir les données des ventes dans un logiciel de comptabilité ". En défense, l'administration reprend les motifs dont le vérificateur s'était prévalu. Il est donc constant que la caisse enregistreuse dont disposait le restaurant n'était pas équipée d'un progiciel de comptabilité et que la transmission des données au système de traitement de la comptabilité était opérée mensuellement à partir de l'exploitation d'un tableur servi manuellement à partir des enregistrements opérés sur la caisse de l'établissement. En revanche, il ne ressort pas de l'examen des propositions de rectification ni de l'argumentation développée en défense que le détail des recettes enregistrées ait été intégralement saisi sur le tableur dont il s'agit. Enfin, il ne ressort pas d'avantage de la lecture de ces mêmes documents, que le système de traitement de la comptabilité auquel sont transmises les données recueillies par la caisse doive être regardé comme un " progiciel de comptabilité ". En conséquence, l'administration n'établit pas que la comptabilité de l'entreprise en cause ait été tenue au cours de la période vérifiée au moyen d'un système informatisé au sens de l'article L. 47 A du livre des procédures fiscales. Dans ces conditions, M. D... est fondé à soutenir qu'en refusant de déférer aux demandes du vérificateur justifiées par ces mêmes dispositions, il ne s'est pas opposé au contrôle fiscal dont il faisait l'objet et qu'ainsi il a, à tort encouru la procédure d'évaluation d'office. Ainsi, M. D... est fondé à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des rappels de taxe en litige ainsi que de la majoration de 100 % de l'article 1732 du code général des impôts.
6. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a rejeté ses demandes, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens des requêtes. Dans les circonstances de l'espèce il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions de M. D... tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, qui au demeurant ne sont pas chiffrées.
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1601032, 1601033 du 7 mai 2018 est annulé.
Article 2 : M. D... est déchargé des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles il a été assujetti au titre des années 2011 et 2012 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes et des pénalités de l'article 1732 du code général des impôts.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... D... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 15 octobre 2019, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- M. Barthez, président assesseur,
- M. B..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 29 octobre 2019.
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N° 18MA03097, 18MA03098
nc