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10/10/2019 | FRANCE | N°17MA04703

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 1ère chambre, 10 octobre 2019, 17MA04703


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler les décisions des 18 juin 2014, 25 juin 2014 et 30 avril 2015 par lesquelles le maire de la commune de Sanary-sur-Mer a refusé de constater la caducité du permis de construire délivré le 22 septembre 2008 à la SCI Donatello.

Par un jugement n° 1404173 et 1502411 du 10 octobre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregi

strés les 9 décembre 2017, 10 avril 2018, 27 juin 2018 et 5 juillet 2019, M. D..., représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler les décisions des 18 juin 2014, 25 juin 2014 et 30 avril 2015 par lesquelles le maire de la commune de Sanary-sur-Mer a refusé de constater la caducité du permis de construire délivré le 22 septembre 2008 à la SCI Donatello.

Par un jugement n° 1404173 et 1502411 du 10 octobre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires complémentaires, enregistrés les 9 décembre 2017, 10 avril 2018, 27 juin 2018 et 5 juillet 2019, M. D..., représenté par Me H... et Me F..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Toulon en date du 10 octobre 2017 ;

2°) d'annuler les décisions des 18 juin 2014, 25 juin 2014 et 30 avril 2015 par lesquelles le maire de la commune de Sanary-sur-Mer a refusé de constater la caducité du permis de construire délivré le 22 septembre 2008 à la SCI Donatello.

3°) de mettre à la charge de la commune de Sanary-sur-Mer et de la SCI Donatello chacune la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'erreurs manifestes s'agissant de la caducité du permis de construire ;

- le permis était illégal car pris en méconnaissance du cahier des charges du lotissement et la SCI pétitionnaire a commis une fraude à la loi ;

- la demande présentée par la SCI Donatello sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme est irrecevable.

Par des mémoires en défense présentés les 26 février 2018 et 8 juillet 2019, la SCI Donatello, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D... une somme de 6 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que le permis de construire n'était pas périmé.

Par un mémoire distinct présenté le 26 février 2018, la SCI Donatello, représentée par Me E..., demande à la Cour, en application de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme, de condamner M. D... à lui verser la somme de 150 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle soutient que la mise en oeuvre du recours excède la défense des intérêts légitimes de M. D... et lui cause un préjudice excessif.

La commune de Sanary sur Mer, représentée par Me G..., a présenté un mémoire en défense le 1er juin 2018, par lequel elle conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. D... la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

- le moyen tiré de la caducité du permis de construire est infondé ;

- le moyen tiré de l'illégalité du permis de construire est inopérant.

Les mémoires présentés par la commune de Sanary-sur-Mer et M. D... le 19 juillet 2019 n'ont pas été communiqués en application de l'article R. 611-1 du code de justice administrative.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Gougot, rapporteur public,

- les observations de Me H... pour M. D..., de Me A..., substituant Me G..., pour la commune de Sanary-sur-Mer et de Me E... pour la SCI Donatello.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... relève appel du jugement du 10 octobre 2017 par lequel le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions des 18 juin 2014, 25 juin 2014 et 30 avril 2015, par lesquelles le maire de la commune de Sanary-sur-Mer a refusé de constater la caducité du permis de construire délivré le 22 septembre 2008 à la SCI Donatello.

Sur le moyen tiré de la péremption du permis :

2. Aux termes de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme dans sa version applicable au litige : " Le permis de construire, d'aménager ou de démolir est périmé si les travaux ne sont pas entrepris dans le délai de deux ans à compter de la notification mentionnée à l'article R. 424-10 ou de la date à laquelle la décision tacite est intervenue. / Il en est de même si, passé ce délai, les travaux sont interrompus pendant un délai supérieur à une année (...) ". L'article 1er du décret du 19 décembre 2008 prolongeant le délai de validité des permis de construire, d'aménager ou de démolir et des décisions de non-opposition à une déclaration préalable a, pour les permis de construire intervenus au plus tard le 31 décembre 2010, porté à trois ans le délai mentionné au premier alinéa de l'article R. 424-17 du code de l'urbanisme, ce délai étant ensuite pérennisé. En vertu de l'article 2 de ce même décret, cette modification s'applique aux autorisations en cours de validité à la date de sa publication, soit le 20 décembre 2008.

3. En application de ces dispositions, et compte tenu de la prorogation décidée le 22 septembre 2011, le permis de construire délivré le 22 septembre 2008 par le maire de la commune de Sanary-sur-Mer à la SCI Donatello et portant sur la démolition d'une villa existante et la construction d'un immeuble de dix-sept logements, demeurait valide jusqu'au 22 septembre 2012. M. D... ne conteste plus en appel que des travaux ont été effectués avant cette date.

4. En application du 2ème alinéa de l'article R. 424-17 précité, l'interruption des travaux pendant une durée d'un an n'était susceptible d'entraîner la péremption du permis de construire que si cette interruption était caractérisée à compter du 22 septembre 2012.

5. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'inspection du travail a relevé, le 19 septembre 2012, qu'une canalisation en fibrociment située sous la véranda de la villa était susceptible de contenir de l'amiante et que la société devait faire réaliser, avant le début des travaux sur cette canalisation, un repérage indiquant la méthodologie de désamiantage. Il est constant que la phase désamiantage, obligatoire lorsque la présence d'amiante est suspectée, doit être prise en compte pour apprécier le maintien de la durée de validité du permis de construire, et ce, quelle que soit l'importance matérielle des analyses et travaux à réaliser. M. D... conteste néanmoins la date à laquelle a été réalisée l'opération de désamiantage prévue initialement les 6 et 7 mai 2013 et repoussée selon la société au 30 mai 2013. Toutefois, même en écartant des débats l'attestation, qui n'apparaît pas pour autant entachée de fraude, de la société Covini réalisée en 2015 pour expliquer les raisons du décalage dans le temps de ces travaux, il ressort du compte rendu d'analyse de la société Protec que les prélèvements effectués sur le chantier ont été reçus le 31 mai 2013 et analysés le 4 juin suivant. Ainsi, la phase de désamiantage, incluant l'opération de désamiantage sur place et les analyses obligatoires à réaliser sur les prélèvements effectués sur le chantier, a duré au moins jusqu'au 4 juin 2013. Dans ces conditions, et peu important à cet égard la circonstance, à la supposer établie, que l'opération de désamiantage n'ait pas respecté toutes les règles et normes en vigueur, les travaux n'ont pas été interrompus pendant plus d'une année à compter du 22 septembre 2012.

6. En second lieu, M. D... conteste le fait que les travaux auraient repris à compter du mois de mai 2014, soit dans le délai d'un an suivant la phase de désamiantage. Toutefois, les photographies produites afin de démontrer que la société n'aurait réalisé aucuns travaux entre la fin de l'année 2012 et le mois de juin 2014 n'ont pas de caractère probant dès lors que les dates sont reportées de façon manuscrite. En outre, la comparaison des divers constats d'huissier produits à l'instance ne permet pas d'établir l'absence de travaux entre 2012 et 2014. Il ressort au contraire du procès-verbal du 6 juin 2014 qu'à cette date, les travaux de terrassement étaient en cours, et que ces travaux avaient nécessairement commencé avant le 6 juin 2014 au vu des photographies annexées montrant un terrassement et un décaissement sur l'ensemble du terrain d'assiette. En outre, ces constatations sont corroborées par l'attestation de la société Sotreve établie en 2015, selon laquelle ont eu lieu l'installation de chantier le 19 mai 2014 et le démarrage des travaux de terrassement le 21 mai suivant, et le devis réalisé par cette société le 14 mai 2014 et accepté le même jour par la SCI Donatello, portant sur un montant de travaux de terrassement estimé à 30 480 euros. Enfin il ressort des termes même de la lettre envoyée par M. D... au maire de la commune de Sanary sur Mer le 29 mai 2014 que " le chantier a repris une activité au cours de la première quinzaine de mai 2014 ". Dans ces conditions, et au vu des travaux significatifs réalisés en mai 2014 sur le chantier, les travaux n'ont pas été interrompus pendant plus d'une année à partir du 4 juin 2013. Enfin, M. D... ne conteste pas la réalisation de travaux après le mois de juin 2014. Dans ces conditions, il n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Toulon a rejeté le moyen tiré de la péremption du permis de construire.

Sur le moyen tiré de l'illégalité du permis de construire :

7. M. D... soutient pour la première fois en appel que le permis de construire aurait été obtenu par fraude dès lors que la SCI pétitionnaire aurait déclaré que le projet ne faisait pas partie du lotissement du Clos de la Buge et n'aurait pas respecté de ce fait les règles du cahier des charges du lotissement. Toutefois, la légalité du permis de construire est sans incidence sur son exécution. Aussi, M. D... ne peut utilement se prévaloir de l'illégalité du permis de construire au soutien de son recours dirigé contre des décisions refusant de constater la péremption du permis. Le moyen doit donc être écarté comme étant inopérant.

8. Il résulte de ce qui précède que la requête de M. D... ne peut qu'être rejetée.

Sur les conclusions de la SCI Donatello présentées sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme :

9. Aux termes de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme : " Lorsque le droit de former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager est mis en oeuvre dans des conditions qui excèdent la défense des intérêts légitimes du requérant et qui causent un préjudice excessif au bénéficiaire du permis, celui-ci peut demander, par un mémoire distinct, au juge administratif saisi du recours de condamner l'auteur de celui-ci à lui allouer des dommages et intérêts. La demande peut être présentée pour la première fois en appel (...) ". Les recours fondés sur une mauvaise exécution ou une inexécution d'un permis de construire ne sont pas au nombre de ceux visés par ces dispositions qui doivent s'entendre restrictivement compte tenu de leur portée, alors même que, notamment, l'annulation d'un refus de constater la caducité d'un permis peut avoir pour conséquence de priver celui-ci d'effet.

10. Il résulte de ce qui précède que la SCI Donatello ne peut demander sur le fondement de ces dispositions que la Cour condamne M. D... à lui verser la somme de 150 000 euros en réparation du préjudice que lui causerait l'action en justice de ce dernier.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. La commune de Sanary-sur-Mer et la SCI Donatello n'étant pas parties perdantes à la présente instance, il y a lieu de rejeter la demande de M. D... présentée sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Il y a lieu en revanche, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. D... la somme de 1 000 euros à verser à la commune de Sanary-sur-Mer et la somme de 1 000 euros à verser à la SCI Donatello au titre des mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : M. D... versera la somme de 1 000 euros à la commune de Sanary-sur-Mer et la somme de 1 000 euros à la SCI Donatello sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Les conclusions de la SCI Donatello présentées sur le fondement de l'article L. 600-7 du code de l'urbanisme sont rejetées.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... D..., à la SCI Donatello, à la commune de Sanary-sur-Mer et au ministère de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

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N° 17MA04703

hw


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17MA04703
Date de la décision : 10/10/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-04-01 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Régime d'utilisation du permis. Péremption.


Composition du Tribunal
Président : M. POUJADE
Rapporteur ?: Mme Elisabeth BAIZET
Rapporteur public ?: Mme GOUGOT
Avocat(s) : CABINET HERVÉ ANDREANI ET VIRGINIE PIN

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-10-10;17ma04703 ?
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