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11/07/2019 | FRANCE | N°18MA01502

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 11 juillet 2019, 18MA01502


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EARL Denis Fabre a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement l'établissement SNCF-Réseau et l'Etat à lui verser la somme de 114 779,04 euros en réparation du préjudice économique qu'elle estime avoir subi du fait de la suppression du passage à niveau n° 6 sur la voie ferrée reliant Carpentras à Avignon, à Althen-des-Paluds et d'ordonner une expertise judiciaire avant dire droit afin d'évaluer ce préjudice.

Par un jugement n° 1600948 du 9 février 2018, le tribuna

l administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'EARL Denis Fabre a demandé au tribunal administratif de Nîmes de condamner solidairement l'établissement SNCF-Réseau et l'Etat à lui verser la somme de 114 779,04 euros en réparation du préjudice économique qu'elle estime avoir subi du fait de la suppression du passage à niveau n° 6 sur la voie ferrée reliant Carpentras à Avignon, à Althen-des-Paluds et d'ordonner une expertise judiciaire avant dire droit afin d'évaluer ce préjudice.

Par un jugement n° 1600948 du 9 février 2018, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté cette demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés le 5 avril 2018, le 27 août 2018, le 5 octobre 2018, le 23 novembre 2018, le 14 janvier 2019 et le 25 février 2019, l'EARL Denis Fabre, représentée par Me B..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 9 février 2018 ;

2°) de condamner solidairement l'établissement SNCF-Réseau et l'Etat à lui verser la somme de 114 779,04 euros à parfaire ;

3°) d'ordonner une expertise judiciaire avant dire droit afin d'évaluer son préjudice économique ;

4°) de mettre à la charge de l'établissement SNCF-Réseau et de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la demande de première instance est recevable en tant qu'elle est dirigée contre l'Etat ;

- elle subit un dommage anormal et spécial, relatif au surcoût grevant son bénéfice, à la durée des trajets des engins agricoles et aux risques encourus, du fait d'un parcours quatre fois plus long qu'auparavant et devant emprunter une portion de voie rapide ;

- l'allongement de parcours ne peut être qualifié de temporaire dès lors que la construction de l'ouvrage de franchissement de la voie ferrée n'est pas achevée ;

- la suppression du passage à niveau ne répond pas à un but d'intérêt général mais à des considérations économiques, pratiques et techniques ;

- le préjudice est direct et certain.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 juillet 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'EARL Denis Fabre ne sont pas fondés.

Par des mémoires en défense enregistrés le 24 octobre 2018, le 3 janvier 2019 et le 20 février 2019, l'établissement SNCF-Réseau, représenté par MeA..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de l'EARL Denis Fabre d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- sa responsabilité n'est pas susceptible d'être engagée ;

- à titre subsidiaire, les moyens soulevés par l'EARL Denis Fabre ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

La présidente de la Cour a désigné Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure de la 2ème chambre, pour présider, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative, la formation de jugement.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jorda-Lecroq,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant l'EARL Denis Fabre.

Considérant ce qui suit :

1. Les modifications définitives apportées à la circulation générale et résultant des changements effectués dans l'assiette ou la direction des voies publiques existantes, ne sont pas de nature à ouvrir droit à indemnité. Les allongements de parcours et les difficultés d'accès des riverains à leur propriété du fait de la disparition d'une voie d'accès qu'ils utilisaient, que celle-ci résulte d'un parti d'aménagement de la collectivité publique ou d'un défaut d'entretien de la voie, ne peuvent ouvrir droit à indemnisation à leur profit que si elles excèdent les sujétions qui doivent normalement être supportées sans indemnité.

2. Il résulte de l'instruction que la suppression du passage à niveau n° 6 situé sur le territoire de la commune d'Althen-des-Paluds à compter du 15 janvier 2014, décidée par l'arrêté du préfet de Vaucluse du 23 décembre 2013, est intervenue pour des motifs de sécurité dans le cadre de l'ouverture du trafic voyageurs de la ligne ferroviaire Avignon - Carpentras ayant fait l'objet d'une déclaration d'utilité publique. La construction d'un ouvrage de franchissement de la voie ferrée à hauteur du passage à niveau supprimé est en cours, l'achèvement des travaux devant intervenir au deuxième semestre de l'année 2019. La suppression du passage à niveau a entraîné pour l'EARL Denis Fabre depuis le début de l'année 2014 un allongement de parcours pour se rendre du siège de l'exploitation agricole à la parcelle située de l'autre côté de la voie ferrée de l'ordre de 3 kilomètres, soit 6 kilomètres aller retour. Toutefois, l'existence d'un préjudice anormal et spécial n'est pas établie, dès lors que la parcelle concernée ne représente qu'environ 7 des 33 hectares de l'exploitation agricole, que les documents comptables produits par l'EARL requérante, s'ils indiquent une baisse du chiffre d'affaires de l'exploitation, ne permettent pas de rattacher une perte de bénéfice à l'allongement de parcours litigieux et que d'autres usagers de la voie publique sont susceptibles d'être concernés par cet allongement. Dans ces conditions, la gêne que cet établissement subit du fait de l'allongement de parcours n'excède pas, ainsi que l'ont retenu à bon droit les premiers juges, les sujétions normales que les usagers doivent supporter sans indemnité dans un but d'intérêt général.

3. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, l'EARL Denis Fabre n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. Ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'EARL Denis Fabre la somme que l'établissement SNCF-Réseau demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de l'EARL Denis Fabre est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de l'établissement SNCF-Réseau présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'EARL Denis Fabre, le ministre de la transition écologique et solidaire et à l'établissement SNCF-Réseau.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2019, où siégeaient :

Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure, présidant la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C..., première conseillère,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

La présidente rapporteure,

signé

K. JORDA-LECROQL'assesseure,

signé

A. BOURJADE-MASCARENHAS

La greffière,

signé

C. MONTENERO

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique et solidaire en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

Pour expédition conforme,

La greffière,

2

N° 18MA01502

kp


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01502
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Lien de causalité - Absence.

Travaux publics - Différentes catégories de dommages - Dommages créés par l'exécution des travaux publics.


Composition du Tribunal
Président : Mme JORDA-LECROQ
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : SCP PENARD - OOSTERLYNCK

Origine de la décision
Date de l'import : 30/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-11;18ma01502 ?
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