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09/07/2019 | FRANCE | N°18MA00222

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 09 juillet 2019, 18MA00222


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2015 par lequel le maire de la commune de Puichéric a accordé un permis de construire à M.F....

Par un jugement n° 1601656 du 17 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 janvier 2018 et le 2 mai 2019, M. B..., représenté par la SCP Cabee-Biver-Laredj, demande à la Cour :
r>1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 novembre 2017 ;

2°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2015 par lequel le maire de la commune de Puichéric a accordé un permis de construire à M.F....

Par un jugement n° 1601656 du 17 novembre 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 janvier 2018 et le 2 mai 2019, M. B..., représenté par la SCP Cabee-Biver-Laredj, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 novembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2015 par lequel le maire de la commune de Puichéric a accordé un permis de construire à M.F... ;

3°) de mettre à la charge de M. F...la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les travaux réalisés ont créé des nuisances olfactives et sonores et une vue sur son terrain et il a ainsi intérêt à agir ;

- l'arrêté en cause méconnaît les articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme, les énonciations de la demande de permis de construire, notamment celles figurant sur le plan de masse, étant contraires à l'état réel des lieux et du projet envisagé dès lors qu'il n'existe pas de terrasse au sud et qu'une terrasse au nord a été créée sans autorisation ;

- les énonciations de la demande de permis de construire, tout particulièrement, le plan de masse PC 2 et la notice descriptive PC4, sont frauduleuses ;

- le projet prévoit la démolition d'une partie de la toiture Sud de l'immeuble alors qu'aucune demande de permis de démolir n'a été déposée ;

- la création d'une toiture non couverte méconnaît le règlement de la zone Ufb du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 mars 2018, la commune de Puichéric, représentée par la SELARL Lysis avocats, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B...la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. B...n'a pas intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 mars 2018, M.F..., représenté par la SCP Akheos, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. B... la somme de 3 500 euros au titre de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- M. B...n'a pas intérêt à agir ;

- les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 17 avril 2019, la clôture d'instruction a été fixée au 13 mai 2019 à 12 :00 heures, en application des dispositions de l'article R. 613-1 du code de justice administrative.

Un mémoire présenté pour la commune de Puichéric a été enregistré le 6 juin 2019, postérieurement à la clôture d'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant la commune de Puichéric.

Considérant ce qui suit :

1. Par arrêté du 4 novembre 2015, le maire de la commune de Puichéric a délivré à M.F..., un permis de construire afin de réaliser l'extension du logement situé au premier étage d'une construction existante, par la modification de sa couverture. Par le jugement du 17 novembre 2017 dont relève appel M.B..., le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la fin de non-recevoir opposée par la commune de Puichéric et M. F...à la demande de première instance :

2. Aux termes de l'article L. 600-1-2 du code de l'urbanisme : " Une personne autre que l'Etat, les collectivités territoriales ou leurs groupements ou une association n'est recevable à former un recours pour excès de pouvoir contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager que si la construction, l'aménagement ou les travaux sont de nature à affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance du bien qu'elle détient ou occupe régulièrement ou pour lequel elle bénéficie d'une promesse de vente, de bail, ou d'un contrat préliminaire mentionné à l'article L. 261-15 du code de la construction et de l'habitation ".

3. Il résulte de ces dispositions qu'il appartient, en particulier, à tout requérant qui saisit le juge administratif d'un recours pour excès de pouvoir tendant à l'annulation d'un permis de construire, de démolir ou d'aménager, de préciser l'atteinte qu'il invoque pour justifier d'un intérêt lui donnant qualité pour agir, en faisant état de tous éléments suffisamment précis et étayés de nature à établir que cette atteinte est susceptible d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Il appartient au défendeur, s'il entend contester l'intérêt à agir du requérant, d'apporter tous éléments de nature à établir que les atteintes alléguées sont dépourvues de réalité. Le juge de l'excès de pouvoir apprécie la recevabilité de la requête au vu des éléments ainsi versés au dossier par les parties, en écartant le cas échéant les allégations qu'il jugerait insuffisamment étayées mais sans pour autant exiger de l'auteur du recours qu'il apporte la preuve du caractère certain des atteintes qu'il invoque au soutien de la recevabilité de celui-ci. Eu égard à sa situation particulière, le voisin immédiat justifie, en principe, d'un intérêt à agir lorsqu'il fait état devant le juge, qui statue au vu de l'ensemble des pièces du dossier, d'éléments relatifs à la nature, à l'importance ou à la localisation du projet de construction.

4. Il ressort des pièces du dossier que M.B..., propriétaire d'une construction implantée à proximité immédiate du terrain d'assiette du projet, fait valoir que le projet comporte la réalisation, au premier étage d'une construction existante, d'une terrasse en façade Sud permettant d'avoir une vue sur son jardin et de l'exposer à des nuisances, susceptibles d'affecter directement les conditions d'occupation, d'utilisation ou de jouissance de son bien. Dès lors, M. B...justifie d'un intérêt lui donnant qualité pour agir. Par suite, la fin de non-recevoir opposée à ce titre doit être écartée.

Sur la légalité de l'arrêté du 4 novembre 2015 :

5. En premier lieu, les moyens tirés de la méconnaissance des articles R. 431-8 et R. 431-10 du code de l'urbanisme au motif que les pièces annexées à la demande de permis de construire sollicitée par M.F..., ne permettaient pas au service instructeur d'apprécier l'insertion du projet dans son environnement et par rapport aux constructions avoisinantes ainsi que le moyen tiré du défaut de demande d'un permis de démolir ne comportent aucun élément de fait ou de droit nouveau par rapport à l'argumentation développée devant le tribunal administratif de Montpellier. Par suite, il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption de motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 3 et 5 du jugement attaqué.

6. En deuxième lieu, M B...ne peut utilement invoquer les nuisances découlant de la réalisation de la terrasse autorisée au premier étage du bâtiment existant dès lors que le permis de construire, qui est délivré sous réserve des droits des tiers, a pour seul objet d'assurer la conformité des travaux qu'il autorise avec la réglementation d'urbanisme.

7. En troisième lieu et, d'une part, par arrêté du 17 mars 2008, le maire a autorisé M. F... à procéder à la rénovation et l'extension du logement situé au premier étage de la construction existante, en façade Nord, couvrant " en partie le pallier d'accès à la surface commerciale pour offrir un porche protégé devant les entrées ", situées au rez-de-chaussée. Le projet en cause visait notamment à couvrir intégralement la " toiture terrasse inaccessible " située au Nord afin d'étendre la partie habitation. M. B...soutient que cette toiture terrasse a été réalisée sans autorisation de construire. Toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, notamment du dossier de demande de permis de construire, objet du permis délivré le 17 mars 2008, que la couverture de l'entrée des locaux techniques situés au rez-de-chaussée, selon la dénomination impropre du pétitionnaire, qui aurait dû constituer le sol de l'extension du logement du premier étage, n'aurait pas été autorisée par l'arrêté du 17 mars 2008. Dans ces conditions, il n'est pas établi que M. F...aurait porté des énonciations mensongères relatives à la toiture terrasse en cause dans l'intention de tromper l'administration, à cet égard.

8. D'autre part, il ressort des pièces versées aux débats, notamment du dossier de la demande de permis de construire en litige, notamment la notice descriptive PC 4, les plans de masse PC 2 " état actuel " et " état projeté ", les plans de coupe PC 3 ainsi que les photographies produites, que la partie à usage d'habitation située au 1er étage de la construction existante, en façade Sud, ne comporte pas de terrasse mais constituait un volume clos et couvert. Nonobstant les mentions portées sur la notice explicative PC4 et le formulaire CERFA, selon lesquelles " les travaux d'aménagement pour réaliser un logement de type T3 réduiront les surfaces couvertes de la terrasse Sud ", ces indications ne sont pas en contradiction avec les autres pièces du dossier de demande de permis de construire, notamment le plan de masse PC 2 " état actuel " et le plan de coupe PC 3 " état actuel " qui montrent la pièce existante. Dès lors, M. F...n'a pas porté d'énonciations délibérément mensongères dans l'intention d'induire en erreur l'administration, constitutives de fraude. Le moyen tiré de l'existence d'une fraude doit être écarté.

9. En dernier lieu, l'article Ufb 11 du règlement du plan local d'urbanisme (PLU) de la commune énonce que : " 1 - intervention sur le bâti ancien/ existant couverture, toitures : Les couvertures seront à une ou deux pentes, n'excédant pas 45 %. Les terrasses et les " tropéziennes " sont interdites. Les loggias ou terrasses couvertes peuvent être envisageables, au cas par cas, selon les dispositions du bâti existant. ".

10. Il ressort des pièces du dossier que la terrasse projetée, partiellement couverte, située au premier étage de la construction existante, en façade Sud, qui ne peut être regardée comme étant une " terrasse couverte ", au sens de l'article Ufb 11 du règlement du PLU, constitue une terrasse ou une tropézienne interdite par ces dispositions. Dès lors, M. B...est fondé à soutenir que l'arrêté du maire de la commune de Puychéric du 4 novembre 2015, en tant qu'il autorise la réalisation d'une telle terrasse, méconnaît l'article Ufb 11 du règlement du PLU.

Sur l'application de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme :

11. Aux termes de l'article L. 600-5 du code de l'urbanisme, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2018-1021 du 23 novembre 2018 ; : " Sans préjudice de la mise en oeuvre de l'article L. 600-5-1, le juge administratif qui, saisi de conclusions dirigées contre un permis de construire, de démolir ou d'aménager ou contre une décision de non-opposition à déclaration préalable, estime, après avoir constaté que les autres moyens ne sont pas fondés, qu'un vice n'affectant qu'une partie du projet peut être régularisé, limite à cette partie la portée de l'annulation qu'il prononce et, le cas échéant, fixe le délai dans lequel le titulaire de l'autorisation pourra en demander la régularisation, même après l'achèvement des travaux (...) ".

12. Le vice concernant la réalisation d'une terrasse partiellement couverte, au sud, située au premier étage de la construction existante relevé au point 10, affecte une partie identifiable du projet et est susceptible d'être régularisé. Il y a lieu, dès lors, de n'annuler le permis de construire en litige qu'en tant qu'il porte sur la réalisation de cette terrasse et d'impartir à M. F... un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt pour solliciter une régularisation sur ce point.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...est seulement fondé à soutenir que, c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande en ce qui concerne la construction de la terrasse partiellement couverte, au sud, située au premier étage de la construction existante. Il y a lieu, par suite, d'annuler l'arrêté du maire de la commune de Puicheric du 4 novembre 2015 en tant qu'il autorise la réalisation d'une terrasse au sud de la construction existante et de réformer le jugement attaqué dans cette mesure.

Sur les frais liés au litige :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.B..., qui n'est pas la partie perdant pour l'essentiel dans la présente instance, la somme que la commune de Puichéric et M. F...demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de mettre à la charge de M. F...la somme demandée par M.B..., au même titre.

D É C I D E :

Article 1er : L'arrêté du maire de la commune de Puychéric du 4 novembre 2015 est annulé en tant qu'il autorise la réalisation d'une terrasse au sud de la construction existante. Il est imparti au pétitionnaire un délai de trois mois pour solliciter la régularisation de son projet sur ce point.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 novembre 2017 est réformé en ce qu'il est contraire l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B...est rejeté.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Puichéric et de M. F...présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...B..., à la commune de Puicheric et à M. E...F....

Copie en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Narbonne.

Délibéré après l'audience du 25 juin 2019, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- MmeD..., première conseillère,

- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 9 juillet 2019.

2

N° 18MA00222


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-03-03-02-02 Urbanisme et aménagement du territoire. Permis de construire. Légalité interne du permis de construire. Légalité au regard de la réglementation locale. POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : SCP CABEE - BIVER - LAREDJ

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 09/07/2019
Date de l'import : 30/07/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18MA00222
Numéro NOR : CETATEXT000038828633 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-07-09;18ma00222 ?
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