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28/06/2019 | FRANCE | N°17MA02017

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 28 juin 2019, 17MA02017


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B...ont demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de l'Île-Rousse à libérer la parcelle cadastrée B 952 leur appartenant sous astreinte.

Par un jugement n° 1600086 du 16 mars 2017, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de l'Île-Rousse sur leur demande du 3 octobre 2016, a enjoint à la commune de libérer la parcelle B 952 dans le délai de trois mois sous astreinte et l'a condamnée

verser aux intéressés une somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A... B...ont demandé au tribunal administratif de Bastia de condamner la commune de l'Île-Rousse à libérer la parcelle cadastrée B 952 leur appartenant sous astreinte.

Par un jugement n° 1600086 du 16 mars 2017, le tribunal administratif de Bastia a annulé la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de l'Île-Rousse sur leur demande du 3 octobre 2016, a enjoint à la commune de libérer la parcelle B 952 dans le délai de trois mois sous astreinte et l'a condamnée à verser aux intéressés une somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 mai 2017, la commune de l'Île-Rousse, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 16 mars 2017 ;

2°) à titre principal, de rejeter la demande présentée par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Bastia, à titre subsidiaire, de lui laisser un délai de douze mois afin de lui permettre de mener à son terme la procédure d'expropriation engagée et, en toute hypothèse, de réduire très sensiblement leurs prétentions indemnitaires ;

3°) de mettre à la charge de M. et Mme B... la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les époux B...n'ont pas contesté la légalité de la décision implicite de rejet du 3 décembre 2016 et les premiers juges ont statué au-delà des conclusions dont ils étaient saisis ;

- les conclusions d'injonction présentées à titre principal par les époux B...devant le tribunal étaient irrecevables ;

- la voie aménagée sur la parcelle en litige présente une utilité publique ;

- la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique engagée constitue une mesure de régularisation appropriée ;

- les prétentions indemnitaires des époux B...ne sont pas fondées ;

- elles sont à tout le moins partiellement prescrites et excessives.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 juillet 2017, M. et Mme B..., représentés par Me C..., concluent au rejet de la requête, demandent à titre incident que la somme que la commune de l'Île-Rousse a été condamnée à leur verser soit portée à un montant de 30 000 euros et demandent que soit mise à la charge de la commune la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils font valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé et qu'ils sont privés de la jouissance de leur bien depuis plus de vingt-huit ans.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- la loi n° 68-1250 du 31 décembre 1968 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- et les conclusions de M. Chanon, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... ont acquis le 26 février 1985 deux parcelles cadastrées section B 951 et 952 sur la commune de l'Île-Rousse, au lieu-dit " Ginéparo ", pour y édifier une maison d'habitation. Le permis de construire délivré par la commune le 27 janvier 1986 prévoyait qu'en application de l'article R. 332-15 du code de l'urbanisme, " sera cédé gratuitement par le pétitionnaire 10 % de la superficie de l'unité foncière pour la création de la voie située côté Est du terrain et la rectification de la voie côté Nord ". La commune a ultérieurement aménagé une voie de circulation ouverte au public sur l'assiette de la parcelle B 952. Estimant avoir été irrégulièrement dépossédés d'une partie de leur propriété, les époux B...ont assigné la commune de l'Île-Rousse devant le tribunal de grande instance de Bastia aux fins de voir libérer cette parcelle. Par ordonnance du 6 novembre 2015, le juge de la mise en état de ce tribunal a décliné la compétence du juge judiciaire pour connaître de ce litige. M. et Mme B... ont alors saisi le tribunal administratif de Bastia d'un recours, enregistré le 28 janvier 2016, tendant à ce que la commune de l'Île-Rousse soit condamnée à libérer cette parcelle B 952 sous astreinte de 300 euros par jour de retard. La commune relève appel du jugement du 16 mars 2017 par lequel le tribunal administratif, après avoir requalifié les conclusions des épouxB..., a annulé la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de l'Île-Rousse sur leur demande du 3 octobre 2016, a enjoint à la commune de libérer la parcelle B 952 dans le délai de trois mois sous astreinte et l'a condamnée à verser aux intéressés une somme de 5 000 euros en réparation de leur préjudice de jouissance. M. et Mme B... demandent à titre incident que la somme que la commune de l'Île-Rousse a été condamnée à leur verser soit portée à un montant de 30 000 euros.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Lorsque le juge administratif est saisi d'un recours de pleine de juridiction tendant à la réparation du dommage causé par une emprise irrégulière, il peut s'il convient de faire droit à cette demande, saisi de conclusions en ce sens, enjoindre, à titre principal, à l'administration de faire cesser cette emprise. En application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative selon lequel : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision ", la recevabilité d'une telle demande est, toutefois, subordonnée à la présentation par le requérant d'une demande préalable en ce sens auprès de l'administration compétente et au rejet de celle-ci par une décision expresse ou implicite. Le cas échéant, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête.

3. Si dans leur requête introductive d'instance devant le tribunal administratif de Bastia M. et Mme B... ont seulement présenté des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de l'Île-Rousse de libérer la parcelle cadastrée B 952 leur appartenant, sans contester une décision de la commune, ni justifié lui avoir adressé une demande préalable, ils ont, dans un mémoire enregistré par le greffe du tribunal le 14 octobre 2016, produit une lettre datée du 26 septembre 2016 adressée au maire de la commune par laquelle ils lui ont demandé, d'une part, la cessation de l'emprise irrégulière, et, d'autre part, le versement d'une somme de 30 000 euros en réparation de leur préjudice. Les conclusions dirigées contre le refus de faire cesser l'emprise étant absorbées par les conclusions en injonction, les premiers juges ont pu à juste titre se saisir de conclusions à fin d'annulation de la décision implicite de rejet née de la demande de M. et Mme B..., quand bien même ces derniers n'ont pas expressément présenté de conclusions en ce sens. Dès lors, la commune requérante n'est pas fondée à soutenir que le jugement du tribunal administratif est irrégulier pour avoir, en prononçant l'annulation du rejet implicite opposé par le maire de l'Île-Rousse à la demande du 3 octobre 2016, statué au-delà des conclusions dont il était saisi.

Sur la recevabilité des demandes de première instance :

4. Ainsi qu'il a été dit ci-dessus, les conclusions présentées par M. et Mme B... tendant à ce qu'il soit enjoint à la commune de l'Île-Rousse de libérer la parcelle cadastrée B 952 leur appartenant étaient recevables dès lors qu'à la date à laquelle les premiers juges ont statué, une décision administrative refusant de faire droit à une telle demande était intervenue.

5. M. et Mme B... ayant aussi saisi la commune d'une demande préalable tendant à la réparation du préjudice qu'ils estimaient avoir subi étaient également recevables à soumettre au tribunal administratif des conclusions indemnitaires qui présentaient un lien suffisant avec leurs conclusions initiales, quand bien même elles n'ont été enregistrées que le 14 octobre 2016.

Sur les conclusions à fin d'annulation et d'injonction :

6. Il appartient au juge administratif, lorsqu'il examine des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à une personne publique de faire cesser une emprise irrégulière, de rechercher, d'abord, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible. Dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part, les inconvénients que l'emprise entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'emprise, d'autre part, les conséquences pour l'intérêt général de la remise en état des lieux, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si celle-ci n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.

7. Il résulte de l'instruction que, par délibération du 31 mai 2017 adoptée postérieurement au jugement attaqué, le conseil municipal de l'Île-Rousse a décidé de recourir à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique afin de régulariser la bande de terrain en litige au motif que cette voie contribue à la desserte automobile du quartier et que la conservation de cette desserte présente le caractère d'intérêt général et a mandaté le maire à l'effet d'entreprendre toutes diligences à cette fin. Il résulte également de l'instruction que l'enquête publique, dont l'ouverture a été décidée par arrêté préfectoral du 4 avril 2019, s'est déroulée du 30 avril 2019 au 17 mai 2019. A la date du présent arrêt, il apparaît ainsi qu'une régularisation appropriée de l'emprise litigieuse est possible.

8. Ainsi, c'est à tort que le tribunal s'est fondé sur le motif tiré de ce qu'il ne résultait pas de l'instruction qu'une telle régularisation serait possible pour annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de l'Île-Rousse sur la demande de libération de cette parcelle et enjoindre à la commune de procéder à cette libération sous astreinte.

9. Aucun autre moyen invoqué par M. et Mme B... tant devant le tribunal administratif de Bastia que devant la Cour n'étant, dans ces conditions, susceptible de justifier le prononcé d'une telle injonction, il appartient à la Cour, saisie par la voie de l'effet dévolutif de l'appel, d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia en tant qu'il a fait droit à ces conclusions et d'en prononcer le rejet.

Sur les conclusions indemnitaires :

En ce qui concerne l'exception de prescription quadriennale :

10. Aux termes de l'article 7 de la loi du 31 décembre 1968 : " L'administration doit, pour pouvoir se prévaloir, à propos d'une créance litigieuse, de la prescription prévue par la présente loi, l'invoquer avant que la juridiction saisie du litige au premier degré se soit prononcée sur le fond ".

11. Il résulte de l'instruction que la commune de l'Île-Rousse n'a pas opposé la prescription quadriennale devant le tribunal. En vertu des dispositions précitées, cette prescription ne peut donc être invoquée pour la première fois en appel.

En ce qui concerne la réalité et l'évaluation du préjudice de jouissance :

12. Ainsi qu'il a été dit au point 1 ci-dessus, le permis de construire délivré à M. et Mme B... par le maire de la commune de l'Île Rousse le 27 janvier 1986 prévoyait la cession à titre gratuit de l'emprise en litige, d'une surface de 204 mètres carrés située à l'extrémité Est de leur propriété, aux fins d'aménager une voie de circulation. La seule circonstance, d'une part, que les intéressés ont alors librement consenti à cette cession dont la perspective figurait en outre expressément dans l'acte de vente immobilière du 26 février 1985 concernant les deux parcelles, auquel était joint un certificat d'urbanisme positif mentionnant un emplacement réservé de sept mètres de large pour la création d'une voie publique communale en limite de la parcelle 952 et indiquant également qu'une cession gratuite de terrain pourrait être exigée lors de la délivrance du permis de construire et, d'autre part, qu'ils se soient satisfaits de la situation pendant plus de vingt-huit ans ne saurait suffire à établir l'inexistence d'un préjudice résultant de la privation de jouissance de cette parcelle dont la cession n'a pas été effectivement formalisée. La commune requérante n'est donc pas fondée à soutenir que M. et Mme B... ne peuvent se prévaloir d'aucun préjudice. En revanche, ces éléments peuvent à bon droit être pris en considération pour apprécier le montant de l'indemnisation qui leur est due. Ainsi, eu égard au fait que M. et Mme B... n'ont, ainsi qu'il résulte de l'instruction, jamais entrepris une quelconque démarche aux fins de se voir restituer leur bien entre la date de délivrance du permis de construire et la date à laquelle ils ont assigné à cette fin la commune de l'Île-Rousse devant le tribunal de grande instance de Bastia, soit le 27 janvier 2015, alors qu'ils ne pouvaient ignorer qu'aucun acte de cession n'était formellement intervenu, il y a lieu de réduire l'indemnité fixée par le jugement attaquée à la somme de 3 000 euros et de rejeter, par voie de conséquence, les conclusions incidentes de M. et Mme B... tendant au rehaussement de cette indemnité.

Sur les frais liés au litige :

13. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

14. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de mettre à la charge de M. et Mme B... la somme que la commune de l'Île-Rousse demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Les dispositions du même article font par ailleurs obstacle à ce que les sommes demandées à ce titre par M. et Mme B... soient mises à la charge de la commune de l'Île-Rousse, qui n'est pas la partie perdante.

D É C I D E :

Article 1er : Les articles 1er et 2 du jugement du tribunal administratif de Bastia du 16 mars 2017 sont annulés.

Article 2 : La demande présentée par M. et Mme B... devant le tribunal administratif de Bastia en tant qu'elle tend à l'annulation de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le maire de l'Île-Rousse sur leur demande tendant à la libération de la parcelle B 952 leur appartenant et à ce qu'il soit enjoint à la commune de libérer cette parcelle dans le délai de trois mois sous astreinte est rejetée.

Article 3 : La somme de 5 000 euros que la commune de l'Île-Rousse a été condamnée à verser à M. et Mme B... est ramenée à 3 000 euros.

Article 4 : L'article 3 du jugement du tribunal administratif de Bastia du 16 mars 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête et les conclusions incidentes présentées par M. et Mme B... devant la Cour sont rejetées.

Article 6 : Les conclusions présentées par la commune de l'Île-Rousse et par M. et Mme B... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de l'Île-Rousse et à M. et Mme A... et NicoleB....

Délibéré après l'audience du 3 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- Mme Helmlinger, présidente de la Cour,

- M. Guidal, président-assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 juin 2019.

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N° 17MA02017

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Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

COMPÉTENCE - RÉPARTITION DES COMPÉTENCES ENTRE LES DEUX ORDRES DE JURIDICTION - COMPÉTENCE DÉTERMINÉE PAR UN CRITÈRE JURISPRUDENTIEL - LIBERTÉ INDIVIDUELLE - PROPRIÉTÉ PRIVÉE ET ÉTAT DES PERSONNES - PROPRIÉTÉ - EMPRISE IRRÉGULIÈRE - AMÉNAGEMENT SANS TITRE D'UNE VOIE DE CIRCULATION PUBLIQUE SUR UN TERRAIN PRIVÉ - ACTE MANIFESTEMENT INSUSCEPTIBLE D'ÊTRE RATTACHÉ À UN POUVOIR DE L'ADMINISTRATION - ABSENCE - EMPRISE IRRÉGULIÈRE - EXISTENCE [RJ1] CONCLUSIONS TENDANT À LA CESSATION DE L'EMPRISE IRRÉGULIÈRE - CONTRÔLE OPÉRÉ PAR LE JUGE DE PLEINE JURIDICTION - MÉTHODE - 1) EXAMEN DE LA POSSIBILITÉ D'UNE RÉGULARISATION APPROPRIÉE - 2) EXAMEN DU BILAN ENTRE LES INCONVÉNIENTS DE L'OUVRAGE ET LES CONSÉQUENCES DE LA DÉMOLITION POUR L'INTÉRÊT GÉNÉRAL [RJ2].

17-03-02-08-02-01 Il appartient au juge administratif, lorsqu'il examine des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à une personne publique de faire cesser une emprise irrégulière, de rechercher, d'abord, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible. Dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part, les inconvénients que l'emprise entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'emprise, d'autre part, les conséquences pour l'intérêt général de la remise en état des lieux, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si celle-ci n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.,,,En l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions à fins d'injonction de faire cesser l'emprise irrégulière, dès lors que, à la date de l'arrêt, le conseil municipal a décidé de recourir à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique afin de régulariser la bande de terrain en litige au motif que cette voie contribue à la desserte automobile du quartier et que la conservation de cette desserte présente le caractère d'intérêt général et a mandaté le maire à l'effet d'entreprendre toutes diligences à cette fin, que l'enquête publique préalable à cette procédure d'expropriation est achevée et qu'ainsi, une régularisation appropriée de l'emprise litigieuse est possible.

DROITS CIVILS ET INDIVIDUELS - DROIT DE PROPRIÉTÉ - ACTES DES AUTORITÉS ADMINISTRATIVES CONCERNANT LES BIENS PRIVÉS - VOIE DE FAIT ET EMPRISE IRRÉGULIÈRE - AMÉNAGEMENT SANS TITRE D'UNE VOIE DE CIRCULATION PUBLIQUE SUR UN TERRAIN PRIVÉ - ACTE MANIFESTEMENT INSUSCEPTIBLE D'ÊTRE RATTACHÉ À UN POUVOIR DE L'ADMINISTRATION - ABSENCE - EMPRISE IRRÉGULIÈRE - EXISTENCE [RJ1] CONCLUSIONS TENDANT À LA CESSATION DE L'EMPRISE IRRÉGULIÈRE - CONTRÔLE OPÉRÉ PAR LE JUGE DE PLEINE JURIDICTION - MÉTHODE - 1) EXAMEN DE LA POSSIBILITÉ D'UNE RÉGULARISATION APPROPRIÉE - 2) EXAMEN DU BILAN ENTRE LES INCONVÉNIENTS DE L'OUVRAGE ET LES CONSÉQUENCES DE LA DÉMOLITION POUR L'INTÉRÊT GÉNÉRAL [RJ2].

26-04-04-01 Il appartient au juge administratif, lorsqu'il examine des conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à une personne publique de faire cesser une emprise irrégulière, de rechercher, d'abord, en fonction de la situation de droit et de fait existant à la date à laquelle il statue, si eu égard notamment à la nature de l'irrégularité, une régularisation appropriée est possible. Dans la négative, il lui revient ensuite de prendre en considération, d'une part, les inconvénients que l'emprise entraîne pour les divers intérêts publics ou privés en présence et notamment, le cas échéant, pour le propriétaire du terrain d'assiette de l'emprise, d'autre part, les conséquences pour l'intérêt général de la remise en état des lieux, et d'apprécier, en rapprochant ces éléments, si celle-ci n'entraîne pas une atteinte excessive à l'intérêt général.,,,En l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions à fins d'injonction de faire cesser l'emprise irrégulière, dès lors que, à la date de l'arrêt, le conseil municipal a décidé de recourir à la procédure d'expropriation pour cause d'utilité publique afin de régulariser la bande de terrain en litige au motif que cette voie contribue à la desserte automobile du quartier et que la conservation de cette desserte présente le caractère d'intérêt général et a mandaté le maire à l'effet d'entreprendre toutes diligences à cette fin, que l'enquête publique préalable à cette procédure d'expropriation est achevée et qu'ainsi, une régularisation appropriée de l'emprise litigieuse est possible.

PROCÉDURE - POUVOIRS ET DEVOIRS DU JUGE - QUESTIONS GÉNÉRALES - CONCLUSIONS - CONCLUSIONS IRRECEVABLES - DEMANDES D'INJONCTION - RECOURS DE PLEINE DE JURIDICTION TENDANT À LA RÉPARATION DU DOMMAGE CAUSÉ PAR UNE EMPRISE IRRÉGULIÈRE - RECEVABILITÉ DES CONCLUSIONS À FIN D'INJONCTION DE FAIRE CESSER L'EMPRISE IRRÉGULIÈRE PRÉSENTÉES À TITRE PRINCIPAL.

54-07-01-03-02-03 Lorsque le juge administratif est saisi d'un recours de pleine de juridiction tendant à la réparation du dommage causé par une emprise irrégulière, il peut s'il convient de faire droit à cette demande, saisi de conclusions en ce sens, enjoindre, à titre principal, à l'administration de faire cesser cette emprise. En application de l'article R. 421-1 du code de justice administrative selon lequel la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, la recevabilité d'une telle demande est, toutefois, subordonnée à la présentation par le requérant d'une demande préalable en ce sens auprès de l'administration compétente et au rejet de celle-ci par une décision expresse ou implicite. Le cas échéant, l'intervention d'une telle décision en cours d'instance régularise la requête. [RJ3].


Références :

[RJ1]

Cf. TC, 17 juin 2013, M. Bergoend c/ Société ERDF Annecy Léman, n° 3911,,

[RJ2]

Rappr. CE, 29 janvier 2003, Syndicat départemental de l'électricité et du gaz des Alpes-Maritimes et commune de Clans, n° 245239 ;

CE, 13 février 2009, Communauté de communes du canton de Saint-Malo de la Lande, n° 295885, ,

[RJ3]

Rapp. CE, 27 juillet 2015, M. Baey, n° 367484 ;

CE, 18 mars 2019, Commune de Chambéry, n° 411462.


Publications
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Composition du Tribunal
Président : Mme HELMLINGER
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : CABINET MUSCATELLI

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 28/06/2019
Date de l'import : 20/07/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17MA02017
Numéro NOR : CETATEXT000038713718 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-28;17ma02017 ?
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