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25/06/2019 | FRANCE | N°18MA02315

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 25 juin 2019, 18MA02315


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision du 14 décembre 2015 par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault a fixé au 31 août 2015 la date de consolidation de l'accident de service dont elle a été victime le 16 juin 2014, ensemble la décision implicite de la même autorité rejetant son recours gracieux et, d'autre part, d'enjoindre au département de l'Hérault de prendre une décision tenant compte de son état de santé réel d

ans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme F... D...a demandé au tribunal administratif de Montpellier, d'une part, d'annuler la décision du 14 décembre 2015 par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault a fixé au 31 août 2015 la date de consolidation de l'accident de service dont elle a été victime le 16 juin 2014, ensemble la décision implicite de la même autorité rejetant son recours gracieux et, d'autre part, d'enjoindre au département de l'Hérault de prendre une décision tenant compte de son état de santé réel dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1602044 du 23 mars 2018, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 mai 2018, MmeD..., représentée par la SELARL Maillot avocats et associés, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mars 2018 ;

2°) d'annuler la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 14 décembre 2015, ensemble la décision implicite de la même autorité rejetant son recours gracieux ;

3°) d'enjoindre au département de l'Hérault de ré-instruire la demande en tenant compte de son état de santé réel dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge du département de l'Hérault le versement d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les pièces médicales communiquées, bien que postérieures aux décisions en cause, démontrent l'aggravation de son état de santé qui, dès lors, n'était pas consolidé au 31 août 2015.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 octobre 2018, le département de l'Hérault, représenté par la SCP CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme D...la somme de 2000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Le département soutient que les moyens invoqués par Mme D...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale ;

- la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 ;

- l'arrêté du 4 août 2004 relatif aux commissions de réforme des agents de la fonction publique territoriale et de la fonction publique hospitalière ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant MmeD..., et de MeC..., représentant le département de l'Hérault.

Une note en délibéré présentée pour le département de l'Hérault a été enregistrée le 12 juin 2019.

Considérant ce qui suit :

1. Mme F...D..., adjointe administrative de 2ème classe au sein du département de l'Hérault, affectée à l'agence départementale de la solidarité du Piémont Biterrois a été victime d'un accident dont l'imputabilité au service a été reconnue par la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 14 décembre 2015. Les congés de maladie du 16 juin 2014 au 31 août 2015 ont été pris en charge à ce titre. Par cette décision, le président a fixé au 31 août 2015 la date de consolidation de l'accident de service et a refusé de prendre en charge au titre de l'accident de service les arrêts de travail postérieurs au 31 août 2015. Par le jugement du 23 mars 2018 dont relève appel MmeD..., le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande qui doit être regardée comme tendant à l'annulation de la décision du 14 décembre 2015 par laquelle le président du conseil départemental de l'Hérault a, d'une part, fixé la date de consolidation des lésions consécutives à l'accident de service au 31 août 2015 et, d'autre part, refusé de prendre en charge les arrêts de travail postérieurs au 31 août 2015 ainsi que de la décision implicite de rejet de son recours gracieux.

2. Aux termes de l'article 57 de la loi susvisée du 26 janvier 1984 dans sa rédaction applicable au litige : " Le fonctionnaire en activité a droit : / (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. Celui-ci conserve alors l'intégralité de son traitement pendant une durée de trois mois ; ce traitement est réduit de moitié pendant les neuf mois suivants. (...). / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à la mise à la retraite. (...) / Dans le cas visé à l'alinéa précédent, l'imputation au service de l'accident ou de la maladie est appréciée par la commission de réforme instituée par le régime des pensions des agents des collectivités locales (...) ".

En ce qui concerne la date de consolidation des lésions :

3. Lorsqu'elle apprécie la date de consolidation de l'état de santé d'un agent à la suite d'un accident de service, laquelle correspond à la stabilisation de l'état de santé de l'agent qui permet d'évaluer les séquelles de cet accident, la commission de réforme se borne à émettre un avis et le pouvoir de décision appartient à l'autorité administrative dont relève l'agent, éclairée par cet avis. Le juge de l'excès de pouvoir exerce un contrôle normal sur la date de consolidation retenue par l'autorité administrative.

4. Au vu de l'avis de la commission de réforme émis le 24 novembre 2015, le président du conseil départemental de l'Hérault a, par la décision du 14 décembre 2015, fixé au 31 août 2015 la date de consolidation de l'accident survenu le 16 juin 2014, reconnu imputable au service. Il ressort des pièces du dossier que, dans son rapport d'expertise établi le 31 août 2015, et au vu duquel la commission a émis son avis, le docteurE..., médecin psychiatre agréé, a conclu au lien direct et exclusif de la pathologie en cause avec le service, relevé l'amélioration de la pathologie affectant MmeD..., en dépit de la persistance des troubles et a, ainsi, fixé au 31 août 2015, la consolidation de son état et déterminé à 8 % le taux d'incapacité permanente partielle. Tout comme en première instance, Mme D...soutient en appel que, eu égard à l'aggravation de ses troubles, révélée par les pièces médicales qu'elle communique, son état de santé n'était pas, au 31 août 2015, encore consolidé. Toutefois, la requérante ne peut se prévaloir utilement des mentions portées sur les avis d'arrêt de travail, telles que " burn out " ou " état dépressif réactionnel " adressés à son administration. En outre, dans le certificat médical du 19 janvier 2016 dont elle fait état, son médecin généraliste traitant, outre la persistance des troubles psychiatriques, relève leur aggravation consécutive à la " non reconnaissance par son administration des souhaits de Mme D...quant à son désir de reprendre son activité professionnelle ", sans se prononcer sur la consolidation de son état de santé. De même, ni le docteurG..., psychiatre, dans son rapport des 24 octobre 2016 et 8 février 2017, ni le docteurB..., également psychiatre, aux termes de son rapport non daté, s'ils concluent au lien direct de la pathologie psychiatrique de l'intéressée avec le service et son inaptitude à reprendre son activité professionnelle, à la date de leur examen, en revanche, ne portent aucune appréciation sur la stabilisation de son état de santé à une date postérieure au 31 août 2015, telle que fixée par le médecin psychiatre agréé. Dès lors, Mme D...n'apporte pas d'élément médical, nonobstant la persistance des séquelles et la poursuite des soins, de nature à infirmer les conclusions du Docteur E...sur la date de consolidation des lésions consécutives à l'accident du 16 juin 2014, fixée au 31 août 2015, et n'établit pas que son état de santé n'était pas stabilisé à cette date. Par suite, en fixant à cette date, la consolidation des troubles consécutifs à l'accident de service du 16 juin 2014, le président du conseil départemental de l'Hérault n'a pas entaché la décision contestée d'illégalité.

En ce qui concerne l'imputabilité des arrêts de travail postérieurs au 31 août 2015 :

5. Il ressort des pièces du dossier, comme il a été dit au point précédent que tant son médecin traitant, aux termes de son certificat médical du 19 janvier 2016, le docteurG..., psychiatre, dans son rapport des 24 octobre 2016 et 8 février 2017 que le docteurB..., également psychiatre, aux termes de son rapport, concluent, à la date de leur examen, au lien direct de la pathologie psychiatrique de l'intéressée avec le service et son inaptitude à reprendre son activité professionnelle. Le département de l'Hérault n'apporte aucun élément de nature à infirmer ces conclusions. Dès lors, Mme D...est fondée à soutenir que les arrêts de travail pour la période postérieure au 31 août 2015, date de consolidation de sa pathologie, étaient, compte tenu du lien direct et certain avec celle-ci, imputables au service. Par suite, la décision en litige est entachée d'illégalité, dans cette mesure.

6. Il résulte de tout ce qui précède que Mme D...est seulement fondée à soutenir que c'est tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 14 décembre 2015 en tant qu'il refuse de prendre en charge au titre de son accident de service les arrêts de travail liés à sa pathologie reconnue comme un accident de service, postérieurs au 31 août 2015, date de consolidation. Elle est fondée, dans cette mesure, à demander la réformation du jugement et l'annulation, dans cette même mesure, de cette décision et de la décision implicite rejetant son recours gracieux.

Sur les conclusions aux fins d'injonction, sous astreinte :

7. Aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction résultant de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019 : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. / La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure. ".

8. Eu égard au motif énoncé au point 5, l'annulation de la décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 14 décembre 2015 en tant qu'il refuse à Mme D...de prendre en charge au titre de l'accident de service les arrêts de travail postérieurs au 31 août 2015, implique nécessairement l'édiction par cette autorité d'une décision reconnaissant comme imputables au service les arrêts de travail postérieurs au 31 août 2015. Il y a lieu d'enjoindre au président du conseil départemental d'y procéder dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction de l'astreinte demandée par MmeD....

Sur les frais liés au litige :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de MmeD..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdant pour l'essentiel, la somme demandée par le département de l'Hérault, au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du département de l'Hérault une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme D...et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La décision du président du conseil départemental de l'Hérault du 14 décembre 2015 en tant qu'elle refuse à Mme D...de prendre en charge au titre de son accident de service les arrêts de travail postérieurs au 31 août 2015 et, dans la même mesure, la décision implicite rejetant le recours gracieux de Mme D...sont annulées.

Article 2 : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 23 mars 2018 est réformé en ce qu'il a de contraire à l'article 1er du présent arrêt.

Article 3 : Il est enjoint au département de l'Hérault de prendre une décision reconnaissant les arrêts de travail liés à la pathologie de MmeD..., postérieurs au 31 août 2015, imputables au service, dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme D...est rejeté.

Article 5 : Le département de l'Hérault versera à Mme D...une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Les conclusions du département de l'Hérault, présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme F...D...et au département de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 11 juin 2019, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère,

- M. Slimani, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 25 juin 2019.

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N° 18MA02315


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA02315
Date de la décision : 25/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : CABINET MAILLOT - AVOCATS ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-25;18ma02315 ?
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