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12/06/2019 | FRANCE | N°18MA04469

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 12 juin 2019, 18MA04469


Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 9 novembre 2016, la SAS Randis, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 juin 2016 par lequel le maire de la commune du Cannet a refusé de lui délivrer un permis de construire et la décision implicite par laquelle il a refusé de retirer cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au maire de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Cannet une somme de 4 000 euros en

application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

-...

Vu la procédure suivante :

Par une requête enregistrée le 9 novembre 2016, la SAS Randis, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'arrêté du 17 juin 2016 par lequel le maire de la commune du Cannet a refusé de lui délivrer un permis de construire et la décision implicite par laquelle il a refusé de retirer cet arrêté ;

2°) d'enjoindre au maire de réexaminer sa demande dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

3°) de mettre à la charge de la commune du Cannet une somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- le maire avait la possibilité d'imposer des prescriptions ;

- il aurait dû indiquer les raisons pour lesquelles le projet ne pouvait pas être accordé au bénéfice d'une adaptation mineure ;

- la construction projetée respecte les exigences posées par l'article UE 7 du POS.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 février 2017, la commune du Cannet, représentée par MeA..., conclut au rejet de la requête et demande de mettre à la charge de la SAS RANDIS la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision a été signée par une autorité bénéficiant d'une délégation de fonctions régulièrement affichée et publiée ;

- la décision est suffisamment motivée ;

- le maire ne pouvait imposer de prescriptions relatives aux distances par rapport aux limites séparatives, s'agissant d'une modification substantielle et de prescriptions qui n'auraient été ni limitées ni réalisables ;

- une décision n'accordant pas une adaptation mineure, au demeurant non sollicitée, n'a pas à être motivée ;

- la construction projetée méconnaît les règles posées par l'article UE 7 du POS ;

- le dossier de demande de permis de construire déposé par la société requérante ne mentionnait pas l'existence d'un garde-corps amovible et télescopique.

Par un mémoire en réplique, enregistré le 30 mars 2017, la SAS Randis conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens et ajoute que :

- la prescription qu'aurait pu édicter le maire était réalisable et limitée ;

- la hauteur s'apprécie par rapport à l'égout du toit ;

- le motif de refus tiré de l'atteinte au caractère des lieux avoisinants est entaché d'erreur d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 mai 2017, la commune du Cannet persiste dans ses précédentes écritures et ajoute que :

- le projet ne remplit pas les conditions pour pouvoir bénéficier d'une adaptation mineure ;

- la hauteur d'une construction s'apprécie à l'égout du toit sauf disposition contraire du POS ;

- le projet ne s'intègre pas dans les lieux avoisinants.

Par une ordonnance du 10 octobre 2018, le président du tribunal administratif de Nice a transmis le dossier de la requête de la SAS Randis à la cour administrative d'appel de Marseille.

Par un mémoire enregistré le 11 mars 2019, la commune du Cannet persiste dans ses précédentes écritures.

Par un mémoire enregistré le 25 mars 2019, la SAS Randis conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens, demande en outre qu'il soit enjoint à la commune, à titre principal, sur le fondement des dispositions des articles L. 911-1 du code de justice administrative et L. 424-3 du code de l'urbanisme, de délivrer le permis de construire sollicité dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt, qu'il lui soit enjoint à titre subsidiaire de réexaminer sa demande dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, augmente le montant de ses conclusions présentées en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la somme de 5 000 euros et ajoute que :

- la commune aurait dû préciser les motifs qui l'ont conduite à ne pas accorder une adaptation mineure, quand bien même elle n'en aurait pas fait état dans sa demande de permis de construire ;

- le point le plus élevé du bâtiment est l'égout du toit lorsqu'il s'agit de faire application d'une règle de distance d'implantation par rapport aux limites séparatives se calculant par rapport à la hauteur du bâtiment.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2019, la commune du Cannet persiste dans ses précédentes écritures et ajoute que :

- les bâtiments avoisinants mentionnés par la société requérante ont été construits postérieurement à l'arrêté en litige ;

- les parcelles en cause sont localisées en aléa fort de débordement depuis les intempéries du 3 octobre 2015, tel que cela résulte d'un porter à connaissance du préfet ;

- la Cour devra en conséquence procéder à une substitution de motifs pour refuser le permis de construire au regard de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme ;

- cette situation implique nécessairement une nouvelle instruction de la demande.

Par un mémoire enregistré le 24 avril 2019, la SAS Randis conclut aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens, augmente le montant de ses prétentions émises sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à la somme de 6 000 euros et ajoute en outre que le porter à connaissance invoqué par la commune a été notifié postérieurement à l'arrêté en litige.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Duran-Gottschalk, rapporteure,

- et les conclusions de M. Revert, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SAS Randis a déposé le 16 juin 2015 une demande de permis de construire tendant à la construction d'un drive sous l'enseigne Leclerc sur le territoire de la commune du Cannet, pour une surface de plancher de 1 061,34 m², sur un terrain cadastré section AB n°s 49, 73 et 74. La commission départementale d'aménagement commercial et la commission nationale d'aménagement commercial ont émis un avis favorable à cette demande. Par arrêté du 17 juin 2016, dont la SAS Randis demande l'annulation, le maire du Cannet a refusé de délivrer l'autorisation sollicitée.

Sur la légalité du refus de permis de construire du 17 juin 2016 :

2. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que le signataire de l'arrêté bénéficiait d'une délégation du maire en date du 11 avril 2014, affichée en mairie du 11 avril au 11 juin 2014 et publiée au recueil des actes administratifs de la commune pris du 9 avril au 15 avril 2014, à l'effet de signer les autorisations d'urbanisme, notamment lorsque la délivrance du permis de construire ou de toute autre autorisation d'urbanisme tient lieu de l'autorisation prévue par une autre législation. Il convient dès lors d'écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision.

3. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 424-3 du code de l'urbanisme : " Lorsque la décision rejette la demande ou s'oppose à la déclaration préalable, elle doit être motivée. Cette motivation doit indiquer l'intégralité des motifs justifiant la décision de rejet ou d'opposition, notamment l'ensemble des absences de conformité des travaux aux dispositions législatives et réglementaires mentionnées à l'article L. 421-6. Il en est de même lorsqu'elle est assortie de prescriptions, oppose un sursis à statuer ou comporte une dérogation ou une adaptation mineure aux règles d'urbanisme applicables ". Selon l'article R. 424-5 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Si la décision comporte rejet de la demande, si elle est assortie de prescriptions ou s'il s'agit d'un sursis à statuer, elle doit être motivée. Il en est de même lorsqu'une dérogation ou une adaptation mineure est accordée ".

4. L'arrêté du maire, qui mentionne que la construction projetée, dont la hauteur est de 10,78 mètres, devrait être implantée à une distance minimale des limites séparatives égale à 5,39 mètres alors qu'il apparaît sur le plan de masse du projet qu'elle est implantée à une distance de 5,00 mètres de la limite latérale Sud et Ouest, qu'elle est donc non conforme à l'article UE 7 du POS, que cette non-conformité ne peut faire l'objet d'une adaptation mineure et que le projet porte atteinte au caractère des lieux environnants, est suffisamment motivé, quand bien même le maire n'aurait pas précisé les motifs pour lesquels il n'accordait pas le permis de construire au bénéfice de prescriptions ou d'adaptations mineures.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article UE 7 du POS : " Marges latérales. Toute construction doit être éloignée des limites séparatives de l'unité foncière qui touchent une voie d'une distance au moins égale à la moitié de sa hauteur, cette distance ne devant jamais être inférieure à 5 mètres ". Selon l'article UE 10 : " La hauteur totale de toutes constructions, toutes superstructures comprises, est mesurée du point le plus haut de la construction, à son point le plus bas au niveau du terrain naturel ou excavé, y compris dans le cas d'un terrain en pente. Elle est fixée à : 15 mètres ".

6. Il ressort des pièces du dossier de demande de permis de construire, notamment de la notice descriptive avec insertion du plan de coupe A - A', que le bâtiment s'élève à une hauteur, laquelle doit être mesurée en son point le plus haut constitué en l'espèce par l'acrotère, de 10,78 mètres, sans que soit mentionnée sur ce plan ou sur tout autre document de la demande de permis, la présence d'un garde-corps amovible et télescopique. Dans ces conditions, la commune a pu à bon droit refuser l'autorisation sollicitée pour méconnaissance de l'article UE 7 du POS, la distance à respecter entre la construction et la limite séparative devant être de 5,39 mètres, alors qu'aucune disposition législative ou réglementaire n'imposait au maire de délivrer le permis au bénéfice de prescriptions.

7. En quatrième et dernier lieu, selon l'article UE 11 du POS : " - ASPECT EXTERIEUR. Les constructions doivent présenter un aspect compatible avec le caractère ou l'intérêt des lieux avoisinants, des sites, des paysages naturels, ainsi qu'avec la conservation des perspectives monumentales (...) ". Il ressort des pièces du dossier que la zone dans laquelle se situe l'immeuble projeté, fortement urbanisée sans homogénéité, n'a aucun caractère particulier, quand bien même les constructions mentionnées par la société requérante auraient été achevées postérieurement à l'arrêté en litige. Il en résulte que le motif tiré de la méconnaissance de l'article UE 11 du POS est entaché d'erreur d'appréciation.

8. La commune du Cannet aurait pris la même décision en se fondant sur la seule méconnaissance de l'article UE 7 du POS. La SAS Randis n'est ainsi pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 17 juin 2016. Ses conclusions aux fins d'annulation et d'injonction doivent par suite être rejetées.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune du Cannet, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, le versement d'une somme à la SAS Randis, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de cette société la somme de 2 000 euros au profit de la commune du Cannet au titre des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SAS Randis est rejetée.

Article 2 : La SAS Randis versera une somme de 2 000 euros à la commune du Cannet en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SAS Randis et à la commune du Cannet.

Copie en sera adressée à la Commission nationale d'aménagement commercial, au ministre de l'économie et des finances et au ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président-assesseur,

- Mme Duran-Gottschalk, première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 juin 2019.

6

N° 18MA04469


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA04469
Date de la décision : 12/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU) - Application des règles fixées par les POS ou les PLU - Règles de fond - Implantation des constructions par rapport aux voies et emprises publiques.

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Plans d`occupation des sols (POS) et plans locaux d'urbanisme (PLU) - Application des règles fixées par les POS ou les PLU - Règles de fond - Hauteur des constructions.

Urbanisme et aménagement du territoire - Permis de construire - Légalité interne du permis de construire - Légalité au regard de la réglementation locale - POS ou PLU (voir supra : Plans d`aménagement et d`urbanisme).

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses - Autorisation d`exploitation commerciale (voir : Commerce - industrie - intervention économique de la puissance publique).


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Karine DURAN-GOTTSCHALK
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : SCP BOUYSSOU ET ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 18/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-12;18ma04469 ?
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