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11/06/2019 | FRANCE | N°18MA05054

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 11 juin 2019, 18MA05054


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 16 juin 2018 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1802549 du 3 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 novembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'a

nnuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice du 3 juillet 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 16 juin 2018 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours.

Par un jugement n° 1802549 du 3 juillet 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 novembre 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice du 3 juillet 2018 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 16 juin 2018 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- il a sollicité le réexamen de sa demande d'asile ;

- le préfet a méconnu l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision d'assignation à résidence est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet, qui ne pouvait l'assigner à résidence à une adresse de domiciliation, a méconnu l'article L. 561-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en s'abstenant de préciser que la période de quarante-cinq jours ne comprenait aucun jour férié.

Vu les autres pièces du dossier.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 26 octobre 2018.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 16 juin 2018, le préfet des Alpes-Maritimes a assigné à résidence M. B..., ressortissant guinéen né en 1996, pour une durée de quarante-cinq jours. M. B... fait appel du jugement du 3 juillet 2018 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été refusé à M. B... par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 novembre 2014, confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 17 juillet 2015. L'intéressé a ensuite fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise le 6 novembre 2017, puis de l'arrêté d'assignation à résidence en litige, le 16 juin 2018. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a alors déposé une demande d'asile qui a été transmise le 28 juin 2018 à l'Office français de protection des réfugiés et apatrides pour faire l'objet d'un examen selon la procédure accélérée. Toutefois, le dépôt de cette demande de réexamen est sans incidence sur la légalité de l'arrêté décidant l'assignation à résidence de M. B... qui n'a pas, par lui-même, pour objet de mettre à exécution la mesure d'éloignement avant que l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ne se soit prononcé.

3. En deuxième lieu, l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " I. - L'autorité administrative peut prendre une décision d'assignation à résidence à l'égard de l'étranger qui ne peut quitter immédiatement le territoire français mais dont l'éloignement demeure une perspective raisonnable, lorsque cet étranger : / (...) 5° Fait l'objet d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant et pour laquelle le délai pour quitter le territoire est expiré ou n'a pas été accordé ; (...) / Les sept derniers alinéas de l'article L. 561-1 sont applicables, sous réserve que la durée maximale de l'assignation ne puisse excéder une durée de quarante-cinq jours (...) ". Aux termes de l'avant-dernier alinéa de l'article L. 561-1 du même code, dans sa rédaction applicable au présent litige : " L'étranger astreint à résider dans les lieux qui lui sont fixés par l'autorité administrative doit se présenter périodiquement aux services de police ou aux unités de gendarmerie. Il doit également se présenter, lorsque l'autorité administrative le lui demande, aux autorités consulaires, en vue de la délivrance d'un document de voyage (...) ". L'article R. 561-2 de ce code dispose que : " L'autorité administrative détermine le périmètre dans lequel l'étranger assigné à résidence en application de l'article (...) L. 561-2 (...) est autorisé à circuler muni des documents justifiant de son identité et de sa situation administrative et au sein duquel est fixée sa résidence. Elle lui désigne le service auquel il doit se présenter, selon une fréquence qu'il fixe dans la limite d'une présentation par jour, en précisant si cette obligation s'applique les dimanches et les jours fériés ou chômés (...) ". Le deuxième alinéa de cet article prévoit également que, dans certains cas, l'autorité administrative peut " désigner à l'étranger une plage horaire pendant laquelle il doit demeurer dans les locaux où il est assigné à résidence, dans la limite de dix heures consécutives par vingt-quatre heures ".

4. D'une part, il est constant que M. B... faisait l'objet, à la date de l'arrêté en litige, d'une obligation de quitter le territoire français prise moins d'un an auparavant pour laquelle le délai pour quitter le territoire était expiré, et l'intéressé ne conteste pas qu'il ne pouvait quitter immédiatement le territoire français mais que son éloignement demeurait une perspective raisonnable. Le moyen tiré de ce que le préfet aurait admis l'existence d'un risque pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine et aurait ainsi entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation doit donc en tout état de cause être écarté.

5. D'autre part, il ressort des dispositions citées au point 3 qu'une mesure d'assignation à résidence prise en application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile consiste, pour l'autorité administrative qui la prononce, à déterminer un périmètre que l'étranger ne peut quitter et au sein duquel il est autorisé à circuler et, afin de s'assurer du respect de cette obligation, à lui imposer de se présenter, selon une périodicité déterminée, aux services de police ou aux unités de gendarmerie. Une telle mesure n'a pas, en dehors des hypothèses où elle inclut une astreinte à domicile pour une durée limitée, pour effet d'obliger celui qui en fait l'objet à demeurer à son domicile. Dès lors, les décisions par lesquelles le préfet assigne à résidence, sur le fondement de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les étrangers faisant l'objet d'une obligation de quitter le territoire français peuvent être prononcées à l'égard des étrangers qui ne disposent que d'une simple domiciliation postale. L'indication dans de telles décisions d'une adresse qui correspond uniquement à une domiciliation postale ne saurait imposer à l'intéressé de demeurer à cette adresse. Le moyen tiré par M. B... de ce que le préfet des Alpes-Maritimes ne pouvait légalement l'assigner à résidence à une adresse postale, alors que l'arrêté contesté ne comporte aucune astreinte à domicile doit, par suite, être écarté.

6. Enfin, contrairement à ce qui est soutenu, l'article R. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'impose pas au préfet de préciser que la période de quarante-cinq jours ne comprend aucun jour férié.

7. En dernier lieu, l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales stipule que : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou des traitements inhumains ou dégradants ".

8. Le moyen tiré de ce que le préfet, en raison des risques auxquels M. B... serait exposés en cas de retour dans son pays d'origine, aurait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui de ses conclusions dirigées contre l'arrêté l'assignant à résidence, qui n'a ni pour objet ni pour effet de l'éloigner à destination de son pays d'origine.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande. Ses conclusions tendant à l'application des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., à Me A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2019, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juin 2019.

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N° 18MA05054

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA05054
Date de la décision : 11/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-04-01 Étrangers. Séjour des étrangers. Restrictions apportées au séjour. Assignation à résidence.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : COHEN ; COHEN ; COHEN

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-11;18ma05054 ?
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