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11/06/2019 | FRANCE | N°18MA00321

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre, 11 juin 2019, 18MA00321


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et Mme F... B... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 27 août 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a établi une servitude de passage et d'aménagement destinée à assurer la continuité et la pérennité des voies de défense des forêts contre l'incendie et à établir ou entretenir les équipements de protection et de surveillance de ces forêts au profit du Syndicat mixte de défense et de valorisation forestière sur les communes de Vitrolles-en

-Luberon, Peypin-d'Aigues, La Bastide-des-Jourdans appartenant au massif Grand Luber...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... et Mme F... B... épouse A... ont demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 27 août 2015 par lequel le préfet de Vaucluse a établi une servitude de passage et d'aménagement destinée à assurer la continuité et la pérennité des voies de défense des forêts contre l'incendie et à établir ou entretenir les équipements de protection et de surveillance de ces forêts au profit du Syndicat mixte de défense et de valorisation forestière sur les communes de Vitrolles-en-Luberon, Peypin-d'Aigues, La Bastide-des-Jourdans appartenant au massif Grand Luberon Est.

Par un jugement n° 1503247 du 26 décembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 22 janvier 2018, le 14 mai 2018, le 20 juillet 2018 et le 14 août 2018, M. A... et Mme B... épouse A..., représentés par Me D..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nîmes du 26 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Vaucluse du 27 août 2015 ;

3°) de rejeter les conclusions du Syndicat mixte vauclusien de défense et de valorisation de la forêt ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement est irrégulier en ce que les premiers juges ont refusé de contrôler l'opportunité du tracé retenu ;

- le signataire de l'arrêté est incompétent ;

- l'arrêté est entaché d'un défaut de motivation ;

- la procédure est irrégulière, dès lors que la date du rapport d'enquête publique est fausse ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation en ce qui concerne l'opportunité du tracé ;

- l'emprise de la servitude présente un caractère disproportionné.

Par un mémoire en défense, enregistré le 5 avril 2019, le Syndicat mixte vauclusien de défense et de valorisation de la forêt, représenté par Me E..., demande à la Cour de rejeter la requête de M. A... et Mme B... épouse A... et de mettre à leur charge une somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable en ce qu'elle constitue la reproduction littérale du mémoire de première instance, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- les moyens soulevés par M. A... et Mme B... épouse A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 mars 2019, le ministre de l'agriculture et de l'alimentation conclut au rejet de la requête de M. A... et Mme B... épouse A....

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. A... et Mme B... épouse A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code forestier ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- et les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... et Mme B... épouse A... sont propriétaires de terrains sur le territoire des communes de Vitrolles-en-Luberon et la Bastide-des-Jourdans. Par arrêté du 27 août 2015, le préfet de Vaucluse a décidé d'établir au profit du Syndicat mixte de défense et de valorisation forestière une servitude de passage et d'aménagement notamment sur ces communes et sur des parcelles appartenant à M. A... et Mme B... épouse A... afin d'assurer la continuité et la pérennité des voies de défense des forêts contre l'incendie et à établir ou entretenir les équipements de protection et de surveillance de ces forêts. M. A... et Mme B... épouse A... font appel du jugement du 26 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Si M. A... et Mme B... épouse A... soutiennent que le tribunal aurait entaché son jugement d'irrégularité en refusant de contrôler l'opportunité du tracé retenu par le préfet, une telle erreur, à la supposer établie, relève du bien-fondé du jugement et est sans incidence sur sa régularité.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué est signé par M. H..., sous-préfet chargé de mission auprès du préfet de Vaucluse, auquel ce dernier, par arrêté du 21 août 2015 publié le même jour au recueil des actes administratifs, a donné délégation à l'effet de signer tous arrêtés, requêtes et mémoires présentés dans le cadre de recours contentieux, décisions et circulaires relevant des attributions de l'Etat dans le département de Vaucluse, sauf exceptions au nombre desquelles ne sont pas mentionnés les arrêtés établissant les servitudes de passage et d'aménagement destinées à assurer la continuité et la pérennité des voies de défense des forêts contre l'incendie et à établir ou entretenir les équipements de protection et de surveillance de ces forêts. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté critiqué doit être écarté.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, alors en vigueur : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ".

5. Si les dispositions précitées de la loi du 11 juillet 1979 imposent la motivation de certaines décisions individuelles, un arrêté grevant des parcelles de servitudes ne saurait être regardé comme une décision individuelle pour l'application de cette loi. Par suite, le moyen tiré de ce que l'arrêté en litige n'est pas motivé doit être en tout état de cause écarté comme inopérant.

6. En troisième lieu, la circonstance que le rapport d'enquête publique comporte une erreur de plume en ce qui concerne sa date est en elle-même sans incidence sur la légalité de l'arrêté en litige.

7. En quatrième lieu, l'article L. 134-1 du code forestier dispose que : " Pour créer des voies de défense des bois et forêts contre l'incendie, en assurer la continuité et la pérennité ainsi que pour établir et entretenir des équipements de protection et de surveillance des bois et forêts, une servitude de passage et d'aménagement est établie par l'Etat (...) au profit (...) d'une association syndicale. / Si la bande de roulement de ces voies excède 6 mètres ou si la surface au sol de ces équipements excède 500 mètres carrés, l'établissement de cette servitude est précédé d'une enquête publique (...). / En aucun cas, la servitude ne peut grever les terrains attenants à des maisons d'habitation, clos de murs ou de clôtures équivalentes selon les usages locaux. / (...) Le bénéficiaire de la servitude peut procéder à ses frais au débroussaillement des abords de la voie ou de l'équipement sur deux bandes latérales sans que le total des largeurs de ces bandes n'excède 100 mètres ".

8. L'opportunité du tracé ne saurait être utilement discutée devant le juge de l'excès de pouvoir. Il n'y a donc pas lieu d'apprécier les mérites respectifs du tracé retenu et de tracés alternatifs. A cet égard est notamment inopérante la circonstance que le Syndicat mixte de défense et de valorisation forestière aurait créé un chemin de lutte contre les incendies sur le chemin dit du Mont-Justin postérieurement à l'arrêté en litige. Il convient seulement d'examiner si le tracé retenu présente des inconvénients d'une importance telle qu'il retire à la servitude de passage et d'aménagement son caractère d'utilité publique.

9. Il ressort des pièces du dossier que la servitude en litige, qui porte sur la piste dite du Roumagnou, située à proximité d'une maison d'habitation appartenant aux requérants, prévoit notamment le droit pour le syndicat de créer et d'aménager l'infrastructure pour une plateforme de circulation de 6 à 10 mètres de largeur et des talus inhérents, et de procéder au débroussaillement des abords de la voie sur deux bandes latérales sans que le total des largeurs de ces bandes n'excède 100 mètres. Toutefois, l'emprise de cette servitude n'apparaît pas disproportionnée au regard de l'intérêt de l'accès au sud-est du massif du Luberon que nécessite le service de lutte contre les incendies, alors que la maison d'habitation appartenant aux requérants est distante de plus de 100 mètres de la piste. La circonstance que le rapport d'enquête publique aurait envisagé une largeur de débroussaillement limitée à 20 mètres de part et d'autre de la voie est sans incidence à cet égard. Par ailleurs, la circonstance que la servitude concernerait la piste parcourant les terrains des requérants sur une longueur de 5 kilomètres ne saurait en-elle-même retirer au projet son caractère d'utilité publique. Enfin, la circonstance que la piste pourrait être empruntée par des tiers, qui d'ailleurs ne résulte pas de l'établissement de la servitude en litige, est sans incidence sur son caractère d'utilité publique. Dans ces conditions, eu égard à l'atteinte très limitée à la propriété, et alors que les requérants ne font état d'aucun autre inconvénient, l'emprise de la servitude n'est pas excessive au regard de l'utilité qu'elle présente.

10. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner la fin de non-recevoir opposée par le Syndicat mixte vauclusien de défense et de valorisation de la forêt, que M. A... et Mme B... épouse A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté leur demande.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les conclusions présentées par M. A... et Mme B... épouse A..., partie perdante, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, doivent être rejetées. Il y a lieu, en revanche, de mettre à leur charge une somme de 2 000 euros à verser au Syndicat mixte vauclusien de défense et de valorisation de la forêt sur le fondement de cet article.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... et Mme B... épouse A... est rejetée.

Article 2 : M. A... et Mme B... épouse A... verseront au Syndicat mixte vauclusien de défense et de valorisation de la forêt une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et Mme F... B... épouse A..., au ministre de l'agriculture et de l'alimentation et au Syndicat mixte vauclusien de défense et de valorisation de la forêt.

Copie en sera adressée au préfet de Vaucluse.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2019, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme G..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juin 2019.

4

N° 18MA00321

nc


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18MA00321
Date de la décision : 11/06/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-04-01-01-05 Droits civils et individuels. Droit de propriété. Servitudes. Institution des servitudes.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Florence MASTRANTUONO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : URBAN CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-06-11;18ma00321 ?
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