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20/05/2019 | FRANCE | N°17MA03352

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 20 mai 2019, 17MA03352


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté pris par le préfet des Bouches-du-Rhône le 29 avril 2016, portant refus de délivrance d'un certificat de résidence assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination et prononciation d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1610224 du 5 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille a

rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enre...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté pris par le préfet des Bouches-du-Rhône le 29 avril 2016, portant refus de délivrance d'un certificat de résidence assorti d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et fixation du pays de destination et prononciation d'une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans.

Par un jugement n° 1610224 du 5 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté la demande de M.A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 juillet 2017, et par un mémoire ampliatif du 21 novembre 2017, M.A..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Marseille du 5 avril 2017 ;

2°) d'annuler les décisions prises par l'arrêté préfectoral du 29 avril 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône, de lui délivrer un titre de séjour portant mention " vie privée et familiale " d'un an dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour autorisant à travailler dès la notification de l'arrêt à intervenir et de réexaminer sa situation dans un délai de deux mois à compter de la décision ;

5°) de mettre à la charge du préfet des Bouches-du-Rhône une somme de 1 800 euros au titre des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la régularité du jugement attaqué :

- le tribunal administratif de Marseille a entaché son jugement d'une omission à statuer sur le moyen tiré de l'erreur sur la qualification juridique des faits de l'interdiction de retour sur le territoire français ;

- il a également omis de mentionner les pièces complémentaires du mémoire en réplique communiqué le 7 février 2017, soit avant la clôture de l'instruction.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

- le préfet des Bouches-du-Rhône a entaché son arrêté d'un défaut de motivation en fait ;

- l'arrêté a été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien, dès lors qu'il réside en France de manière continue depuis 2006 ;

- les juges de première instance ont commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de reconnaître sa présence pour les années 2006 et 2007.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision attaquée doit être annulée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour.

Sur la décision portant interdiction de retour de deux ans :

- la décision en litige doit être annulée par la voie de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français ;

- la décision est insuffisamment motivée ;

- la décision repose sur un défaut d'examen de sa situation ;

-la décision est entachée d'une méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-1, III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il bénéficie d'une insertion socioprofessionnelle, et que la menace à l'ordre public ne saurait être caractérisée pour une infraction commise en 2010 ;

- la durée de l'interdiction de retour est excessive ;

- le préfet des Bouches-du-Rhône a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision repose sur une erreur dans la qualification juridique des faits ;

- le préfet des Bouches-du-Rhône a fondé sa décision sur des motifs erronés en droit et en fait.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 juin 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la demande.

Il fait valoir que postérieurement à l'enregistrement de la requête, M. A...a été interpellé le 24 juillet 2017 par les services de police dans le cadre d'un flagrant délit puis placé en garde à vue.

M. A...a été admis à l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 juin 2017 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Marseille.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Pecchioli, rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., de nationalité algérienne, né le 3 novembre 1983, demande l'annulation du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa requête contre l'arrêté du préfet du département des Bouches-du-Rhône du 29 avril 2016 qui lui a refusé un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours, a prononcé une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans et a fixé le pays de destination.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Il ressort des pièces du dossier que M. A...a présenté un mémoire complémentaire le 7 février 2017, soulevant le moyen tiré d'une erreur sur la qualification juridique des faits de l'interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de deux ans. En omettant de statuer sur ce moyen, le tribunal administratif a entaché le jugement attaqué d'irrégularité. Par suite, et sans qu'il y ait lieu d'examiner l'autre moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué en date du 5 avril 2017, le jugement attaqué doit être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Marseille.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

4. En premier lieu, la décision en litige expose la situation personnelle et familiale de M. A...en rappelant les conditions de son entrée et de son séjour en France, les décisions des juridictions administratives statuant sur les refus qui lui ont été opposés, et précise les attaches familiales dont il dispose. Il mentionne en particulier que ses parents et son frère ont fait l'objet d'un refus d'admission au séjour et qu'il ne justifie pas d'un domicile personnel. Ainsi, l'arrêté en litige comporte l'énoncé des considérations de fait qui en constituent le fondement. Par suite, et alors même que ces motifs ne reprennent pas l'intégralité des éléments caractérisant la situation personnelle de l'intéressé, le moyen tiré de ce que l'arrêté serait entaché d'un défaut de motivation doit être écarté.

5. En second lieu, aux termes de l'article 6-1 de l'accord franco-algérien : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention "vie privée et familiale" est délivré de plein droit : 1°) Au ressortissant algérien qui justifie par tout moyen résider en France depuis plus de dix ans ou plus de quinze ans si, au cours de cette période, il a séjourné en qualité d'étudiant (...) ".

6. M. A...a fait l'objet de quatre obligations de quitter le territoire français, outre celle dont il fait appel. Le préfet des Bouches-du-Rhône a, en effet, pris à son encontre des arrêtés portant refus de délivrance d'un titre de séjour assortis d'une obligation de quitter le territoire français respectivement le 29 septembre 2009, le 22 septembre 2011 et le 29 novembre 2013 ainsi qu'une obligation de quitter le territoire français le 10 juin 2010 suite à son interpellation. Toutes ces décisions sont définitives, ayant été notamment confirmées par le tribunal administratif de Marseille et, en ce qui concerne l'arrêté du 22 septembre 2011, par la cour administrative de Marseille. Le jugement rendu le 3 juillet 2014 par le tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 29 novembre 2013, objet d'un troisième refus de titre, avait notamment relevé que l'intéressé n'établissait toujours pas la réalité de sa présence habituelle en France pour les années 2004, 2005, 2006, 2007, 2009, et 2013. Par ailleurs, par deux fois les 25 juin et 24 juillet 2010, M. A...a refusé d'embarquer et donc d'exécuter les décisions portant obligation de quitter le territoire prises à son encontre. Il a été condamné, par suite, le 8 septembre 2010 à une peine de quatre mois d'emprisonnement avec sursis. Le requérant qui s'est manifesté pour la première fois en préfecture le 7 septembre 2004 est entrée en Grèce le 13 août 2004 sous couvert d'un passeport revêtu d'un visa touristique de trente jours. Il ne justifie pas non plus de la date de sa dernière entrée en France, n'ayant pas produit l'intégralité de son passeport pour la période en cause, à l'exception des années 2013 - 2014. Dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces produites, que M. A...aurait résidé de manière habituelle en France depuis l'année 2006, dès lors que les attestations et pièces produites ne sont pas suffisamment probantes pour établir sa présence effective pendant toute la période. Il s'ensuit qu'en refusant de lui délivrer un titre de séjour, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu les stipulations précitées du 1° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. L'illégalité du refus de titre de séjour opposée à M. A...n'étant pas établie, l'exception d'illégalité dudit refus, soulevée à l'appui des conclusions d'annulations dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français, ne peut qu'être écartée.

Sur la décision portant interdiction de retour de deux ans :

8. En premier lieu, et ainsi qu'il a été dit précédemment, la décision portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français n'est pas entachée d'illégalité. Dès lors, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée par l'intéressé à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français ne peut être qu'écartée.

9. En deuxième lieu, Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...). ".

10. Il résulte de ces dispositions que, lorsque le préfet prend, à l'encontre d'un étranger, une décision portant obligation de quitter le territoire français ne comportant aucun délai de départ, ou lorsque l'étranger n'a pas respecté le délai qui lui était imparti pour satisfaire à cette obligation, il appartient au préfet d'assortir sa décision d'une interdiction de retour sur le territoire français, sauf dans le cas où des circonstances humanitaires y feraient obstacle. Seule la durée de cette interdiction de retour doit être appréciée au regard des quatre critères énumérés au III de l'article L. 511-1, à savoir la durée de la présence de l'étranger sur le territoire français, la nature et l'ancienneté de ses liens avec la France, l'existence ou non d'une précédente mesure d'éloignement et, le cas échéant, la menace pour l'ordre public que constitue sa présence sur le territoire.

11. Il ressort des pièces du dossier que, pour prononcer une interdiction de retour d'une durée de deux ans à l'encontre de M.A..., le préfet des Bouches-du-Rhône a retenu, en l'absence de circonstances humanitaires, que l'intéressé, déclarant être entrée en France en 2004, ne démontrait pas y avoir résidé habituellement depuis cette date, qu'il était célibataire et sans enfant. De surcroît et comme mentionné au point 6, M. A...a déjà fait l'objet de refus de séjour avec obligation de quitter le territoire français. C'est au terme de sa quatrième obligation de quitter le territoire français que M. A...a été visé d'une interdiction de retour sur le territoire français. Compte tenu de ces éléments, le préfet des Bouches du Rhône, qui a suffisamment motivé sa décision, n'a pas méconnu les dispositions précitées.

12. En troisième et dernier lieu, eu égard à la situation d'ensemble de M. A...telle que décrite ci-dessus, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a ni commis d'erreur dans la qualification juridique des faits, ni fondé sa décision sur des motifs erronés en droit et en fait, ni commis d'erreur manifeste d'appréciation en prononçant une interdiction de retour pour la durée de deux années, laquelle n'est pas, au demeurant, d'une durée excessive.

Sur les conclusions à fin d'injonction sous astreinte :

13. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions tendant à l'annulation de la décision litigieuse, n'implique aucune mesure particulière d'exécution. Par suite, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. A...ne peuvent être accueillies.

Sur les frais de l'instance :

14. Il résulte des dispositions combinées de l'article 37 de la loi du

10 juillet 1991 relative à l'aide juridique et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative que l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle peut demander au juge de condamner la partie perdante à lui verser la somme correspondant à celle qu'il aurait réclamée à son client, si ce dernier n'avait pas eu l'aide juridictionnelle, à charge pour l'avocat qui poursuit, en cas de condamnation, le recouvrement de la somme qui lui a été allouée par le juge, de renoncer à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d' aide juridictionnelle qui lui a été confiée.

15. Les dispositions précitées font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance soit condamné à verser une quelconque somme à l'avocat de M.A..., au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1610224 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 5 avril 2017 est annulé.

Article 2 : La requête de M. A... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... A..., à Me C...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 29 avril 2019, où siégeaient :

- M. Bocquet, président,

- M. Marcovici, président assesseur,

- M. Pecchioli, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 mai 2019.

2

N° 17MA03352


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03352
Date de la décision : 20/05/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: M. Jean-Laurent PECCHIOLI
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : PEROLLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 04/06/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-05-20;17ma03352 ?
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