Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille, d'une part, d'annuler la décision du 26 février 2015 par laquelle le directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de Marseille Provence (CCIMP) l'a informé de la proposition de rattachement de son poste à l'emploi de responsable d'activité et la décision du 24 juillet 2015 par laquelle le président par intérim de la chambre de commerce et d'industrie de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (CCIR PACA) a rejeté son recours gracieux du 1er juillet 2015, d'autre part, de condamner la CCIMP et la CCIR PACA à lui verser la somme de 200 000 euros au titre des préjudices résultant de la classification illégale de son poste et de faits constitutifs de harcèlement moral.
Par un jugement n° 1507794 du 28 avril 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et un mémoire, enregistrés le 3 juillet 2017 et le 28 février 2019, M. B..., représenté par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 ;
2°) d'annuler la décision du 26 février 2015 par laquelle le directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de Marseille Provence (CCIMP) l'a informé de la proposition de rattachement de son poste à l'emploi de responsable d'activité et la décision du 24 juillet 2015 par laquelle le président par intérim de la chambre de commerce et d'industrie de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (CCIR PACA) a rejeté son recours gracieux du 1er juillet 2015 ;
3°) de condamner la CCIMP et la CCIR PACA à lui verser la somme totale de 120 000 euros au titre des préjudices résultant de la classification illégale de son poste et de faits constitutifs de harcèlement moral ;
4°) de condamner la CCIMP à lui verser la somme de 92 592,23 euros à titre de provision au titre du rappel de rémunération et accessoires dus entre 2006 et 2016 ;
5°) d'ordonner une mesure d'expertise afin de reconstituer sa carrière ;
6°) d'enjoindre à la CCIMP de procéder à l'établissement de nouveaux bulletins de salaires et de le réintégrer au poste d'expert (classification 8) sur la base des avantages statutaires y référant avec une augmentation calculée sur la moyenne des augmentations réalisées entre 2008 et février 2019 ;
7°) de mettre à la charge de la CCIMP la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
* la requête a été enregistrée dans le délai d'appel ;
* la décision du 24 juillet 2015 est insuffisamment motivée ;
* il aurait dû bénéficier d'un reclassement dans l'emploi d'expert ;
* ce reclassement erroné constitue une sanction disciplinaire déguisée ;
* il a fait l'objet d'agissements constitutifs de harcèlement moral ;
* son employeur n'a pas respecté l'engagement contractuel prévoyant l'augmentation régulière de son salaire ;
* le préjudice résultant du harcèlement moral doit être réparé à hauteur de 90 000 euros ;
* le préjudice moral résultant de la sanction disciplinaire déguisée doit être réparé à hauteur de 30 000 euros ;
* il a subi un préjudice financier dont l'étendue doit être déterminée à dire d'expert.
Par des mémoires en défense, enregistrés le 17 janvier 2019 et le 7 mars 2019, la CCIMP et la CCIR PACA, représentées par Me D..., concluent au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 3 000 euros soit mise à la charge de M. B... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elles soutiennent que :
* la requête, qui est tardive, est irrecevable ;
* les moyens soulevés par M. B... ne sont pas fondés.
Par ordonnance du 8 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 janvier 2019 à 12 heures.
Par ordonnance du 30 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été reportée au 28 février 2019 à 12 heures.
Par ordonnance du 28 février 2019, la clôture de l'instruction a été reportée au 7 mars 2019 à 12 heures.
Un mémoire présenté pour la CCIMP et la CCIR PACA, a été enregistré le 7 mars 2019 à 12h41.
Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions indemnitaires de M. B... fondées sur le non-respect par la CCIMP de ses engagements contractuels, lesquelles n'ont pas été présentées dans un délai raisonnable.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
* le code de commerce ;
* la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 ;
* l'arrêté du 25 juillet 1997 relatif au statut du personnel de l'assemblée des chambres françaises de commerce et d'industrie, des chambres régionales de commerce et d'industrie, des chambres de commerce et d'industrie et des groupements consulaires ;
* le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
* le rapport de M. d'Izarn de Villefort,
* les conclusions de M. Coutel, rapporteur public,
* les observations de Me A..., substituant Me F..., représentant M. B...,
* et les observations de Me E..., substituant Me D..., représentant la CCIMP et la CCIR PACA.
Considérant ce qui suit :
1. Par décision du 28 octobre 1992, M. B... a été recruté par la chambre de commerce et d'industrie de Marseille Provence (CCIMP) en qualité de cadre contractuel pour occuper les fonctions d'ingénieur à temps partiel au sein de l'école supérieure d'ingénieurs de Marseille.
Par décision du 28 juillet 1999, il a été nommé ingénieur enseignant chercheur avant d'être affecté, à compter du 1er octobre 2004 à la direction de l'innovation et du développement de la chambre en qualité de responsable des formations du Centre innovation management euroméditerranéen. Par décision du 31 décembre 2007, il a été titularisé à compter du 1er janvier 2008 avec l'attribution d'un indice d'expérience de 55 et d'un indice transitoire de 1 077,36 calculé en fonction de la rémunération annuelle brute alors perçue de 66 735,87 euros. Par décision du 19 décembre 2008, il a été fait application à M. B..., à compter du 1er janvier 2009, de la nouvelle classification des emplois en qualifiant le sien de responsable de professionnalisation, niveau 7, échelon B, ouvrant droit à une rémunération, d'un montant identique à celui qu'il percevait auparavant, résultant de l'indice de qualification 530, de l'indice de résultat 547,36 et de l'indice d'expérience 60. À la suite de la suppression de son poste décidée le 24 février 2012, il a été reclassé en qualité de conseiller expert en développement durable à compter du 1er juillet 2012, rattaché à l'emploi d'expert conseil, niveau 7, échelon B, indice 530. Par une décision du directeur général de la CCIMP du 4 juin 2015, confirmée par une décision du président par intérim de la chambre de commerce et d'industrie de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (CCIR PACA) du 24 juillet 2015, prise pour la mise en oeuvre de la classification des emplois applicable à compter du 1er septembre 2015, M. B... a été reclassé sur l'emploi de responsable d'activité, niveau 7, indice de qualification 530, indice de résultat 552,36, indice d'expérience 90. Il fait appel du jugement du 28 avril 2017 par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces actes du 26 février 2015 et du 24 juillet 2015 et à la condamnation de la CCIMP et la CCIR PACA à lui verser la somme de 200 000 euros au titre des préjudices résultant de la classification illégale de son poste et de faits constitutifs de harcèlement moral.
Sur la fin de non-recevoir opposée par la CCIMP et la CCIR PACA :
2. Aux termes de l'article R. 811-2 du code de justice administrative : " Sauf dispositions contraires, le délai d'appel est de deux mois. Il court contre toute partie à l'instance à compter du jour où la notification a été faite à cette partie dans les conditions prévues aux articles R. 751-3 et R. 751-4-1 (...) ".
3. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a reçu notification du jugement attaqué le 3 mai 2017. Sa requête a été enregistrée au greffe de la cour administrative d'appel le 3 juillet 2017, soit dans le délai imparti par les dispositions précitées. Par suite, la fin de non-recevoir opposée par la CCIMP et la CCIR PACA tirée de la tardiveté de la requête ne peut être accueillie.
Sur la recevabilité de la demande de première instance :
4. En premier lieu, par décision du 22 septembre 2014, publiée au journal officiel le 7 novembre 2014, la Commission paritaire nationale (CPN) des chambres de commerce et d'industrie instituée par la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952 relative à l'établissement obligatoire d'un statut du personnel administratif des chambres d'agriculture, des chambres de commerce et des chambres de métiers a notamment annexé à ce statut un accord méthodologique d'expérimentation et de mise en oeuvre de la classification nationale des emplois. Par lettre du 26 février 2015, préalablement aux réunions de la CPN et de la Commission paritaire régionale (CPR) amenées à statuer dans le cadre du rattachement des postes occupés par les agents employés par les chambres de commerce aux emplois nationaux ainsi classés, le directeur général de la CCIMP a transmis à M. B... une proposition de rattachement de son poste de conseiller expert en développement durable à l'emploi de responsable d'activité figurant sur la grille nationale. Ainsi que l'ont soutenu en première instance la CCIMP et la CCIR PACA, cette lettre du 26 février 2015 constitue un acte préparatoire qui, ne faisant pas grief, ne peut être attaqué par la voie du recours pour excès de pouvoir. Par suite, les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de cet acte ne sont pas recevables.
5. En deuxième lieu, d'une part, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance. Cette règle, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance.
6. D'autre part, l'expiration du délai permettant d'introduire un recours en annulation contre une décision expresse dont l'objet est purement pécuniaire fait obstacle à ce que soient présentées des conclusions indemnitaires ayant la même portée.
7. Il résulte de l'instruction que M. B..., alors employé à temps partiel par la CCIMP sous contrat à durée déterminée, en qualité d'ingénieur enseignant chercheur, a accepté l'élargissement de ses missions, dans le cadre d'un nouveau contrat à durée indéterminée à plein temps, pour contribuer au développement des offres de formations proposées par les établissements du groupe ESIM (École supérieure d'ingénieurs de Marseille) alors rattachés à la CCIMP. Les modalités de son action, précisées par des objectifs chiffrés, ont été définies dans une " note d'opportunité " datée du 14 mai 2001, présentée à la direction du Groupe ESIM et au directeur général de la CCIMP. Ce document prévoyait également que la rémunération de M. B... serait augmentée de 10% par an pendant trois ans sous condition d'atteindre les objectifs fixés. L'intéressé a bénéficié d'une première augmentation de 10% accordée par une décision du 22 juin 2004. Il a alors été placé en arrêt de travail du 18 mai 2004 au 15 janvier 2006. Il s'est vu opposer formellement, le 28 juin 2007, un refus de son employeur de lui octroyer la deuxième tranche d'augmentation de salaire qu'il sollicitait au titre de l'année 2006 au motif que le principe même d'une telle augmentation serait incompatible avec les pratiques en vigueur au sein de la CCIMP.
Il a pris connaissance de cette décision au plus tard le 18 juillet 2007, date à laquelle il l'a contestée devant la direction de la CCIMP. Il n'a cependant exercé aucun recours juridictionnel à son encontre. Ainsi, il résulte de ce qui a été dit aux points 12 et 13 que cette décision, qui a un objet exclusivement pécuniaire, était devenue définitive. Par suite, les conclusions indemnitaires de M. B... présentées devant le tribunal administratif de Marseille le 29 septembre 2015, qui sont fondées sur le refus qui lui a été opposé par la CCIMP de donner suite aux engagements rappelés par la " note d'opportunité " datée du 14 mai 2001, formalisé pour la première fois dans cette décision du 28 juin 2007, ne sont pas recevables et ne peuvent qu'être rejetées.
8. En troisième lieu, la CCIMP et la CCIR PACA n'établissent pas à quelle date la décision attaquée du 24 juillet 2015 a été notifiée à M. B.... Dès lors, le délai de recours n'ayant pas couru, elles ne sont pas fondées à soutenir que la demande de M. B... tendant à l'annulation de cette décision, enregistrée au greffe du tribunal administratif le 26 septembre 2015, serait tardive et, par suite, irrecevable.
9. En quatrième lieu, aucune fin de non-recevoir tirée du défaut de décision préalable ne peut être opposée à un requérant ayant introduit devant le juge administratif un contentieux indemnitaire à une date où il n'avait présenté aucune demande en ce sens devant l'administration lorsqu'il a formé, postérieurement à l'introduction de son recours juridictionnel, une demande auprès de l'administration sur laquelle le silence gardé par celle-ci a fait naître une décision implicite de rejet avant que le juge de première instance ne statue et ce, quelles que soient les conclusions du mémoire en défense de l'administration. En revanche, une telle fin de non-recevoir peut être opposée lorsque, à la date à laquelle le juge statue, le requérant s'est borné à l'informer qu'il avait saisi l'administration d'une demande mais qu'aucune décision de l'administration, ni explicite ni implicite, n'était encore née.
10. Par lettres du 22 août 2016, reçues par la CCIMP et la CCIR PACA le 24 août suivant, M. B... a demandé à celles-ci réparation du préjudice résultant notamment de faits constitutifs de harcèlement moral. A la date du 28 avril 2017 à laquelle le tribunal administratif de Marseille a statué sur les conclusions indemnitaires présentées par M. B..., deux décisions implicites de rejet étaient nées du silence gardé pendant plus de deux mois sur ces demandes. Il suit de là que, contrairement à ce qu'ont soutenu en première instance la CCIMP et la CCIR PACA, ces conclusions indemnitaires sont recevables.
Sur les conclusions à fin d'annulation :
11. Aux termes de l'article 14 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie approuvé par arrêté interministériel du 25 juillet 1997 : " Le classement des emplois est déterminé au moyen du système de classification nationale des emplois établi par la Commission Paritaire Nationale. / Ce système de classification nationale est obligatoire (...) ".
12. L'article 3 de l'accord mentionné au point 4 prévoit que sont classés
au niveau VII " les emplois se caractérisant par la conduite d'un ensemble de
missions, de projets et/ou d'équipes soutenant un objectif général ou une politique
de la compagnie consulaire. Les décisions et actions sont déterminantes sur l'entité d'appartenance et influencent de manière significative les résultats d'autres entités.
Leurs effets sur la compagnie consulaire peuvent se mesurer à moyen terme ".
Sont classés par ailleurs au niveau VIII " les emplois se caractérisant par la direction d'une ou plusieurs entités principales de la compagnie consulaire et/ou par un apport d'expertise déterminant pour sa stratégie. Les décisions et actions sont liées aux politiques de la compagnie consulaire et peuvent se mesurer à long terme ".
13. Il ressort des pièces du dossier que si l'emploi de responsable d'activité implique pour celui qui l'occupe " la rédaction de notes pour les élus et les outils d'aide à la décision, à partir d'une expertise approfondie et d'une connaissance du réseau ", il se caractérise pour une part importante par " le pilotage et la bonne exécution d'activités ou de projets, en s'appuyant sur une équipe de collaborateurs, ainsi qu'éventuellement sur des ressources externes pour mener à bien des missions ", par " la maîtrise d'oeuvre de projets d'envergure, avec des budgets importants et des interlocuteurs multiples " ainsi que l'animation de " plusieurs équipes de cadres internes et/ou externes au réseau intervenant sur ces projets " et la communication sur les résultats. De même, le titulaire d'un tel emploi doit justifier de " connaissances générales " et d'une " expérience dépassant le cadre d'un domaine de spécialisation pour défendre des sujets " sans que soit requis un niveau d'expertise et doit " savoir former des équipes et participer au développement des compétences individuelles et collectives des collaborateurs ".
14. Les fonctions de conseiller expert en développement durable occupées par M. B... ont fait l'objet d'une fiche de poste élaborée le 6 octobre 2014. Ce document mentionne qu'une expérience significative en matière de management de projets est requise de la part du titulaire du poste. Cependant, s'il incombe à ce dernier d'apporter à la direction de la chambre et aux entreprises une information de haut niveau dans son domaine de compétence et de contribuer, par son expertise, aux projets ou actions engagés par les autres services de la chambre, il n'est pas lui-même responsable d'une activité précise ou de tels projets et actions. En outre, aucun élément de cette fiche ou du dossier ne révèle que l'intéressé aurait pour mission d'encadrer une équipe de collaborateurs. Dans ces conditions, M. B... est fondé à soutenir que la décision du 24 juillet 2015, prise sur le fondement de l'article 6 de l'accord mentionné au point 4, par laquelle son poste a été rattaché à l'emploi de responsable d'activité est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation. Cette décision doit dès lors être annulée, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens soulevés par M. B....
Sur les conclusions indemnitaires :
15. Il appartient à un agent public qui soutient avoir été victime d'agissements constitutifs de harcèlement moral, de soumettre au juge des éléments de fait susceptibles de faire présumer l'existence d'un tel harcèlement. Il incombe à l'administration de produire, en sens contraire, une argumentation de nature à démontrer que les agissements en cause sont justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. La conviction du juge, à qui il revient d'apprécier si les agissements de harcèlement sont ou non établis, se détermine au vu de ces échanges contradictoires, qu'il peut compléter, en cas de doute, en ordonnant toute mesure d'instruction utile.
16. Si M. B... fait valoir que la CCIMP n'a pas respecté les engagements rappelés par la " note d'opportunité " datée du 14 mai 2001 et que ses demandes répétées ont provoqué une hostilité à son égard de la direction, la CCIMP a justifié sa position sur ce point par le niveau de rémunération déjà atteint par le requérant par rapport à celle qui était versée au personnel occupant des responsabilités supérieures, le montant de la rémunération versée au requérant après sa titularisation étant d'ailleurs fixé par application des dispositions prévues par le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie.
17. M. B... ajoute, que, contrairement à ses collègues, il n'a pas été mis à disposition de l'École centrale de Marseille lorsqu'il a été mis fin en 2010 au partenariat entre cet établissement et la CCIMP, qu'il a été dénigré, la qualité du mastère dont il était responsable ainsi que ses propres compétences professionnelles ayant été remises en cause, qu'il a fait l'objet d'une procédure de licenciement pour suppression de poste et que ses conditions de travail se sont dégradées. La matérialité de ces faits résulte notamment des attestations concordantes qu'il a produites. Ainsi qu'il a été exposé au point 1, si, à la suite de la suppression de son poste décidée le 24 février 2012, il a été reclassé en qualité de conseiller expert en développement durable à compter du 1er juillet 2012, les attributions lui restant jusqu'à son reclassement ne permettaient pas de l'occuper à plein temps. Le bureau qui lui avait été attribué se trouvait le seul occupé à un étage. A la date du 11 novembre 2013, alors que ses fonctions étaient celles de conseiller expert en développement durable, il était encore en attente de connaître les choix et les priorités de la direction en la matière. Il a été placé en arrêt de travail à compter du 6 décembre 2013 et n'a pas repris le travail depuis. Il est atteint d'une dépression sévère ayant justifié deux longs séjours en milieu spécialisé. Une pension d'invalidité de catégorie 2 lui a été attribuée à compter du 5 décembre 2016. Ces éléments de fait sont susceptibles de faire présumer l'existence d'un harcèlement moral. La CCIMP et la CCIR PACA n'apportent aucune argumentation de nature à démontrer que ces agissements seraient justifiés par des considérations étrangères à tout harcèlement. Ainsi, M. B... est fondé à soutenir qu'il a subi des agissements constitutifs de harcèlement moral qui engagent la responsabilité de la CCIMP et de la CCIR PACA à son égard.
18. Le préjudice moral subi par M. B... résultant de ces faits doit être indemnisé à hauteur de 5 000 euros.
19. Il résulte de ce qui précède que, sans qu'il soit besoin d'ordonner une mesure d'expertise, M. B... est seulement fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté ses conclusions tendant à l'annulation de la décision du 24 juillet 2015 et ses conclusions indemnitaires.
Sur les conclusions tendant au versement d'une provision :
20. Il résulte du motif énoncé au point 7 que M. B... n'est pas recevable à rechercher la responsabilité de la CCIMP et de la CCIR PACA à raison du non-respect d'engagements contractuels. Par suite, ses conclusions tendant à la condamnation de celles-ci à lui verser une provision à valoir sur la réparation du préjudice résultant de cette faute ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
21. Le présent arrêt n'implique pas pour la CCIMP de procéder à l'établissement de nouveaux bulletins de salaires et de réintégrer M. B... au poste d'expert (classification 8) sur la base des avantages statutaires y référant avec une augmentation calculée sur la moyenne des augmentations réalisées entre 2008 et février 2019. Ainsi, les conclusions tendant à ce que soit adressée à la CCIMP une injonction en ce sens ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les frais liés au litige :
22. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que la CCIMP et la CCIR PACA demandent au titre des frais exposés par elles et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la CCIMP et de la CCIR PACA une somme globale de 2 000 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1er : L'article 1er du jugement du tribunal administratif de Marseille du 28 avril 2017 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions de M. B... tendant à l'annulation de la décision du 24 juillet 2015 et ses conclusions indemnitaires.
Article 2 : La décision du président par intérim de la CCIR PACA du 24 juillet 2015 est annulée.
Article 3 : La CCIMP et la CCIR PACA sont condamnées à verser à M. B... la somme de 5 000 euros.
Article 4 : La CCIMP et la CCIR PACA verseront à M. B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... et les conclusions présentées par la CCIMP et de la CCIR PACA tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.
Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B..., à la chambre de commerce et d'industrie de Marseille Provence et à la chambre de commerce et d'industrie de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.
Délibéré après l'audience du 2 avril 2019, où siégeaient :
* M. Gonzales, président,
* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,
* M. Jorda, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 23 avril 2019.
N° 17MA02834 3