Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... B...a demandé au tribunal administratif de Nîmes :
- d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2017 par lequel le directeur général de l'office public de l'habitat (OPH) du Grand Avignon Résidences lui a infligé un blâme ;
- d'enjoindre à l'autorité compétente de retirer deux courriers du comité hygiène et sécurité datés du 22 juillet 2016 de son dossier administratif ;
- et de condamner l'office public Grand Avignon Résidences à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis des faits de harcèlement moral et de discrimination syndicale.
Par un jugement n° 1700661 du 2 mars 2018, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 2 mai 2018, et par des mémoires complémentaires, enregistrés les 16 août 2018 et 21 septembre 2018, Mme B..., représentée par la SCP Penard-Oosterlynck-C..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du 2 mars 2018 du magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes ;
2°) d'annuler l'arrêté du 5 janvier 2017 par lequel le directeur général de l'office public de l'habitat (OPH) du Grand Avignon Résidences lui a infligé un blâme ;
3°) d'enjoindre à l'autorité compétente de retirer deux courriers du comité hygiène et sécurité datés du 22 juillet 2016 de son dossier administratif, sous astreinte de 50 euros par jour de retard à compter de la notification du présent arrêt ;
4°) de mettre à la charge de l'office public de l'habitat du Grand Avignon Résidences la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- sa requête est recevable.
Sur l'arrêté du 5 janvier 2017 lui infligeant un blâme :
- la matérialité des faits reprochés n'est pas établie ;
- ces faits, qui se sont déroulés en dehors du service, ne pouvaient faire l'objet d'une sanction dès lors qu'elle intervenait lors de la réunion litigieuse en sa seule qualité de déléguée syndicale ;
- elle constitue une sanction disciplinaire déguisée ;
- cette sanction est disproportionnée ;
- elle est la preuve de l'acharnement et de la discrimination syndicale dont elle est victime.
Sur sa demande de retrait de deux documents :
- les deux courriers qu'elle a adressés en sa qualité de secrétaire du CHSCT ne devaient pas figurer dans son dossier administratif en application de l'article 18 de la loi du 13 juillet 1983 ;
- ils portent atteinte à la liberté syndicale ;
- elle a demandé ce retrait dans son recours gracieux du 20 janvier 2017.
Sur la discrimination syndicale et le harcèlement moral dont elle a été victime :
- l'administration a méconnu l'article 11 de la loi du 13 juillet 1983 qui imposait de lui accorder la protection fonctionnelle.
Par des mémoires en défense, enregistrés les 25 juillet 2018 et 4 septembre 2018, l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences, représenté par la Selarl d'avocats Strat, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de la requérante une somme de 3 000 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- à titre principal, la requête d'appel de Mme B..., qui contient des conclusions sans connexité entre elles en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative et qui n'est pas signée en méconnaissance de l'article R. 431-4 de ce code, est irrecevable ;
- à titre subsidiaire, les faits reprochés sont matériellement établis ;
- ils sont de nature à justifier la sanction du blâme ;
- la présence de ces courriers ne témoigne pas d'une appréciation sur sa manière d'exercer ses activités syndicales ;
- elle n'établit pas subir une discrimination syndicale ou un harcèlement moral.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;
- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires à la fonction publique territoriale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Carassic,
- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,
- et les observations de Me C... représentant Mme B...et Me A... représentant l'office public de l'habitat d'Avignon.
Considérant ce qui suit :
1. Mme B..., rédacteur territorial en poste à l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences, exerce une activité syndicale et bénéficie d'une décharge d'activité de 70 %. Par l'arrêté en litige du 5 janvier 2017, le directeur général de l'office public de l'habitat a prononcé à son encontre la sanction disciplinaire du blâme. Estimant que cette décision révélait des actes de discrimination et de harcèlement moral de la part de sa hiérarchie en raison de son appartenance syndicale, elle a demandé au tribunal administratif de Nîmes l'annulation de cette décision, d'enjoindre à l'autorité compétente de retirer deux courriers du comité hygiène et sécurité datés du 22 juillet 2016 de son dossier administratif et de condamner l'office public Grand Avignon Résidences à réparer les préjudices qu'elle estime avoir subis des faits de harcèlement moral et de discrimination syndicale. Par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande. En appel, la requérante demande l'annulation de l'arrêté du 5 janvier 2017 et d'enjoindre à l'autorité compétente de retirer deux pièces de son dossier administratif.
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
En ce qui concerne la décision du 5 janvier 2017 lui infligeant un blâme :
2. L'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 prévoit que toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale. L'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 dispose que : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes : Premier groupe : l'avertissement ; le blâme(...)". Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.
3. Pour prononcer à l'encontre de Mme B... la sanction disciplinaire en litige, le directeur général de l'office public de l'habitat s'est fondé sur le motif tiré du comportement agressif de la requérante, qui excède les limites de la défense des intérêts du personnel, envers la directrice des ressources humaines, lors d'une réunion le 15 novembre 2016 en présence des délégués syndicaux, en méconnaissance de son devoir de réserve et de son obligation d'obéissance hiérarchique.
4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la lettre du 7 décembre 2016 du directeur général de l'office, présent lors de cette réunion du 15 novembre 2016, informant la requérante qu'il envisageait de prendre à son encontre la sanction disciplinaire du blâme, ainsi que d'une attestation circonstanciée d'un agent de l'office ayant assisté à cette réunion, qui même rédigée après les faits est revêtue de force probante, que la requérante a interrompu brutalement la réponse de la directrice des ressources humaines à ses questions, qu'elle a hurlé à l'attention de cette dernière "qu'elle ne s'adressait qu'au directeur général" et qu'elle a ordonné à cette directrice de se taire. Les attestations produites par la requérante de représentants syndicaux d'autres syndicats, qui affirment que Mme B... a "précisé qu'elle s'adressait au directeur général", ne sont pas de nature à remettre en cause la matérialité des faits reprochés. Ces propos, alors même qu'ils ont été tenus lors d'une réunion paritaire du 15 novembre 2016 organisée en vue de la négociation annuelle obligatoire selon le code du travail des salaires du personnel de l'office, constituent un manquement caractérisé à l'obligation de réserve et de respect à l'égard de ses supérieurs hiérarchiques qui s'impose à tout agent public, fût-il délégué syndical, et constituent une faute de nature à justifier le prononcé d'une sanction disciplinaire. La décision en litige constituant une sanction disciplinaire, la requérante ne peut utilement soutenir qu'elle constituerait une sanction disciplinaire déguisée. Dans ces conditions, eu égard à la nature des faits reprochés, l'administration n'a pas pris une sanction disproportionnée en décidant d'infliger à Mme B... un blâme, sanction du premier groupe et n'a pas opéré une discrimination syndicale à l'encontre de la requérante en prenant cette sanction. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige du 5 janvier 2017 serait entachée d'illégalité.
En ce qui concerne la demande tendant à enjoindre au directeur général de l'office de retirer deux lettres de son dossier administratif :
5. La requérante ne demande pas plus en appel qu'en première instance l'annulation de la décision du 9 février 2017 du directeur général de l'office prise en réponse à son recours gracieux du 20 janvier 2017 rejetant sa demande tendant au retrait de certaines pièces de son dossier administratif. Dès lors, la requérante n'est pas recevable à demander au juge le prononcé d'une injonction à titre principal, ainsi que l'a retenu à bon droit le premier juge. Ces conclusions doivent être rejetées.
En ce qui concerne l'existence d'un harcèlement moral et d'une discrimination à son encontre :
6. En se bornant à soutenir que le directeur général de l'office n'a pas mis en oeuvre, à son bénéfice, la protection juridique prévue par la loi du 13 juillet 1983 pour faire cesser les persécutions subies à son encontre, Mme B... n'apporte aucun élément de nature à faire présumer l'existence d'un harcèlement moral de la part de sa hiérarchie et de ses collègues ou celle d'une discrimination en raison de son appartenance syndicale.
7. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les fins de non recevoir opposées par l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné du tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.
Sur les frais liés au litige :
8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de Mme B... la somme de 1 000 euros à verser à l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences au titre des frais qu'il a exposés et non compris dans les dépens.
D É C I D E :
Article 1 : La requête de Mme B... est rejetée.
Article 2 : Mme B... versera la somme de 1 000 euros à l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B...et à l'office public de l'habitat Grand Avignon Résidences.
Délibéré après l'audience du 29 janvier 2019, où siégeaient :
- Mme Buccafurri, présidente,
- Mme Simon, président-assesseur,
- Mme Carassic, première conseillère.
Lu en audience publique, le 12 février 2019.
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N° 18MA02023