La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/02/2019 | FRANCE | N°17MA01943

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 12 février 2019, 17MA01943


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... Beaujarda demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 8 janvier 2015 par laquelle le maire de la commune de Vias a refusé le raccordement de la parcelle lui appartenant au réseau public d'électricité.

Par le jugement n° 1500513 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mai 2017, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 12 septembre 2017, M

. Beaujard, représenté par Me Baudard, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 ma...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... Beaujarda demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 8 janvier 2015 par laquelle le maire de la commune de Vias a refusé le raccordement de la parcelle lui appartenant au réseau public d'électricité.

Par le jugement n° 1500513 du 17 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mai 2017, et par un mémoire complémentaire, enregistré le 12 septembre 2017, M. Beaujard, représenté par Me Baudard, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 17 mars 2016 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) d'annuler la décision du 8 janvier 2015 du maire de la commune de Vias ;

3°) de mettre à la charge de la direction générale des finances publiques la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision en litige n'est pas motivée en méconnaissance de l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979 ;

- le maire n'était pas compétent pour se prononcer sur une demande de raccordement provisoire ;

- ce refus du raccordement méconnaît l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision en litige méconnaît le principe d'égalité des citoyens devant la loi.

Par deux mémoires en défense, enregistrés les 23 juin et 25 septembre 2017, la commune de Vias, représentée par la Selarl d'avocats Gil-Cros, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de M. Beaujard la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige, nouveau en appel, est, à titre principal, irrecevable, dès lors que le requérant n'avait soulevé que des moyens de légalité interne devant les premiers juges et, à titre subsidiaire, infondé ;

- les autres moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par lettre en date du 16 janvier 2019, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt à intervenir était susceptible d'être fondé sur un moyen d'ordre public relevé d'office par la Cour tiré de la méconnaissance du champ d'application de la loi par le maire qui a fondé la décision en litige du 8 janvier 2015 sur les délibérations des 11 février et 4 mai 2005 du conseil municipal de Vias et non pas sur l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, pour s'opposer à la demande de raccordement de M. D.en Seine et Marne et qu'une caravane est effectivement stationnée sur ce terrain

Par un mémoire, enregistré le 22 janvier 2019, M. Beaujard a fait part de ses observations sur le moyen d'ordre public.

Par un mémoire, enregistré le 22 janvier 2019, la commune de Vias a fait part de ses observations sur le moyen d'ordre public.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Carassic,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me A... représentant la commune de Vias.

Considérant ce qui suit :

1. M. Beaujard, propriétaire depuis 2010 d'un terrain cadastré AI n° 367 situé lieu-dit les Dunes à Vias, a demandé au maire de la commune de Vias le raccordement provisoire de la caravane stationnée sur cette parcelle au réseau public d'électricité. Par la décision en litige du 8 janvier 2015, le maire a refusé ce raccordement. Par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté la demande de M. Beaujard tendant à l'annulation de cette décision.

Sur le bien fondé du jugement :

2. En premier lieu, pour s'opposer, dans la décision en litige du 8 janvier 2015, à la demande de raccordement de cette caravane, le maire de la commune de Vias ne pouvait légalement se fonder, comme il l'a fait, sur les délibérations du conseil municipal des 11 février et 4 mai 2005 prises dans le cadre d'une lutte contre la "cabanisation" de ce secteur, qui ne lui donnaient pas compétence pour s'opposer au raccordement définitif de la caravane en cause au réseau public d'électricité, ainsi que les parties en ont été informées en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative.

3. Toutefois, lorsqu'il constate que la décision contestée devant lui aurait pu être prise, en vertu du même pouvoir d'appréciation, sur le fondement d'un autre texte que celui dont la méconnaissance est invoquée, le juge de l'excès de pouvoir peut substituer ce fondement à celui qui a servi de base légale à la décision attaquée, sous réserve que l'intéressé ait disposé des garanties dont est assortie l'application du texte sur le fondement duquel la décision aurait dû être prononcée. Une telle substitution relevant de l'office du juge, celui-ci peut y procéder de sa propre initiative, au vu des pièces du dossier, mais sous réserve, dans ce cas, d'avoir au préalable mis les parties à même de présenter des observations sur ce point. Le juge peut également faire droit à une demande présentée à cette fin par l'administration lorsque cette demande répond aux conditions auxquelles la substitution de base légale est subordonnée. La commune, en soutenant que la décision en litige pouvait être fondée sur l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme, doit être regardée comme demandant une substitution de base légale.

4. L'article L. 111-6 du code de l'urbanisme alors applicable prévoit que : " Les bâtiments, locaux ou installations soumis aux dispositions des articles L. 421-1 à L. 421-4 ou L. 510-1, ne peuvent,( nonobstant toutes clauses contraires des cahiers des charges de concession, d'affermage ou de régie intéressée), être raccordés définitivement aux réseaux d'électricité, d'eau, de gaz ou de téléphone si leur construction ou leur transformation n'a pas été, selon le cas, autorisée ou agréée en vertu des articles précités. ". Ces dispositions permettent au maire au regard du règlement du plan d'occupation des sols ou du plan local d'urbanisme, de s'opposer au raccordement définitif au réseau de distribution d'électricité des caravanes mobiles stationnant irrégulièrement sur le territoire de la commune.

5. Le requérant a sollicité un raccordement provisoire au réseau électrique de sa parcelle, afin d'alimenter une caravane qui y stationne, pour y passer des vacances familiales l'été et que "ce terrain n'est en aucun cas un lieu d'habitation habituel" dès lors qu'il résiderait en région parisienne. Toutefois, cette demande précise aussi, d'une part, que ce raccordement sera sollicité chaque année pour les périodes estivales, que "le mieux serait bien sûr (d'obtenir) une autorisation permanente pour un branchement comme chez mes voisins", et, d'autre part, que le requérant occupera cette caravane de "juin à septembre" et "pour le temps où sont autorisés les séjours", c'est-à-dire, selon le plan d'occupation des sols de la commune, pour la période du 15 mars au 15 septembre pendant laquelle est autorisé dans ce secteur l'usage des tentes et caravanes, soit pendant une période de six mois par an. Dans ces conditions, le maire de la commune de Vias est fondé à soutenir que la demande de raccordement au réseau électrique, présentée comme provisoire par M. Beaujard, doit être regardée comme une demande de raccordement définitif à ce réseau au sens et pour l'application des dispositions précitées de l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme.

6. En second lieu, la décision en litige est fondée sur la circonstance que la demande de M. Beaujard, qui vise à raccorder une caravane stationnant sur le terrain, tendrait en réalité au raccordement d'un cabanon d'une superficie de 24 m² implanté sans autorisation sur la parcelle de M. Beaujard située dans un secteur où cette construction est interdite. Toutefois, il ressort des pièces du dossier, et il n'est pas contesté par la commune, que M. Beaujard est domicilié.en Seine et Marne et qu'une caravane est effectivement stationnée sur ce terrain Le requérant produit une attestation non contestée de sa voisine à Vias qui affirme que le requérant n'y réside que durant cinq semaines par an l'été. Le constat d'huissier du 27 avril 2017 établi à la demande du requérant fait état de l'existence sur ce terrain d'une cabane en bois de 3 m sur 3 m et d'une partie constituée de bardages plastiques de 3 m sur 3 m, pour une superficie totale de 15 m², et non de 24 m² comme le soutient la commune, qui sert à entreposer des meubles de jardin et des planches à voile et ne présente pas les caractéristiques d'une construction à usage d'habitation, alors même qu'une autre cabane d'1,50 m sur 1,50 m située à côté sert de douche et de toilettes d'été. Dans ces conditions, le motif de refus fondé sur le raccordement du cabanon existant sur la parcelle de M. Beaujard est entaché d'une erreur de fait.

7. Enfin, la zone V NA du plan d'occupation des sols de la commune, où se situe cette parcelle, est définie par le règlement comme une zone naturelle non équipée ou peu équipée destinée à l'urbanisation touristique en y ménageant le caractère naturel et végétal du site. Elle comprend un secteur V NAb qui correspond à la partie du territoire réservée à l'accueil d'aménagements touristiques légers de caractère saisonnier, dans lequel est notamment autorisé, par l'article 1er, " le stationnement de caravanes et mobil-home en occupation saisonnière (sous réserve du maintien du système de mobilité) ". Par suite, le stationnement de la caravane, qui conserve sa mobilité, de M. Beaujard sur ce terrain est conforme au règlement d'urbanisme de la commune et le maire ne pouvait pas se fonder sur l'article L. 111-6 du code de l'urbanisme pour refuser de raccorder cette caravane au réseau électrique. Dès lors, la demande de substitution de base légale présentée par la commune de Vias ne peut être accueillie.

8. Pour l'application des dispositions de l'article L. 600-4-1 du code de l'urbanisme, les autres moyens invoqués par M. Beaujard ne sont pas de nature, en l'état de l'instruction, à entraîner également l'annulation de la décision en litige.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. Beaujard est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Par suite, il y a lieu d'annuler tant le jugement attaqué que la décision du 8 janvier 2015 du maire de la commune de Vias.

Sur les frais liés au litige :

10. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une quelconque somme soit mise à la charge de M. Beaujard, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Ces mêmes dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à la charge de l'Etat, dont dépend la direction générale des finances publiques, et qui n'est pas partie à la présente instance, au titre des frais exposés par M. Beaujard et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1 : Le jugement du 17 mars 2016 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : La décision du 8 janvier 2015 du maire de Vias est annulée.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par la commune de Vias sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... Beaujardet à la commune de Vias.

Copie pour information en sera adressée au procureur de la République près le tribunal de grande instance de Montpellier.

Délibéré après l'audience du 29 janvier 2019, où siégeaient :

- Mme Buccafurri, présidente,

- Mme Simon, président-assesseur,

- Mme Carassic, première conseillère.

Lu en audience publique, le 12 février 2019.

4

N° 17MA01943


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA01943
Date de la décision : 12/02/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-04-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Autorisations d`utilisation des sols diverses. Autorisation des installations et travaux divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme BUCCAFURRI
Rapporteur ?: Mme Marie-Claude CARASSIC
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : BAUDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-02-12;17ma01943 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award