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14/01/2019 | FRANCE | N°18MA01234

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 14 janvier 2019, 18MA01234


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 février 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé d'office.

Par un jugement n° 1704493 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête enregistrée le 19 mars 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 15 février 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être renvoyé d'office.

Par un jugement n° 1704493 du 9 novembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 19 mars 2018, M. D..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 9 novembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du 15 février 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative et, dans cette attente, de le munir d'une autorisation provisoire de séjour, dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens.

Il soutient que :

- l'arrêté attaqué a été pris par une autorité incompétente ;

- il méconnaît l'article L. 313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 mai 2018, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. D... ne sont pas fondés.

La demande d'aide juridictionnelle présentée par M. D... a été rejetée par une décision du 19 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié en matière de séjour et de travail ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. A... Gautron a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D..., né le 5 mars 1980 et de nationalité tunisienne, déclaré être entré sur le territoire français le 11 avril 2011 dans des conditions indéterminées et s'y être maintenu depuis lors. Le 19 mai 2016, il a sollicité la délivrance d'un titre de séjour temporaire en qualité d'étranger malade. A la suite d'un avis favorable du médecin de l'agence régionale de santé, il a alors bénéficié d'une autorisation provisoire de séjour expirant le 23 février 2017. Le 23 décembre 2016, il a de nouveau sollicité la délivrance d'un titre de séjour au même titre. Par l'arrêté contesté du 15 février 2017, pris à la suite d'un avis cette fois défavorable du médecin de l'agence régionale de santé, émis le 16 janvier précédent, le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé son admission au séjour et a ordonné son éloignement.

2. En premier lieu, par un arrêté n° 13-2016-09-20-001 du 20 septembre 2016, le préfet des Bouches-du-Rhône a délégué sa signature à M. E..., agent de préfecture, à l'effet de signer, notamment, les décisions portant refus de séjour et les mesures d'éloignement. Cet acte réglementaire, accessible tant au juge qu'aux parties, a été régulièrement publié le jour même au recueil des actes administratifs. Dès lors, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'arrêté contesté doit être écarté.

3. En deuxième lieu, en vertu de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ".

4. En admettant même que l'interruption des traitements quotidiens suivis en France par M. D... pour soigner tant les troubles psychiques importants dont il est atteint que de sa dépendance aux opiacés puisse être regardée, au vu des attestations médicales qu'il produit, comme susceptible de l'exposer à des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'une d'elles évoquant à ce titre, il est vrai, un " risque vital ", il ne ressort ni de ces attestations ni des autres pièces du dossier que les traitements dont s'agit seraient indisponibles en Tunisie. Le requérant n'établit pas davantage, en outre, que le traitement de sa dépendance aux opiacés, à tout le moins, le serait, en se bornant à se référer à des articles non étayés et que contredisent les pièces versées aux débats par le préfet. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que ce dernier aurait fait une inexacte application des dispositions précitées ne peut être accueilli.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. M. D... ne justifie pas, à l'examen des pièces qu'il verse aux débats, de la date et des conditions de son entrée en France, non plus que de sa présence habituelle, depuis lors, sur le territoire national. S'il fait état de liens familiaux en France, notamment sa tante et deux cousins germains, il n'en démontre pas l'intensité ni même la réalité. Par ailleurs, M. D... est célibataire, sans charge de famille, et ne justifie ni d'une intégration socio-professionnelle particulièrement significative ni de revenus lui permettant de subvenir à ses besoins. Enfin, il n'établit pas être dépourvu de toute attache familiale dans son pays d'origine, où il a vécu selon ses propres déclarations jusqu'à l'âge de 31 ans au moins. Ainsi, M. D... ne démontre pas avoir durablement fixé le centre de sa vie privée et familiale en France à la date de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, le préfet des Bouches-du-Rhône, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels ce refus a été pris. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté pris à son encontre par le préfet des Bouches-du-Rhône le 15 février 2017. Ses conclusions à fin d'injonction ne peuvent, par voie de conséquence, qu'être rejetées, tout comme celles tendant au remboursement des frais exposés et non compris dans les dépens.

D É C I D E:

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... D...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2018 où siégeaient :

- M. David Zupan, président,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller,

- M. A... Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 janvier 2019.

4

N° 18MA01234


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01234
Date de la décision : 14/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. Allan GAUTRON
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : ROBIN

Origine de la décision
Date de l'import : 22/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-01-14;18ma01234 ?
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