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08/01/2019 | FRANCE | N°18MA01715

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 08 janvier 2019, 18MA01715


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 28 octobre 2016 par laquelle le directeur de l'agence régionale de santé de Corse lui a notifié son licenciement et l'a invitée à présenter une demande de reclassement ainsi que la décision du 11 mai 2017 la licenciant à compter du même jour.

Par un jugement n° 1600756 et 1700002 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête,

enregistrée le 17 avril 2018, Mme A... représentée par Me C... demande à la Cour :

1°) d'annu...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... A... a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 28 octobre 2016 par laquelle le directeur de l'agence régionale de santé de Corse lui a notifié son licenciement et l'a invitée à présenter une demande de reclassement ainsi que la décision du 11 mai 2017 la licenciant à compter du même jour.

Par un jugement n° 1600756 et 1700002 du 1er mars 2018, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 17 avril 2018, Mme A... représentée par Me C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er mars 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 28 octobre 2016 par laquelle le directeur de l'agence régionale de santé de Corse lui a notifié son licenciement et l'a invitée à présenter une demande de reclassement ainsi que la décision du 11 mai 2017 la licenciant à compter du même jour ;

3°) d'enjoindre à l'agence régionale de santé de Corse de la réintégrer au sein du personnel relevant du régime " Assurance maladie " ;

4°) de mettre à la charge de l'agence régionale de santé de Corse la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle soutient que :

S'agissant de la décision du 28 octobre 2016 :

* les dispositions de l'article 47 du décret du 17 janvier 1986 ont été méconnues dans la mesure où elle n'a pas été informée, lors de son entretien préalable au licenciement réalisé le 25 juillet 2016, de la nature du nouveau besoin et de ses possibilités d'adaptation ; cette irrégularité l'a privée d'une garantie procédurale importante et a été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision ; cette question n'a été envisagée que 2 mois et demi plus tard, alors que la procédure de licenciement était déjà engagée et la commission administrative paritaire déjà consultée ;

* les dispositions de l'article 45-5 du même décret ont été méconnues, en l'absence de réelle mise en oeuvre d'une procédure de reclassement ; ses candidatures aux postes de DGA et DSPMS n'ont pas été examinées ;

* la décision de licenciement est entachée de détournement de pouvoir dans la mesure où le besoin auquel répondait son emploi n'a pas disparu et que le besoin en statisticien n'est pas nouveau, étant acté dès 2012 ; son licenciement est en réalité fondé sur le recours qu'elle a formé contre le second avenant à son contrat de travail ;

* elle est entachée d'erreur de droit, son contrat ayant été modifié en février 2016 pour être adapté aux besoins de l'agence ; les missions de son poste de " Référent performance " n'ont pas été supprimées mais redistribuées à d'autres agents ; la décision mentionne un emploi de " chargée de l'efficience " alors qu'elle occupait un emploi de " Référent performance " ; l'impossibilité de son adaptation au nouveau besoin n'est pas démontrée ; son reclassement n'a pas été sérieusement envisagé ;

* elle est entachée d'erreur de fait dès lors qu'elle mentionne la suppression d'un emploi de " chargée de l'efficience " alors qu'elle occupait un emploi de " Référent performance " ;

* elle est également entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de son profil, de ses compétences et de ses capacités d'adaptation au poste ;

S'agissant de la décision du 11 mai 2017 : étant purement confirmative de la décision du 28 octobre 2016, elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision du 28 octobre 2016.

Par un mémoire, enregistré le 31 juillet 2018, l'agence régionale de santé de Corse, représentée par Me D..., demande à la Cour de rejeter la requête de Mme A... et de mettre à sa charge la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par Mme A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

* la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 ;

* le décret n° 86-83 du 17 janvier 1986 ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de Mme Tahiri,

* les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

* et les observations de Me D..., représentant l'agence régionale de santé de Corse.

Considérant ce qui suit :

1. Mme A... a été recrutée en mai 2006 par contrat à durée déterminée puis à compter d'avril 2010 en contrat à durée indéterminée par l'agence régionale hospitalière Provence-Alpes Côte d'Azur et Corse à laquelle a succédé l'agence régionale de santé de Corse. Par décision du 28 octobre 2016, le directeur de l'agence régionale de santé de Corse lui a notifié son licenciement et l'a invitée à présenter une demande de reclassement. Par décision du 11 mai 2017, il a prononcé son licenciement à compter du même jour. Mme A... fait appel du jugement du tribunal administratif de Bastia du 1er mars 2018 rejetant ses demandes tendant à l'annulation des décisions du 28 octobre 2016 et du 11 mai 2017.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la décision du 28 octobre 2016 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article 45.3 du décret du 17 janvier 1986 susvisé : " Sans préjudice des dispositions relatives au licenciement pour faute disciplinaire, pour insuffisance professionnelle ou pour inaptitude physique, le licenciement d'un agent contractuel recruté pour répondre à un besoin permanent doit être justifié par l'un des motifs suivants : / 1° La suppression du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent ; / 2° La transformation du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement, lorsque l'adaptation de l'agent au nouveau besoin n'est pas possible ; (...) ". Aux termes de l'article 45-4 du même décret : " En cas de transformation du besoin ou de l'emploi qui a justifié le recrutement de l'agent contractuel recruté pour un besoin permanent, l'administration peut proposer la modification d'un élément substantiel du contrat de travail tel que la quotité de temps de travail de l'agent, ou un changement de son lieu de travail. Elle peut proposer dans les mêmes conditions une modification des fonctions de l'agent, sous réserve que celle-ci soit compatible avec la qualification professionnelle de l'agent. Lorsqu'une telle modification est envisagée, la proposition est adressée à l'agent par lettre recommandée avec avis de réception ou par lettre remise en main propre contre décharge. (...) ". Le I. de l'article 47 du même décret précise que : " Le licenciement ne peut intervenir qu'à l'issue d'un entretien préalable. (...) Au cours de l'entretien préalable, l'administration indique à l'agent les motifs du licenciement et le cas échéant le délai pendant lequel l'agent doit présenter sa demande écrite de reclassement ainsi que les conditions dans lesquelles les offres de reclassement sont présentées ".

3. Si les actes administratifs doivent être pris selon les formes et conformément aux procédures prévues par les lois et règlements, un vice affectant le déroulement d'une procédure administrative préalable, suivie à titre obligatoire ou facultatif, n'est de nature à entacher d'illégalité la décision prise que s'il ressort des pièces du dossier qu'il a été susceptible d'exercer, en l'espèce, une influence sur le sens de la décision prise ou qu'il a privé les intéressés d'une garantie.

4. Il ressort notamment des courriers échangés les 19 août 2016 et 28 septembre 2016 entre Mme A... et le directeur général de l'agence régionale de santé de Corse que lors de son entretien préalable au licenciement le 25 juillet 2016, Mme A... était seulement informée que ce licenciement était motivé par la transformation du besoin qui avait justifié son recrutement. En effet, à la suite de la demande de précision présentée le 19 août 2016 par l'intéressée, elle était informée par courrier du 28 septembre 2016 que le nouveau besoin portait sur un emploi de chargé d'études statistiques et elle était invitée à se présenter le 4 octobre 2016 au services des ressources humaines afin d'envisager les possibilités d'adaptation à cet emploi. Il ressort en outre des pièces du dossier que Mme A..., dont la formation et la carrière étaient centrées sur les fonctions de management dans les établissements sanitaires et sociaux, ne disposait pas des qualifications nécessaires pour s'adapter à ce nouvel emploi, lequel nécessitait notamment des compétences techniques pour élaborer et traiter des requêtes statistiques ainsi que cela ressort de la fiche de poste produite. Dans ces conditions, les premiers juges ont, à bon droit, estimé que l'indication incomplète des motifs du licenciement de Mme A... lors de son entretien préalable n'avait pas, dans les circonstances de l'espèce, privé l'intéressée d'une garantie ni été susceptible d'exercer une influence sur le sens de la décision contestée intervenue le 28 octobre 2016. Enfin, la circonstance que la commission administrative paritaire a été consultée le 13 octobre 2016 est sans incidence sur le respect de la formalité prévue à l'article 45.3 du décret du 17 janvier 1986 dont elle se prévaut uniquement.

5. En deuxième lieu, la circonstance que l'impossibilité d'un reclassement de Mme A... ne serait pas établie est sans incidence sur la légalité de la décision du 28 octobre 2016 par laquelle l'administration lui a notifié sa décision de la licencier et l'a invitée à présenter une demande de reclassement. Un tel moyen n'est opérant qu'à l'égard de la décision distincte de licenciement en cas d'échec de la procédure de reclassement.

6. En troisième lieu, il ressort des pièces du dossier qu'à la suite d'une modification de son contrat de travail par avenant du 8 janvier 2016, Mme A... occupait un emploi de référent performance au sein de la mission Expertises et projets de santé. Il ne ressort pas des pièces du dossier qu'en mentionnant cet emploi comme " chargée de l'efficience ", le directeur général de l'agence régionale de santé de Corse aurait commis une erreur de fait sur la nature du poste effectivement occupé par Mme A... dont les missions étaient détaillées dans une fiche d'analyse établie en vue d'envisager un possible redéploiement de ses activités. La circonstance que ces missions auraient été redistribuées aux autres agents de la mission " expertises et projets de santé " et non supprimées est sans incidence sur la légalité de la décision en litige, fondée non sur une suppression du besoin ayant justifié son recrutement mais sur une transformation de son emploi, regardé comme étant sans forte technicité et permettant un redéploiement des missions sur les autres agents en fonction à l'agence régionale de santé de Corse, en un poste de chargé d'études statistiques dédié au projet régional de santé concernant la période 2018/2022. Mme A... ne fournit aucun élément de nature à remettre en cause l'impossibilité de son adaptation à ce nouvel emploi, laquelle ressort suffisamment de la comparaison de ses qualifications et de celles nécessitées par l'emploi de chargé d'études statistiques ainsi qu'il a été dit au point 4. Par suite, Mme A... n'est pas fondée à soutenir que la décision en litige est entachée d'erreur de fait, d'erreur de droit et d'erreur d'appréciation.

7. En dernier lieu, le détournement de pouvoir allégué, tenant à la volonté de sanctionner Mme A... pour avoir contesté le second avenant à son contrat, n'est pas établi eu égard notamment aux consultations globales menées par l'agence régionale de santé de Corse afin d'identifier les postes susceptibles d'être supprimés, par redéploiement des missions sur les autres agents en fonctions dans un contexte où le plafond d'emploi de cet établissement public était atteint et alors que la demande de création de poste supplémentaire, initialement envisagée, avait été rejetée en juin 2016.

En ce qui concerne la décision du 11 mai 2017 :

8. En premier lieu, s'il ressort des pièces du dossier que Mme A... a sollicité le bénéfice d'un reclassement, que les postes de directeur de la santé publique et du médico-social, de directeur adjoint de l'agence régionale de santé et de directeur de la qualité de l'offre de soins sont devenus vacants avant l'intervention de la décision du 11 mai 2017 et qu'elle a vainement présenté sa candidature pour les deux premiers, il est constant que ces postes sont classés sur un niveau d'emploi 1 bis, correspondant à des emplois de direction alors que l'appelante relève d'un niveau 2 d'emploi, soit cadre expert. Dans ces conditions, en l'absence d'autres postes vacants et alors même que les candidatures de Mme A... ont été rejetées au moyen de lettres types, l'agence régionale de santé de Corse doit être regardée comme ayant satisfait à son obligation de reclassement.

9. En second lieu, il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à exciper de l'illégalité de la décision du 28 octobre 2016 à l'encontre de la mesure de licenciement du 11 mai 2017.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

11. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation de la requête de Mme A..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions aux fins d'injonctions présentées par cette dernière ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

12. Dans les circonstances de l'espèce, il ne paraît pas inéquitable de laisser à chacune des parties à l'instance la charge des frais qu'elles ont exposés et non compris dans les dépens.

13. Enfin, aucun dépens au sens des dispositions de l'article R. 761-1 du code de justice administrative n'ayant été exposé au titre de la présente instance, les conclusions présentées à ce titre par Mme A... ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée

Article 2 : Les conclusions de l'agence régionale de santé de Corse tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... A... et à l'agence régionale de santé de Corse.

Délibéré après l'audience du 18 décembre 2018, où siégeaient :

* M. Gonzales, président,

* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

* Mme Tahiri, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 janvier 2019.

N° 18MA01715 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA01715
Date de la décision : 08/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-12-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat. Licenciement.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : FINALTERI

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2019-01-08;18ma01715 ?
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