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28/12/2018 | FRANCE | N°17MA00873

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 28 décembre 2018, 17MA00873


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Kbax a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Vias à lui verser la somme de 30 568 euros en réparation des préjudices résultant de l'intervention des services de la commune de Vias, le 2 juin 2015, sur la parcelle AH n° 227 dont elle est propriétaire.

Par un jugement n° 1505303 du 5 janvier 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée l

e 3 mars 2017, la société civile immobilière (SCI) Kbax, représentée par Me D..., demande à la ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société civile immobilière Kbax a demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner la commune de Vias à lui verser la somme de 30 568 euros en réparation des préjudices résultant de l'intervention des services de la commune de Vias, le 2 juin 2015, sur la parcelle AH n° 227 dont elle est propriétaire.

Par un jugement n° 1505303 du 5 janvier 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2017, la société civile immobilière (SCI) Kbax, représentée par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 5 janvier 2017 du tribunal administratif de Montpellier ;

2°) de condamner la commune de Vias à indemniser son préjudice matériel à hauteur de 26 568 euros et son préjudice moral et d'anxiété pour un montant de 4 000 euros ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Vias la somme de 2 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'erreur de fait en ce qu'il a retenu que selon la main courante de la police municipale de Vias, la SCI Kbax avait procédé en plus de l'aménagement d'une clôture, à des travaux d'enrochement et de remblais ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il a retenu que les ouvrages de protection présents sur la parcelle H n° 227 ont été édifiés sur le domaine public maritime ;

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur de droit en ce que le jugement du 29 juin 2016 du tribunal administratif de Montpellier ayant enjoint à la SCI Kbax de retirer les ouvrages implantés sur le domaine public maritime ne pouvait servir de fondement à l'intervention en cause de la commune de Vias ;

- en l'absence d'arrêté préfectoral de délimitation du rivage visant la parcelle de la SCI Kbax, l'intervention des services municipaux sur cette parcelle est constitutive d'une faute ;

- les ouvrages de protection présents sur la parcelle H n° 227 ont été édifiés avant la montée des flots de sorte qu'ils ne font pas partie du domaine public maritime ;

- l'intervention en cause, réalisée sans fondement administratif ou juridictionnel, constitue une voie de fait ou à tout le moins une faute grave de l'administration ;

- les travaux réalisés par la commune créent un préjudice sur la propriété de la SCI dès lors que l'ouverture d'un passage au public aggrave l'atteinte de la propriété par la mer.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 mai 2017, la commune de Vias conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la SCI Kbax d'une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que les moyens soulevés par l'appelante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général de la propriété des personnes publiques ;

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Georges Guidal, président assesseur, pour présider la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les conclusions de M. A...,

- et les observations de Me B... représentant la commune de Vias.

Considérant ce qui suit :

1 La société Kbax, propriétaire en bord de mer des parcelles cadastrées section AH n° 227, 294, 295, 296 et 297 au lieu-dit " La Cosse ", sur le territoire de la commune de Vias, relève appel du jugement du 5 janvier 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation de cette commune à lui verser la somme de 26 568 euros au titre de la réparation de ses préjudices liés, selon elle, au sectionnement et à l'arrachage d'une partie de sa clôture, à l'enlèvement de l'enrochement et au déblai partiel afin d'aplanir le sable à l'aide d'engins motorisés pour créer un passage entre son terrain et la parcelle voisine AH n° 225.

Sur la régularité du jugement :

2 Dans la limite de l'effet dévolutif de l'appel, le juge d'appel est saisi à nouveau de l'ensemble des questions posées par le litige. Il lui appartient dans ce cadre de donner à ces questions la réponse que le droit commande en substituant son appréciation à celle des premiers juges. Les moyens tirés de ce que le tribunal administratif aurait commis différentes erreurs de fait, de droit ou d'appréciation n'appellent pas de réponses distinctes de celles par lesquelles il est à nouveau statué sur le fond du litige et ne sont pas de nature à remettre en cause la régularité du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3 En premier lieu, aux termes de l'article R. 160-10 du code de l'urbanisme, dont les dispositions ont depuis été reprises à l'article R. 121-1 du même code : " En l'absence d'acte administratif de délimitation, tout propriétaire riverain peut demander au préfet qu'il soit procédé à la délimitation du domaine public maritime au droit de sa propriété. Il en est de même dans le cas où, depuis une délimitation antérieure, des phénomènes naturels non liés à des perturbations météorologiques exceptionnelles ont eu pour effet de modifier le niveau des plus hautes eaux ". Aux termes de l'article L. 2111-5 du code général de la propriété des personnes publiques : " Les limites du rivage sont constatées par l'Etat en fonction des observations opérées sur les lieux à délimiter ou des informations fournies par des procédés scientifiques. (...). L'acte administratif portant délimitation du rivage est publié et notifié aux riverains. (...). ". Il résulte de ces dispositions que, saisi d'une demande en ce sens par les propriétaires riverains, le préfet est tenu de procéder à la délimitation du domaine public maritime au droit de leur propriété lorsqu'il n'existe aucune délimitation ou lorsque les conditions naturelles justifient qu'il soit procédé à une nouvelle délimitation.

4 D'une part, il ne résulte d'aucune pièce du dossier et il n'est pas même allégué que la société requérante aurait saisi le préfet d'une demande de délimitation du domaine public maritime au droit de sa propriété. D'autre part, un tel acte n'a qu'un caractère recognitif et la délimitation à laquelle il procède peut-être contestée à toute époque. Par suite, l'absence de délimitation du domaine public maritime ne faisait pas obstacle à ce que le maire de la commune de Vias prenne les mesures de police générale nécessaires à la sûreté et à la sécurité sur le territoire de sa commune. Il suit de là que le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 2111-5 du code général de la propriété des personnes publiques ne peut qu'être écarté.

5 En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques : " Le domaine public maritime naturel de L'Etat comprend : / 1° Le sol et le sous-sol de la mer entre la limite extérieure de la mer territoriale et, côté terre, le rivage de la mer. / Le rivage de la mer est constitué par tout ce qu'elle couvre et découvre jusqu'où les plus hautes mers peuvent s'étendre en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles (...) ; (...) ". Aux termes des dispositions de l'article L. 2122-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Nul ne peut, sans disposer d'un titre l'y habilitant, occuper une dépendance du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 ou l'utiliser dans des limites dépassant le droit d'usage qui appartient à tous " et aux termes de l'article L. 2132-3 du même code : " Nul ne peut bâtir sur le domaine public maritime ou y réaliser quelque aménagement ou quelque ouvrage que ce soit sous peine de leur démolition, de confiscation des matériaux et d'amende ". Il résulte de ces dispositions que le sol et le rivage de la mer font partie du domaine public maritime naturel de l'Etat et ne peuvent faire l'objet d'une propriété privée, sans que puissent y faire obstacle les actes de propriété dont sont susceptibles de se prévaloir les riverains, et que, par suite, ces derniers ne peuvent y édifier des ouvrages ou y réaliser des aménagements sans l'autorisation de l'autorité compétente de l'Etat, sous peine de poursuites pour contravention de grande voirie.

6 Par ailleurs, il appartient au juge administratif de se prononcer sur l'existence, l'étendue et les limites du domaine public, même en l'absence d'acte administratif délimitant ce domaine.

7 Il résulte des clichés photographiques produits ainsi que du plan de la direction départementale des territoires et de la mer mentionnant la limite haute du rivage constatée par l'Etat en 2004, 2005, 2007, 2012 et 2013 sur les parcelles cadastrées section AH, que la commune de Vias est intervenue sur des terrains soumis à l'action naturelle des flots, en l'absence de perturbations météorologiques exceptionnelles. Dans ces conditions, ces terrains et notamment la partie de la parcelle cadastrée AH n° 227 sur laquelle ont été édifiés des aménagements ayant pour objet la protection contre l'érosion maritime, alors même que ces ouvrages auraient édifiés avant l'action des flots, sont situés sur le rivage de la mer au sens des dispositions précitées de l'article L. 2111-4 du code général de la propriété des personnes publiques. Dès lors, le moyen tiré de ce que la commune de Vias a illégalement réalisé des travaux dans une propriété privée doit être écarté.

8 Enfin, aux termes de l'article L. 2212-2 du code général des collectivités territoriales : " La police municipale a pour objet d'assurer le bon ordre, la sûreté, la sécurité et la salubrité publiques. (...) " et aux termes de l'article L. 2212-3 du même code : " La police municipale des communes riveraines de la mer s'exerce sur le rivage de la mer jusqu'à la limite des eaux. ".

9 Ainsi qu'il est dit au point précédent, la commune de Vias est intervenue sur des terrains incorporés au domaine public maritime. Dans ces conditions, le maire n'a commis aucune faute en intervenant sur ledit domaine au titre de ses pouvoirs de police pour rendre à nouveau possible l'accès des usagers à la plage sans danger.

10 Il résulte de ce qui précède, en l'absence de faute commise par la commune de Vias, de nature à engager sa responsabilité, que la SCI Kbax n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la condamnation en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis.

Sur les frais liés au litige :

11 Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

12 Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme demandée à ce titre par la SCI Kbax, partie perdante à l'instance, soit mise à la charge de la commune de Vias. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la SCI Kbax une somme 2 000 euros à verser à la commune de Vias en application de ces mêmes dispositions.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la SCI Kbax est rejetée.

Article 2 : La SCI Kbax versera à la commune de Vias, une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société civile immobilière Kbax et à la commune de Vias.

Délibéré après l'audience du 14 décembre 2018, où siégeaient :

- M. Guidal, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme C..., première conseillère,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 décembre 2018.

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N° 17MA00873

nl


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Domaine - Domaine public - Régime.

Domaine - Domaine public - Protection du domaine - Protection contre les occupations irrégulières.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. GUIDAL
Rapporteur ?: Mme Jeannette FEMENIA
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS GIL-FOURRIER et CROS

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 28/12/2018
Date de l'import : 15/01/2019

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 17MA00873
Numéro NOR : CETATEXT000037969024 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-28;17ma00873 ?
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