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20/12/2018 | FRANCE | N°17MA01098

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 17MA01098


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 8 février 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en assortissant sa décision d'une interdiction de retour en France d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1700470 du 13 février 2017, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 février 2017, a enjoint au préfe

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...D...B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté du 8 février 2017 par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a obligé à quitter le territoire français sans délai en assortissant sa décision d'une interdiction de retour en France d'une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1700470 du 13 février 2017, le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 8 février 2017, a enjoint au préfet des Alpes-Maritimes de procéder à un nouvel examen de la situation de M. B...dans un délai de quinze jours à compter de la notification de ce jugement et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2017, le préfet des Alpes-Maritimes demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice du 13 février 2017 ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. B...devant le tribunal administratif de Nice.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français litigieuse est suffisamment motivée ;

- elle n'est pas entachée d'un défaut d'examen de la situation de M.B....

La requête a été communiquée à M. B...qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Jorda-Lecroq a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Le préfet des Alpes-Maritimes relève appel du jugement du 13 février 2017 par lequel le magistrat délégué par le président du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 8 février 2017 ayant obligé M. A...D...B..., de nationalité nigériane, à quitter le territoire français sans délai en assortissant sa décision d'une interdiction de retour en France d'une durée de trois ans, lui a enjoint de procéder à un nouvel examen de la situation de M. B... dans un délai de quinze jours à compter de la notification de ce jugement et a rejeté le surplus des conclusions de la demande.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. ".

3. Pour annuler l'arrêté litigieux, le premier juge a retenu que celui-ci était entaché d'un défaut de motivation, révélant un défaut d'examen de la situation de M.B..., en l'absence de mention, dans cet arrêté, d'un examen de la situation de l'intéressé au regard de sa volonté d'être reconduit en Italie, où il estimait être admissible, et de sa carte d'identité délivrée par la commune de Rome, explicitement citées par le procès-verbal d'audition du 20 janvier 2017. Il ressort toutefois de la notice de renseignements établie lors de l'entretien du 20 janvier 2017 que M. B...a alors indiqué avoir vécu en Italie environ dix ans à partir de 2005/2006, être célibataire, être entré en France régulièrement le 22 décembre 2013 en train en étant alors en possession de documents italiens, avoir fait une demande auprès d'une préfecture pour avoir des papiers, ne pas avoir effectué de demande en qualité de réfugié et avoir des problèmes cardiaques ayant été découverts en prison. Il ressort, par ailleurs, des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes a, antérieurement à l'arrêté contesté, formé auprès des autorités italiennes une demande de réadmission qui a fait l'objet d'une décision de rejet le 25 janvier 2017. Dans ces conditions, le préfet des Alpes-Maritimes, qui n'était pas tenu de faire état de l'ensemble des éléments de fait relatifs à la situation personnelle de l'intéressé a, en relevant dans l'arrêté litigieux, s'agissant de la situation personnelle de M.B..., en particulier, que l'intéressé, né le 18 juillet 1972, avait déclaré être entré en France sans être en possession des documents et visa exigés, qu'il avait été condamné le 30 janvier 2016 par le tribunal de grande instance de Nice pour aide à l'entrée, à la circulation ou au séjour irrégulier en France, et qu'il indiquait être sur le territoire français depuis le 22 décembre 2013, a suffisamment motivé sa décision portant obligation de quitter le territoire français au regard des éléments factuels dont il avait connaissance à la date de celle-ci. La circonstance, relevée surabondamment par le premier juge, que M. B...a produit un document en date du 28 novembre 2015 intitulé "Permesso di soggiorno" confirmant sa date d'entrée en Italie, le motif de séjour étant lié au bénéfice de la protection subsidiaire " pot. Sussidiaria ", un récépissé des services d'immigration italiens attestant du dépôt d'une demande de renouvellement de son titre de séjour italien, ainsi qu'un permis de conduire italien, est sans influence sur la légalité de l'arrêté litigieux. Il suit de là que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a, par ces motifs tirés de l'absence de motivation suffisante en fait de l'obligation de quitter le territoire français et de l'absence d'examen de la situation de M.B..., annulé l'arrêté du 8 février 2017 du préfet des Alpes-Maritimes.

4. Toutefois, il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens invoqués par M. B...devant le tribunal.

Sur les autres moyens invoqués par M. B...devant le tribunal :

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

5. En premier lieu, si M. B...fait état d'une saisine du médecin de l'agence régionale de santé le 1er décembre 2016, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet des Alpes-Maritimes aurait été destinataire, antérieurement à l'arrêté litigieux, d'éléments relatifs à l'état de santé de M. B...autres que les problèmes cardiaques évoqués lors de l'entretien du 20 janvier 2017 ou d'une demande de titre de séjour en qualité d'étranger malade. Dans ces conditions, l'intéressé, qui ne s'est plus prévalu, dans sa demande présentée devant le tribunal, de tels problèmes cardiaques, mais d'une hépatite B chronique active, n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait, pour ce motif, entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

6. En deuxième lieu, pour les mêmes motifs que ceux exposés au point précédent, le moyen tiré de la violation des dispositions des articles L. 313-11,11° et L. 511-4,10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés.

7. En troisième lieu, M.B..., qui n'a pas formé de demande en qualité de réfugié, n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 531-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour soutenir que l'obligation de quitter le territoire français litigieuse, qui est légalement fondée sur les dispositions de l'article L. 511-1-I 1° du même code, serait entachée d'un défaut de base légale.

En ce qui concerne la décision fixant le pays de destination :

8. Il ressort des pièces du dossier que M. B...n'établit pas la réalité et l'actualité des risques qu'il soutient encourir en cas de retour dans son pays d'origine. Si M. B...a eu la qualité de réfugié en Italie au titre de la protection subsidiaire, il n'est plus titulaire d'un titre de séjour dans ce pays et ne démontre pas avoir été empêché de mener à terme ni même avoir entrepris les démarches en vue de déposer une demande de renouvellement d'un tel titre alors qu'il était incarcéré en France. Dans ces conditions, les moyens tirés de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de l'article 18 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 33-1 de la convention de Genève du 28 juillet 1951 et de l'article 27 du règlement (UE) n°604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 doivent être écartés.

En ce qui concerne la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans :

9. D'une part, il résulte de ce qui a été exposé aux points 3 à 7 que le moyen tiré de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

10. D'autre part, M.B..., qui n'établit ni avoir formé une demande en qualité d'étranger malade, ni bénéficier de la protection subsidiaire en Italie à la date de l'arrêté contesté, n'est pas fondé à soutenir que ces éléments constitueraient des circonstances humanitaires de nature à entraîner l'illégalité de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de trois ans.

11. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet des Alpes-Maritimes est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat délégué du tribunal administratif de Nice a annulé l'arrêté du 8 février 2017 et lui a enjoint de réexaminer la situation de M.B..., et à demander l'annulation de ce jugement du tribunal administratif de Nice du 13 février 2017 et le rejet de la demande présentée par M. B...devant ce tribunal.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du magistrat désigné du tribunal administratif de Nice du 13 février 2017 est annulé.

Article 2 : La demande de M. B...présentée devant le tribunal administratif de Nice est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. A...D...B....

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente assesseure,

- MmeC..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

2

N° 17MA01098


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA01098
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Karine JORDA-LECROQ
Rapporteur public ?: M. ARGOUD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-20;17ma01098 ?
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