La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2018 | FRANCE | N°15MA01255

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 décembre 2018, 15MA01255


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt du 12 octobre 2017, la Cour a, sur la requête de Mme D...enregistrée sous le n° 15MA01255 tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération de Montpellier à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la chute dont elle a été victime le 25 avril 2012, ordonné avant dire droit une expertise en vue de déterminer les préjudices subis par la victime.

Après le dépôt du rapport d'expertise, MmeD..., par deux mémoires enregistrés le 29 juin et le 3 octobre 2018, demande à la cour, dans le dernier

état de ses écritures :

1°) de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à...

Vu la procédure suivante :

Par un arrêt du 12 octobre 2017, la Cour a, sur la requête de Mme D...enregistrée sous le n° 15MA01255 tendant à la condamnation de la communauté d'agglomération de Montpellier à l'indemniser des préjudices qu'elle estime avoir subis du fait de la chute dont elle a été victime le 25 avril 2012, ordonné avant dire droit une expertise en vue de déterminer les préjudices subis par la victime.

Après le dépôt du rapport d'expertise, MmeD..., par deux mémoires enregistrés le 29 juin et le 3 octobre 2018, demande à la cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme de 9 524,74 euros, assortie des intérêts au taux légal à compter du 4 juillet 2013 et de la capitalisation des intérêts ;

2°) de mettre à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole la somme de 3 976,61 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ainsi que les dépens.

Elle soutient que les préjudices dont elle demande l'indemnisation sont établis dans leur principe et leur montant.

Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 7 septembre 2018, Montpellier Méditerranée Métropole, représentée par la SCP Vinsonneau-Paliès Noy Gauer et associés, demande à la cour :

1°) de limiter la condamnation à la somme de 6 323,61 euros ;

2°) de condamner la société Veolia Eau à la garantir de la condamnation susceptible d'être prononcée à son encontre.

Elle soutient que les sommes demandées par Mme D...sont excessives.

Par un nouveau mémoire en défense, enregistré le 10 septembre 2018, la société Veolia Eau, représentée par la SCP de Angelis - Semidei - Vuillquez - Habart-Melki - Bardon - de Angelis, demande à la cour :

1°) à titre principal, de rejeter la requête de MmeD... ;

2°) à titre subsidiaire, de réduire le montant de l'indemnisation demandée ;

3°) de mettre les dépens à la charge de MmeD....

Elle soutient que :

- la responsabilité de Montpellier Méditerranée Métropole n'est pas engagée du fait d'un défaut d'entretien normal de l'ouvrage public ;

- la victime a commis une faute de nature à l'exonérer totalement de sa responsabilité ;

- les dommages résultant de l'existence, de la nature et du fonctionnement de l'ouvrage relèvent de la personne publique délégante ;

- les sommes demandées par Mme D...sont excessives.

La requête a été communiquée à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault, qui n'a pas produit d'observations.

Vu :

- l'ordonnance du 5 juin 2018 par laquelle la présidente de la cour a liquidé et taxé à la somme de 960 euros les frais de l'expertise ordonnée par l'arrêt du 12 octobre 2017 ;

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Merenne,

- les conclusions de M. Argoud, rapporteur public,

- et les observations de MeA..., représentant Mme D..., de Me C...substituant la SELARL Phelip et associés, représentant la commune de Montpellier et de Me E..., représentant la société Veolia Eau.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêt du 12 octobre 2017, la cour a jugé que la responsabilité de Montpellier Méditerranée Métropole était engagée à l'égard de Mme D...du fait de l'absence d'une plaque de fermeture d'un regard du réseau d'assainissement et d'eau potable à l'origine d'un accident sur la voie publique le 25 avril 2012 et que la faute de la victime était de nature à exonérer la métropole à hauteur du tiers de sa responsabilité. La cour a en outre ordonné une expertise médicale en vue de déterminer les préjudices subis par la victime.

Sur les préjudices :

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux :

2. En application des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, le juge saisi d'un recours de la victime d'un dommage corporel et du recours subrogatoire d'un organisme de sécurité sociale doit, pour chacun des postes de préjudices, déterminer le montant du préjudice en précisant la part qui a été réparée par des prestations de sécurité sociale et celle qui est demeurée à la charge de la victime. Il lui appartient ensuite de fixer l'indemnité mise à la charge de l'auteur du dommage au titre du poste de préjudice en tenant compte du partage de responsabilité avec la victime. Le juge doit allouer cette indemnité à la victime dans la limite de la part du poste de préjudice qui n'a pas été réparée par des prestations, le solde, s'il existe, étant alloué à l'organisme de sécurité sociale.

3. Dans le cas où la caisse de sécurité sociale n'a pas demandé le remboursement de ses dépenses, comme dans le cas où les conclusions qu'elle a présentées à cette fin sont irrecevables, le juge n'est pas dispensé de tenir compte, dans l'évaluation du dommage corporel, des éléments de préjudice qui ont été couverts par des prestations. Afin de procéder à l'évaluation, il lui appartient au besoin d'inviter la caisse à faire connaître le montant des frais qu'elle a pris en charge. L'indemnité mise à la charge de la collectivité doit alors correspondre à la part du dommage corporel dont elle est responsable sans pouvoir excéder la part non couverte par des prestations. L'indemnité doit être intégralement versée à la victime.

4. Si la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault n'a pas produit de mémoire dans la présente instance, il résulte des factures produites par Mme D...que les dépenses de santé se sont élevées à 2 970,85 euros, de sorte que la part du dommage corporel dont Montpellier Méditerranée Métropole est responsable s'élève à 1 980,57 euros compte tenu de la faute exonératoire de la victime.

5. Mme D...justifie de dépenses de santé restées à sa charge à hauteur de 310,02, euros s'agissant de la première hospitalisation à la clinique Saint-Jean à Montpellier pour la période comprise entre le 29 mai et le 1er juin 2012, de 205,18 euros s'agissant de la seconde hospitalisation pour la période comprise entre le 21 et le 23 novembre 2012, compte tenu d'une prise en charge partielle par un assureur complémentaire, et de 20,22 euros pour l'achat d'un dispositif médical. La part non couverte par les prestations s'élève ainsi à 535,42 euros. Etant inférieure à la part du dommage corporel dont Montpellier Méditerranée Métropole est responsable, elle doit être intégralement versée à la victime.

6. Si Mme D...demande en outre, au titre des dépenses de santé futures, la prise en charge des frais correspondant à une intervention de chirurgie esthétique en vue d'une reprise de la cicatrice sur la cuisse droite, la réalisation de cette intervention, quand bien même elle serait médicalement justifiée, dépend du choix de la victime de la subir et ne présente donc pas un caractère certain à la date du présent arrêt. Il y a lieu en conséquence de rejeter cette demande.

En ce qui concerne les préjudices extrapatrimoniaux :

7. L'expert désigné par la cour a retenu, pour la période comprise entre le 25 avril 2012 et le 16 décembre 2013, date de consolidation de l'état de santé de la victime, un déficit fonctionnel temporaire total pour une durée totale de huit jours et un déficit fonctionnel temporaire partiel de 30 % pour une durée de quarante-trois jours, de 25 % pour une durée de trente-trois jours, et de 10 % pour une durée de cinq-cent-seize jours. Il sera fait une juste appréciation de ce poste de préjudice en allouant la somme de 1 500 euros, soit 1 000 euros après prise en compte de la faute exonératoire de la victime.

8. Les souffrances endurées, représentées par la réalisation de deux interventions chirurgicales et des soins locaux, ont été évaluées à 3,5 sur une échelle de 1 à 7. Il y a lieu de retenir à ce titre la somme de 6 000 euros, soit 4 000 euros après prise en compte de la faute exonératoire.

9. Le déficit fonctionnel permanent, qui porte sur les troubles restant éprouvés par la victime après la consolidation de son état de santé, a été fixé à 2 % du fait de douleurs neuropathiques liées au traumatisme cutané. La victime était âgée de cinquante-trois ans à la date de consolidation de son état de santé. Il convient d'évaluer ce poste de préjudice à la somme de 2 400 euros, soit 1 600 euros après prise en compte de la faute exonératoire.

10. Le préjudice esthétique permanent a été évalué à 1 sur une échelle de 1 à 7 du fait d'une cicatrice discrète à la face latérale de la cuisse avec un aspect dysmorphique en coup de hache sur le versant latéral de la cuisse. L'expert a en outre évoqué un préjudice esthétique temporaire tenant à la présence d'hématomes à la cuisse droite lors des périodes de soins locaux post-chirurgicaux. Il y a lieu d'évaluer ces deux postes de préjudice à la somme de 1 200 euros, soit 800 euros après prise en compte de la faute exonératoire.

11. Le préjudice d'agrément résulte de l'impossibilité de poursuivre certaines activités sportives et de loisirs. MmeD..., quand bien même elle indique avoir exercé cette activité seule, ne justifie pas par les pièces qu'elle produit d'une pratique effective de la randonnée, qui serait limitée sur les longs trajets du fait des séquelles de l'accident.

12. Il résulte de l'ensemble de ce qui précède que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Il y a lieu en conséquence de condamner Montpellier Méditerranée Métropole à lui verser la somme de 7 935,42 euros, assortie des intérêts à compter du 4 juin 2013, date d'enregistrement de la demande de Mme D...par le tribunal administratif de Montpellier.

13. Ces intérêts seront capitalisés le 29 juin 2018, date à laquelle la capitalisation a été demandée pour la première fois et où il était dû au moins une année d'intérêts.

Sur l'appel en garantie :

14. L'autorité de la chose jugée attachée à l'arrêt du 12 octobre 2017 fait obstacle à ce que la société Veolia Eau remette en cause, au stade de l'évaluation des préjudices, la responsabilité de Montpellier Méditerranée Métropole et la fraction du dommage laissée à la charge de la victime.

15. L'exploitation du réseau d'assainissement avait été confiée à la société Veolia Eau par un contrat d'affermage. Contrairement à ce que soutient cette dernière, le dommage ne résulte pas de l'existence, de la nature ou du dimensionnement des ouvrages, mais de leur fonctionnement en raison du défaut d'entretien que constitue l'absence d'une plaque de fermeture d'un regard. Montpellier Méditerranée Métropole est en conséquence fondée à être garantie par la société Veolia Eau de la condamnation prononcée ci-dessus.

Sur les frais liés au litige :

16. Il y a lieu, en application de l'article R. 761-1 du code de justice administrative, de mettre les frais d'expertise, à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole, ainsi que la somme de 35 euros correspondant au montant de la contribution pour l'aide juridique acquittée par Mme D... pour l'introduction de sa demande devant le tribunal administratif de Montpellier.

17. Il y a également lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 500 euros au titre des frais non compris dans les dépens exposés par MmeD....

18. Les dispositions de cet article font en revanche obstacle à ce qu'il soit fait droit aux conclusions présentées sur le même fondement à l'encontre de Mme D...par Montpellier Méditerranée Métropole et la commune de Montpellier, qui n'est au demeurant pas partie à la présente instance.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 30 janvier 2015 du tribunal administratif de Montpellier est annulé.

Article 2 : Montpellier Méditerranée Métropole est condamnée à verser la somme de 7 935,42 euros à Mme D...avec intérêts au taux légal à compter 4 juin 2013. Ces intérêts seront capitalisés le 29 juin 2018 pour produire eux-mêmes intérêts.

Article 3 : La société Veolia Eau garantira Montpellier Méditerranée Métropole de l'intégralité de la condamnation prononcée à l'article 2.

Article 4 : Les frais de l'expertise et la contribution pour l'aide juridique, d'un montant de 35 euros, sont mis à la charge de Montpellier Méditerranée Métropole.

Article 5 : Montpellier Méditerranée Métropole versera à Mme D...la somme de 3 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 6 : Le surplus des conclusions des parties est rejeté.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B...D..., à Montpellier Méditerranée Métropole, à la commune de Montpellier, à la société Veolia Eau et à la caisse primaire d'assurance maladie de l'Hérault.

Copie en sera adressée pour information à l'expert judiciaire.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018, où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- M. Merenne, premier conseiller.

Lu en audience publique le 20 décembre 2018.

2

N° 15MA01255


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA01255
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

67-03-01 Travaux publics. Différentes catégories de dommages. Dommages sur les voies publiques terrestres.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: M. Jean-Marie ARGOUD
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : SELARL PHELIP et ASSOCIÉS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-20;15ma01255 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award