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18/12/2018 | FRANCE | N°18MA00546-18MA00548

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 18 décembre 2018, 18MA00546-18MA00548


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les décisions des 10 et 28 mars 2014 par lesquelles le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var a refusé de procéder à sa réintégration dans les effectifs de la commune ainsi que la décision prononçant son changement d'affectation à la brigade des services et de l'environnement à compter du 9 décembre 2009. Elle a également demandé la condamnation de la commune de Saint-Laurent-du-Var à lui verser l'intégralité des traitements et

accessoires qu'elle aurait perçus si elle avait continué à exercer son activit...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler les décisions des 10 et 28 mars 2014 par lesquelles le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var a refusé de procéder à sa réintégration dans les effectifs de la commune ainsi que la décision prononçant son changement d'affectation à la brigade des services et de l'environnement à compter du 9 décembre 2009. Elle a également demandé la condamnation de la commune de Saint-Laurent-du-Var à lui verser l'intégralité des traitements et accessoires qu'elle aurait perçus si elle avait continué à exercer son activité au sein de la police municipale depuis le 1er mai 2010 ainsi que la somme de 100 000 euros en réparation du préjudice qu'elle estime avoir subi.

Par un jugement n° 1403745, 1502162 du 8 décembre 2017, le tribunal administratif de Nice a rejeté ses demandes.

Procédures devant la Cour :

I - Par une requête, enregistrée le 7 février 2018 sous le n° 18MA00546, Mme B... représentée par Me D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 décembre 2017 ;

2°) d'enjoindre à la commune de Saint-Laurent-du-Var de procéder à sa réintégration en qualité d'adjoint technique à la vidéo, avec rétablissement de son traitement ;

3°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Laurent-du-Var la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions dirigées contre son changement d'affectation sont recevables dès lors que ce dernier s'apparente à une sanction déguisée, fondée sur des griefs erronés ; il s'apparente également à une discrimination et porte atteinte à ses perspectives de carrière, d'avancement et de rémunération ;

- s'agissant des décisions des 10 et 28 mars 2014, les premiers juges ont considéré à tort que le second recours gracieux a fait naître une simple décision confirmative d'une décision devenue définitive ;

- le refus de renouvellement de son contrat est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; la commune de Saint-Laurent-du-Var a procédé à un nouveau recrutement sans avis de vacances et sans respecter le délai d'attente de deux mois ; elle lui avait fait connaître qu'elle restait à sa disposition pour reprendre son poste initial.

Par un mémoire enregistré le 26 novembre 2018, la commune de Saint-Laurent-du-Var, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la requête n'est pas recevable et que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2018.

II - Par une requête, enregistrée le 7 février 2018 sous le n° 18MA00548, Mme B... représentée par Me D... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 8 décembre 2017 ;

2°) d'annuler les décisions des 10 et 28 mars 2014 par lesquelles le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var a refusé de procéder à sa réintégration dans les effectifs de la commune ;

3°) d'annuler la décision prononçant son changement d'affectation à la brigade des services et de l'environnement à compter du 9 décembre 2009 ;

4°) d'enjoindre à la commune de Saint-Laurent-du-Var de procéder à sa réintégration en qualité d'adjoint technique à la vidéo, avec rétablissement de son traitement et de prononcer sa titularisation ;

5°) de condamner la commune de Saint-Laurent-du-Var à lui verser l'intégralité des traitements et accessoires qu'elle aurait perçus si elle avait continué à exercer son activité au sein de la police municipale depuis le 1er mai 2010, assortis des intérêts légaux ;

6°) de mettre à la charge de la commune de Saint-Laurent-du-Var la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions dirigées contre son changement d'affectation sont recevables dès lors que ce dernier s'apparente à une sanction déguisée, fondée sur des griefs erronés ; il s'apparente également à une discrimination et porte atteinte à ses perspectives de carrière, d'avancement et de rémunération ;

- s'agissant des décisions des 10 et 28 mars 2014, les premiers juges ont considéré à tort que le second recours gracieux a fait naître une simple décision confirmative d'une décision devenue définitive ;

- le refus de renouvellement de son contrat est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ; la commune de Saint-Laurent-du-Var a procédé à un nouveau recrutement sans avis de vacances et sans respecter le délai d'attente de deux mois ; elle lui avait fait connaître qu'elle restait à sa disposition pour reprendre son poste initial.

Par un mémoire enregistré le 26 novembre 2018, la commune de Saint-Laurent-du-Var, représentée par Me A..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de Mme B... la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que la requête n'est pas recevable et que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 avril 2018.

Par une lettre du 27 novembre 2018, les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de la tardiveté, au regard du principe de sécurité juridique, des conclusions présentées devant le tribunal au-delà d'un délai raisonnable et tendant à l'annulation de la décision prononçant le changement d'affectation immédiat de Mme B... à la brigade des services et de l'environnement, dont elle a eu connaissance au plus tard le 9 décembre 2009.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Tahiri,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Saint-Laurent-du-Var.

Considérant ce qui suit :

1. Par les requêtes susvisées nos 18MA00546 et 18MA00548, Mme B..., dont la Cour a prononcé le 23 janvier 2014 l'annulation du refus de renouvellement du contrat qui la liait à la commune de Saint-Laurent-du-Var en tant qu'adjoint technique de 2ème classe, fait appel du jugement du 8 décembre 2017 du tribunal administratif de Nice rejetant ses conclusions aux fins d'annulation dirigées contre les décisions des 10 et 28 mars 2014 par lesquelles le maire de la commune de Saint-Laurent-du-Var a refusé de procéder à sa réintégration dans les effectifs de la commune, contre la décision prononçant son changement d'affectation à la brigade des services et de l'environnement à compter du 9 décembre 2009 ainsi que ses conclusions indemnitaires. Ces requêtes concernent la situation d'un même agent et ont fait l'objet d'une instruction commune. Il y a lieu de les joindre pour statuer par un seul arrêt.

Sur la recevabilité des conclusions aux fins d'annulation :

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre la décision prononçant le changement d'affectation de Mme B... à la brigade des services et de l'environnement à compter du 9 décembre 2009 :

2. En premier lieu, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire, ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. En une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours, ou l'absence de preuve qu'une telle information a bien été fournie, ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par le code de justice administrative, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable. En règle générale et sauf circonstances particulières dont se prévaudrait le requérant, ce délai ne saurait, sous réserve de l'exercice de recours administratifs pour lesquels les textes prévoient des délais particuliers, excéder un an à compter de la date à laquelle une décision expresse lui a été notifiée ou de la date à laquelle il est établi qu'il en a eu connaissance.

3. La règle selon laquelle le destinataire d'une décision individuelle auquel les voies et délais de recours n'ont pas été notifiées ne peut exercer un recours juridictionnel contre cette décision au-delà d'un délai raisonnable à compter de la date où il a eu connaissance de la décision, qui a pour seul objet de borner dans le temps les conséquences de la sanction attachée au défaut de mention des voies et délais de recours, ne porte pas atteinte à la substance du droit au recours, mais tend seulement à éviter que son exercice, au-delà d'un délai raisonnable, ne mette en péril la stabilité des situations juridiques et la bonne administration de la justice, en exposant les défendeurs potentiels à des recours excessivement tardifs. Il appartient dès lors au juge administratif d'en faire application au litige dont il est saisi, quelle que soit la date des faits qui lui ont donné naissance. Par suite, cette règle est applicable au présent litige, quand bien même elle a été énoncée, postérieurement aux faits de l'espèce, par une décision du Conseil d'Etat statuant au contentieux rendue le 13 juillet 2016.

4. Il ressort des écritures de Mme B... qu'elle a eu connaissance le 9 décembre 2009 de la note de service prononçant son changement d'affectation immédiat à la brigade des services et de l'environnement. En l'absence de preuve de la mention des voies et délais de recours dans la notification de cette décision, le délai de recours de deux mois prévu par l'article R. 421-1 du code de justice administrative ne lui est pas opposable. Cependant, le principe de sécurité juridique fait obstacle à ce que Mme B..., qui a ainsi eu connaissance de cette décision plus d'un an avant l'introduction de sa demande devant le tribunal administratif de Nice le 9 septembre 2014, puisse encore la contester devant le juge administratif. Il s'ensuit que les conclusions dirigées contre la note de service prononçant le changement d'affectation de Mme B... sont tardives et, partant, irrecevables.

En ce qui concerne les conclusions dirigées contre les décisions des 10 et 28 mars 2014 par lesquelles la commune de Saint-Laurent-du-Var a refusé de procéder à la réintégration de Mme B... dans les effectifs de la commune :

5. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... a reçu le 12 mars 2014 la décision du 10 mars 2014, mentionnant les voies et délais de recours, par laquelle le maire de Saint-Laurent-du-Var a rejeté sa demande du 7 février 2014 tendant à être réintégrée dans les effectifs de cette commune. Elle a formé à l'encontre de cette décision un recours gracieux qui a été rejeté par une décision explicite du 28 mars 2014, mentionnant également les voies et délais de recours et notifiée le 1er avril 2014 à l'intéressée, lui laissant ainsi jusqu'au 2 juillet 2014 inclus pour présenter un recours contentieux. Le courrier du 17 juillet 2014, qui présentait le caractère d'un nouveau recours gracieux formé par l'intermédiaire d'une organisation syndicale, n'a pas eu pour effet de rouvrir un délai de recours à l'encontre des décisions des 10 mars et 28 mars 2014, ni de permettre un recours contentieux contre la décision du 7 août 2014 statuant sur le second recours gracieux, cette décision ayant pour seul objet de confirmer les décisions précédentes. Enfin, la demande d'aide juridictionnelle, elle-même présentée hors délai auprès du tribunal de grande instance de Nice le 12 décembre 2016, n'a pu interrompre celui-ci. Ainsi, la demande présentée le 9 septembre 2014 par Mme B... devant le tribunal administratif de Nice était tardive et, par suite, irrecevable.

Sur les conclusions indemnitaires :

6. Mme B... ne conteste pas l'irrecevabilité retenue par les premiers juges pour rejeter ses conclusions aux fins d'indemnisation. Dans ces conditions, les moyens qu'elle développe sont inopérants. Elle n'est, dès lors, pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont rejeté ses conclusions indemnitaires.

Sur les conclusions aux fins d'injonction :

7. Le présent arrêt, qui rejette les conclusions à fin d'annulation et d'indemnité de la requête de Mme B..., n'appelle aucune mesure d'exécution. Dès lors, les conclusions aux fins d'injonctions présentées par cette dernière ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés aux deux instances :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Saint-Laurent-du-Var, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement d'une somme au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme B... les sommes que la commune de Saint-Laurent-du-Var réclame au même titre.

D É C I D E :

Article 1er : Les requêtes de Mme B... sont rejetées.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Saint-Laurent-du-Var en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B...et à la commune de Saint-Laurent-du-Var.

Délibéré après l'audience du 4 décembre 2018, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- Mme Tahiri, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 décembre 2018.

N° 18MA00546, 18MA00848 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00546-18MA00548
Date de la décision : 18/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

36-12-03 Fonctionnaires et agents publics. Agents contractuels et temporaires. Fin du contrat.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : PARRAVICINI ; PARRAVICINI ; PARRAVICINI

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-18;18ma00546.18ma00548 ?
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