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11/12/2018 | FRANCE | N°18MA00725

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 18MA00725


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 6 avril 2016 par laquelle le directeur délégué du centre hospitalier de Digne-les-Bains a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son syndrome dépressif.

Par un jugement n° 1604676 du 18 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2018, le centre hospitalier de Digne-les-Bains,

représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 décembre 2017 ;

2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler la décision du 6 avril 2016 par laquelle le directeur délégué du centre hospitalier de Digne-les-Bains a refusé de reconnaître l'imputabilité au service de son syndrome dépressif.

Par un jugement n° 1604676 du 18 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a fait droit à sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 16 février 2018, le centre hospitalier de Digne-les-Bains, représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du 18 décembre 2017 ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... la somme de 1 400 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* les premiers juges ont commis une erreur de fait et une erreur de droit dès lors que, d'une part, la demande présentée par Mme B... le 21 janvier 2016 avait pour objet la reconnaissance d'une maladie professionnelle et non celle d'un accident de service, lesquels relèvent de régimes juridiques distincts et, d'autre part, sa demande ne pouvait être accueillie au regard des dispositions des articles L. 461-1 et suivants et R. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale ;

* en tout état de cause, le lien entre l'état dépressif présenté par Mme B... et sa situation professionnelle n'est pas établi, l'intéressée ne rapportant pas la preuve de l'existence d'une relation de travail conflictuelle et son poste ayant été seulement modifié dans le cadre de la réorganisation du service.

Par un mémoire, enregistré le 25 avril 2018, Mme B..., représentée par Me D..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge du centre hospitalier de Digne-les-Bains la somme de 4 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir que :

* la décision du 6 avril 2016 a été signée par une autorité incompétente et est insuffisamment motivée ;

* le directeur du centre hospitalier a commis une erreur manifeste d'appréciation en considérant que sa pathologie n'était pas imputable au service.

Par ordonnance du 16 octobre 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 16 novembre 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

* le code de la sécurité sociale ;

* la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 ;

* le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

* le rapport de Mme Tahiri,

* et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision du 6 avril 2016, le directeur délégué du centre hospitalier de Digne-les-Bains a refusé de reconnaître imputable au service le syndrome dépressif dont est atteinte Mme B..., assistante médico-administrative employée en tant que secrétaire médicale dans cet établissement. Le centre hospitalier de Digne-les-Bains fait appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 6 avril 2016.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. En premier lieu, sont inopérants, devant le juge de l'excès de pouvoir, les moyens de légalité interne qui, sans rapport avec la teneur de la décision, ne contestent pas utilement la légalité des motifs et du dispositif qui sont ceux de la décision administrative attaquée.

3. Il ressort à cet égard des pièces du dossier que la décision du 6 avril 2016, si elle relève que la demande de Mme B... porte sur la reconnaissance d'une maladie professionnelle et non d'un accident de service est motivée, d'une part, par l'avis défavorable émis par la commission de réforme en ce qui concerne la reconnaissance de maladie professionnelle, d'autre part, par la circonstance que la proposition de reconnaissance en tant qu'accident de travail émanant de cette même instance ne pouvait aboutir faute de respect du délai de déclaration et, enfin, par l'absence de preuve d'une relation directe et exclusive entre la survenue de l'accident ou de la maladie et le service ou l'exercice des fonctions. Il résulte de ces mentions que le centre hospitalier de Digne-les-Bains a expressément examiné si Mme B... pouvait prétendre à la reconnaissance du syndrome dépressif dont elle est atteinte en tant que résultant d'un accident de service. Dès lors, ce motif, contrairement à ce que soutient le centre hospitalier de Digne-les-Bains, pouvait être utilement contesté devant le juge de l'excès de pouvoir.

4. En second lieu, aux termes de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 : " Le fonctionnaire en activité a droit : (...) / 2° A des congés de maladie dont la durée totale peut atteindre un an pendant une période de douze mois consécutifs en cas de maladie dûment constatée mettant l'intéressé dans l'impossibilité d'exercer ses fonctions. (...) / Toutefois, si la maladie provient de l'une des causes exceptionnelles prévues à l'article L. 27 du code des pensions civiles et militaires de retraite ou d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, le fonctionnaire conserve l'intégralité de son traitement jusqu'à ce qu'il soit en état de reprendre son service ou jusqu'à sa mise à la retraite. Il a droit, en outre, au remboursement des honoraires médicaux et des frais directement entraînés par la maladie ou l'accident. "

5. Aucune disposition ne rend applicables aux fonctionnaires hospitaliers qui demandent le bénéfice des dispositions du 2° de l'article 41 de la loi du 9 janvier 1986 les dispositions des articles L. 461-1 et R. 461-1 et suivants du code de la sécurité sociale instituant une présomption d'origine professionnelle pour toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractées dans des conditions mentionnées à ce tableau, non plus que les dispositions de l'article R. 441-2 du même code précisant le délai dans lequel la victime d'un accident de travail doit en faire la déclaration à son employeur. Un accident survenu sur le lieu et dans le temps du service, dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice par un fonctionnaire de ses fonctions ou d'une activité qui en constitue le prolongement normal présente, en l'absence de faute personnelle ou de toute autre circonstance particulière détachant cet événement du service, le caractère d'un accident de service. Il appartient dans tous les cas au juge administratif, saisi d'une décision de l'autorité administrative compétente refusant de reconnaître l'imputabilité au service d'un tel événement, de se prononcer au vu des circonstances de l'espèce.

6. Il ressort des certificats des 22 décembre 2015 et 8 mars 2016, produits par Mme B... et établis par le médecin généraliste qui la suit habituellement, que le 26 novembre 2014 ce médecin a constaté qu'elle présentait un état anxieux et une symptomatologie évoquant un burn-out professionnel ainsi que l'absence de symptomatologie de ce type antérieurement. Mme B... produit également un certificat du 8 mars 2016 émanant de son psychiatre et mentionnant que l'intéressée a été reçue le 4 décembre 2014 dans un état d'angoisse aiguë qu'elle reliait à sa situation professionnelle et qu'elle a développé par la suite un état anxio-dépressif réactionnel avec asthénie, angoisse permanente, troubles du sommeil et un sentiment profond d'injustice. Ce médecin confirmait l'absence d'antécédent psychiatrique ainsi que l'existence de relations familiales parfaitement équilibrées et satisfaisantes.

Il ressort en outre des courriers établis par le médecin de prévention du centre hospitalier de Dignes-les-Bains et des courriers établis en réponse par le directeur adjoint par intérim chargé des ressources humaines de ce centre hospitalier qu'il existait au sein du service dans lequel était affecté Mme B... une atmosphère devenue pesante dont les agents rendaient responsable la nouvelle cadre de santé arrivée dans le service en avril 2014 et que la direction de l'établissement imputait quant à elle aux perspectives futures de réorganisation du service. Saisie pour avis, la commission de réforme a estimé le 17 mars 2016 que Mme B... présentait un syndrome dépressif réactionnel qui serait secondaire à des relations conflictuelles avec sa hiérarchie et qui doit être pris en charge au titre de l'accident de service. Dès lors, en l'absence d'antécédents anxio-dépressifs, compte tenu des circonstances ainsi décrites et de l'ensemble des pièces médicales produites et alors même qu'aucun harcèlement moral ne serait reprochable au centre hospitalier de Dignes-les-Bains, l'état de santé de Mme B... doit être regardé comme imputable au service.

7. Il résulte de ce qui précède que le centre hospitalier de Dignes-les-Bains n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a annulé la décision du 6 avril 2016 par laquelle le directeur délégué de ce centre hospitalier a refusé de reconnaître l'imputabilité au service du syndrome dépressif présenté par Mme B....

Sur les frais liés à l'instance :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'a pas la qualité de partie perdante dans la présente instance, la somme que le centre hospitalier de Dignes-les-Bains demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. En revanche il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du centre hospitalier de Dignes-les-Bains la somme de 2 000 euros à verser à Mme B... au titre des frais qu'elle a exposés pour sa défense en appel.

D É C I D E :

Article 1er : La requête du centre hospitalier de Dignes-les-Bains est rejetée.

Article 2 : Le centre hospitalier de Dignes-les-Bains versera la somme de 2 000 euros à Mme B... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier de Dignes-les-Bains et à Mme C... B....

Délibéré après l'audience du 20 novembre 2018 où siégeaient :

* M. Gonzales, président,

* M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

* Mme Tahiri, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.

N° 18MA00725 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00725
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-05-04-01-03 Fonctionnaires et agents publics. Positions. Congés. Congés de maladie. Accidents de service.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: Mme Samira TAHIRI
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : MICHEL

Origine de la décision
Date de l'import : 01/01/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-11;18ma00725 ?
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