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11/12/2018 | FRANCE | N°17MA03205

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 11 décembre 2018, 17MA03205


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales (ADAPEI) Var-Méditerranée a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la restitution, outre intérêt au taux légal, des cotisations de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2011, 2012 et 2013 pour un montant total de 392 333 euros.

Par un jugement n° 1503758 du 8 juin 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par u

ne requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2017 et le 20 février 2018, l'ADAPEI Var-...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'Association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales (ADAPEI) Var-Méditerranée a demandé au tribunal administratif de Toulon de prononcer la restitution, outre intérêt au taux légal, des cotisations de taxe sur les salaires qu'elle a acquittées au titre des années 2011, 2012 et 2013 pour un montant total de 392 333 euros.

Par un jugement n° 1503758 du 8 juin 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juillet 2017 et le 20 février 2018, l'ADAPEI Var-Méditerranée, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 juin 2017 ;

2°) de prononcer la restitution des cotisations de taxe sur les salaires au titre des années 2011 à 2013 à hauteur de 392 333 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement est entaché d'erreur de droit, la doctrine fiscale référencée BOI-TVA-CHAMP-30-10-30-20 autorisant les établissements et services d'aide par le travail (ESAT) à opter pour l'assujettissement à la taxe sur la valeur ajoutée sur les recettes provenant des opérations de production et de commercialisation effectuées par les personnes handicapées et à constituer des secteurs distincts pour leurs opérations à caractère socio-éducatif et leurs activités de production et de commercialisation ;

- l'activité de production et de commercialisation est comptabilisée distinctement et assurée par des personnels distincts et réalisée avec des moyens d'exploitation différents.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 22 janvier 2018 et le 1er mars 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par l'ADAPEI Var-Méditerranée ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Barthez, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Antonetti, président de la 4ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Maury,

- les conclusions de Mme Boyer, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant l'ADAPEI Var-Méditerranée.

Considérant ce qui suit :

1. L'ADAPEI Var-Méditerranée, qui a pour objet de défendre les intérêts matériels et moraux des personnes en situation de handicap et de leur famille en vue de favoriser leur insertion sociale et professionnelle, assure notamment la gestion de trois ESAT. Elle a présenté une réclamation auprès de l'administration fiscale le 5 janvier 2015 afin d'obtenir le dégrèvement partiel de la taxe sur les salaires qu'elle avait spontanément versée au titre des années 2011 à 2013 pour les montants respectifs de 137 204 euros, de 128 282 euros et de 126 847 euros, au motif qu'elle réalise à la fois des activités soumises à la taxe sur la valeur ajoutée et des prestations à caractère socio-éducatif qui sont exonérées du versement de cette taxe. A la suite du rejet de sa réclamation, elle a saisi le tribunal administratif de Toulon d'une demande tendant à la restitution des cotisations de taxe sur les salaires à hauteur d'un montant de 392 333 euros. Elle fait appel du jugement du tribunal administratif de Toulon du 8 juin 2017 qui a rejeté sa demande.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. En vertu des dispositions de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, un contribuable, qui présente une réclamation dirigée contre une imposition établie selon les déclarations qu'il a souscrites, ne peut obtenir la décharge ou la réduction de l'imposition qui en découle qu'en démontrant le caractère exagéré de l'imposition.

3. Aux termes du 1 de l'article 231 du code général des impôts, dans sa rédaction applicable au présent litige : " Les sommes payées à titre de rémunérations sont soumises à une taxe sur les salaires (...) à la charge des personnes ou organismes (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en totalité ou sur 90 % au moins de son montant, ainsi que le chiffre d'affaires total mentionné au dénominateur du rapport s'entendent du total des recettes et autres produits, y compris ceux correspondant à des opérations qui n'entrent pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée. Le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée mentionné au numérateur du rapport s'entend du total des recettes et autres produits qui n'ont pas ouvert droit à déduction de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ". Aux termes de l'article 209 de l'annexe II du code général des impôts dans sa rédaction applicable au présent litige : " I. - Les opérations situées hors du champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée et les opérations imposables doivent être comptabilisées dans des comptes distincts pour l'application du droit à déduction. / Il en va de même pour les secteurs d'activité qui ne sont pas soumis à des dispositions identiques au regard de la taxe sur la valeur ajoutée (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'activité d'une entreprise peut être répartie en secteurs distincts si les services de l'entreprise peuvent être utilisés indépendamment les uns des autres, s'ils comportent la mise en oeuvre de techniques et de moyens de production séparés et s'ils font l'objet d'une comptabilisation distincte.

4. En premier lieu, il résulte de l'instruction que l'ADAPEI Var-Méditerranée assure une activité de production, liée à la commercialisation de produits réalisés dans le cadre de l'activité d'aide par le travail réalisée par les trois ESAT, ainsi qu'une mission d'insertion sociale. Elle réalise donc des opérations relevant de deux secteurs distincts d'activité, l'un afférent au suivi social d'insertion, exonéré de taxe sur la valeur ajoutée, et l'autre afférent à la production et à la commercialisation d'objets fabriqués et de prestations réalisées par des travailleurs handicapés, passible de la taxe sur la valeur ajoutée. Ainsi, elle remplit les conditions pour créer deux secteurs d'activité différents.

5. En second lieu, il résulte de l'instruction et notamment des pièces que produit l'ADAPEI Var-Méditerranée que l'activité de production et de commercialisation est comptabilisée distinctement et assurée par des personnels distincts et réalisée avec des moyens d'exploitation différents de celle l'activité de suivi social d'insertion. Dans ce cadre, l'association requérante a calculé la taxe sur les salaires en prenant en compte un secteur exonéré et un secteur soumis à la taxe sur la valeur ajoutée à 100 % et appliqué en cas d'affectation mixte un coefficient de taxation forfaitaire. Les éléments qu'elle a versés à l'appui de sa réclamation du 29 décembre 2014, justifiés par les données de sa comptabilité, et dont les modalités de calcul ne sont pas contestées en défense, lui permettent d'apporter la preuve des excédents de versements de taxe sur les salaires à hauteur de 137 204 euros en 2011, 128 282 euros en 2012 et 126 847 euros en 2013.

6 Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de se prononcer sur l'autre moyen de la requête, que l'ADAPEI Var-Méditerranée est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande de restitution de cotisations de taxe sur les salaires qu'elle a versées au titre des années 2011 à 2013 à hauteur de 392 333 euros.

Sur les frais liés au litige :

7. Aux termes de l'article L. 761 -1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation. ".

8. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à l'ADAPEI Var-Méditerranée d'une somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Toulon n° 1503758 du 8 juin 2017 est annulé.

Article 2 : Les cotisations de taxe sur les salaires versées par l'ADAPEI Var-Méditerranée sont réduites à hauteur de 137 204 euros au titre de l'année 2011, 128 282 euros au titre de l'année 2012 et 126 847 euros au titre de l'année 2013.

Article 3 : L'Etat versera à l'ADAPEI Var-Méditerranée une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à l'Association départementale des parents et amis de personnes handicapées mentales Var-Méditerranée (ADAPEI) et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018, où siégeaient :

- M. Barthez, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Maury, premier conseiller,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 décembre 2018.

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N° 17AMA03205

jm


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA03205
Date de la décision : 11/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: M. André MAURY
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : SOCIETE D'AVOCATS FIDAL

Origine de la décision
Date de l'import : 18/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-11;17ma03205 ?
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