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10/12/2018 | FRANCE | N°18MA02836

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 10 décembre 2018, 18MA02836


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté, en date du 20 avril 2018, par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours avec obligation de présentation.

Par un jugement n° 1801730 du 11 mai 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2018, M. E..., représenté par Me D..., d

emande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... E...a demandé au tribunal administratif de Nice d'annuler l'arrêté, en date du 20 avril 2018, par lequel le préfet des Alpes-Maritimes l'a assigné à résidence pour une durée de quarante-cinq jours avec obligation de présentation.

Par un jugement n° 1801730 du 11 mai 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 juin 2018, M. E..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 20 avril 2018 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Alpes-Maritimes, à titre principal, de réexaminer sa situation en le munissant sans délai d'une autorisation provisoire de séjour et de mettre à jour le fichier du système d'information Schengen ou, à titre subsidiaire, d'ordonner la suspension de la mesure d'éloignement ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'erreur de fait en ce qu'il lui oppose une entrée irrégulière sur le territoire français et les articles L. 511-1 et L. 511-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont donc en réalité inapplicables ;

- il ne peut faire l'objet d'un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen pour la durée de l'interdiction de retour dès lors que l'obligation de quitter le territoire français n'est pas assortie d'une interdiction de retour ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il ne peut bénéficier de soins appropriés dans son pays d'origine ;

- le préfet a fait une inexacte application de l'article L. 511-1 II 1° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne présente pas de risques de fuite.

La requête a été communiquée le 9 octobre 2018 au préfet des Alpes-Maritimes, qui n'a pas produit d'observations.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. A... Zupan, président-rapporteur, a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., né le 25 janvier 1980, de nationalité nigériane, est entré en France, selon ses déclarations, le 13 février 2012 et y a déposé une demande d'asile qui a été rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 10 septembre 2012 puis par la Cour nationale du droit d'asile le 11 juillet 2014. Il a ensuite obtenu en 2015, pour raison de santé, un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", qui a été renouvelé l'année suivante. Par un arrêté du 24 octobre 2017, le préfet des Alpes-Maritimes a cependant refusé de renouveler une seconde fois ce titre de séjour et a assorti ce refus d'une mesure d'éloignement. Par l'arrêté contesté du 20 avril 2018 le même préfet a assigné M. E... à résidence pour une durée de quarante-cinq jours, avec obligation de présentation, en vue d'organiser les modalités pratiques de son éloignement du sol français.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. En premier lieu, l'arrêté contesté vise les articles L. 561-2 5°, L. 513-1 et suivants et L. 512-1 et suivants du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, se réfère en outre aux stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, rappelle que M. E... est sous le coup d'une mesure d'éloignement, indique que l'intéressé a justifié de garanties de représentation et expose la finalité de la mesure d'assignation à résidence qu'il prescrit. Il est ainsi suffisamment motivé en fait et en droit.

3. En deuxième lieu, le préfet des Alpes-Maritimes a fondé l'arrêté contesté sur les dispositions de l'article L. 561-2 5° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et non sur ses articles L. 511-1 et L. 511-2, dont la méconnaissance est dès lors inutilement invoquée. Par ailleurs, il n'est pas contesté qu'il existait une perspective raisonnable d'organisation du départ de M. E... et que l'intéressé présentait des garanties propres à prévenir le risque qu'il se soustraie à la mesure d'éloignement prise à son encontre le 27 octobre 2017. L'allégation du requérant selon laquelle il ne présentait pas de risque de fuite n'est ainsi pas susceptible de remettre en cause la légalité de la décision en litige. Il en va de même, eu égard à l'objet de cette décision, de la circonstance, au demeurant non démontrée, que le requérant serait entré régulièrement en France contrairement à ce qu'a relevé le préfet. Les moyens tirés de l'erreur de fait ou de l'inexacte application de l'article L. 561-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent donc être écartés.

4. En troisième lieu, M. E... reprend devant la Cour les conclusions et moyens dirigés contre une décision portant obligation de quitter le territoire français prétendument contenue dans l'arrêté attaqué, sans toutefois contester le motif d'irrecevabilité qu'y a opposé le premier juge, lequel a constaté que ces conclusions étaient dirigées contre un acte dépourvu d'existence matérielle, ledit arrêté prescrivant uniquement une mesure d'assignation à résidence. Ces conclusions et moyens ne peuvent dès lors qu'être rejetés. A supposer que M. E... ait ainsi entendu exciper de l'illégalité de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 24 octobre 2017 mentionné au point 1, portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français, ce moyen ne peut qu'être également écarté dès lors que, par arrêt de ce jour n° 18MA02046, la Cour a rejeté l'appel interjeté par M. E... à l'encontre du jugement du tribunal administratif de Nice du 6 avril 2018 rejetant son recours dirigé contre ces décisions.

5. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Le requérant fait valoir qu'il réside en France depuis 2012, qu'il vit en concubinage depuis octobre 2015 avec Mme C...B..., compatriote titulaire d'une carte de séjour " vie privée et familiale " en cours de validité, et que ses deux frères vivent également sur le territoire national. Toutefois, M. E..., célibataire et sans enfant, a vécu jusqu'à l'âge de 32 ans dans son pays d'origine et ne justifie, par les pièces versées aux débats, ni d'une communauté de vie ancienne et stable avec Mme B... ni d'une insertion significative dans la société française. Dans ces conditions, et eu égard à ses effets, la décision critiquée ne peut être regardée comme portant une atteinte excessive au droit de l'intéressée au respect de sa vie privée et familiale. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit ainsi être écarté. Pour les mêmes raisons, M. E... ne peut se prévaloir, pour contester cette mesure d'assignation à résidence, d'une situation justifiant la délivrance de plein droit d'un titre de séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

7. En cinquième lieu, le requérant n'apporte aucun élément de nature à établir que son état de santé serait incompatible avec une mesure d'assignation à résidence. La décision en litige ne peut dès lors être regardée comme procédant à cet égard d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

8. En sixième lieu, l'arrêté contesté ne comporte aucune prescription ni même aucune indication relative à un signalement aux fins de non admission dans le système d'information Schengen. Par suite, les moyens visant un tel signalement sont dépourvus de toute portée utile.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nice a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet des Alpes-Maritimes du 20 avril 2017. Sa requête doit dès lors être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... E...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Alpes-Maritimes.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2018, où siégeaient :

- M. A... Zupan, président,

- M. Philippe Grimaud, premier conseiller,

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique le 10 décembre 2018.

N° 18MA02836 5


Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Références :

Publications
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Composition du Tribunal
Président : M. ZUPAN
Rapporteur ?: M. David ZUPAN
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : YOULOU

Origine de la décision
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Date de la décision : 10/12/2018
Date de l'import : 18/12/2018

Fonds documentaire ?: Legifrance


Numérotation
Numéro d'arrêt : 18MA02836
Numéro NOR : CETATEXT000037815944 ?
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-12-10;18ma02836 ?
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