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27/11/2018 | FRANCE | N°18MA00471

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 27 novembre 2018, 18MA00471


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1706022 du 28 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2018,

Mme C..., représentée par Me F..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 décembre 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 24 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1706022 du 28 décembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 janvier 2018, Mme C..., représentée par Me F..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 28 décembre 2017 du tribunal administratif de Marseille ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 24 juillet 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer, à titre principal, un certificat de résidence algérien portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et, à titre subsidiaire, de procéder à un nouvel examen de sa situation sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du délai de deux mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de dix jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous les mêmes conditions d'astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- le tribunal a omis de répondre à plusieurs moyens soulevés notamment ceux tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise par le préfet dans l'appréciation de sa situation personnelle ;

- ces moyens ne sont pas visés dans le jugement ;

- l'arrêté méconnaît le paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il n'existe pas de traitement approprié en Algérie pour soigner son enfant ;

- l'observation générale n° 14 (2013) du 29 mai 2013, du comité des droits de l'enfant des Nations Unies a été méconnue ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle et familiale ;

- il méconnaît également les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet des Bouches-du-Rhône qui n'a pas produit de mémoire.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 19 février 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New-York le 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Barthez, président assesseur, pour présider la formation de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de M. Antonetti, président de la 4ème chambre, en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Carotenuto a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante algérienne, est entrée en France le 27 août 2015 avec ses trois enfants, sous couvert d'un visa Schengen de type C. A la suite de l'avis favorable du médecin de l'agence régionale de santé, elle a bénéficié de trois autorisations provisoires de séjour valables du 20 novembre 2015 au 6 mars 2017 en raison de sa qualité de parent d'enfant malade. Elle a sollicité, le 24 janvier 2017, la délivrance d'un certificat de résidence en qualité de parent d'enfant malade. Mme C... relève appel du jugement du 28 décembre 2017 du tribunal administratif de Marseille qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a refusé de lui délivrer un titre de séjour et l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. A l'appui de sa demande, Mme C... a notamment invoqué, dans son mémoire en réplique, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et de l'erreur manifeste commise par le préfet dans l'appréciation de sa situation personnelle. Le tribunal ne s'est pas prononcé sur ces moyens qui ne sont d'ailleurs pas visés et qui n'étaient pas inopérants. Le jugement est dès lors entaché d'irrégularité et doit, pour ce motif, être annulé.

3. Il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Marseille.

Sur la légalité de l'arrêté contesté :

4. En premier lieu, par un arrêté du 21 mars 2017, régulièrement publié au recueil des actes administratifs le 24 mars 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône a donné délégation à Mme E... pour signer tous les actes dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent les décisions en matière de police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de l'auteur de l'acte manque en fait et doit être écarté.

5. En deuxième lieu, aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent des enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale ". Il résulte de ces stipulations que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant.

6. Il ressort des pièces du dossier que le jeuneD..., né en 2014, fils de Mme C..., présente une polypathologie liée à la trisomie 21 dont il est atteint. Dès son arrivée en France en septembre 2015 et pendant les dix-huit mois durant lesquels Mme C... a bénéficié d'autorisations de séjour, D...a été pris en charge par différents spécialistes au sein du Centre d'action médico-sociale précoce (CAMSP) à Aix-en-Provence. Dans le cadre de l'examen de la demande d'admission au séjour en qualité de parent d'enfant malade présentée par Mme C..., le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans l'avis émis le 26 juin 2017, que si l'état de santé de D...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine " eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé ". Les pièces médicales produites dont le certificat médical du 5 septembre 2017 du DrB..., qui indique que " La prise en charge au CAMSP est bénéfique pour accompagner et favoriser le développement psychomoteur deD..., un arrêt de celle-ci serait préjudiciable pour lui. Il est indiqué pour un développement optimal de D...qu'il n'y ait pas de rupture dans les soins prodigués (...) ", ainsi que l'attestation de la présidente de l'Association Trisomie 21 Section Bouches-du-Rhône du 31 juillet 2017, ne permettent pas de remettre en cause l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Dans ces conditions, Mme C... n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté attaqué a porté atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant et a méconnu les stipulations du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

7. En troisième lieu, l'observation générale n° 14 (2013) du Comité des droits de l'enfant des Nations Unies ne contient pas de dispositions dont Mme C... peut utilement se prévaloir dans le cadre de la présente instance.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Mme C... est entrée en France en septembre 2015 avec ses enfants. Aucune intégration sociale ou professionnelle ne ressort des pièces du dossier. Par ailleurs, le père de ses enfants réside en Algérie. Dans ces conditions, eu égard à la brièveté de son séjour en France, et alors même que ses enfants y sont scolarisés, l'arrêté contesté n'a pas porté une atteinte disproportionnée au droit de Mme C... au respect de sa vie privée et familiale et n'a donc pas méconnu les stipulations précédemment citées. Pour les mêmes motifs, cet arrêté n'est entaché d'aucune erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de Mme C....

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 24 juillet 2017. Ses conclusions présentées aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées pour l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent, par voie de conséquence, être accueillies.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du 28 décembre 2017 du tribunal administratif de Marseille est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme C... devant le tribunal administratif de Marseille et le surplus des conclusions de sa requête sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., à Me F... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 13 novembre 2018, où siégeaient :

- M. Barthez, président assesseur, président de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- M. Maury, premier conseiller,

- Mme Carotenuto, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 novembre 2018.

2

N° 18MA00471

mtr


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00471
Date de la décision : 27/11/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BARTHEZ
Rapporteur ?: Mme Sylvie CAROTENUTO
Rapporteur public ?: Mme BOYER
Avocat(s) : ZERROUKI

Origine de la décision
Date de l'import : 04/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-11-27;18ma00471 ?
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