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12/10/2018 | FRANCE | N°18MA00297

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 12 octobre 2018, 18MA00297


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 octobre 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail du 10 février 2015, a autorisé la société Sotalis à le licencier.

Par un jugement n° 1503863 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par

une requête, enregistrée le 22 janvier 2018, M. A..., représenté par Me E..., demande à la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler pour excès de pouvoir la décision du 7 octobre 2015 par laquelle le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social, après avoir annulé la décision de l'inspecteur du travail du 10 février 2015, a autorisé la société Sotalis à le licencier.

Par un jugement n° 1503863 du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 22 janvier 2018, M. A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 23 novembre 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 7 octobre 2015 du ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social autorisant son licenciement ;

3°) de mettre à la charge de la société Sotalis la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les faits qui lui sont reprochés n'ont pas de caractère fautif ;

- il existe un lien entre la demande d'autorisation de licenciement présentée par son employeur et son mandat de représentant de section syndicale.

Par un mémoire en défense, enregistré le 27 mars 2018, la société Sotalis, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à la ministre du travail qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 relatif aux modalités d'application des dispositions du code du travail concernant la durée du travail dans les entreprises de transport routier de marchandises ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de M. A....

1. Considérant que, sur recours hiérarchique de la société Sotalis qui exploite une activité de transports terrestre, le ministre du travail, de l'emploi, de la formation professionnelle et du dialogue social a, par une décision du 7 octobre 2015, annulé la décision du 10 février 2015 de l'inspecteur du travail de l'unité territoriale de Vaucluse refusant à la société l'autorisation de licencier M. A..., salarié protégé, et autorisé cette société à le licencier ; que M. A... relève appel du jugement du 23 novembre 2017, par lequel le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision ministérielle du 7 octobre 2015 ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation de la décision du 7 octobre 2015 du ministre chargé du travail :

2. Considérant, d'une part, qu'en vertu des dispositions du code du travail, le licenciement des salariés légalement investis de fonctions représentatives, qui bénéficient d'une protection exceptionnelle dans l'intérêt de l'ensemble des travailleurs qu'ils représentent, ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail ; que, lorsque leur licenciement est envisagé, celui-ci ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou avec leur appartenance syndicale ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail saisi et, le cas échéant, au ministre compétent, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

3. Considérant, d'autre part, que sauf atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos, l'instauration d'une nouvelle répartition du travail sur la journée relève du pouvoir de direction de l'employeur et constitue un simple changement des conditions de travail dont le refus par le salarié est susceptible de caractériser une faute de nature à justifier son licenciement ; qu'en revanche, en cas d'atteinte excessive au droit du salarié au respect de sa vie personnelle et familiale ou à son droit au repos l'instauration d'une nouvelle répartition du travail sur la journée constitue une modification du contrat de travail ;

4. Considérant que pour autoriser le licenciement de M. A..., chauffeur routier et représentant de section syndicale, le ministre chargé du travail a relevé que le requérant avait refusé à plusieurs reprises de se conformer aux directives de sa hiérarchie et aux instructions d'exploitation en matière de repos quotidien, lesquels refus avaient entraîné des retards de livraison ; qu'il a ensuite considéré qu'un retard de trente minutes chez un client qui lui était reproché par son employeur était établi ; qu'il a enfin pris en compte la circonstance que l'intéressé s'était battu chez un client avec un collègue, tout en ne retenant pas l'allégation selon laquelle M. A... aurait à cette occasion provoqué ce même collègue ou proféré à son égard " des insanités " ; que le ministre a estimé que ces faits, pris dans leur ensemble, étaient constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante de nature à justifier le licenciement du requérant ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier qu'au moins à trois reprises, les 23 septembre, 1er octobre et 31 octobre 2014, M. A... a refusé de se conformer aux directives de son employeur d'appliquer un temps de repos quotidien réduit à neuf heures maximum tel que prévu par l'article 8 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983 susvisé pour le personnel roulant effectuant des transports soumis au règlement (CEE) n° 3820/85 du Conseil du 20 décembre 1985 ; que ce refus a été réitéré par un courrier du 5 octobre 2014 ; que pour opposer un tel refus, M. A... ne s'est jamais prévalu de ses obligations familiales ; que ces instructions de l'employeur, conformes à l'article 8 du décret n° 83-40 du 26 janvier 1983, ne portent pas atteinte au droit au repos de l'intéressé et ne sont pas davantage contraires aux préconisations du médecin du travail qui, en l'espèce, a donné un accord à cette répartition du travail sur la journée dès lors que le repos quotidien de neuf heures s'effectuait dans la tranche horaire 21 heures / 5 heures ; que ces directives relevaient, dans ces conditions, du pouvoir de direction de l'employeur et constituaient non pas une modification du contrat de travail du salarié mais un simple changement de ses conditions de travail ; qu'en refusant de les appliquer, alors qu'en outre il ressort des pièces du dossier que ce refus a entraîné des retards de livraison chez les clients de la société Sotalis, M. A... a commis une faute ;

6. Considérant que M. A... ne conteste pas les deuxième et troisième griefs retenus par le ministre chargé du travail à son encontre tenant, d'une part, au fait de ne pas avoir justifié d'un retard de trente minutes à la livraison chez un client et de s'être battu avec un autre chauffeur routier de la société Sotalis le 17 octobre 2014 sur le site d'une société cliente où il assurait une livraison ; que les faits allégués par l'intéressé, à savoir qu'il n'aurait pas proféré d'injures à l'encontre de son collègue contrairement aux indications de son employeur et qui n'ont d'ailleurs pas été retenus par le ministre, et qu'il ne serait pas à l'origine de l'altercation, ne peuvent atténuer la gravité de la faute commise par M. A... pour avoir participé à des violences physiques en présence des représentants d'une société cliente ;

7. Considérant que ces faits, pris dans leur ensemble, sont constitutifs d'une faute d'une gravité suffisante pour justifier le licenciement de M. A... ; qu'il ne ressort pas, en revanche, des pièces du dossier que les faits ayant conduit à son licenciement seraient de nature à caractériser un harcèlement moral de la part de son employeur ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que la société Sotalis aurait tenté d'entraver l'exercice par M. A... de son mandat et que la demande de licenciement serait en rapport avec l'exercice de ses fonctions représentatives et son appartenance syndicale, alors qu'il ressort de ces mêmes pièces qu'avant même sa désignation comme représentant de section syndicale, l'intéressé avait déjà fait l'objet de deux avertissements, le 27 mai 2014 pour insultes et non respect des directives de l'employeur et le 20 juin 2014 pour usage à des fins personnelles d'un véhicule de l'entreprise ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement du 23 novembre 2017, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ;

Sur les frais liés au litige :

9. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de la société Sotalis qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions de la société Sotalis présentées au titre des mêmes dispositions ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la société Sotalis tendant au bénéfice des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à la ministre du travail et à la société Sotalis.

Délibéré après l'audience du 28 septembre 2018 où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président-assesseur,

- Mme B..., première conseillère,

Lu en audience publique, le 12 octobre 2018.

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N° 18MA00297

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00297
Date de la décision : 12/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

66-07-01-04-02-01 Travail et emploi. Licenciements. Autorisation administrative - Salariés protégés. Conditions de fond de l'autorisation ou du refus d'autorisation. Licenciement pour faute. Existence d'une faute d'une gravité suffisante.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SELAS KYM

Origine de la décision
Date de l'import : 23/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-10-12;18ma00297 ?
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