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20/09/2018 | FRANCE | N°18MA00247

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 20 septembre 2018, 18MA00247


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 du préfet du Var lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1703316 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2018, M.B..., représenté par Me C

..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 29 déc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 25 septembre 2017 du préfet du Var lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Par un jugement n° 1703316 du 29 décembre 2017, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 janvier 2018, M.B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 29 décembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Var du 25 septembre 2017 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Var de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;

- la décision est entachée d'une erreur de droit, le préfet ayant considéré que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas applicables aux ressortissants tunisiens ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie d'une résidence de plus de dix ans sur le territoire français ;

- elle méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

La requête a été communiquée au préfet du Var qui n'a pas produit de mémoire.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,

- et les observations de MeC..., représentant M.B....

Considérant ce qui suit :

1. L'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose que " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) constituent une mesure de police... ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

2. Les exigences de motivation d'une décision administrative défavorable, notamment d'un arrêté portant obligation de quitter le territoire, n'imposent pas à l'autorité compétente de mentionner, dans le détail, les circonstances propres à la situation personnelle du destinataire de cette décision mais uniquement d'énoncer les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement. La décision contestée comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, alors même qu'elle n'indiquerait pas pour chacune des années de présence les raisons conduisant le préfet à estimer que les justificatifs produits n'étaient pas suffisants pour établir la réalité de la résidence habituelle en France de M.B..., elle est suffisamment motivée au regard des exigences posées par les dispositions de l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration. Le moyen tiré de ce que cette décision serait insuffisamment motivée doit être écarté.

3. Portant sur la délivrance des catégories de cartes de séjour temporaire prévues par les dispositions auxquelles il renvoie, l'article L. 313-14 n'institue pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-tunisien prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, un ressortissant tunisien souhaitant obtenir un titre de séjour au titre d'une telle activité ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national, s'agissant d'un point déjà traité par l'accord franco-tunisien, au sens de l'article 11 de cet accord. Toutefois, si l'accord franco-tunisien ne prévoit pas, pour sa part, de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, il y a lieu d'observer que ses stipulations n'interdisent pas au préfet de délivrer un titre de séjour à un ressortissant tunisien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit. Il appartient au préfet, dans l'exercice du pouvoir discrétionnaire dont il dispose sur ce point, d'apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation.

4. Il résulte de ce qui a été indiqué au point précédent que M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Var a entaché la décision contestée d'une erreur de droit en mentionnant que les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'étaient pas applicables aux ressortissants tunisiens.

5. M.B..., ressortissant tunisien né le 8 juillet 1973, déclare être entré en France le 3 août 2006 muni d'un visa de court séjour et y être demeuré depuis cette date. Toutefois, les documents qu'il produit consistant pour chaque année uniquement en deux courriers de l'assureur de deux scooters acquis le premier le 27 août 2006 et le second le 24 juillet 2014, et en deux reçus de paiement de la cotisation d'assurance, et comprenant en outre, pour les années 2006, 2007, 2014 et 2015, une facture d'achat, pour les années 2007 et 2010, une prescription médicale, et un procès-verbal d'infraction en 2014 et 2015, n'établissent pas de façon suffisamment probante une présence habituelle en France de l'intéressé notamment en ce qui concerne les années 2006 à 2013. Les attestations, non circonstanciées, ne permettent pas davantage de justifier de la durée de présence alléguée. Le requérant ne démontre pas une intégration particulière au sein de la société française alors qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une obligation de quitter le territoire du préfet du Var du 9 octobre 2011. Il ne justifie pas davantage avoir transféré le centre de ses intérêts privés et familiaux en France. Ainsi, il n'établit pas que sa demande de titre de séjour répondrait à des considérations humanitaires ou se justifierait au regard de motifs exceptionnels. Enfin, la circonstance que l'intéressé est titulaire d'un contrat de travail à durée indéterminée qui a fait l'objet d'une demande d'autorisation de travail n'est pas de nature à constituer par elle-même un motif exceptionnel d'admission au séjour au sens des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, c'est à bon droit que le préfet a refusé de l'admettre au séjour sur ce fondement.

6. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : / (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

7. Pour les motifs exposés au point 5, le requérant ne justifie pas avoir transféré en France le centre de ses intérêts privés et familiaux. Il est célibataire et sans enfant. Le requérant, qui déclare être entré sur le territoire national à l'âge de trente-trois ans, n'est pas isolé dans son pays d'origine où il a passé la majeure partie de son existence et où vivent son père et une partie de sa fratrie. Il ne justifie d'aucune intégration particulière en France. Dans ces conditions, l'intéressé, quand bien même il disposerait d'une attestation d'hébergement en France depuis 2014 et d'un contrat de travail à durée indéterminée ayant fait l'objet d'une demande d'autorisation de travail, n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée, au regard des buts poursuivis par l'administration, aurait porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée. Cette décision ne méconnaît pas, par suite, les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans. (...) ".

9. Il résulte de ce qui a été dit au point 5 que M. B...ne justifie pas d'une présence habituelle en France avant l'année 2014. Dès lors, le préfet du Var n'était pas tenu de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile la demande d'admission exceptionnelle au séjour.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande.

11. Le présent arrêt, qui rejette la requête, n'implique aucune mesure d'exécution. Les conclusions présentées à fin d'injonction et d'astreinte par M. B...ne peuvent qu'être rejetées.

12. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, verse quelque somme que ce soit à M. B...au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Var.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2018 où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- Mme Jorda-Lecroq, présidente-assesseure,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2018.

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N° 18MA000247


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 18MA00247
Date de la décision : 20/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: M. ARGOUD
Avocat(s) : BOCHNAKIAN et LARRIEU-SANS

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-09-20;18ma00247 ?
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