Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme C... A...a demandé au tribunal administratif de Montpellier de prononcer l'annulation de l'arrêté du 4 mai 2017 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1702688 du 6 juillet 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 14 décembre 2017, Mme A..., représentée par Me B... demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 juillet 2017 ;
2°) d'annuler l'arrêté préfectoral du 4 mai 2017 ;
3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire d'enjoindre au préfet de l'Hérault de réexaminer sa demande dans un délai de deux mois sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991.
Elle soutient que :
- en l'absence de notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile dans une langue qu'elle comprend ainsi que l'exigent les dispositions des articles R. 733-32 et R. 213-6 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet ne pouvait considérer qu'elle ne bénéficiait plus d'un droit au séjour ;
- la décision est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa situation au regard de son droit au séjour au jour où elle a été prise ;
- la décision fixant le pays de destination est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux des risques encourus en cas de retour au Nigeria ;
- elle a été prise en violation des dispositions de l'article L. 513-2 du même code.
Par un mémoire en défense, enregistré le 14 juin 2018, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.
Il fait valoir que les moyens présentés par Mme A... ne sont pas fondés.
Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 30 octobre 2017.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée, relative à l'aide juridique
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Boyer,
- et les observations de Me D... substituant Me B..., représentant MmeA....
1. Considérant que Mme A..., de nationalité nigeriane, relève appel du jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 juillet 2017 rejetant sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 mai 2017 par lequel le préfet de l'Hérault l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger admis à séjourner en France bénéficie du droit de s'y maintenir jusqu'à la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. Le a du 3° du II de l'article L. 511-1 n'est pas applicable. " ; qu'aux termes de l'article R. 733-32 du même code : " Le secrétaire général de la Cour notifie la décision de la Cour au requérant par lettre recommandée avec demande d'avis de réception et dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l'article R. 213-3 (...) " ; qu'il résulte du premier alinéa de l'article R. 213-6 du même code, qui reprend les dispositions du deuxième alinéa de l'article R. 213-3 à la suite de leur modification par le décret du 21 septembre 2015 susvisé, que : " l'étranger est informé, dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, du caractère positif ou négatif de la décision prise (...) " ;
3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée par le secrétaire général de la Cour nationale du droit d'asile ; qu'en l'absence d'une telle notification régulière et notamment de ce que le caractère positif ou négatif de la décision lui a été indiqué dans une langue dont il est raisonnable de penser qu'il la comprend, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire ;
4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier, et n'est d'ailleurs pas contesté, que Mme A... a indiqué, à l'occasion de sa demande d'asile, qu'elle ne comprenait pas le français et a reçu l'assistance d'un interprète en langue anglaise lors des procédures suivies devant l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et devant la Cour Nationale du droit d'asile ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que Mme A... aurait été informée du sens de la décision de la Cour nationale du droit d'asile dans une langue qu'elle comprend ; que le préfet qui supporte la charge de la preuve n'apporte aucun élément susceptible de démontrer le contraire ; que, par suite Mme A... est fondée à demander pour ce motif l'annulation de l'arrêté contesté ;
5. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme A... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;
6. Considérant qu'eu égard au motif d'annulation retenu, l'exécution du présent arrêt n'implique aucune mesure d'exécution ; que, dès lors, les conclusions tendant au prononcé d'une injonction assortie d'une astreinte doivent être rejetées ;
7. Considérant que Mme A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, le versement à Me B..., son avocat, d'une somme de 1 500 euros ; que conformément aux dispositions précitées de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 modifiée, le recouvrement en tout ou partie de cette somme vaudra renonciation à percevoir, à due concurrence, la part contributive de l'Etat ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 6 juillet 2017 et l'arrêté du préfet de l'Hérault du 4 mai 2017 sont annulés.
Article 2 : L'Etat versera à Me B... la somme de 1 500 euros en application du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991. Me B... renoncera, s'il recouvre cette somme, à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme A... est rejeté.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C...A..., à Me B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.
Délibéré après l'audience du 19 juin 2018, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 3 juillet 2018.
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N° 17MA04827
mtr