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26/06/2018 | FRANCE | N°17MA04445

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 9ème chambre - formation à 3, 26 juin 2018, 17MA04445


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Bouillargues a prononcé sa révocation et l'avis du 19 octobre 2015 par lequel le conseil de discipline de recours de la région Languedoc Roussillon a rejeté son recours.

Par un jugement n° 1503966 du 21 septembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2017, e

t un mémoire enregistré le 24 mai 2018, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...a demandé au tribunal administratif de Nîmes d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Bouillargues a prononcé sa révocation et l'avis du 19 octobre 2015 par lequel le conseil de discipline de recours de la région Languedoc Roussillon a rejeté son recours.

Par un jugement n° 1503966 du 21 septembre 2017, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 novembre 2017, et un mémoire enregistré le 24 mai 2018, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nîmes du 21 septembre 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Bouillargues a prononcé sa révocation ;

3°) d'annuler l'avis du 19 octobre 2015 par lequel le conseil de discipline de recours de la région Languedoc Roussillon a rejeté son recours ;

4°) de mettre à la charge de la commune de Bouillargues une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal a estimé à tort que l'avis n'était pas une décision faisant grief ;

- cet avis est entaché d'une erreur de droit, de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation en ce que notamment le conseil n'a pas recherché si la sanction était proportionnée à la gravité des faits reprochés ;

- la procédure disciplinaire est irrégulière dès lors que la lettre l'informant de l'engagement de la procédure disciplinaire ne visait pas de faits précis ;

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- ces vices sont susceptibles d'avoir exercé une influence sur la sens de la décision contestée et de l'avoir privé d'une garantie ;

- l'arrêté est entaché d'erreurs de fait, de droit et d'une erreur manifeste d'appréciation en ce qu'il conteste la matérialité des faits reprochés, qu'il pouvait être affecté à l'entretien des espaces verts et qu'il est bien intégré dans la commune ;

- le maire s'est cru lié par la condamnation pénale prononcée.

Par un mémoire en défense, enregistré le 10 avril 2018, la commune de Bouillargues, représentée par la SCP d'avocats Vinsonneau-Palliès Noy Gauer et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. C... une somme de 2 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- le décret n° 89-677 du 18 septembre 1989 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné M. Portail en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Lopa Dufrénot,

- les conclusions de M. Roux, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant M. C..., et de Me A...., représentant la commune de Bouillargues.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., adjoint technique territorial de 2ème classe, employé par la commune de Bouillargues, exerçait des fonctions principales d'entretien des espaces verts et de la piscine municipale et à titre provisoire des fonctions d'animation sur le temps périscolaire des écoles. Par arrêté du 4 novembre 2014, le maire de la commune de Bouillargues a prononcé sa révocation. Par avis du 19 octobre 2015, le conseil de discipline de recours a rejeté son recours. Par le jugement attaqué, dont M. C... relève appel, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 novembre 2014 par lequel le maire de la commune de Bouillargues a prononcé sa révocation et de l'avis du 19 octobre 2015 qui a rejeté son recours.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'article 89 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale dispose que les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes dont le quatrième groupe comprend la révocation. L'article 91 de la même loi énonce que les fonctionnaires qui ont fait l'objet d'une sanction des deuxième, troisième et quatrième groupes peuvent introduire un recours auprès du conseil de discipline départemental ou interdépartemental dans les cas et conditions fixés par un décret en Conseil d'Etat. Selon le même article, l'autorité territoriale ne peut prononcer de sanction plus sévère que celle proposée par le conseil de discipline de recours.

3. Comme l'ont jugé, à bon droit, les premiers juges, l'avis du conseil de discipline de recours, qui, en application de l'article 91 de la loi du 26 janvier 1984, oblige l'autorité disciplinaire à réduire ou à annuler la sanction initialement prononcée, ne présente pas, à l'égard de l'agent, le caractère d'une décision faisant grief. Tel est le cas de l'avis du 19 octobre 2015 par lequel le conseil de discipline de recours se prononçant en faveur d'une mesure de révocation, a rejeté le recours de M. C.... Ainsi le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit donc être écarté.

Sur la légalité de l'arrêté du 4 novembre 2014 :

En ce qui concerne la légalité externe de l'arrêté contesté :

4. En premier lieu, l'article 4 du décret du 28 septembre 1989 énonce que l'autorité investie du pouvoir disciplinaire informe par écrit l'intéressé de la procédure disciplinaire engagée contre lui, lui précise les faits qui lui sont reprochés et lui indique qu'il a le droit d'obtenir la communication intégrale de son dossier individuel au siège de l'autorité territoriale et la possibilité de se faire assister par un ou plusieurs conseils de son choix.

5. Il ressort des pièces du dossier que dans le courrier du 2 juin 2014, en relevant que compte tenu de la " condamnation à une peine de prison pour des faits graves ", était engagée une procédure disciplinaire, le maire de la commune a énoncé les circonstances de fait avec une précision telle que M. C... était informé des motifs conduisant l'autorité administrative à décider de l'ouverture d'une procédure disciplinaire.

6. En second lieu, l'article 1er de la loi du 11 juillet 1979, aujourd'hui codifié au code des relations entre le public et l'administration, dispose que : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) / - infligent une sanction (...) ". L'article 3 de cette même loi précise que la motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision. L'article 19 de la loi susvisée du 13 juillet 1983 énonce que la décision prononçant une sanction disciplinaire doit être motivée. Ces dispositions imposent à l'autorité qui prononce la sanction de préciser elle-même, dans sa décision, les griefs qu'elle entend retenir à l'encontre de l'agent concerné, de telle sorte que ce dernier puisse, à la seule lecture de cette décision, connaître les motifs de la sanction qui le frappe.

7. Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté de révocation en litige mentionne qu'il est reproché à M. C... " d'avoir commis un comportement délictuel en lien avec ses fonctions d'animateur " et qu'il " a fait l'objet d'une condamnation pénale ". Une telle motivation est suffisamment circonstanciée pour mettre à même M. C... de déterminer les faits que l'autorité disciplinaire lui reprochait et ainsi les motifs de la sanction. Le moyen tiré d'une insuffisante motivation ne peut qu'être écarté.

En ce qui concerne la légalité interne de l'arrêté contesté :

8. En premier lieu, il ne ressort pas de la lecture de l'arrêté contesté qu'en visant l'avis du conseil de discipline du 17 octobre 2014, le maire de la commune de Bouillargues se serait estimé tenu par cet avis.

9. En second lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

10. En outre, l'autorité de la chose jugée en matière pénale qui s'impose aux autorités administratives ne s'attache qu'à la constatation matérielle des faits mentionnés dans les décisions des juridictions de jugement qui statuent sur le fond de l'action publique et qui sont le support nécessaire du dispositif.

11. Il est constant que, par jugement du tribunal correctionnel de Nîmes du 7 avril 2014, définitif, M. C... a été condamné à une peine de trois ans dont deux ans assortis d'un sursis avec mise à l'épreuve comportant l'interdiction de se livrer à une activité professionnelle en contact avec des mineurs pour des faits d'agression sexuelle sur mineur de 15 ans et détention d'images de mineur présentant un caractère pornographique. En se fondant sur la nature des faits commis par l'intéressé, ayant donné lieu à condamnation, par le jugement précité devenu définitif, pour engager une procédure disciplinaire à raison des mêmes faits en lien avec les fonctions d'animateur que le requérant, ainsi qu'il ressort des pièces du dossier, exerçait à titre accessoire et temporaire, le maire de la commune n'a pas entaché son arrêté d'une erreur de droit.

12. Les fais relatés au point 11, au demeurant commis dans le cadre du service, constituent une faute de nature à justifier une sanction disciplinaire.

13. Il est constant qu'à la suite de l'interpellation le 22 juillet 2014, à son domicile, M. C... maintenu en détention provisoire pendant près de trois semaines, a été placé sous contrôle judiciaire jusqu'à l'audience du 7 avril 2017 où il a été condamné ainsi qu'il a été dit au point n° 11. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation de la psychologue du 1er août 2012 et des articles diffusés dans la presse que la révélation de ces faits d'une réelle gravité a eu un retentissement sur le service au sein de l'école où exerçait M. C..., ses collègues ayant été choqués. Eu égard à leur nature particulière et leur gravité, et alors même que M. C... assurait les fonctions d'animation, comme il a été dit, à titre temporaire, ces agissements portent atteinte à la considération due aux fonctions d'animateur exercées par celui-ci auprès notamment des parents d'enfants fréquentant l'école et la piscine, jetant le discrédit sur la collectivité, notamment à travers la publicité qui a été réservée aux faits. En raison de la gravité des faits et de l'atteinte portée à l'image de l'administration et des fonctions d'animation auprès de mineurs, en dépit d'états de service très satisfaisants, de l'absence de sanction disciplinaire antérieure, de l'exercice à titre principal de l'entretien des espaces verts, de la circonstance alléguée qu'eu égard au quantum de la peine prononcée et à sa qualité de primo-délinquant, aucun mandat de dépôt n'a été prononcé par la juridiction répressive autorisant le requérant à bénéficier d'un aménagement de peine, en décidant de prononcer sa révocation, le maire de la commune de Bouillargues n'a pas pris une sanction disproportionnée.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nîmes a rejeté ses conclusions dirigées contre l'arrêté du maire de la commune de Bouillargues du 4 novembre 2014.

Sur les frais liés au litige :

15. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de la commune de Bouillargues, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. C... demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de M. C... la somme que demande la commune de Bouillargues au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par la commune de Bouillargues au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C...et à la commune de Bouillargues.

Délibéré après l'audience du 12 juin 2018, où siégeaient :

- M. Portail, président-assesseur, présidant la formation du jugement en application de l'article R. 222.26 du code de justice administrative,

- Mme D..., première conseillère,

- Mme Lopa Dufrénot, première conseillère.

Lu en audience publique, le 26 juin 2018.

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N° 17MA04445


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 9ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA04445
Date de la décision : 26/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. PORTAIL
Rapporteur ?: Mme Micheline LOPA-DUFRENOT
Rapporteur public ?: M. ROUX
Avocat(s) : TURMEL

Origine de la décision
Date de l'import : 03/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-26;17ma04445 ?
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