La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

14/06/2018 | FRANCE | N°17MA02608

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 14 juin 2018, 17MA02608


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1700514 du 10 mai 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une

requête, enregistrée le 14 juin 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 21 septembre 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1700514 du 10 mai 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 14 juin 2017, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 10 mai 2017 ;

2°) d'annuler la décision du 21 septembre 2016 du préfet de l'Hérault ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et de lui délivrer, durant cet examen, une autorisation provisoire de séjour à compter de la notification de la décision à intervenir, sous la même astreinte.

Il soutient que :

- la décision portant refus de séjour est insuffisamment motivée ;

- le préfet n'a pas consulté la commission du titre de séjour ;

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît également les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York du 26 janvier 1990 ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision l'obligeant à quitter le territoire national est insuffisamment motivée ;

- elle est fondée sur une décision de refus de séjour elle-même illégale ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 18 septembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York du 26 janvier 1990 ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 modifiée relative à l'aide juridique ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la Cour a désigné Mme Évelyne Paix, président assesseur, pour présider par intérim la 3ème chambre de la cour administrative de Marseille.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de M. Sauveplane,

1. Considérant que M. B..., ressortissant tunisien né en 1991, relève appel du jugement du 10 mai 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 21 septembre 2016 par laquelle le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours à compter de sa notification et a fixé le pays de destination ;

Sur la légalité de la décision de refus de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, que la décision de refus de séjour mentionne, notamment, que le requérant déclare, sans en apporter la preuve, être entré en France au mois d'octobre 2014, démuni de visa et sans être autorisé à s'y établir, que M. B... ne fournit aucun justificatif permettant d'établir sa présence réelle avant le 22 février 2016 et que le requérant qui a reconnu par anticipation le 22 février 2016 son enfant né le 9 juin 2016, s'est marié le 27 juillet 2016 avec la mère de cet enfant, ressortissante tunisienne, titulaire d'un titre de séjour ; que la décision souligne également que M. B... ne démontre pas être dans l'impossibilité de regagner son pays d'origine où il a vécu plus de vingt-trois ans et où résident ses parents et six de ses frères et soeurs, le temps nécessaire pour la mise en place par son épouse de la procédure de regroupement familial, que M. B... ne démontre pas avoir établi de manière stable et durable en France le centre de ses intérêts privés et familiaux, que sa demande d'admission au séjour ne relève pas de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels lui permettant de se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et que M. B... n'entre dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour en application du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ou de l'accord franco-tunisien ; que la décision relève enfin que l'intéressé n'allègue pas encourir de risque pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine et que les conséquences d'une obligation de quitter le territoire à son égard ne paraissent pas disproportionnées par rapport à son droit au respect de sa vie privée et familiale dont il pourrait se prévaloir au titre de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré d'un défaut de motivation de la décision doit être écarté ;

3. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République " et qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2° Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

4. Considérant que M. B... déclare être entré en France en octobre 2014 mais n'apporte de preuves de sa présence en France qu'à compter du 22 février 2016, date de sa reconnaissance de paternité reportée mentionnée au point 2 ; que, même en retenant la date d'entrée en France dont il se prévaut, il a vécu jusqu'à l'âge de vingt-trois ans en Tunisie, Etat dans lequel il n'est pas contesté que résident ses parents et six de ses frères et soeurs ; que, même s'il s'est marié le 27 juillet 2016 avec une compatriote en situation régulière, mère de l'enfant née le 9 juin 2016, la présence en France de M. B... est récente ; qu'il ne démontre pas être dans l'impossibilité de reconstituer l'unité de sa cellule familiale dans son pays d'origine, dès lors que son épouse possède également la nationalité tunisienne ; que, dans ces conditions, le préfet de l'Hérault n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte excessive et disproportionnée par rapport au but en vue duquel cette mesure a été décidée et n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ; qu'il n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de M. B... ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions politiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

6. Considérant que M. B... déclare participer " activement à l'éducation de ses deux filles avec lesquelles il vit " mais n'établit ni être le père de deux filles vivant en France ni contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son enfant née le 9 juin 2016 ; que, dès lors, il n'est pas fondé à soutenir que l'intérêt supérieur de la seule de ses enfants dont l'existence est prouvée n'aurait pas été suffisamment pris en compte ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département, est instituée une commission du titre de séjour (...) " et qu'aux termes de l'article L. 312-2 du même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'en l'espèce et ainsi qu'il a été dit au point 4, M. B... ne justifie pas qu'il entrait effectivement dans le champ d'application de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'est pas fondé à soutenir que la décision contestée aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. Elle n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision relative au séjour (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que la décision prononçant l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle de la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour ; que le préfet a visé précisément dans l'arrêté attaqué les dispositions sur le fondement desquelles a été prise l'obligation de quitter le territoire français et a suffisamment motivé la décision de refus de séjour comme il a été dit au point 2 ; qu'ainsi, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la décision doit être écarté ;

9. Considérant, en deuxième lieu, que les conclusions d'annulation dirigées contre la décision portant refus de séjour étant rejetées, M. B... n'est pas fondé à se prévaloir, par la voie de l'exception, de l'illégalité de cette décision pour soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait privée de base légale ;

10. Considérant, en troisième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux indiqués au point 4, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'en outre, M. B... ne se trouvait pas dans la situation des étrangers qui, pouvant prétendre à un titre de séjour de plein droit, ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que le préfet n'a pas non plus commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

11. Considérant qu'il résulte de l'ensemble de ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées au titre des frais de procédure ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., à Me C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 31 mai 2018, où siégeaient :

- Mme Paix, président assesseur, président de la formation de jugement par intérim,

- M. Haïli, premier conseiller,

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 14 juin 2018.

4

N° 17MA02608


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02608
Date de la décision : 14/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers.

Étrangers - Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : Mme PAIX
Rapporteur ?: M. Mathieu SAUVEPLANE
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : BAUDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 26/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-14;17ma02608 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award