Vu la procédure suivante : Procédure contentieuse antérieure : La société à responsabilité limitée (SARL) Bodeva Communication a demandé au tribunal administratif de Montpellier de lui accorder la restitution du crédit d'impôt institué en faveur des métiers d'art au titre de l'exercice clos en 2012. Par un jugement n° 1601302 du 26 juin 2017, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande. Procédure devant la Cour : Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 août 2017 et le 4 mai 2018, la SARL Bodeva Communication, représentée par MeA..., demande à la Cour : 1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 juin 2017 ; 2°) de lui accorder la restitution demandée ; 3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que : - elle est éligible au crédit d'impôt en faveur des métiers d'art dès lors que les cinq salariés retenus dans le cadre du calcul de ce crédit d'impôt sont infographistes et que les produits graphiques qu'elle conçoit sont des objets industriels ou artisanaux nouveaux au sens des dispositions des articles 244 quater O du code général des impôts et 49 septies ZL de l'annexe III à ce code ; - la charge salariale des salariés exerçant une activité de création de produits nouveaux représente 64 % de la masse salariale totale ; - elle apporte tous les éléments justifiant le calcul retenu de son crédit d'impôt. Par un mémoire, enregistré le 19 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête. Il soutient que les moyens soulevés par la SARL Bodeva Communication ne sont pas fondés. Vu les autres pièces du dossier. Vu : - le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ; - le code de justice administrative. Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience. Ont été entendus, au cours de l'audience publique : - le rapport de Mme Carotenuto, - et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public. 1. Considérant que la SARL Bodeva Communication, a déposé au titre de l'exercice clos en 2012 une déclaration spéciale en vue de bénéficier, pour un montant qu'elle a évalué à 25 001 euros, du crédit d'impôt en faveur des métiers d'art prévu à l'article 244 quater O du code général des impôts ; qu'elle relève appel du jugement du 26 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à la restitution du crédit d'impôt en faveur des métiers d'art auquel elle estime avoir droit au titre de l'exercice clos en 2012 ;
2. Considérant qu'aux termes de l'article 244 quater O du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'exercice en litige : " I. Les entreprises mentionnées au III et imposées d'après leur bénéfice réel ou exonérées (...) peuvent bénéficier d'un crédit d'impôt égal à 10 % de la somme : 1° Des salaires et charges sociales afférents aux salariés directement chargés de la conception de nouveaux produits dans un des secteurs ou métiers mentionnés au III et aux ingénieurs et techniciens de production chargés de la réalisation de prototypes ou d'échantillons non vendus ; (...) III. - Les entreprises pouvant bénéficier du crédit d'impôt mentionné au I sont : 1° Les entreprises dont les charges de personnel afférentes aux salariés qui exercent un des métiers d'art énumérés dans un arrêté du ministre chargé des petites et moyennes entreprises représentent au moins 30 % de la masse salariale totale ; (...) " ; 3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que pour bénéficier du crédit d'impôt en faveur des métiers d'art, l'entreprise doit employer des salariés exerçant l'un des métiers d'art figurant sur la liste fixée par un arrêté du ministre chargé des petites et moyennes entreprises du 12 décembre 2003, concevoir des " nouveaux produits " au sens de l'article 49 septies ZL de l'annexe III au code général des impôts, c'est-à-dire réaliser des " travaux portant sur la mise au point de produits ou gamme de produits qui, par leur apparence caractérisée en particulier par leurs lignes, contours, couleurs, matériaux, forme, texture, ou par leur fonctionnalité, se distinguent des objets industriels ou artisanaux existants ou des séries ou collections précédentes ", et avoir des charges de personnel afférentes aux salariés exerçant l'un de ces métiers d'art représentant au moins 30 % de sa masse salariale totale ; que ces trois conditions sont cumulatives ; 4. Considérant que, sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier si la situation du contribuable entre dans le champ du bénéfice d'un crédit d'impôt ; 5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, notamment du descriptif des postes et des attestations des salariés produits par la société requérante, dont le caractère probant n'est pas contesté par le ministre, que les cinq infographistes de la société avaient pour fonction de concevoir des réalisations graphiques originales, de mettre une image ou un texte en valeur ou en mouvement par le biais de logiciels d'infographie à des fins publicitaires ; que d'une part, les métiers de graphistes et d'infographistes constituent des métiers d'art qui figurent, en tant que métiers liés aux arts graphiques, sur la liste des métiers de l'artisanat d'art fixée par l'arrêté du 12 décembre 2003 auquel renvoient les dispositions du III de l'article 244 quater O du code général des impôts ; que d'autre part, il résulte de l'instruction, notamment des nombreux exemples de réalisations graphiques versées au dossier, que celles-ci revêtent la nature de " produits " au sens des dispositions du code général des impôts et qu'elles résultent d'un travail de création original effectué pour chacun des clients de la SARL Bodeva Communication pour qui ils ont vocation à servir d'identité visuelle graphique, et non de la seule adaptation personnalisée d'un produit existant ; que les produits immatériels originaux créés par cette société revêtent ainsi le caractère de produits nouveaux au sens des dispositions du code général des impôts et de l'annexe III à ce code dans leur rédaction applicable ; qu'il est à cet égard sans incidence qu'en développant lesdits produits cette société ne faisait que répondre aux commandes qu'elle recevait de ses clients ;
que la société justifie des heures consacrées aux travaux de conception de nouveaux produits par ses salariés infographistes en produisant les bulletins de salaire délivrés aux intéressés au titre de l'année 2012 ; qu'est alors sans incidence la circonstance que la SARL Bodeva Communication facture également à ses clients les sommes exposées pour la réalisation de ses produits ; qu'elle justifie également par la production d'un extrait du livre de paye de l'année 2012 ainsi que des déclarations annuelles des données sociales pour chacun des salariés de l'année 2012 des dépenses salariales mentionnées sur sa demande de crédit d'impôt ; que cinq des neuf salariés de la société participaient directement à la réalisation des produits ouvrant droit au crédit d'impôt ; que si le ministre conteste que les charges de personnel afférentes à ces salariés représentaient 64 % de la masse salariale totale de la SARL Bodeva Communication de l'année 2012, il admet néanmoins qu'elles en représentaient 37 % ; qu'ainsi, les charges de personnel afférentes à l'activité d'infographie représentent au moins 30 % de la masse salariale totale tel que prévu au 1° du III de l'article 244 quater O du code général des impôts ; que si deux des salariés infographistes avaient des fonctions mixtes et exerçaient partiellement le métier d'infographiste, la proportion de 50 % et 75 % du temps de travail affecté aux travaux de conception de nouveaux produits retenue par la société n'est pas contestée par le ministre ; que, dans ces conditions, c'est à bon droit que la SARL Bodeva Communication a intégré les charges de personnel afférentes aux salariés infographistes dans sa demande de restitution du crédit d'impôt en faveur des métiers d'art prévu par les dispositions de l'article 244 quater O du code général des impôts ; qu'il y a lieu de lui accorder la restitution demandée ; 6. Considérant qu'il résulte de tout de ce qui précède que la SARL Bodeva Communication est fondée à soutenir que c'est à tort, que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que ce jugement doit être annulé ; Sur les conclusions présentées au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : 7. Considérant qu'il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat, qui est la partie perdante dans la présente instance, la somme de 2 000 euros au titre des frais que la société Bodeva Communication a exposés ;
D É C I D E :Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 26 juin 2017 est annulé.Article 2 : L'Etat restituera à la SARL Bodeva Communication, au titre du crédit d'impôt en faveur des métiers d'art afférent à l'exercice clos en 2012, la somme de 25 001 euros.Article 3 : L'Etat versera à la SARL Bodeva Communication une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Bodeva Communication et au ministre de l'action et des comptes publics. Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est. Délibéré après l'audience du 22 mai 2018, où siégeaient : - M. Antonetti, président, - Mme Chevalier-Aubert, président assesseur, - Mme Carotenuto, premier conseiller. Lu en audience publique, le 5 juin 2018.2N° 17MA03730