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05/06/2018 | FRANCE | N°17MA02662

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 05 juin 2018, 17MA02662


Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 14MA05031 rendu le 31 mai 2016, la Cour a rejeté la requête du centre communal d'action sociale (CCAS) de la commune de Marseille tendant à l'annulation du jugement n° 1201493 du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser à Mme B... la somme correspondant à la totalité des heures de travail effectuées de nuit et les fins de semaine, en sus du cycle de travail établi à 39h30 par semaine, entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2011, déduction faite des rémunérations déjà perç

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Vu la procédure suivante :

Par un arrêt n° 14MA05031 rendu le 31 mai 2016, la Cour a rejeté la requête du centre communal d'action sociale (CCAS) de la commune de Marseille tendant à l'annulation du jugement n° 1201493 du 16 octobre 2014 par lequel le tribunal administratif de Marseille l'a condamné à verser à Mme B... la somme correspondant à la totalité des heures de travail effectuées de nuit et les fins de semaine, en sus du cycle de travail établi à 39h30 par semaine, entre le 1er janvier 2007 et le 31 décembre 2011, déduction faite des rémunérations déjà perçues, sur la base du taux horaire qui lui était alors applicable, a renvoyé Mme B... devant cet établissement public afin qu'il soit procédé au calcul de la somme à laquelle l'intéressée a droit, dans la limite de 122 333,62 euros, et a condamné le CCAS à verser la somme de 1 000 euros au titre des préjudices moraux et des troubles dans les conditions d'existence subis par Mme B..., ainsi que celle de 35 euros en remboursement de la contribution pour l'aide juridique.

Mme A... B..., représentée par Me F..., a présenté le 12 janvier 2017 une demande en vue d'obtenir l'exécution du jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014.

Par une ordonnance du 17 juillet 2017, la présidente de la Cour a décidé l'ouverture d'une procédure juridictionnelle.

Par un mémoire enregistré le 16 août 2017, le CCAS de la commune de Marseille, représenté par Me D..., conclut au rejet de la demande d'exécution présentée par Mme B... et à ce que la somme de 1 500 euros soit mise à la charge de celle-ci sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- c'est à tort qu'une procédure juridictionnelle a été ouverte dès lors que la requête tend à l'exécution de l'arrêt n° 14MA05031 rendu par la Cour ;

- la question du montant de la somme due à Mme B... en exécution du jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014 revêt le caractère d'un litige distinct de la procédure d'exécution ;

- le montant de la somme de 9 958,59 euros versée à Mme B... a été déterminé conformément aux motifs de ce jugement.

Par des mémoires enregistrés les 30 janvier et 13 avril 2018, Mme B... demande à la Cour de condamner le CCAS de la commune de Marseille au paiement d'une astreinte de 300 euros par jour jusqu'à l'exécution du jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014 et de mettre à la charge du CCAS de la commune de Marseille la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'ordonnance par laquelle la présidente de la Cour a ouvert une procédure juridictionnelle n'est pas susceptible de recours ;

- il résulte des dispositions de l'article L. 911-4 du code de justice administrative que la demande d'exécution devait être portée devant la Cour ;

- l'exécution du jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014 implique pour le CCAS de la commune de Marseille le versement de la somme de 122 333,62 euros avec intérêts à compter du 10 janvier 2017 et capitalisation.

Les parties ont été informées, en application des dispositions de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que l'arrêt était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office, tiré de l'irrecevabilité des conclusions de Mme B... tendant à la capitalisation des intérêts, lesquelles soulèvent un litige distinct de la demande d'astreinte en vue d'assurer l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille.

Par ordonnance du 11 avril 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au 4 mai 2018 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code monétaire et financier ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. d'Izarn de Villefort,

- les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public,

- et les observations de Me F..., représentant Mme B..., et de Me C... substituant MeD..., représentant le CCAS de Marseille.

Sur les fins de non-recevoir opposées par le CCAS de la commune de Marseille :

1. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-4 du code de justice administrative : " En cas d'inexécution d'un jugement, la partie intéressée peut demander au tribunal administratif qui a rendu la décision d'en assurer l'exécution. / Toutefois, en cas d'inexécution d'un jugement frappé d'appel, la demande d'exécution est adressée à la juridiction d'appel. / Si le jugement dont l'exécution est demandée n'a pas défini les mesures d'exécution, la juridiction saisie procède à cette définition. Elle peut fixer un délai et prononcer une astreinte " ;

2. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que, dans tous les cas où un jugement de tribunal administratif a fait l'objet d'un appel et alors même que cet appel a été rejeté par la juridiction d'appel, cette dernière est seule compétente pour prononcer les mesures qu'implique l'exécution du jugement ; qu'il résulte par ailleurs des dispositions de l'article R. 921-6 du code de justice administrative que l'ordonnance par laquelle le président de la Cour ou du tribunal ouvre une procédure juridictionnelle n'est pas susceptible de recours ; que, par suite, la fin de non-recevoir opposée par le CCAS de la commune de Marseille tirée de ce que la demande de Mme B... tend formellement à l'exécution de l'arrêt n° 14MA05031 rendu par la Cour, qui a rejeté l'appel de cet établissement contre le jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014 le condamnant à verser certaines sommes à Mme B... et non pas à l'exécution de ce jugement doit être écartée ;

3. Considérant que, par son jugement du 16 octobre 2014, le tribunal administratif de Marseille a condamné le CCAS de la commune de Marseille à verser à Mme B... la somme correspondant à la totalité des heures de travail effectuées de nuit et les fins de semaine, en sus de son cycle de travail établi à 39h30 par semaine, entre le 1er janvier 2007 au 31 décembre 2011, déduction faite des rémunérations déjà perçues, sur la base du taux horaire qui lui était alors applicable et a renvoyé l'intéressée devant cet établissement afin qu'il soit procédé au calcul de la somme à laquelle elle a droit, dans la limite de la somme de 122 333,62 euros, qui correspondait à ses prétentions ; que, dans ses motifs, ce jugement a relevé " que si le code général des collectivités territoriales habilite les collectivités territoriales et leurs établissements publics à instaurer des régimes d'équivalence horaire en matière de durée du travail, sous réserve du respect des dispositions législatives et réglementaires applicables, afin de tenir compte de ces périodes d'inaction, il n'est pas établi que le CCAS de la commune de Marseille aurait, en l'espèce, institué un régime d'équivalence horaire en matière de durée du travail opposable aux agents travaillant au-delà du cycle hebdomadaire de 39 heures 30 ; que, par suite, le centre communal d'action sociale ne peut légalement rémunérer à un taux minoré, ou selon un horaire minoré par équivalence, les services accomplis par Mme B... au titre de son travail effectif en sus de son cycle de travail de 39h30 " ;

4. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, par une délibération du 18 juillet 2016, le conseil d'administration du CCAS de la commune de Marseille a instauré une organisation transitoire du temps de travail des agents logés par nécessité absolue de service en résidence autonomie en décidant que le temps de présence réparti entre 1 272 heures de gardiennage et 1 272 heures de travail effectif par an et par agent équivalait à une durée de travail annuel effectif de 1 607 heures, que le temps de présence quotidien comportait 6 heures de travail effectif et que les agents attributaires d'un logement par nécessité absolue de service pouvaient, sans compensation, être placés sous le régime de l'astreinte dans la limite de deux samedis et dimanches consécutifs par mois ; que, le 8 septembre 2016, le CCAS de la commune de Marseille a mandaté au profit de Mme B... la somme de 9 958,59 euros calculée en appliquant au décompte des heures effectuées produit par cette dernière le régime d'équivalence horaire défini par la délibération précitée du 18 juillet 2016 ; que, contrairement à ce que prescrivait le dispositif du jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 octobre 2014, la somme versée à Mme B... correspondant à la totalité des heures de travail effectuées de nuit et les fins de semaine, en sus de son cycle de travail établi à 39h30 par semaine, entre le 1er janvier 2007 au 31 décembre 2011, déduction faite des rémunérations déjà perçues, n'a donc pas été calculée sur la base du taux horaire qui lui était alors applicable ; qu'ainsi, la contestation de cette somme manifestement calculée en méconnaissance du dispositif du jugement rendu par le tribunal administratif de Marseille, tel qu'éclairé par ses motifs rappelés au point 3, la contestation de cette somme ne relève pas d'un litige distinct de celui qui a été tranché par ce jugement ;

Sur l'exécution du jugement rendu par le tribunal administratif de Marseille :

5. Considérant que l'exécution du jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014 implique pour le CCAS de la commune de Marseille le versement à Mme B..., non pas de la somme de 122 333,62 euros, mais d'une somme complémentaire correspondant à la différence entre les sommes mises à sa charge telles que calculées selon les indications rappelées au point 3 et le versement effectué le 8 septembre 2016 pour son compte ; que le règlement de ce solde doit en outre être assorti, de plein droit, des intérêts au taux légal à compter de la date de notification de ce jugement, soit le 28 octobre 2014 ; que, par application des dispositions de l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, et alors même que le jugement du 16 décembre 2014 ne l'avait pas prévu explicitement, le taux d'intérêt légal applicable doit être majoré de cinq points à l'expiration d'un délai de deux mois à compter de cette date ;

6. Considérant, toutefois, que les conclusions tendant à la capitalisation des intérêts ont été présentées pour la première fois devant le juge de l'exécution ; que, par suite, elles soulèvent un litige distinct de la demande d'astreinte en vue d'assurer l'exécution du jugement du tribunal administratif de Marseille ; que ces conclusions ne peuvent, dès lors, être accueillies ;

7. Considérant qu'ainsi, il résulte de l'instruction qu'à la date du présent arrêt, le CCAS de la commune de Marseille n'a pas pris les mesures propres à assurer la complète exécution du jugement n° 1201493 rendu par le tribunal administratif de Marseille le 16 octobre 2014 ; qu'il y a lieu, compte tenu de toutes les circonstances de l'affaire, de prononcer contre le CCAS de la commune de Marseille, à défaut pour lui de justifier de cette complète exécution en procédant au règlement d'une somme complémentaire calculée conformément aux motifs mentionnés aux points 3 et 5 et au versement des intérêts dus sur cette somme, conformément à l'article 1153-1 du code civil et à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier, dans le délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, une astreinte de 100 euros par jour jusqu'à la date à laquelle le jugement du 16 octobre 2014 aura reçu exécution ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de Mme B..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, la somme que le CCAS de la commune de Marseille demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du CCAS de la commune de Marseille la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés par Mme B... et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : Une astreinte est prononcée à l'encontre du centre communal d'action sociale de la commune de Marseille, s'il ne justifie pas avoir, dans le délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt, entièrement exécuté le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 octobre 2014 en versant à Mme B... une somme complémentaire calculée conformément aux motifs mentionnés aux points 3 et 5 ainsi que les intérêts dus sur cette somme, conformément à l'article 1153-1 du code civil et à l'article L. 313-3 du code monétaire et financier et jusqu'à la date de cette exécution. Le taux de cette astreinte est fixé à 100 euros par jour, à compter de l'expiration du délai de deux mois suivant la notification du présent arrêt.

Article 2 : Le CCAS de la commune de Marseille communiquera au greffe de la Cour copie des actes justifiant des mesures prises pour exécuter le jugement du tribunal administratif de Marseille du 16 octobre 2014.

Article 3 : Le CCAS de la commune de Marseille versera à Mme B... la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... et les conclusions du CCAS de la commune de Marseille présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetés.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au centre communal d'action sociale de la commune de Marseille.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2018, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- Mme E..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 5 juin 2018.

N° 17MA02662 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA02662
Date de la décision : 05/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Exécution décision justice adm

Analyses

54-06-07-008 Procédure. Jugements. Exécution des jugements. Prescription d'une mesure d'exécution.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Philippe D'IZARN DE VILLEFORT
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : SELARL GRIMALDI - MOLINA et ASSOCIÉS - AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-05;17ma02662 ?
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