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05/06/2018 | FRANCE | N°16MA02805

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 8ème chambre - formation à 3, 05 juin 2018, 16MA02805


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 22 juin 2015, M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 21 avril 2015 par laquelle le directeur départemental des territoires et de la mer de la Haute-Corse a pris à son encontre la sanction disciplinaire de mise à pied pour une durée de huit jours et d'enjoindre le reversement à son profit de la somme retenue au titre de cette mise à pied dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement, avec intérêts au taux

légal à compter de la date de dépôt de la requête et capitalisation des inté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par une requête enregistrée le 22 juin 2015, M. A... B...a demandé au tribunal administratif de Bastia d'annuler la décision du 21 avril 2015 par laquelle le directeur départemental des territoires et de la mer de la Haute-Corse a pris à son encontre la sanction disciplinaire de mise à pied pour une durée de huit jours et d'enjoindre le reversement à son profit de la somme retenue au titre de cette mise à pied dans le délai de huit jours à compter de la notification du jugement, avec intérêts au taux légal à compter de la date de dépôt de la requête et capitalisation des intérêts.

Par un jugement n° 1500728 du 12 mai 2016, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 juillet 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Bastia ;

2°) d'annuler la décision du 21 avril 2015 portant à son encontre sanction de mise à pied pour une durée de huit jours ;

3°) d'enjoindre à l'État de lui reverser la somme retenue au titre de cette mise à pied dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, avec intérêts au taux légal à compter de la date de dépôt de la requête devant le tribunal, avec capitalisation des intérêts ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision en litige n'a pas respecté le principe des droits de la défense ;

- une telle méconnaissance des droits de la défense, s'agissant des ouvriers des parcs et ateliers régis par le décret du 21 mai 1965, serait constitutive d'une inégalité de traitement ;

- cette carence statutaire est contraire aux stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- les conditions d'instruction devant la commission consultative ont effectivement méconnu le respect des droits de la défense ;

- les prescriptions des articles 8 et 10 du décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 ont été méconnues ;

- la sanction a été prise à l'issue d'une appréciation erronée des faits ;

- l'administration n'établit pas les faits qui ont justifié la sanction en litige ;

- la sanction est disproportionnée.

Par lettre du 5 décembre 2017, le ministre de la transition écologique et solidaire a été mis en demeure de produire des observations en application de l'article R. 612-3 du code de justice administrative.

Par ordonnance du 18 avril 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 4 mai 2018 à 12h00.

Par un mémoire enregistré le 7 mai 2018, soit postérieurement à la clôture de l'instruction, M. B... s'est désisté de sa requête.

Un mémoire en défense présenté par le ministre de la transition écologique et solidaire a été enregistré le 18 mai 2018, soit postérieurement à la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 modifiée ;

- le décret n° 65-382 du 21 mai 1965 modifié ;

- le décret n° 84-961 du 25 octobre 1984 modifié ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutel,

- et les conclusions de M. Angéniol, rapporteur public.

1. Considérant que M. B..., initialement recruté par la direction départementale de l'équipement de la Haute-Corse en qualité d'ouvrier des parcs et ateliers, a été mis à disposition du président du conseil général de la Haute-Corse à compter du 1er janvier 2011 ; que, par une décision du directeur départemental des territoires et de la mer de la Haute-Corse du 21 avril 2015, l'intéressé a été sanctionné d'une mise à pied d'une durée de huit jours ; que le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande en annulation de cette sanction par jugement du 12 mai 2016, dont l'intéressé interjette appel ;

Sur la légalité externe :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 27 du décret du 21 mai 1965 susvisé : " Les ouvriers visés par le présent décret peuvent être l'objet de mesures disciplinaires pour absence non autorisée, retard à l'arrivée sur le chantier ou à l'atelier, ou départ avant l'heure réglementaire, inexécution des ordres reçus, faute professionnelle, intempérance ou toute autre faute. / L'échelle des mesures disciplinaires est la suivante : 1° L'avertissement ; 2° Le blâme ; 3° La mise à pied temporaire pour une durée ne pouvant excéder huit jours ; 4° Le licenciement définitif. (...) / La mise à pied et le licenciement définitif sont prononcés par le chef de service après avis de la commission prévue à l'article 4 du présent décret, siégeant en formation disciplinaire, l'intéressé ayant été préalablement entendu. (...) " ; que les ouvriers d'Etat, au nombre desquels figurent les ouvriers des parcs et ateliers des ponts et chaussées et des bases aériennes régis par le décret du 21 mai 1965, ne sont pas régis par les dispositions de la loi du 11 janvier 1984 et, par suite, par les dispositions du décret du 25 octobre 1984 qui sont seules applicables aux fonctionnaires de l'État ; qu'il s'ensuit que l'ensemble des prescriptions de ce décret ne peuvent être utilement invoquées par M. B... à l'encontre de la sanction en litige ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 4 du décret du 21 mai 1965 dans sa version applicable à la date de la décision : " Il est institué dans chaque service des ponts, dans chaque direction territoriale de Voies navigables de France et au Cérema une commission consultative chargée de donner son avis sur le recrutement, la confirmation à la fin du stage, le licenciement temporaire ou définitif avant ou après la fin du stage, l'affiliation au régime de retraite de la loi du 21 mars 1928 modifiée, le changement de catégorie, ainsi que le choix des ouvriers susceptibles de suivre les cours et stages de promotion ouvrière. Cette commission peut examiner toute autre question dont elle serait saisie par le chef de service par le directeur territorial de Voies navigables de France, par le directeur général du Cérema ou par la majorité de ses membres. Cette commission est composée comme suit : Le chef de service ou le directeur territorial de Voies navigables de France ou le directeur général du Cérema ou leur représentant respectif, président. Deux cadres du service ou de la direction territoriale de Voies navigables de France ou du Cérema. Trois délégués du personnel, élus à bulletins secrets. " ; qu'aux termes de l'article 27 de ce décret : " Les ouvriers visés par le présent décret peuvent être l'objet de mesures disciplinaires pour absence non autorisée, retard à l'arrivée sur le chantier ou à l'atelier, ou départ avant l'heure réglementaire, inexécution des ordres reçus, faute professionnelle, intempérance ou toute autre faute. L'échelle des mesures disciplinaires est la suivante :1° L'avertissement ; 2° Le blâme ; 3° La mise à pied temporaire pour une durée ne pouvant excéder huit jours ; 4° Le licenciement définitif. L'avertissement et le blâme sont prononcés par l'ingénieur d'arrondissement ou l'ingénieur des travaux publics de l'État délégué ou par le directeur général de Voies navigables de France ou, par délégation de celui-ci, le directeur territorial de VNF ou par le directeur général du Cérema. La mise à pied et le licenciement définitif sont prononcés par le chef de service ou par le directeur général de Voies navigables de France ou, par délégation de celui-ci, par le directeur territorial de VNF ou par le directeur général du Cérema après avis de la commission prévue à l'article 4 du présent décret, siégeant en formation disciplinaire, l'intéressé ayant été préalablement entendu. "

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. B... a été informé par courrier du 26 février 2015 de la tenue de la commission consultative compétente siégeant en matière disciplinaire le 16 mars suivant ; que ce courrier faisait expressément mention qu'il avait la possibilité de se présenter ou d'être représenté par un conseil de son choix et d'y formuler des observations ;

5. Considérant qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le dossier disciplinaire consulté par M. B... le 19 février 2015 serait différent de celui sur lequel les membres de la commission se sont prononcés ; que les documents adressés à la commission, postérieurement à sa séance du 16 mars 2015, n'ont pu avoir d'influence sur la procédure suivie, dès lors que la teneur de ces documents, à savoir l'affectation précise de l'intéressé et ses obligations de service, a été expressément évoquée lors des débats de la commission ;

6. Considérant qu'aucune disposition ni aucun principe n'impose d'entendre les témoins séparément ; qu'en outre, il ne ressort pas des mentions du procès-verbal que les représentants du département de la Haute-Corse, qui ont exposé les faits objectivement en qualité d'autorité d'emploi, aient pris part au vote ou que leur comportement ait fait obstacle à la sérénité ou à l'impartialité des débats de la commission ;

7. Considérant que la circonstance que les dispositions de la loi du 11 janvier 1984 ne seraient pas applicables aux ouvriers des parcs et ateliers n'est pas constitutive, par elle-même, d'une méconnaissance du principe d'égalité de traitement, dès lors notamment que, ainsi qu'il vient d'être dit, les droits de la défense sont garantis par la bonne application des prescriptions du décret du 21 mai 1965 ; que la procédure suivie, compte tenu de ses garanties, notamment la consultation préalable d'une commission paritaire, ne méconnaît pas davantage les stipulations de l'article 6-1 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que la sanction en litige aurait été prise à l'issue d'une procédure irrégulière ;

Sur la légalité interne :

9. Considérant qu'il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes ;

10. Considérant que la sanction litigieuse a été prise au motif que M. B..., malgré les consignes qui lui avaient été données, a refusé, à la fin de la période hivernale pendant laquelle il est mis à disposition de la collectivité territoriale de Corse, de quitter les locaux du service des garages et ateliers de Corte et de regagner, à compter du 18 avril 2014, les locaux de sa nouvelle affectation au sein de la direction des infrastructures, des routes et des transports ; que l'intéressé conteste la matérialité des faits ; que, toutefois, sur ce point, il y a lieu d'adopter les motifs des premiers juges dès lors qu'ils sont exacts et suffisants et n'appellent, compte tenu des écritures, aucune précision en appel sur ce point ;

11. Considérant, qu'eu égard à la gravité de la faute qui consiste en un refus réitéré de se soumettre à l'autorité hiérarchique, l'autorité disciplinaire n'a pas pris une sanction disproportionnée en prononçant à l'encontre de M. B..., au regard des faits en cause et alors même que l'intéressé aurait antérieurement fait preuve de très bons états de service, une mise à pied d'une durée de huit jours ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Bastia a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte ainsi que celles tendant à ce que les frais exposés par lui et non compris dans les dépens soient mis à la charge de l'État, doivent être rejetées ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2018, où siégeaient :

- M. Gonzales, président,

- M. d'Izarn de Villefort, président assesseur,

- M. Coutel, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 5 juin 2018.

N° 16MA02805 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 8ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02805
Date de la décision : 05/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Motifs. Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : M. GONZALES
Rapporteur ?: M. Marc COUTEL
Rapporteur public ?: M. ANGENIOL
Avocat(s) : ROUSSEL-FILIPPI

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-06-05;16ma02805 ?
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