La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/03/2018 | FRANCE | N°15MA03162

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 2ème chambre - formation à 3, 15 mars 2018, 15MA03162


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la communauté de communes du Pays Saint-Ponais et le syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron à leur verser la somme de 30 526,86 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait des travaux de restauration du cours d'eau de la Salesse.

Par un jugement n° 1402028 du 24 juin 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cou

r :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2015 et le 26 février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme A...B...ont demandé au tribunal administratif de Montpellier de condamner solidairement la communauté de communes du Pays Saint-Ponais et le syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron à leur verser la somme de 30 526,86 euros en réparation des préjudices qu'ils estiment avoir subis du fait des travaux de restauration du cours d'eau de la Salesse.

Par un jugement n° 1402028 du 24 juin 2015, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 29 juillet 2015 et le 26 février 2016,

M. et MmeB..., représentés par le cabinet d'avocats Guigues, Calas-David, Annovazzi, demandent à la cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 24 juin 2015 ;

2°) de condamner solidairement la communauté de communes du Pays Saint-Ponais et le syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron à leur verser la somme de

30 526,86 euros ainsi que les intérêts au taux légal à compter du 29 janvier 2014 et la capitalisation de ces intérêts à compter du 29 janvier 2014 ;

3°) de mettre à la charge de la communauté de communes du Pays Saint-Ponais et du syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron la somme de 3 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et les entiers dépens.

Ils soutiennent que :

- la requête est recevable dès lors qu'ils ont intérêt à agir, qu'ils ont adressé une réclamation préalable et que l'action en responsabilité n'est pas prescrite ;

- le lien de causalité entre les travaux effectués par la communauté de communes du Pays Saint-Ponais et le syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron et les dommages est établi ;

- le préjudice présente un caractère spécial et anormal eu égard au nombre restreint de propriétaires riverains du cours d'eau concernés ;

- ils ont entretenu le cours d'eau conformément à l'article L. 215-14 du code de l'environnement.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 23 décembre 2015 et le 23 mars 2016, la communauté de communes du Pays Saint-Ponais, représentée par la SCPA CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme B...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la requête est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux et d'intérêt légitime ;

- le lien de causalité entre les dommages et les travaux réalisés n'est pas établi ;

- le préjudice subi n'est pas certain ;

- le préjudice ne présente pas un caractère anormal et spécial ;

- les requérants ont commis une faute à l'origine du dommage en l'absence d'entretien permanent du cours d'eau ;

- les dommages sont imputables à une catastrophe naturelle ;

- les dommages sont imputables au fait d'un tiers.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 décembre 2015, le syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron, représenté par la SCP Christol, Inquimbert, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme B...la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux et d'intérêt légitime ;

- le lien de causalité entre les dommages et les travaux réalisés n'est pas établi ;

- le préjudice ne présente pas un caractère anormal et spécial ;

- les requérants ont commis une faute à l'origine du dommage en l'absence d'entretien permanent du cours d'eau et du fait de la plantation de chênes verts dans la zone rouge du plan de prévention des risques naturels d'inondation du bassin versant du Jaur ;

- les dommages sont imputables à un cas de force majeure ;

- le préjudice n'est pas établi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 décembre 2017, la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur, venant aux droits de la communauté de communes du Pays Saint-Ponais, représentée par la SCPA CGCB et associés, conclut au rejet de la requête et à ce qu'il soit mis à la charge de M. et Mme B...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- à titre principal, la requête est irrecevable en l'absence de liaison du contentieux et d'intérêt légitime ;

- à titre subsidiaire, le lien de causalité entre les dommages et les travaux réalisés n'est pas établi ;

- le préjudice subi n'est pas certain ;

- le préjudice ne présente pas un caractère anormal et spécial ;

- les victimes ont commis une faute à l'origine du dommage en l'absence d'entretien permanent du cours d'eau.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas,

- les conclusions de Mme Chamot, rapporteure publique,

- et les observations de MeC..., représentant la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur.

1. Considérant qu'aux termes de l'alinéa 1 de l'article L. 215-2 du code de l'environnement : " Le lit des cours d'eau non domaniaux appartient aux propriétaires des deux rives. " ; que l'article L. 215-14 du même code dispose : " (...) le propriétaire riverain est tenu à un entretien régulier du cours d'eau. L'entretien régulier a pour objet de maintenir le cours d'eau dans son profil d'équilibre, de permettre l'écoulement naturel des eaux et de contribuer à son bon état écologique ou, le cas échéant, à son bon potentiel écologique, notamment par enlèvement des embâcles, débris et atterrissements, flottants ou non, par élagage ou recépage de la végétation des rives. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 215-2 dudit code : " L'entretien régulier du cours d'eau auquel est tenu le propriétaire en vertu de l'article L. 215-14 est assuré par le seul recours à l'une ou plusieurs des opérations prévues par ledit article et au faucardage localisé (...) " ; qu'enfin, il résulte des dispositions de l'article L. 215-15 du code de l'environnement que les collectivités territoriales, leurs groupements ou les syndicats mixtes créés en application de l'article L. 5721-2 du code général des collectivités territoriales peuvent prendre en charge l'entretien d'un cours d'eau en application de l'article L. 211-7 du code dans le cadre d'un plan de gestion et après l'enquête publique prévue pour la déclaration d'intérêt général ;

2. Considérant que, dans le cadre d'un programme de restauration de la ripisylve de la haute vallée du Jaur, des travaux ont été effectués entre le mois de mars et le mois de mai 2007 par la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur, venant aux droits de la communauté de communes du Pays Saint-Ponais, sous la maîtrise d'oeuvre du syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron sur les rives du cours d'eau non domanial dénommé " La Salesse " ; que ces travaux qui ont fait l'objet d'une déclaration d'intérêt général par un arrêté du préfet de l'Hérault du 17 janvier 2007 et qui avaient pour objet la prévention des crues, répondaient ainsi à un but d'intérêt général ; que ces travaux, qui ont notamment consisté en l'abattage et le recépage de la rive droite à deux cents mètres en aval de la confluence du ruisseau de Teussines et de la Salesse, présentent le caractère de travaux publics ;

3. Considérant que la mise en jeu de la responsabilité sans faute d'une collectivité publique pour dommages de travaux publics à l'égard d'un justiciable qui est tiers par rapport à un ouvrage public ou une opération de travaux publics est subordonnée à la démonstration par cet administré de l'existence d'un dommage anormal et spécial directement en lien avec cet ouvrage ou cette opération ; que les personnes mises en cause doivent alors, pour dégager leur responsabilité, établir que le dommage est imputable à la faute de la victime ou à un cas de force majeure, sans que puisse utilement être invoqué le fait du tiers ;

4. Considérant que M. et Mme B...sont propriétaires, sur le territoire de la commune de Saint-Pons de Thomières, de terrains bordant la rive gauche du cours d'eau non domanial de la Salesse ; que M. et Mme B...ont la qualité de tiers par rapport aux travaux effectués sur la rive opposée et qui n'avaient pas pour objet de pallier leur carence dans l'entretien du cours d'eau au droit des parcelles leur appartenant ;

5. Considérant qu'à la suite des fortes pluies qui se sont abattues sur la région de Saint-Pons du 12 au 17 mars 2011, les terrains appartenant à M. et Mme B...ont été inondés, une partie de la berge et de leur parcelle s'est effondrée dans la Salesse, tandis que la clôture a été emportée et son portail endommagé ; qu'il résulte de l'instruction, et notamment du rapport de l'expert désigné par une ordonnance du juge des référés du tribunal administratif de Montpellier du 2 juillet 2012, que les dommages consécutifs à l'érosion de la rive gauche du cours d'eau, ne sont pas imputables, d'une manière directe et certaine, aux travaux publics réalisés, eu égard notamment à la situation naturelle des lieux et à l'importance de la crue de la Salesse ; qu'ainsi, c'est à juste titre que les premiers juges ont estimé que les requérants ne rapportaient pas la preuve, dont la charge leur incombe, de l'existence d'un lien de causalité entre ces travaux et les préjudices invoqués ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. et Mme B...ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté leur demande ;

7. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur et du syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron, qui ne sont pas les parties perdantes dans la présente instance, la somme que M. et Mme B...demandent au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de M. et Mme B...une somme de 1 000 euros chacun au titre des frais exposés respectivement par la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur et par le syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron et non compris dans les dépens ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. et Mme B...est rejetée.

Article 2 : M. et Mme B...verseront à la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur et au syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron une somme de

1 000 euros chacun au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié M. et Mme A...B..., à la communauté de communes Minervois, Saint-Ponais, Orb-Jaur, venant aux droits de la communauté de communes du Pays Saint-Ponais, et au syndicat mixte de la vallée de l'Orb et du Libron.

Délibéré après l'audience du 22 février 2018 où siégeaient :

- M. Vanhullebus, président de chambre,

- M. Barthez, président assesseur,

- Mme Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.

Lu en audience publique, le 15 mars 2018.

2

N° 15MA03162


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 2ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 15MA03162
Date de la décision : 15/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Régime de la responsabilité - Qualité de tiers.

Travaux publics - Règles communes à l'ensemble des dommages de travaux publics - Lien de causalité - Absence.


Composition du Tribunal
Président : M. VANHULLEBUS
Rapporteur ?: Mme Agnes BOURJADE
Rapporteur public ?: Mme CHAMOT
Avocat(s) : SCP D'AVOCATS CGCB et ASSOCIES MONTPELLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 27/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-03-15;15ma03162 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award