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09/03/2018 | FRANCE | N°16MA02691

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 09 mars 2018, 16MA02691


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Sainte Maxime a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2012 par lequel le préfet du Var a rendu immédiatement opposables certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels d'incendies de forêt (PPRIF) sur la commune de Sainte Maxime ainsi que la décision du 15 novembre 2012 par laquelle le préfet du Var a rejeté son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté.

Par un jugement n° 1300108 du 4 mai 2016, le tribuna

l administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La commune de Sainte Maxime a demandé au tribunal administratif de Toulon d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2012 par lequel le préfet du Var a rendu immédiatement opposables certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels d'incendies de forêt (PPRIF) sur la commune de Sainte Maxime ainsi que la décision du 15 novembre 2012 par laquelle le préfet du Var a rejeté son recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté.

Par un jugement n° 1300108 du 4 mai 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 6 juillet 2016 et le 29 décembre 2017, la commune de Sainte Maxime, représentée par la SELARL Plenot-Suares-Blanco-Orlandini, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Toulon du 4 mai 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 13 juillet 2012 du préfet du Var ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en s'abstenant d'encadrer dans le temps les dispositions rendues opposables par anticipation des plans de prévention des risques naturels prévisibles prescrits avant le 1er août 2011, le décret du 28 juin 2011 méconnaît le principe d'égalité ;

- il n'est pas justifié de l'urgence d'une mise en application anticipée du plan de prévention des risques naturels d'incendies de forêt sur la commune de Sainte Maxime ;

- le règlement de la zone forestière est entaché d'une erreur d'appréciation ;

- il n'a pas été tenu compte des projets de travaux sur les secteurs des Moulins et de Camp Ferrat ce qui entache l'arrêté en litige d'une erreur de fait et d'une erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2018, le ministre de la transition écologique et solidaire conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la commune de Sainte Maxime ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'environnement ;

- le décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 relatif à la procédure d'élaboration, de révision et de modification des plans de prévention des risques naturels prévisibles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., représentant la commune de Sainte Maxime.

1. Considérant que, par jugement du 4 mai 2016, le tribunal administratif de Toulon a rejeté la demande de la commune de Sainte Maxime tendant notamment à l'annulation de l'arrêté du 13 juillet 2012 par lequel le préfet du Var a rendu immédiatement opposables certaines dispositions du projet de plan de prévention des risques naturels d'incendies de forêt (PPRIF) sur la commune de Sainte Maxime ; que la commune de Sainte Maxime relève appel de ce jugement ;

Sur la légalité de l'arrêté préfectoral du 13 juillet 2012 :

En ce qui concerne l'exception d'illégalité du décret du 28 juin 2011 :

2. Considérant que l'article L. 562-1 du code de l'environnement prévoit que l'Etat élabore et met en application des plans de prévention des risques naturels prévisibles, tels que, notamment, les incendies de forêt ; que ces plans ont notamment pour objet, en vertu du II de cet article, de délimiter les zones exposées à ces risques et de définir, compte tenu de leur gravité, les mesures de prévention, de protection et de sauvegarde qui doivent être prises dans ces zones, lesquelles peuvent consister en l'interdiction de tout type de construction, d'ouvrage, d'aménagement ou d'exploitation ; qu'en vertu de l'article L. 562-2 du même code, lorsqu'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles contient certaines des dispositions mentionnées aux 1° et 2° du II de l'article L. 562-1 et que l'urgence le justifie, le préfet peut, après consultation des maires concernés, les rendre immédiatement opposables à toute personne publique ou privée, par une décision rendue publique ; que le même article ajoute que ces dispositions cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan finalement approuvé ;

3. Considérant que l'article L. 562-2 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'article 222 de la loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010 et entrée en vigueur le 14 juillet suivant, ne prévoit aucun délai au-delà duquel les dispositions du projet de plan faisant l'objet d'une application anticipée cessent d'être opposables ; que le dernier alinéa de l'article R. 562-2 du même code dans sa rédaction résultant du décret n° 2011-765 du 28 juin 2011 fixe quant à lui un délai de trois ans, prorogeable une fois dans la limite de dix-huit mois, pour l'approbation du plan ; qu'il résulte cependant de l'article 2 du même décret que ces dispositions ne sont pas applicables aux plans dont l'élaboration a été prescrite avant le 1er août 2011 ; qu'il suit de là que, pour les projets de plan faisant l'objet, comme en l'espèce, d'une application anticipée postérieurement au 14 juillet 2010 et dont l'élaboration a été prescrite antérieurement au 1er août 2011, aucune disposition législative ou réglementaire ne détermine de limite dans le temps à l'opposabilité immédiate de leurs dispositions ; qu'il est soutenu par la commune de Sainte Maxime qu'en s'abstenant d'encadrer dans le temps les dispositions rendues opposables par anticipation des plans prescrits avant le 1er août 2011, à la différence de ceux prescrits après cette date, le décret du 28 juin 2011 aurait méconnu le principe d'égalité ;

4. Considérant cependant qu'en vertu de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, les dispositions du projet de plan cessent d'être opposables si elles ne sont pas reprises dans le plan approuvé ; qu'elles revêtent dès lors, par l'effet même de la loi, un caractère provisoire ; qu'il suit de là que l'absence, dans le décret du 28 juin 2011, de fixation d'une limite temporelle à l'opposabilité anticipée des dispositions du projet de plan n'a pas eu pour effet de conférer à ces dispositions un caractère permanent ; qu'il appartient au préfet, dans les cas où le projet serait abandonné ou si sa finalisation prenait un retard tel que son application anticipée ne pourrait plus être regardée comme étant provisoire, de mettre fin à l'opposabilité immédiate des dispositions concernées ; que, dans cette mesure, le décret du 28 juin 2011 ne méconnaît pas le principe d'égalité ;

En ce qui concerne la condition d'urgence :

5. Considérant, d'une part, que le risque de retour d'incendies peut caractériser une situation d'urgence de nature à justifier, en application des dispositions de l'article L. 562-2 du code de l'environnement, l'édiction d'un arrêté préfectoral rendant immédiatement opposables certaines dispositions d'un projet de plan de prévention des risques naturels prévisibles ; que s'il ressort de la note de présentation qu'aucun incendie important n'a affecté le territoire de la commune de Sainte Maxime depuis l'année 2003, les deux incendies qui se sont produits cette dernière année, et qui ont parcouru respectivement 2 279 ha et 3072 ha sur le territoire communal, étaient notamment liés à une sécheresse dès le mois d'avril et une canicule au cours de l'été, soit des conditions susceptibles de se répéter eu égard aux prévisions de changement climatique, alors en outre que, depuis cet événement, la végétation s'est reconstituée ; que la politique active de la commune en matière de débroussaillement, est, malgré son apport indéniable en terme de prévention, insuffisante pour écarter tout risque de retour d'incendies portant atteinte à la sécurité des personnes et des biens ;

6. Considérant, d'autre part, que l'administration justifie également la condition d'urgence par la nécessité de ne pas compromettre l'application ultérieure du plan de prévention par une aggravation des risques ou la création de risques nouveaux, du fait notamment de constructions nouvelles sur des terrains comportant un fort risque d'incendie de forêt ; qu'il ressort des pièces du dossier que la pression urbanistique est réelle sur le territoire de la commune de Sainte Maxime ; qu'en particulier, de nombreuses demandes d'autorisation d'urbanisme ont été présentées entre 2006 et 2012 dont une part importante se situaient en zone d'aléas modéré à très élevé ; qu'il n'est pas établi que les dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, qui prévoient de refuser le permis de construire si le projet est de " nature à porter atteinte (...) à la sécurité publique du fait (...) de ses caractéristiques " permettraient, comme celles du PPRIF appliquées par anticipation, de restreindre avec la même efficacité les constructions nouvelles sur des terrains comportant un fort risque d'incendie de forêt ; que, par suite la nécessité de ne pas compromettre l'application ultérieure du PPRIF doit être regardée comme établie ;

En ce qui concerne l'erreur d'appréciation dont serait entaché le règlement de la zone forestière :

7. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que la décision en litige a entendu classer les 5 500 ha du massif forestier de la commune en zone rouge définie par ce document comme " zone à aléas modéré à très élevés " et couvrant les " espaces sans enjeu ou constructions isolées quelle que soit la défendabilité " ; qu'en zone rouge, selon le règlement de la zone, sont admis les bâtiments à usage agricole ou destinés à l'élevage ovin ou caprin si ces élevages contribuent à la mise en valeur et à l'aménagement du milieu forestier dans lequel ils se situent et qu'ils s'appuient sur un projet pastoral, à condition qu'ils soient disposés de manière optimale par rapport aux surfaces cultivées pouvant contribuer à leur protection et qu'ils n'induisent pas la possibilité d'une présence humaine permanente ; qu'en revanche, les constructions nouvelles à usage d'habitation y sont interdites ;

8. Considérant, d'une part, que ce règlement n'interdit en zone rouge ni le maintien des exploitations agricoles existantes, ni l'implantation de bâtiments à usage agricole, ni enfin l'aménagement de " coupures vertes " constituant des " coupures de combustible " ; que, d'autre part, s'il n'autorise pas la construction d'habitation pour les exploitants agricoles, il ressort des pièces du dossier que l'autorisation de telles constructions aurait pour effet d'augmenter les enjeux exposés aux incendies dans des secteurs particulièrement isolés, contraignant les services de lutte contre l'incendie à se disperser ; que la préservation de la capacité d'intervention de ces services présente un caractère d'intérêt général et justifie que puissent être prohibée au sein du massif forestier toute construction à usage d'habitation y compris celles destinées aux exploitants agricoles ; qu'ainsi, l'autorité administrative a pu légalement, et sans commettre d'erreur d'appréciation, y prescrire une telle interdiction ;

En ce qui concerne l'absence de prise en compte des projets de travaux sur les secteurs des Moulins et de Camp Ferrat :

9. Considérant qu'il ressort des documents graphiques annexes à la note de présentation et plus précisément des cartes des " zones EN'1 et des travaux associés " que le document en litige a prévu dans le secteur des Moulins la réalisation d'une voie V 7 au droit du lotissement du Couloubrier et un débroussaillement de la zone D 5 ; qu'il a prévu dans la zone d'activité de Camp Ferrat la réalisation d'une voie V 6 et un débroussaillement de la zone D 4 ; que la note de présentation prévoit, dans le tableau figurant en page 37 du document, que les parcelles situées en zone EN'1 seront classées en zone constructible EN2 après réalisation de ces différents travaux ; qu'ainsi, contrairement à ce qui est soutenu, le plan a bien pris en compte ces projets de travaux au nombre des paramètres de " défendabilité " des zones dont il s'agit et n'est pas entaché d'erreur de fait ; qu'en subordonnant le classement en zone constructible de ces secteurs à la réalisation des travaux dont il s'agit le préfet n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation ; qu'au demeurant à la suite du débroussaillement ainsi prévu, les zones EN'1 f , EN'1 g et EN'1 d ont été classées en 2013 en zone EN2 ;

10. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que la commune de Sainte Maxime n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Toulon a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Considérant que ces dispositions font obstacle à ce qu'une somme soit mise à ce titre à la charge de l'Etat, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Sainte Maxime est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Sainte Maxime et au ministre de la transition écologique et solidaire.

Délibéré après l'audience du 23 février 2018, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Maury, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 mars 2018.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02691
Date de la décision : 09/03/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

44-05-08 Nature et environnement. Divers régimes protecteurs de l`environnement. Prévention des crues, des risques majeurs et des risques sismiques.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : SELARL PLENOT-SUARES-BLANCO-ORLANDINI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/05/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-03-09;16ma02691 ?
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