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22/02/2018 | FRANCE | N°17MA01314

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 3ème chambre - formation à 3, 22 février 2018, 17MA01314


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa remise aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1701386 du 1er mars 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 28 février 2017 assignant à résidence M. A... et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure suivie devant la Cour :

Par une requêt

e, enregistrée le 27 mars 2017, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) de réformer c...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa remise aux autorités italiennes et l'a assigné à résidence.

Par un jugement n° 1701386 du 1er mars 2017, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a annulé l'arrêté du 28 février 2017 assignant à résidence M. A... et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure suivie devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2017, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) de réformer ce jugement du 1er mars 2017 du tribunal administratif de Marseille en tant qu'il n'a pas fait droit à sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa remise aux autorités italiennes ;

2°) d'annuler l'arrêté du 28 février 2017 du préfet des Bouches-du-Rhône décidant sa remise aux autorités italiennes ;

3°) d'enjoindre au préfet des Bouches-du-Rhône de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour au titre de l'asile ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me B..., qui s'engage à renoncer au bénéfice de l'aide juridictionnelle, en application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté de remise aux autorités italiennes n'est pas suffisamment motivé en droit et en fait ;

- sa situation personnelle n'a pas fait l'objet d'un examen individuel ;

- il n'est pas établi que l'Italie soit l'Etat responsable de l'examen de sa demande d'asile ;

- il n'a pas reçu une information suffisante dans une langue qu'il comprend ;

- il n'est pas établi qu'il puisse être soigné en Italie.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 septembre 2017, le préfet des Bouches-du-Rhône conclut au rejet de la requête de M. A....

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par décision du 22 mai 2017

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le règlement n° 603/2013/UE du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- le règlement n° 604/2013/UE du Parlement et du Conseil du 26 juin 2013 ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

A été entendu au cours de l'audience publique le rapport de Mme Paix,

1. Considérant que M. A..., de nationalité guinéenne, relève appel du jugement du 1er mars 2017 en tant que, par ce jugement, le magistrat désigné du tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 28 février 2017 par lequel le préfet des Bouches-du-Rhône a décidé sa remise aux autorités italiennes ;

Sur la légalité externe de l'arrêté de remise aux autorités italiennes :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 742-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Lorsque l'autorité administrative estime que l'examen d'une demande d'asile relève de la compétence d'un autre Etat qu'elle entend requérir, l'étranger bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la fin de la procédure de détermination de l'Etat responsable de l'examen de sa demande et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1 mentionne la procédure dont il fait l'objet. Elle est renouvelable durant la procédure de détermination de l'Etat responsable et, le cas échéant, jusqu'à son transfert effectif à destination de cet Etat. Le présent article ne fait pas obstacle au droit souverain de l'Etat d'accorder l'asile à toute personne dont l'examen de la demande relève de la compétence d'un autre Etat " et qu'aux termes de l'article L. 742-3 du même code : " (...) l'étranger dont l'examen de la demande d'asile relève de la responsabilité d'un autre Etat peut faire l'objet d'un transfert vers l'Etat responsable de cet examen. Toute décision de transfert fait l'objet d'une décision écrite motivée prise par l'autorité administrative (...) " ;

3. Considérant que l'arrêté de remise aux autorités italiennes de M. A... vise notamment la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ses articles 3 et 8, la convention de Genève du 28 juillet 1951 modifiée, le règlement (CE) 1560/2003 de la Commission du 2 septembre 2003 modifié, relatif aux critères de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers, le règlement (UE) 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et notamment ses articles L. 741-1 et L. 741-2 à L. 742-5 ; qu'il mentionne les conditions d'entrée en France de M. A..., sa demande d'asile du 3 octobre 2016 et la saisine des autorités italiennes ainsi que la décision implicite née du silence de celles-ci, intervenue le 11 décembre 2016 ; que la circonstance que cet arrêté ne vise pas expressément les articles 7 à 15 du règlement n° 603/2013 édictant les critères de l'Etat responsable est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation, eu égard à l'ensemble des autres précisions ; qu'est également sans influence sur la régularité formelle de l'arrêté la circonstance qu'il ne décrive pas précisément les circonstances de l'arrivée en Italie de M. A... et de relevé de ses empreintes digitales ; que, par suite, le moyen tiré par M. A... de l'insuffisance de motivation de l'arrêté doit être écarté ;

4. Considérant, en second lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 4 du règlement n° (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 : " 1. Dès qu'une demande de protection internationale est introduite au sens de l'article 20, paragraphe 2, dans un État membre, ses autorités compétentes informent le demandeur de l'application du présent règlement, et notamment : / a) des objectifs du présent règlement et des conséquences de la présentation d'une autre demande dans un État membre différent ainsi que des conséquences du passage d'un État membre à un autre pendant les phases au cours desquelles l'État membre responsable en vertu du présent règlement est déterminé et la demande de protection internationale est examinée; / b) des critères de détermination de l'État membre responsable, de la hiérarchie de ces critères au cours des différentes étapes de la procédure et de leur durée, y compris du fait qu'une demande de protection internationale introduite dans un État membre peut mener à la désignation de cet État membre comme responsable en vertu du présent règlement même si cette responsabilité n'est pas fondée sur ces critères; / c) de l'entretien individuel en vertu de l'article 5 et de la possibilité de fournir des informations sur la présence de membres de la famille, de proches ou de tout autre parent dans les États membres, y compris des moyens par lesquels le demandeur peut fournir ces informations; / d) de la possibilité de contester une décision de transfert et, le cas échéant, de demander une suspension du transfert; / e) du fait que les autorités compétentes des États membres peuvent échanger des données le concernant aux seules fins d'exécuter leurs obligations découlant du présent règlement; / f) de l'existence du droit d'accès aux données le concernant et du droit de demander que ces données soient rectifiées si elles sont inexactes ou supprimées si elles ont fait l'objet d'un traitement illicite, ainsi que des procédures à suivre pour exercer ces droits, y compris des coordonnées des autorités visées à l'article 35 et des autorités nationales chargées de la protection des données qui sont compétentes pour examiner les réclamations relatives à la protection des données à caractère personnel. / 2. Les informations visées au paragraphe 1 sont données par écrit, dans une langue que le demandeur comprend ou dont on peut raisonnablement supposer qu'il la comprend. Les États membres utilisent la brochure commune rédigée à cet effet en vertu du paragraphe 3 " ;

5. Considérant, d'une part, que M. A... s'est présenté en préfecture des Bouches-du-Rhône le 3 octobre 2016 pour demander l'asile ; qu'il a été reçu le 4 octobre au cours d'un entretien et a été invité à formuler ses observations, ce qu'il a fait par écrit ; que, par suite, il n'est pas fondé à soutenir que sa situation n'aurait pas fait l'objet d'un examen particulier ;

6. Considérant, d'autre part, qu'il résulte des pièces du dossier et notamment du compte rendu d'entretien individuel signé le 4 octobre 2016 par M. A... qu'il a déclaré comprendre le français ; que, dans ces conditions, en lui remettant les documents prévus par les dispositions précitées en langue française, le préfet des Bouches-du-Rhône n'a pas méconnu les stipulations de l'article 4 du règlement n° (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ;

Sur la légalité interne de l'arrêté de remise aux autorités italiennes :

7. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article 13 du règlement n° 604/2013 du 26 juin 2013 " 1. Lorsqu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, du présent règlement, notamment des données visées au règlement (UE) n° 603/2013, que le demandeur a franchi irrégulièrement, par voie terrestre, maritime ou aérienne, la frontière d'un État membre dans lequel il est entré en venant d'un État tiers, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. Cette responsabilité prend fin douze mois après la date du franchissement irrégulier de la frontière. / 2. Lorsqu'un État membre ne peut pas, ou ne peut plus, être tenu pour responsable conformément au paragraphe 1 du présent article et qu'il est établi, sur la base de preuves ou d'indices tels qu'ils figurent dans les deux listes mentionnées à l'article 22, paragraphe 3, que le demandeur qui est entré irrégulièrement sur le territoire des États membres ou dont les circonstances de l'entrée sur ce territoire ne peuvent être établies a séjourné dans un État membre pendant une période continue d'au moins cinq mois avant d'introduire sa demande de protection internationale, cet État membre est responsable de l'examen de la demande de protection internationale. / Si le demandeur a séjourné dans plusieurs États membres pendant des périodes d'au moins cinq mois, l'État membre du dernier séjour est responsable de l'examen de la demande de protection internationale " ;

8. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier et notamment de la production par le préfet d'un courrier du 3 octobre 2016 de la direction générale des étrangers en France du ministère de l'intérieur, que les empreintes de l'étranger dont le numéro référencé par l'application de gestion des dossiers des ressortissants étrangers en France (AGDREF) est FR 1 1303225329 sont identiques à celles d'un étranger enregistrées le 3 août 2016 en Italie, sous le n° IT2 RC01669 ; que si M. A... soutient que ces empreintes ne sont pas les siennes, il ne produit aucun commencement de preuve de ces allégations ; que le moyen tiré doit donc être rejeté ;

9. Considérant, en second lieu, qu' aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. Lorsqu'il est impossible de transférer le demandeur en vertu du présent paragraphe vers un État membre désigné sur la base des critères énoncés au chapitre III ou vers le premier État membre auprès duquel la demande a été introduite, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable devient l'État membre responsable (...) 3. Tout État membre conserve le droit d'envoyer un demandeur vers un pays tiers sûr, sous réserve des règles et garanties fixées dans la directive 2013/32/UE ".

10. Considérant que si l'Italie est un Etat membre de l'Union européenne et partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New York qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il appartient néanmoins à l'administration d'apprécier dans chaque cas, au vu des pièces qui lui sont soumises et sous le contrôle du juge, si les conditions dans lesquelles un dossier particulier est traité par les autorités de ce pays répondent à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile ; que toutefois, les simples allégations non assorties de précisions de M. A... tenant aux conditions d'accueil en Italie ne suffisent pas à établir que sa réadmission par l'Italie serait, par elle-même, constitutive d'une atteinte grave au droit d'asile du fait de l'existence de défaillances systémiques par cet Etat dans l'accueil des demandeurs d'asile ; qu'enfin si M. A... indique que son acuité visuelle nécessite des soins qui pourront lui être apportés en France, il n'établit ni même n'allègue que ceux-ci ne pourraient lui être dispensés en Italie ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté le surplus de sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions combinées des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37-1 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2: Le présent arrêt sera notifié à M. C... A..., à Me B..., et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 8 février 2018, où siégeaient :

- M. Bédier, président,

- Mme Paix, président assesseur,

- M. Sauveplane, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 février 2018.

N° 17MA01314 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 3ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA01314
Date de la décision : 22/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02 Étrangers. Expulsion.


Composition du Tribunal
Président : M. BEDIER
Rapporteur ?: Mme Evelyne PAIX
Rapporteur public ?: M. OUILLON
Avocat(s) : PLANTIN

Origine de la décision
Date de l'import : 27/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-02-22;17ma01314 ?
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