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09/02/2018 | FRANCE | N°16MA01772

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 09 février 2018, 16MA01772


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur sa demande tendant à la délivrance d'un agrément pour l'exercice à titre individuel de l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs.

Par un jugement n° 1403211 du 23 février 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le

4 mai 2016 et le 18 août 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... B...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur sa demande tendant à la délivrance d'un agrément pour l'exercice à titre individuel de l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs.

Par un jugement n° 1403211 du 23 février 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 4 mai 2016 et le 18 août 2017, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 23 février 2016 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir la décision implicite de rejet née du silence gardé par le préfet sur sa demande tendant à obtenir un agrément en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs ;

3°) d'enjoindre à l'administration de lui octroyer l'agrément pour exercer en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les premiers juges ont omis de statuer sur ses conclusions tendant à l'annulation de la décision expresse du préfet du 18 juin 2014 ;

- le jugement contesté ne vise, ni n'analyse, l'un des mémoires qu'il a produits ;

- ce jugement ne se prononce pas sur l'un des moyens qu'il a soulevés ;

- la décision du 18 juin 2014 est insuffisamment motivée ;

- l'avis que doit rendre le procureur de la République sur le fondement de l'article L. 472-1 du code de l'action sociale et des familles ne peut reposer que sur des éléments tenant à la personne et non sur des considérations relatives aux besoins quantitatifs ;

- le procureur de la République ne peut évaluer les besoins qu'au regard du nombre de personnes exerçant les fonctions de mandataire et non du nombre de missions confiées ;

- le procureur a méconnu le principe d'égalité de traitement ;

- il a entaché son avis de détournement de pouvoir ;

- le préfet n'était pas lié par l'avis du procureur de la République dès lors que les conditions légales pour obtenir l'agrément étaient satisfaites ;

- l'autorisation préfectorale doit se fonder sur le schéma régional d'organisation sociale et médico-sociale et non sur la déclinaison de ce schéma dédiée aux mandataires judiciaires.

Par un mémoire en défense, enregistré le 25 juillet 2017, la ministre des solidarités et de la santé conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête est tardive ;

- aucun des moyens de cette requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Coutier, premier conseiller,

- les conclusions de M. Chanon, rapporteur public,

- et les observations de Me A... représentant M. B....

1. Considérant que M. B... a déposé le 27 janvier 2014 auprès du directeur départemental de la cohésion sociale de l'Hérault, dans les conditions prévues à l'article R. 472-1 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction alors applicable, un dossier de demande d'agrément pour l'exercice à titre individuel de l'activité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs ; qu'une décision implicite de rejet est née du silence gardé par cette autorité sur cette demande pendant plus de quatre mois ainsi qu'en dispose l'article R. 472-4 du même code ; que M. B... relève appel du jugement du 23 février 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, en premier lieu, que l'article 5 de la loi du 11 juillet 1979, désormais codifié à l'article L. 232-4 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande. Dans ce cas, le délai du recours contentieux contre ladite décision est prorogé jusqu'à l'expiration de deux mois suivant le jour où les motifs lui auront été communiqués " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'acte par lequel une autorité administrative communique, à la demande d'un administré, les motifs d'une décision implicite de rejet n'a pas pour effet de faire naître une nouvelle décision distincte de la première et pouvant faire elle-même l'objet d'un recours pour excès de pouvoir ;

3. Considérant qu'il ressort des écritures qu'il a produites devant le tribunal que M. B... a demandé l'annulation de " la décision implicite de refus du 28 mai 2014 et sa motivation en date du 18 juin 2014 " ; que la lettre du 18 juin 2014, qui constituait la réponse à la demande de communication des motifs de la décision implicite de rejet née du silence gardé par le directeur départemental de la cohésion sociale de l'Hérault sur la demande d'agrément présentée par l'intéressé, ne saurait être regardée comme une décision susceptible d'être contestée devant le juge de l'excès de pouvoir ; que les premiers juges ont répondu, au point 8 du jugement contesté, au moyen tiré du défaut de motivation de la décision en litige et ont ainsi, implicitement mais nécessairement, rejeté les conclusions tendant à l'annulation de l'acte du 18 juin 2014 à supposer même qu'il eût fallu, compte tenu de l'imprécision des écritures du requérant, les regarder comme ayant cette portée ; que, par suite, il y a lieu d'écarter le moyen tiré de ce que ce jugement serait irrégulier au motif d'une omission à statuer ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que le jugement contesté vise un mémoire présenté par M. B... enregistré au greffe du tribunal le 12 janvier 2016 ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé aurait produit, ainsi qu'il l'affirme, un mémoire en date du 18 janvier 2016 ; qu'il y a lieu, dans ces conditions, d'écarter le moyen tiré de ce que ce jugement ne vise pas ce mémoire ni ne répond à ses moyens ; que doit être également écarté le moyen tiré du défaut de visa du mémoire du préfet enregistré le 20 janvier 2016 avant la clôture de l'instruction, ces écritures n'apportant aucun élément nouveau sur lequel se serait fondé le tribunal pour statuer sur la demande de M. B... ;

5. Considérant, en troisième lieu, que les premiers juges ont suffisamment répondu, au point 4 du jugement contesté, au moyen soulevé par le requérant tiré de la méconnaissance, par le procureur de la République, des dispositions de l'article L. 471-2 du code de l'action sociale et des familles ;

6. Considérant, en dernier lieu, que les premiers juges ont estimé que, le préfet se trouvant en situation de compétence liée à raison de l'avis défavorable rendu par le procureur de la République sur la demande présentée par M. B..., le moyen tiré du défaut de motivation de la décision litigieuse était inopérant ; que le tribunal a ainsi suffisamment répondu à ce moyen ;

Sur le bien-fondé du jugement :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 472-1 du code de l'action sociale et des familles dans sa rédaction applicable au litige : " Les personnes physiques qui exercent à titre individuel et habituel les mesures de protection des majeurs ordonnées par l'autorité judiciaire au titre du mandat spécial auquel il peut être recouru dans le cadre de la sauvegarde de justice ou au titre de la curatelle, de la tutelle ou de la mesure d'accompagnement judiciaire font l'objet, préalablement à leur inscription sur la liste prévue à l'article L. 471-2, d'un agrément en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs. / L'agrément est délivré par le représentant de l'Etat dans le département, après vérification que la personne satisfait aux conditions prévues par les articles L. 471-4 et L. 472-2 et avis conforme du procureur de la République. / L'agrément doit s'inscrire dans les objectifs et répondre aux besoins fixés par le schéma régional d'organisation sociale et médico-sociale prévu à l'article L. 312-5. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 471-4 de ce code : " Les mandataires judiciaires à la protection des majeurs doivent satisfaire à des conditions de moralité, d'âge, de formation certifiée par l'Etat et d'expérience professionnelle. (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 472-2 du même code : " Le bénéficiaire de l'agrément doit justifier de garanties des conséquences pécuniaires de sa responsabilité civile en raison des dommages subis par les personnes qu'il prend en charge. " ;

8. Considérant que par lettre du 18 juin 2014, le directeur départemental de la cohésion sociale, sur délégation du préfet de l'Hérault, a expressément répondu à la demande, formulée par M. B... dans le délai de recours contentieux, tendant à la communication des motifs de la décision implicite de rejet opposée à sa demande d'agrément ; que cette lettre indique, d'une part, que l'arrêté préfectoral du 18 juillet 2013 portant actualisation du schéma régional des mandataires judiciaires à la protection des majeurs et des délégués aux prestations familiales établi pour la période 2010-2014 et annexé à l'arrêté du 26 avril 2010 fait ressortir que " les listes départementales comportent un nombre de mandataires judiciaires exerçant à titre individuel qui s'avère suffisant au regard des besoins ", d'autre part, que le signataire de cette lettre a suivi l'avis défavorable émis le 26 mars 2014 par le procureur de la République sur la demande présentée par l'intéressé ; qu'il ressort des énonciations de cet avis que le procureur de la République, après avoir pris acte de ce que, par lettre du 26 février 2014, le directeur départemental de la cohésion sociale lui indiquait qu'il était lui-même défavorable à l'agrément de M. B..., a confirmé qu'en l'état du nombre actuel des personnes inscrites et des besoins, tels qu'appréciés par le schéma régional en application de l'article L. 312-4 du code de l'action sociale et des familles et répertoriés par le juge des tutelles du département de l'Hérault, il ne lui apparaissait " pas opportun de procéder à de nouvelles inscriptions, qui ne permettraient pas d'assurer à l'ensemble des mandataires un nombre de missions suffisant pour maintenir le professionnalisme requis pour l'exercice de celles-ci " ;

9. Considérant qu'il ne résulte aucunement des termes de l'article L. 472-1 du code de l'action sociale et des familles citées au point 7 ci-dessus que le procureur de la République, dans l'avis qu'il est appelé à rendre sur la demande d'agrément pour exercer en qualité de mandataire judiciaire à la protection des majeurs, soit tenu de se limiter à l'appréciation des conditions tenant à la personne telles que fixées par les articles L. 471-4 et L. 472-2 de ce code ; qu'il ne ressort pas des travaux parlementaires préparatoires à la loi du 5 mars 2007, dont est issue la rédaction de l'article L. 472-1 précité, que le législateur ait entendu interdire à cette autorité d'émettre cet avis compte tenu des besoins en mandataires judiciaires à la protection des majeurs, et plus largement, l'empêcher de se prononcer au regard de l'ensemble des informations dont il dispose concernant la situation de cette profession ;

10. Considérant que M. B... reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance tirés de ce que le procureur de la République ne peut évaluer les besoins qu'au regard du nombre de personnes exerçant les fonctions de mandataire et non du nombre de missions confiées, qu'il a méconnu le principe d'égalité de traitement et a entaché cet avis de détournement de pouvoir ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus à juste titre par le tribunal administratif de Montpellier ;

11. Considérant que l'avis émis le 26 mars 2014 par le procureur de la République sur la demande de M. B... est, en vertu des dispositions précitées de l'article L. 472-1 du code de l'action sociale et des familles, un avis conforme ; que le préfet de l'Hérault se trouvait dès lors en situation de compétence liée au regard de cet avis défavorable et était donc tenu, en l'absence d'illégalité de cet avis, de rejeter cette demande ; qu'il en résulte que les autres moyens dirigés contre la décision querellée, qui sont inopérants, ne peuvent qu'être écartés ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à se soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; que, par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur sa recevabilité, la requête doit être rejetée, y compris les conclusions aux fins d'injonction et celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... B...et à la ministre des solidarités et de la santé.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 26 janvier 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Pocheron, président,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Coutier, premier conseiller.

Lu en audience publique le 9 février 2018.

2

N° 16MA01772

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA01772
Date de la décision : 09/02/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

55-03-06 Professions, charges et offices. Conditions d'exercice des professions. Professions non organisées en ordres et ne s'exerçant pas dans le cadre d'une charge ou d'un office.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Bruno COUTIER
Rapporteur public ?: M. CHANON
Avocat(s) : RAMOS.

Origine de la décision
Date de l'import : 20/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-02-09;16ma01772 ?
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