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29/01/2018 | FRANCE | N°16MA03432

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 29 janvier 2018, 16MA03432


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice résultant d'un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 31 juillet 2008 lui interdisant à titre conservatoire l'exercice de toute fonction auprès de mineurs.

Par un jugement n° 1403283 du 22 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24

août 2016 et le 23 octobre 2017, M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'ann...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... A...a demandé au tribunal administratif de Marseille de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice résultant d'un arrêté du préfet des Bouches-du-Rhône du 31 juillet 2008 lui interdisant à titre conservatoire l'exercice de toute fonction auprès de mineurs.

Par un jugement n° 1403283 du 22 juin 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 24 août 2016 et le 23 octobre 2017, M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille ;

2°) de condamner l'Etat à lui verser la somme de 50 000 euros en réparation du préjudice résultant de l'atteinte à sa réputation et du maintien de l'interdiction d'exercice au-delà du 24 janvier 2009.

Il soutient que :

- faute de poursuites pénales ou de condamnation, il ne pouvait faire l'objet d'une interdiction d'exercer ;

- l'administration a méconnu la présomption d'innocence et le secret de l'instruction ;

- l'administration a commis une faute en maintenant cette suspension jusqu'au 3 novembre 2009 malgré l'intervention d'une décision de classement sans suite ;

- la direction départementale de la jeunesse et des sports des Bouches-du-Rhône a porté atteinte à sa réputation en faisant état de l'interdiction d'exercer dans le cadre de l'instruction d'une demande de subvention ;

- l'administration n'a pas mené de procédure contradictoire avant de faire état de cette mesure lors de l'examen de cette demande de subvention.

Par des mémoires enregistrés le 26 décembre 2016 et le 12 octobre 2017, le ministre de la ville, de la jeunesse et des sports, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- la référence à la mesure adoptée à l'égard de M. A... dans un avis rendu sur une demande de subvention n'a porté aucune atteinte à la présomption d'innocence car M. A... n'était pas identifié ;

- la mesure de police administrative prise à l'encontre de M. A... pouvait être adoptée en l'absence de sanction pénale ;

- la mesure de suspension a été prise pour une durée de six mois et n'a pas été prolongée ;

- en tout état de cause, l'intéressé a été l'objet de poursuites pénales et la mesure pouvait donc être maintenue ;

- l'Etat n'a commis aucune faute ;

- la réalité du préjudice invoqué n'est pas établie.

Par ordonnance du 11 octobre 2017, la clôture d'instruction a été fixée au 27 octobre 2017.

M. A...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 22 janvier 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la cour a désigné Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur, pour présider les formations de jugement en cas d'absence ou d'empêchement de Mme Carthé Mazères, présidente de la 6ème chambre en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E... Grimaud, rapporteur ;

- les conclusions de M C... Thiele, rapporteur public :

- et les observations de Me D... pour M. A....

1. Considérant qu'à l'occasion de l'encadrement d'une colonie de vacances organisée du 18 au 24 juillet 2008, M. A..., animateur, a été suspecté d'un comportement inadapté à l'égard de jeunes filles mineures placées sous sa responsabilité ; qu'à raison de ces faits, le préfet des Bouches-du-Rhône a, par un arrêté du 31 juillet 2008, interdit temporairement à M. A... l'exercice de toute fonction auprès de mineurs sur le fondement des dispositions de l'article L. 227-10 du code de l'action sociale et des familles ; que le préfet des Bouches-du-Rhône a, le 3 novembre 2009, mis fin à cette interdiction ; que M. A... relève appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à la réparation des préjudices qu'il estime avoir subis du fait de l'intervention de cette décision, du maintien de ses effets au-delà du 31 janvier 2009 et de la publicité qui lui a été donnée à l'occasion d'une réunion du comité de pilotage du contrat urbain de cohésion sociale de Marseille du 19 mars 2009 ;

Sur les conclusions à fin d'indemnisation :

En ce qui concerne l'édiction de la décision du 31 juillet 2008 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 227-4 du code de l'action sociale et des familles : " La protection des mineurs, dès l'inscription dans un établissement scolaire en application de l'article L. 113-1 du code de l'éducation, qui bénéficient hors du domicile parental, à l'occasion des vacances scolaires, des congés professionnels ou des loisirs, d'un mode d'accueil collectif à caractère éducatif entrant dans une des catégories fixées par décret en Conseil d'Etat, est confiée au représentant de l'Etat dans le département (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 227-10 du même code : " Après avis de la commission départementale compétente en matière de jeunesse et de sport, le représentant de l'Etat dans le département peut prononcer à l'encontre de toute personne dont la participation à un accueil de mineurs mentionné à l'article L. 227-4 ou à l'organisation d'un tel accueil présenterait des risques pour la santé et la sécurité physique ou morale des mineurs mentionnés à l'article L. 227-4, ainsi que de toute personne qui est sous le coup d'une mesure de suspension ou d'interdiction d'exercer prise en application de l'article L. 212-13 du code du sport, l'interdiction temporaire ou permanente d'exercer une fonction particulière ou quelque fonction que ce soit auprès de ces mineurs, ou d'exploiter des locaux les accueillant ou de participer à l'organisation des accueils. / En cas d'urgence, le représentant de l'Etat dans le département peut, sans consultation de ladite commission, prendre une mesure de suspension d'exercice à l'égard des personnes mentionnées à l'alinéa précédent. Cette mesure est limitée à six mois. Dans le cas où l'intéressé fait l'objet de poursuites pénales, la mesure de suspension s'applique jusqu'à l'intervention d'une décision définitive rendue par la juridiction compétente. " ;

3. Considérant que les dispositions précitées soumettent l'édiction d'une mesure d'interdiction d'exercer auprès de mineurs, laquelle constitue une mesure de police administrative, à la seule circonstance que la participation de l'intéressé à un accueil de mineurs ou à son organisation présente des risques pour la santé et la sécurité physique ou morale des mineurs, indépendamment de l'exercice de toute poursuite pénale ; que la circonstance que M. A... n'a pas été l'objet de telles poursuites et que l'enquête judiciaire ouverte après les faits a été classée sans suite est dès lors sans incidence sur la légalité de la décision adoptée à son encontre ; que, pour les mêmes motifs, cette décision dont l'objet n'était pas de sanctionner les faits qui lui étaient reprochés mais de prévenir, à titre conservatoire, la répétition d'un comportement inadapté, n'a méconnu ni le droit de l'intéressé à la présomption d'innocence, ni le secret de l'instruction pénale ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'Etat aurait commis une faute susceptible d'engager sa responsabilité en édictant la décision du 31 juillet 2008 prononçant l'interdiction d'exercer des fonctions auprès de mineurs pour six mois ;

En ce qui concerne le maintien en vigueur de la décision du 31 juillet 2008 :

5. Considérant qu'il résulte de l'instruction, et notamment des termes de la décision du 3 novembre 2009 levant la suspension décidée le 31 juillet 2008 que l'effet de cette décision a été prolongée par l'administration, qui estimait que M. A... était l'objet de poursuites pénales ; qu'il résulte toutefois de l'instruction que seule une enquête préliminaire a été ouverte à la suite des faits survenus en juillet 2008 ; que cet acte, qui n'avait pas eu pour effet de mettre en mouvement l'action publique, qui est déclenchée par l'ouverture d'une information sur réquisitoire du ministère public, une plainte avec constitution de partie civile ou une citation directe de la victime, ne pouvait être regardé comme constituant l'exercice de poursuites pénales au sens des dispositions de l'article L. 227-10 du code de l'action sociale et des familles ; qu'il s'ensuit que M. A... est fondé à soutenir que l'Etat a commis une faute en prolongeant les effets de la mesure de suspension prise à son encontre du 31 janvier 2009 au 3 novembre 2009 ;

6. Considérant toutefois qu'il ne résulte pas de l'instruction que la prolongation des effets de cette mesure, qui n'a d'ailleurs fait l'objet d'aucune décision explicite, ait reçu une quelconque publicité ou diffusion au-delà des services des administrations concernées et n'a donc pas pu porter atteinte à la réputation de M. A... ; que celui-ci, qui se borne par ailleurs à invoquer les dommages causés à sa carrière sportive et d'animateur, n'établit pas que le maintien des effets de cette mesure ait restreint d'une manière ou d'autre ses perspectives d'emploi ou de participation à des compétitions entre le 31 janvier 2009 et le 3 novembre 2009 ; qu'il n'a dès lors subi aucun préjudice ;

En ce qui concerne la mention de l'interdiction d'exercer dans l'avis rendu le 15 janvier 2009 par la direction départementale de la jeunesse et des sports des Bouches-du-Rhône sur la demande de subvention de l'association sportive tennis international management espoirs :

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 120-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Exception faite des cas où il est statué sur une demande, les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de l'article L. 211-2, ainsi que les décisions qui, bien que non mentionnées à cet article, sont prises en considération de la personne, sont soumises au respect d'une procédure contradictoire préalable " ;

8. Considérant que M. A... n'étant pas directement visé par la décision prise sur la demande de subvention présentée par l'association, la direction départementale de la jeunesse et des sports des Bouches-du-Rhône n'était pas tenue de mener une procédure contradictoire préalable à son égard ;

9. Considérant qu'il résulte de l'instruction qu'à l'occasion de sa séance du 19 mars 2009, le comité de pilotage du contrat urbain de cohésion sociale de la ville de Marseille a émis un avis négatif sur la demande de subvention formulée par l'association sportive tennis international management espoirs sur le fondement d'une fiche d'instruction préparée par la direction départementale de la jeunesse et des sports des Bouches-du-Rhône et datée du 15 janvier 2009 ; que cette fiche d'instruction mentionnait que le volet d'accompagnement social du projet envisagé par l'association ne pouvait être mené à bien par celle-ci dès lors, notamment, qu'un animateur ayant été placé sous la responsabilité de M. B... était interdit d'exercer ses fonctions auprès de mineurs en raison de " fautes graves " ;

10. Considérant qu'il résulte de l'instruction que M. A... s'était vu interdire l'exercice de ses fonctions à titre conservatoire à compter du 31 juillet 2008, que cette interdiction avait toujours cours à la date du 15 janvier 2009 à laquelle cet avis a été rendu ; que cet avis, qui ne mentionne que le prénom de M. A..., se borne par ailleurs à faire état de fautes et de l'existence d'une mesure de police administrative adoptée à la suite de celles-ci, sans décrire ni les faits, ni leur contexte, et sans les qualifier d'infractions pénales ; qu'il s'ensuit qu'alors même que cette mention n'était pas directement utile au traitement de la demande de subvention de l'association, M. A... n'est pas fondé à soutenir que l'Etat aurait porté atteinte à la présomption d'innocence, au secret de l'instruction pénale, à sa réputation ou à son honorabilité et aurait ainsi commis une faute de nature à engager sa responsabilité en émettant cet avis, qui n'a reçu aucune publicité ou diffusion au-delà des services des administrations concernées, et en le soumettant au comité de pilotage du contrat urbain de cohésion sociale de la ville de Marseille ;

11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à demander la condamnation de l'Etat à lui verser une somme de 50 000 euros en réparation du préjudice qu'il dit avoir subi ; qu'il n'est dès lors pas fondé à se plaindre que, par le jugement attaqué, les premiers juges ont rejeté sa demande ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête n° 16MA03432 de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... A...et au ministre des sports.

Copie en sera adressée au préfet des Bouches-du-Rhône.

Délibéré après l'audience du 15 janvier 2018, où siégeaient :

- Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président,

- M. E... Grimaud, premier conseiller,

- M. Allan Gautron, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 29 janvier 2018.

2

N° 16MA03432


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA03432
Date de la décision : 29/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Police - Polices spéciales.

Responsabilité de la puissance publique - Responsabilité en raison des différentes activités des services publics - Services de police.


Composition du Tribunal
Président : Mme Steinmetz-Schies
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : GENTILIN

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-01-29;16ma03432 ?
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