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02/01/2018 | FRANCE | N°17MA00575

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 4ème chambre - formation à 3, 02 janvier 2018, 17MA00575


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 mai 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1603612 du 17 octobre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 201

7, Mme D... épouseC..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du t...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D...épouseC..., a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 3 mai 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1603612 du 17 octobre 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 9 février 2017, Mme D... épouseC..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 octobre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 3 mai 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault, à titre principal, de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, au besoin sous astreinte, ou à titre subsidiaire de réexaminer sa situation ;

4°) d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

Sur le refus de titre de séjour :

- la notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides lui refusant l'admission au séjour au titre de l'asile n'a pas été accomplie régulièrement, le préfet ne démontrant pas qu'elle ait reçu un avis de passage ;

- elle est dépourvue de base légale en l'absence de notification régulière de la décision précitée ;

- elle méconnaît l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'une erreur de droit dès lors que le préfet s'est estimé, à tort, en situation de compétence liée par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile pour rejeter sa demande ;

- elle est entachée d'un défaut de motivation ;

- elle est entachée d'un défaut d'examen réel et sérieux de sa demande au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation familiale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire :

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale en raison de l'illégalité du refus de séjour ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen complet de sa situation au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision fixant le pays de destination :

- elle est entachée d'un défaut de motivation et d'une erreur de droit dès lors qu'elle n'indique pas précisément le pays de renvoi ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention des Nations Unies sur la prévention de la torture et des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Un mémoire, présenté pour le préfet de l'Hérault, a été enregistré le 15 décembre 2017 et n'a pas été communiqué.

Mme D... épouse C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 16 janvier 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Chevalier-Aubert a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme D... épouseC..., née en 1991, de nationalité arménienne, relève appel du jugement en date du 17 octobre 2016 du tribunal administratif de Montpellier qui a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 3 mai 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 743-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent. " ; qu'aux termes de l'article L. 743-2 du même code : " Par dérogation à l'article L. 743-1, sous réserve du respect des stipulations de l'article 33 de la convention relative au statut des réfugiés, signée à Genève le 28 juillet 1951, et de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, adoptée à Rome le 4 novembre 1950, le droit de se maintenir sur le territoire français prend fin et l'attestation de demande d'asile peut être refusée, retirée ou son renouvellement refusé lorsque : / 1° L'Office français de protection des réfugiés et apatrides a pris une décision d'irrecevabilité en application des 1° ou 2° de l'article L. 723-11 ; (...) 4° L'étranger n'a introduit une première demande de réexamen, qui a fait l'objet d'une décision d'irrecevabilité par l'office en application du 3° de l'article L. 723-11, qu'en vue de faire échec à une mesure d'éloignement ; (...) " ;

3. Considérant qu'il résulte de ces dispositions que l'étranger qui demande l'asile a le droit de séjourner sur le territoire national à ce titre jusqu'à ce que la décision rejetant sa demande lui ait été notifiée régulièrement par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou, si un recours a été formé devant elle, par la Cour nationale du droit d'asile ; qu'en l'absence d'une telle notification, l'autorité administrative ne peut regarder l'étranger à qui l'asile a été refusé comme ne bénéficiant plus de son droit provisoire au séjour ou comme se maintenant irrégulièrement sur le territoire ; qu'en cas de contestation sur ce point, il appartient à l'autorité administrative de justifier que la décision de la Cour nationale du droit d'asile a été régulièrement notifiée à l'intéressé, le cas échéant en sollicitant la communication de la copie de l'avis de réception auprès de la Cour ;

4. Considérant que Mme D... épouse C...a présenté une demande d'asile, rejetée le 30 septembre 2014 par décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides confirmée par la Cour nationale du droit d'asile le 23 juin 2015 ; que l'intéressée a sollicité le réexamen de sa demande d'asile ; que cette demande a été rejetée, en raison de son irrecevabilité, le 24 mars 2016, sur le fondement des dispositions des articles L. 723-11 et L. 723-16, par l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides ; qu'il ressort des pièces du dossier que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et des apatrides du 24 mars 2016 a fait l'objet d'une notification à l'intéressée par lettre recommandée avec accusé de réception ; que pour établir la notification de cette décision le préfet produit un accusé de réception qui ne comporte pas de date de présentation avant mise en instance mais seulement une étiquette avec la mention " avisé-non réclamé " ; qu'ainsi la décision dont il s'agit ne peut être regardée comme régulièrement notifiée ; qu'il s'ensuit que Mme D... épouse C...bénéficiait toujours du droit à se maintenir sur le territoire français à la date de l'arrêté du 3 mai 2016 ; qu'elle est fondée, par suite, à demander l'annulation de la décision lui refusant l'admission au séjour et de la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français pour ce motif ;

5. Considérant qu'il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que Mme D... épouse C...est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

6. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution " ; et qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette décision doit intervenir dans un délai déterminé " ;

7. Considérant que l'exécution du présent arrêt implique seulement, par application des dispositions précitées, qu'il soit enjoint au préfet de l'Hérault de munir l'intéressée d'une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de la situation de Mme D... épouseC... ; qu'il y a lieu, par suite, de fixer à l'autorité administrative un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt pour procéder à ce réexamen ; qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

8. Considérant que Mme D... épouse C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que le conseil de Mme D... épouse C... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me B... de la somme de 1 000 euros ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 17 octobre 2016 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de l'Hérault du 3 mai 2016 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de délivrer à Mme D... épouse C...une autorisation provisoire de séjour et de procéder à un nouvel examen de la situation de celle-ci dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : L'Etat versera au conseil de Mme D... épouse C...une somme de 1 000 euros en application des dispositions du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve de sa renonciation à percevoir l'indemnité correspondant à la part contributive de l'Etat à la mission d'aide juridictionnelle.

Article 5 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme C...est rejeté.

Article 6 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D...épouseC..., à Me B... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 19 décembre 2017, où siégeaient :

- M. Antonetti, président,

- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,

- Mme Boyer, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 2 janvier 2018.

2

N° 17MA00575


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 4ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00575
Date de la décision : 02/01/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. ANTONETTI
Rapporteur ?: Mme Virginie CHEVALIER-AUBERT
Rapporteur public ?: M. RINGEVAL
Avocat(s) : ROSE

Origine de la décision
Date de l'import : 01/02/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2018-01-02;17ma00575 ?
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