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27/10/2017 | FRANCE | N°16MA04240

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 7ème chambre - formation à 3, 27 octobre 2017, 16MA04240


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1601662 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 novembre 20

16, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribuna...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1601662 du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 novembre 2016, Mme C..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 16 juin 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de l'Hérault du 29 janvier 2016 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de lui délivrer une carte de séjour sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, le versement de la somme de 2 000 euros à Me B..., lequel s'engage dans ce cas à renoncer à percevoir la part contributive de l'Etat au titre de l'aide juridictionnelle.

Elle soutient que :

- le refus de séjour n'a pas été précédé d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ;

- le préfet, qui s'est cru lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, a entaché sa décision d'une erreur de droit ;

- le refus de séjour méconnaît tant les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'a pas davantage été précédée d'un examen réel et complet de sa situation ;

- cette décision méconnait les dispositions de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet n'a pas procédé à un examen réel et complet de sa situation avant de prendre la décision fixant le pays de destination ;

- cette décision méconnaît l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 19 septembre 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme C... ne sont pas fondés.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 10 octobre 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-467 du 10 juillet 1991 ;

- la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Guidal, président,

- et les observations de Me D..., substituant Me B..., représentant Mme C....

1. Considérant que, par jugement du 16 juin 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté la demande de Mme C..., de nationalité angolaise, tendant à l'annulation de l'arrêté du 29 janvier 2016 par lequel le préfet de l'Hérault a refusé de lui délivrer un titre de séjour ; que Mme C... relève appel de ce jugement ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'en vertu du 8° de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la carte de résident est délivrée de plein droit, sauf menace pour l'ordre public et sous réserve de la régularité du séjour, à l'étranger reconnu réfugié en application du livre VII du code ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme C... a sollicité son admission au séjour en France au titre de l'asile ; que sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 8 janvier 2015 ; que le recours formé contre cette décision a été rejeté par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 15 décembre 2015 ; que si l'arrêté en litige, qui refuse à l'intéressée la délivrance de la carte de résident prévu par le 8° de l'article L. 314-11 précité, ne fait pas mention de ce que le 19 janvier 2016 son compagnon s'est prévalu de son état de santé pour être admis au séjour sur le territoire français, cette circonstance n'est pas, à elle seule, de nature à établir que le refus de séjour opposé à Mme C... à la suite du rejet de sa demande d'asile et la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français n'auraient pas été précédés d'un examen réel et sérieux de sa situation personnelle ; qu'il ressort, au contraire, de ces mêmes pièces que le préfet a procédé à un examen complet des circonstances de l'affaire et ne s'est pas cru lié par la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que, lorsque le préfet qui statue sur une demande de titre de séjour présentée au titre de l'asile examine d'office si l'étranger est susceptible de se voir délivrer un titre sur un autre fondement que l'asile, tous les motifs de rejet de la demande, y compris donc les motifs se prononçant sur les fondements examinés d'office par le préfet, peuvent être utilement contestés devant le juge de l'excès de pouvoir ; qu'en l'espèce, le préfet a estimé que le refus de séjour opposé à Mme C... ne portait pas une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie familiale et qu'elle n'entrait dans aucun cas d'attribution d'un titre de séjour de plein droit prévu par le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il s'ensuit que l'intéressée peut se prévaloir utilement des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'aux termes de l'article 8 de cette convention : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale (...)/ 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit :/ (...) 7° A l'étranger (...) dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus (...) " ;

5. Considérant que si Mme C..., entrée sur le territoire national le 23 juillet 2014 avec son compagnon, fait valoir que celui-ci s'est vu délivrer une autorisation provisoire de séjour en raison de son état de santé, il ressort des pièces du dossier que cette décision n' a été prise que le 17 février 2016 ; que cette circonstance, postérieure à l'arrêté contesté, est ainsi , et en tout état de cause, sans influence sur sa légalité ; que, compte tenu des circonstances de l'espèce, et notamment de la durée et des conditions de séjour en France de Mme C... et du fait qu'il n'est pas établi qu'elle ne pourrait pas poursuivre ultérieurement sa vie familiale hors de France avec son compagnon, l'arrêté du préfet de l'Hérault du 29 janvier 2016 n'a pas porté au droit de celle-ci au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a été pris ; que, par suite, il n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, que Mme C... ne saurait, en tout état de cause, se prévaloir des dispositions de l'article L. 742-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans la mesure où elles ont été abrogées antérieurement à l'arrêté contesté par la loi n° 2015-925 du 29 juillet 2015 relative à la réforme du droit d'asile ; qu'à supposer que l'intéressée ait entendu invoquer les dispositions de portée équivalente de l'article L. 743-3 du même code, aux termes desquelles " L'étranger auquel la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé (...) et qui ne peut être autorisé à demeurer sur le territoire à un autre titre doit quitter le territoire français, sous peine de faire l'objet d'une mesure d'éloignement prévue au titre Ier du livre V (...) ", l'intéressée ne démontre pas qu'elle pourrait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour à un autre titre que l'asile ; que Mme C... se trouvait ainsi dans un cas où le préfet pouvait légalement lui faire obligation de quitter le territoire français ;

7. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger qui fait l'objet d'une mesure d'éloignement est éloigné :/ 1° A destination du pays dont il a la nationalité, sauf si l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou la Cour nationale du droit d'asile lui a reconnu le statut de réfugié ou lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire ou s'il n'a pas encore été statué sur sa demande d'asile ;/ 2° Ou à destination du pays qui lui a délivré un document de voyage en cours de validité ;/ 3° Ou à destination d'un autre pays dans lequel il établit être légalement admissible./ Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales (...) " ; qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants. " ; qu'il résulte de ces dispositions que l'autorité administrative chargée de prendre la décision fixant le pays de renvoi d'un étranger a l'obligation de s'assurer, au vu du dossier dont elle dispose et sous le contrôle du juge, que les mesures qu'elle prend n'exposent pas l'étranger à des risques sérieux pour sa liberté ou son intégrité physique, non plus qu'à des traitements contraires à l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; qu'elle est en droit de prendre en considération à cet effet les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ou de la Cour nationale du droit d'asile ayant statué sur la demande d'asile du requérant, sans pour autant être liée par ces éléments ;

8. Considérant qu'il ne ressort ni des termes de la décision contestée ni des autres pièces du dossier que le préfet se serait cru lié par les décisions précitées de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile, et qu'il n'aurait pas procédé à un examen réel et complet de la situation de Mme C... avant de fixer le pays de renvoi à destination duquel la mesure d'éloignement doit être exécutée ;

9. Considérant que si pour contester cette décision Mme C... soutient qu'elle serait exposée à un risque pour sa vie en cas de retour dans son pays d'origine, elle n'apporte pas d'élément établissant ses allégations ; que, dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande ; qu'il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter ses conclusions aux fin d'injonction et d'astreinte et celles tendant à l'application des articles 37 et 75 de la loi du 10 juillet 1991 ;

D É C I D E :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C..., à Me B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de l'Hérault.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2017, où siégeaient :

- M. Pocheron, président de chambre,

- M. Guidal, président assesseur,

- M. Chanon, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 octobre 2017.

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N° 16MA04240

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 7ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA04240
Date de la décision : 27/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. POCHERON
Rapporteur ?: M. Georges GUIDAL
Rapporteur public ?: M. MAURY
Avocat(s) : RUFFEL

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-27;16ma04240 ?
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