Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. B...D...a demandé au tribunal administratif de Marseille d'annuler l'arrêté du 21 janvier 2016 du préfet des Alpes de Haute-Provence refusant de lui délivrer un titre de séjour, l'obligeant à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays à destination duquel il pourrait être éloigné d'office.
Par un jugement n° 1601191 du 2 mai 2016, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 6 juin 2016, M.D..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Marseille du 2 mai 2016 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet des Alpes de Haute-Provence du 21 janvier 2016 ;
3°) d'enjoindre au préfet de Alpes de Haute-Provence de lui délivrer un titre de séjour sous astreinte de quinze euros par jour de retard suivant un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de Alpes de Haute-Provence de lui délivrer un titre de séjour provisoire jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas, sous astreinte de quinze euros par jour de retard suivant un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
5°) à titre infiniment subsidiaire, de fixer l'Italie comme pays à destination duquel il sera susceptible d'être éloigné ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
En ce qui concerne le refus de titre de séjour :
- la décision est entachée d'un vice de procédure, en l'absence de saisine de la commission du titre de séjour ;
- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle dès lors qu'il démontre résider habituellement en France depuis 2003 ;
- la décision méconnait l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision méconnait l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
- la décision fondée sur une décision de refus de titre de séjour illégale est elle-même illégale ;
- la décision méconnait l'article 6 de la directive n° 2008/115/CE du 16 décembre 2008.
Par un mémoire en défense enregistré le 15 novembre 2016, le préfet des Alpes de Haute-Provence conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. D...ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ;
- la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil du 16 décembre 2008 ;
- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Le rapport de Mme Bourjade-Mascarenhas a été entendu au cours de l'audience publique.
1. Considérant que M. B...D..., ressortissant tunisien, né le 10 août 1956, a sollicité le 15 décembre 2015 la délivrance d'un titre de séjour ; que, par arrêté du 21 janvier 2016, le préfet des Alpes de Haute-Provence a rejeté cette demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français ; que, par jugement du 2 mai 2016, dont l'intéressé relève appel, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;
En ce qui concerne la décision de refus de titre de séjour :
2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans sa rédaction applicable à la date de la décision contestée : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; " ; qu'il appartient au préfet, saisi d'une demande de titre de séjour par un étranger en vue de régulariser sa situation, de vérifier que la décision de refus qu'il envisage de prendre ne comporte pas de conséquences d'une gravité exceptionnelle sur la situation personnelle de l'intéressé et n'est pas ainsi entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
3. Considérant que M. D...déclare être entré en France en 2003 ; que les pièces qu'il produit, à savoir cinq attestations insuffisamment circonstanciées, trois factures, deux attestations d'admission à l'aide médicale d'Etat, un commandement de payer, deux attestations de paiement de frais médicaux et quelques documents médicaux récents, si elles peuvent prouver une présence ponctuelle en France, ne permettent pas d'établir une résidence habituelle ; que, par ailleurs, il ne démontre pas davantage qu'en première instance que sa présence serait indispensable aux côtés de son frère Jalloul, handicapé depuis 1999, déjà assisté par sa soeur Najoua à laquelle a été accordé un titre de séjour à cet effet ; qu'il n'établit pas non plus disposer de liens anciens, intenses et stables en France ; qu'en outre, l'intéressé, âgé, à la date de la décision attaquée, de cinquante-neuf ans, a passé la majeure partie de sa vie dans son pays d'origine ou en Italie, où il disposait jusqu'en 2001 d'un titre de séjour ; qu'ainsi, à supposer même que le requérant n'aurait plus aucune attache familiale en Tunisie, le préfet des Alpes de Haute-Provence, qui a apprécié le droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale, n'a, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des conditions d'entrée et de séjour de M. D..., méconnu, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en lui refusant un titre de séjour ; que, pour les mêmes motifs, le préfet des Alpes de Haute-Provence n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle ;
4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision attaquée : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans " ;
5. Considérant que M.D..., qui ne démontre pas par les pièces qu'il a produites tant devant le tribunal administratif que devant la Cour sa résidence habituelle en France ni la nécessité de sa présence quotidienne auprès de son frère handicapé, ne fait pas état de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels qui justifieraient son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile précité ;
6. Considérant que, comme il a été indiqué au point 3, M. D...ne justifiant pas résider en France habituellement depuis plus de dix ans, le préfet n'était pas tenu de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour en application du deuxième alinéa de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :
7. Considérant que M. D...reprend en appel les moyens qu'il avait invoqués en première instance tirés de l'exception d'illégalité de la décision portant refus de séjour et de la méconnaissance de l'article 6 de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 ; qu'il y a lieu d'écarter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Marseille ;
8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. D...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Marseille a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte et celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent également être rejetées ;
D É C I D E :
Article 1er : La requête de M. D...est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B...D...et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet des Alpes de Haute-Provence.
Délibéré après l'audience du 5 octobre 2017, où siégeaient :
- M. Vanhullebus, président,
- M. Barthez, président-assesseur,
- Mme A...Bourjade-Mascarenhas, première conseillère.
Lu en audience publique, le 19 octobre 2017.
2
N° 16MA02199