Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme C... A...ont demandé au tribunal administratif de Nice de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels ils ont été assujettis au titre de l'année 2006, ainsi que des pénalités correspondantes.
Par un jugement n° 1302022 du 26 juin 2015, le tribunal administratif de Nice a, dans un article 1er, prononcé un non-lieu à statuer partiel sur leur demande, dans un article 2, réduit les bases de l'impôt sur le revenu assigné à M. et Mme A... de 20 800 euros et rejeté le surplus de leur demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 21 août 2015, M. et Mme A..., représentés par Me B..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Nice en tant qu'il a rejeté le surplus de leur demande ;
2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige et des pénalités correspondantes ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le vérificateur a emporté irrégulièrement des documents comptables ;
- M. A... a été privé d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification de comptabilité ;
- ils n'ont pas été informés, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales, de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers ;
- M. A...n'a jamais perçu la somme de 91 074 euros au titre de salaires en 2006 ;
- la somme de 23 700 euros remise par chèque a simplement transité sur le compte bancaire ;
- le tribunal a omis de statuer sur ce moyen ;
- les majorations pour manquement délibéré ne sont pas fondées.
Par un mémoire en défense, enregistré le 18 janvier 2016, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme A... ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme Chevalier-Aubert,
- et les conclusions de M. Ringeval, rapporteur public.
1. Considérant que M. et Mme A... ont fait l'objet d'un examen de situation fiscale personnelle portant sur l'année 2006 ; que l'administration a par ailleurs procédé à une vérification de comptabilité de l'activité d'agent commercial exercée par M. A..., portant sur les années 2006 à 2007, ainsi que de la SARL Skybess, dont M. A... est l'associé unique, pour les années 2005 et 2008 ; qu'à l'issue de ces contrôles, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été réclamées à M. et Mme A... au titre de l'année 2006; que M. et Mme A... ont contesté ces impositions ainsi que les pénalités dont elles ont été assorties devant le tribunal administratif de Nice qui, par un jugement du 26 juin 2015, a, d'une part, prononcé un non lieu à statuer partiel sur leur demande, d'autre part, réduit les bases de l'impôt sur le revenu assigné à M. et Mme A... de 20 800 euros et rejeté enfin le surplus de leur demande ; que M. et Mme A... relèvent appel de ce jugement en tant qu'il n'a que partiellement fait droit à leurs conclusions ;
Sur la régularité du jugement :
2. Considérant qu'à l'appui de leur demande, M. et Mme A... soutenaient notamment qu'il subsistait une contestation sur une remise de chèque de 23 700 euros de M. D... correspondant à une somme qui n'aurait fait que transiter sur leurs comptes et pour laquelle ils attendaient que les bénéficiaires leur fournissent des éléments de preuve ; que le tribunal ne s'est pas prononcé sur ce moyen, qui n'était pas inopérant ; que, par suite, le jugement attaqué est, pour ce motif, entaché d'irrégularité et doit être annulé ;
3. Considérant qu'il y a lieu pour la Cour d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par M. et Mme A... devant le tribunal administratif de Nice ;
Sur l'étendue du litige :
4. Considérant que par une décision du 4 décembre 2013 postérieure à l'introduction de la demande, le directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 16 810 euros, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles M. et Mme A... ont été assujettis au titre de l'année 2006 ; qu'à hauteur de ce montant les conclusions de la demande sont devenues sans objet et qu'il n'y a plus lieu d'y statuer ;
Sur le surplus des conclusions :
En ce qui concerne la régularité de la procédure de vérification de comptabilité opérée sur l'activité d'agent commercial exercée par le requérant :
5. Considérant qu'il est constant que le bordereau de restitution de pièces du 9 mai 2009 mentionne qu'il concerne l'ensemble des documents qui ont été remis au vérificateur par M. A... les 9, 17 février et 31 mars 2009 ; qu'il n'est pas contesté que M. A... a contresigné ce bordereau sans émettre de réserves quant à la nature et au nombre des documents restitués ; que, par suite, le vérificateur ne peut être regardé comme ayant emporté irrégulièrement des documents comptables ;
6. Considérant que le premier entretien entre le vérificateur et M. A... a eu lieu, à la demande de ce dernier, à son domicile, le 4 février 2009, et a été suivi, dans les locaux de la 2ème brigade de vérification de Nice, de trois autres entretiens les 17 février, 31 mars, et 23 avril 2009, et d'une réunion de synthèse le 4 mai 2009 ; que, dans ces conditions, les requérants, qui ne démontrent pas que le vérificateur se serait refusé à un échange de vues avec M. A..., ne sont pas fondés à soutenir que l'intéressé aurait été privé de la possibilité d'avoir avec celui-ci, en cours de vérification, un débat oral et contradictoire ;
7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou de la notification prévue à l'article L. 76. Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande " ; que l'obligation ainsi faite à l'administration fiscale d'informer le contribuable de l'origine et de la teneur des renseignements qu'elle a utilisés pour procéder à des rectifications a pour objet de permettre à celui-ci, notamment, de discuter utilement leur provenance ou de demander que les documents qui, le cas échéant, contiennent ces renseignements soient mis à sa disposition avant la mise en recouvrement des impositions qui en procèdent, afin qu'il puisse vérifier l'authenticité de ces documents et en discuter la teneur ou la portée ; que les dispositions de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales instituent ainsi une garantie au profit de l'intéressé ; que, toutefois, la méconnaissance de ces dispositions par l'administration demeure sans conséquence sur le bien-fondé de l'imposition s'il est établi qu'eu égard à la teneur du renseignement, nécessairement connu du contribuable, celui-ci n'a pas été privé, du seul fait de l'absence d'information sur l'origine du renseignement, de cette garantie ;
8. Considérant que si la proposition de rectification du 30 juin 2009 n'indique pas que les relevés des comptes ouverts par M. A... auprès de la banque HSBC sous les n° 30056 00292 02920011589 89 et 30056 00292 02922001509 97 ont été obtenus au moyen de l'exercice par l'administration de son droit de communication, elle précise que les rectifications en litige sont notamment fondées sur les encaissements constatés sur ces comptes, dont la liste détaillée figure en annexe de ce document avec l'indication des montants, des libellés et des dates ; que M. A..., titulaire des comptes dont il s'agit, a ainsi eu connaissance de la teneur des documents obtenus dans le cadre de droit de communication qui ont fondé les rectifications en litige ; que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que M. A... aurait été privé de la garantie prévue par les dispositions de l'article L. 76 B précité du livre des procédures fiscales ; qu'au surplus, et en tout état de cause, les données du compte n° 30056 00292 02920011589 89 n'ont pas été utilisées pour fonder des rectifications ;
En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :
9. Considérant qu'il est constant que M. et Mme A... ont déclaré la somme de 91 074 euros dans la catégorie des traitements et salaires de l'année 2006 ; que l'imposition en cause ayant été établie conformément à la déclaration souscrite au titre de l'année 2006, il incombe à ceux-ci, en application des dispositions précitées de l'article R. 194-1 du livre des procédures fiscales, d'en démontrer le caractère exagéré ; que la seule circonstance alléguée que cette somme a été déclarée seulement pour ne pas encourir de pénalités, mais ne correspondrait pas aux salaires perçus qui s'élèveraient pour 2006 à 15 000 euros, ne suffit pas à établir que le montant retenu serait exagéré ;
10. Considérant qu'en revanche, et en ce qui concerne les rehaussements d'imposition relevant de la catégorie des bénéfices non commerciaux, il résulte des principes qui gouvernent la procédure de rectification contradictoire que la charge de la preuve incombe à l'administration dès lors que les requérants ont contesté les impositions mises à leur charge en présentant des observations le 15 décembre 2010 ; que le ministre, en se bornant à faire état d'une remise de chèque de 23 700 euros enregistrée sur le compte bancaire HSBC numéro 029222001509 et datée du 19 octobre 2006, ne démontre pas que cette somme a constitué une source de revenus imposable dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ; qu'ainsi la base d'imposition doit être réduite de la somme de 23 700 euros;
11. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme A... sont seulement fondés à demander la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales correspondant à la somme de 23 700 euros réintroduite à tort dans les recettes taxables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux ;
En ce qui concerne les pénalités :
12. Considérant qu'aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette et la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs, de la taxe sur la valeur ajoutée et des autres taxes sur le chiffre d'affaires, des droits d'enregistrement, de la taxe de publicité foncière et du droit de timbre, la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration. " ;
13. Considérant qu'en se prévalant, d'une part, de la qualité de " professionnel avisé " de M. A... et, d'autre part, de ce que les recettes dissimulées en matière de bénéfice non commercial constituent une part importante des recettes totales, l'administration ne peut être regardée, alors au demeurant que M. et Mme A... ont obtenu d'importants dégrèvements faisant suite aux justifications apportées dans le cadre de la procédure contentieuse, comme apportant la preuve de l'intention des intéressés d'éluder l'impôt ; que, par suite, M. et Mme A... sont fondés à solliciter la décharge des pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été appliquées ;
Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :
14. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement à M. et Mme A... d'une somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;
D É C I D E :
Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Nice du 26 juin 2015 est annulé.
Article 2 : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de la requête de M. et Mme A..., à concurrence des dégrèvements de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales prononcés par le directeur départemental des finances publiques des Alpes-Maritimes au titre de l'année 2006.
Article 3 : La base d'imposition de M. et Mme A... à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices non commerciaux doit être réduite de la somme de 23 700 euros au titre de l'année 2006.
Article 4 : M. et Mme A... sont déchargés de la fraction de cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de pénalités au titre de 2006 correspondant à la réduction des bases visée à l'article 3.
Article 5 : M. et Mme A... sont déchargés des pénalités pour manquement délibéré qui leur ont été appliquées.
Article 6 : Le surplus des conclusions de la demande et de la requête est rejeté.
Article 7 : L'Etat versera à M. et Mme A... une somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... A...et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée à la direction de contrôle fiscal sud-est.
Délibéré après l'audience du 2 octobre 2017, où siégeaient :
- M. Antonetti, président,
- Mme Chevalier-Aubert, président assesseur,
- Mme Boyer, premier conseiller.
Lu en audience publique, le 17 octobre 2017.
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N° 15MA03519