La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/10/2017 | FRANCE | N°17MA00244

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 6ème chambre - formation à 3, 09 octobre 2017, 17MA00244


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 12 décembre 2016 par lequel celui-ci lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1606186 du 19 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpell

ier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A...C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler l'arrêté du préfet des Pyrénées-Orientales du 12 décembre 2016 par lequel celui-ci lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français pour une durée de trois ans.

Par un jugement n° 1606186 du 19 décembre 2016, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 13 janvier 2017, M. A... C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Montpellier du 19 décembre 2016 ;

2°) d'annuler la décision du 12 décembre 2016 par laquelle le préfet des Pyrénées-Orientales lui a interdit le retour sur le territoire français ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros à verser directement à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'interdiction de retour sur le territoire français est insuffisamment motivée ;

- cette mesure est entachée d'erreur de droit car sa situation ne permettait pas l'édiction d'une interdiction de retour sur le territoire français ;

- cette mesure est disproportionnée.

Par un mémoire enregistré le 3 mars 2017, le préfet des Pyrénées-Orientales conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A... C...ne sont pas fondés.

M. A... C...a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 mars 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Grimaud a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. E... A...C..., né le 30 septembre 1995 et de nationalité bolivienne, a été interpellé le 11 décembre 2016 alors qu'il franchissait la frontière entre l'Espagne et la France ; que, le 12 décembre 2016, le préfet des Pyrénées-Orientales, ayant constaté qu'il était dépourvu de visa ou de titre de séjour l'autorisant à demeurer en France, a édicté à son encontre une obligation de quitter le territoire français sans délai, fixé le pays de destination de cette mesure d'éloignement et lui a interdit le retour sur le territoire français ; que M. A... C...relève appel du jugement du 19 décembre 2016 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision d'interdiction sur le territoire français ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. Considérant qu'aux termes des dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, l'étranger dispose d'un délai de trente jours à compter de sa notification pour rejoindre le pays dont il possède la nationalité ou tout autre pays non membre de l'Union européenne ou avec lequel ne s'applique pas l'acquis de Schengen où il est légalement admissible. / (...) Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; / (...) f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité, ou qu'il a dissimulé des éléments de son identité, ou qu'il n'a pas déclaré le lieu de sa résidence effective ou permanente, ou qu'il s'est précédemment soustrait aux obligations prévues par les articles L. 513-4, L. 552-4, L. 561-1 et L. 561-2 (...) " ; qu'aux termes des dispositions du III du même article : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. / Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. / (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. A... C...a été interpellé dès son entrée sur le territoire français, qu'il n'a jamais fait l'objet d'une mesure d'éloignement et qu'il ne représente pas une menace pour l'ordre public ; que, par suite, et alors même qu'il n'aurait aucune attache familiale ou affective en France, il est fondé à soutenir qu'en décidant de lui interdire le retour sur le territoire français pour la durée maximale de trois ans prévue par les dispositions précitées, le préfet des Pyrénées-Orientales a commis une erreur d'appréciation des circonstances de l'affaire ;

4. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. A... C...est fondé à soutenir que c'est à tort que le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français ; qu'il y a lieu, dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, d'annuler dans cette mesure le jugement du 19 décembre 2016 ainsi que l'arrêté du 12 décembre 2016 prononçant l'interdiction de retour sur le territoire français ;

Sur l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

5. Considérant qu'aux termes du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens, ou qui perd son procès, et non bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, à payer à l'avocat du bénéficiaire de l'aide juridictionnelle, partielle ou totale, une somme qu'il détermine et qui ne saurait être inférieure à la part contributive de l'Etat, au titre des honoraires et frais non compris dans les dépens que le bénéficiaire de l'aide aurait exposés s'il n'avait pas eu cette aide. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation " ;

6. Considérant que M. A... C...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me D... renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'État, de mettre à la charge de l'Etat le versement à celui-ci de la somme de 1 500 euros ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1606186 du tribunal administratif de Montpellier du 19 décembre 2016 est annulé en tant qu'il a rejeté les conclusions à fin d'annulation de M. A... C...à l'encontre de l'arrêté du 12 décembre 2016 lui interdisant le retour sur le territoire français.

Article 2 : L'arrêté du 12 décembre 2016 interdisant le retour sur le territoire français à M. A... C...est annulé.

Article 3 : L'Etat versera, en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, une somme de 1 500 euros à Me D....

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A...C..., à Me D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet des Pyrénées-Orientales.

Délibéré après l'audience du 25 septembre 2017, où siégeaient :

- Mme Isabelle Carthé Mazères président,

- Mme Marie-Pierre Steinmetz-Schies, président assesseur,

- M. B... Grimaud, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 octobre 2017.

2

N° 17MA00244


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 6ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 17MA00244
Date de la décision : 09/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Étrangers - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme CARTHE-MAZERES
Rapporteur ?: M. Philippe GRIMAUD
Rapporteur public ?: M. THIELÉ
Avocat(s) : DE ARANJO

Origine de la décision
Date de l'import : 17/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-09;17ma00244 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award