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02/10/2017 | FRANCE | N°16MA02945

France | France, Cour administrative d'appel de Marseille, 5ème chambre - formation à 3, 02 octobre 2017, 16MA02945


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 26 juin 2014 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

Par un jugement n° 1403406 du 18 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du t

ribunal administratif de Montpellier du 18 mars 2016 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de l'Héraul...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C...a demandé au tribunal administratif de Montpellier d'annuler la décision du 26 juin 2014 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté sa demande de regroupement familial au bénéfice de son épouse.

Par un jugement n° 1403406 du 18 mars 2016, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 21 juillet 2016, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du tribunal administratif de Montpellier du 18 mars 2016 ;

2°) d'annuler la décision du préfet de l'Hérault du 26 juin 2014 ;

3°) de faire droit à sa demande de regroupement familial ou, subsidiairement, d'ordonner le réexamen de celle-ci dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir.

Il soutient que :

- la décision de refus est insuffisamment motivée ;

- le préfet a commis une erreur de droit en s'estimant tenu de rejeter la demande du fait de l'insuffisance de ses ressources, sans prendre en compte les autres éléments de sa situation ;

- le refus est entaché d'erreur manifeste d'appréciation eu égard à la gravité des conséquences sur sa situation personnelle et familiale et son état de santé ;

- la décision méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 août 2017, le préfet de l'Hérault conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen nouveau tiré de l'insuffisance de motivation est irrecevable, la demande de première instance de M. C... ne comportant pas de moyens de légalité externe ;

- il se réfère à ses écritures de première instance quant à la réponse aux autres moyens invoqués.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 20 juin 2016.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Hameline a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M. E... C..., ressortissant marocain titulaire d'une carte de résident d'une durée de validité de dix ans, a sollicité le 17 février 2014 auprès de la préfecture de l'Hérault le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse Mme B... A...; que, par une décision du 26 juin 2014, le préfet de l'Hérault a refusé d'autoriser le regroupement familial ; que M. C..., après avoir obtenu l'aide juridictionnelle, relève appel du jugement du 18 mars 2016 par lequel le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision de refus ;

Sur la fin de non-recevoir opposée à la demande de première instance de M. C... :

2. Considérant qu'aux termes de l'article R. 411-1 du code de justice administrative : " La juridiction est saisie par requête. La requête indique les noms et domiciles des parties. Elle contient l'exposé des faits et moyens, ainsi que l'énoncé des conclusions soumises au juge. (...)" ;

3. Considérant que la demande que M. C... a introduite le 15 juillet 2014 au tribunal administratif de Montpellier sans recourir au ministère d'avocat comportait, de manière sommaire mais suffisante, l'exposé de faits et moyens tirés de l'erreur manifeste d'appréciation de l'administration eu égard à l'ancienneté de son séjour en France et au caractère stable de sa situation financière et patrimoniale, et du droit au respect de sa vie familiale caractérisée notamment par son remariage après son veuvage et la présence de ses enfants sur le territoire français ; que, par suite, son recours contentieux satisfaisait aux conditions posées par l'article R. 411-1 du code de justice administrative ; que la fin de non-recevoir opposée sur ce point par le préfet à la demande de première instance doit ainsi être écartée ;

Sur la légalité de la décision du préfet de l'Hérault :

4. Considérant qu'aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans " ; qu'aux termes de l'article L. 411-5 du même code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. (...) ; 2° Le demandeur ne dispose pas ou ne disposera pas à la date d'arrivée de sa famille en France d'un logement considéré comme normal pour une famille comparable vivant dans la même région géographique (...) " ; qu'il résulte de ces dispositions que, lorsqu'il se prononce sur une demande de regroupement familial, le préfet est en droit de rejeter la demande dans le cas où le demandeur ne justifierait pas remplir l'une ou l'autre des conditions légalement requises tenant notamment aux ressources ou au logement ; qu'il dispose, toutefois, d'un pouvoir d'appréciation et n'est pas tenu par ces dispositions notamment dans le cas où il est porté une atteinte excessive au droit du demandeur de mener une vie familiale normale tel qu'il est protégé par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

5. Considérant que, pour refuser à M. C... le bénéfice du regroupement familial au profit de son épouse, le préfet de l'Hérault s'est fondé sur le seul motif tiré de l'insuffisance des ressources de l'intéressé ; que si le préfet de l'Hérault pouvait légalement fonder sa décision sur ce motif, les conditions de ressources nécessaires pour bénéficier d'un regroupement familial n'étant pas en l'espèce remplies, il ne se trouvait pas en situation de compétence liée et il lui appartenait de procéder à un examen de l'ensemble des circonstances de l'espèce, notamment des incidences de son refus sur la situation de M. C... au regard de son droit au respect de sa vie privée et familiale protégé par l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que le seul visa par la décision attaquée de l'article 8 de cette convention n'est pas de nature à démontrer que le préfet aurait exercé en l'espèce son pouvoir d'appréciation au regard de la vie privée et familiale du requérant ; qu'en se bornant à énoncer dans la décision en litige que, les ressources de M. C... étant d'un montant " inférieur au seuil requis ", " les conditions de montant de ressources exigées par les articles L. 411-5 et R. 411-4 du code susvisé ne sont pas remplies " et " ainsi compte tenu des motifs évoqués ci-dessus que l'intéressé ne remplit pas les conditions requises permettant de réserver une suite favorable à sa demande ", sans aucune autre précision ou élément issu d'un examen de la situation personnelle ou familiale du requérant, le préfet de l'Hérault doit être regardé comme s'étant, à tort, estimé lié par l'insuffisance des ressources de celui-ci pour rejeter la demande dont il était saisi ; que le préfet a, dès lors, méconnu en l'espèce l'étendue de son pouvoir d'appréciation ; que, par suite et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de sa requête, M. C... est fondé à soutenir ainsi qu'il le fait pour la première fois en appel que la décision de refus de sa demande de regroupement familial est entachée d'une erreur de droit ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Montpellier a rejeté sa demande d'annulation de la décision du préfet de l'Hérault du 26 juin 2014 ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que le présent arrêt n'implique pas nécessairement, eu égard au motif sur lequel il se fonde, que le préfet de l'Hérault accorde à M. C... le bénéfice du regroupement familial au bénéfice de son épouse ; qu'il implique, en revanche, que l'administration se prononce à nouveau sur la demande présentée par l'intéressé, en l'absence de toute circonstance nouvelle portée à la connaissance de la Cour qui y ferait obstacle ; qu'il y a lieu, dès lors, d'enjoindre au préfet de l'Hérault de se prononcer à nouveau sur la demande de regroupement familial présentée par M. C... dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement du tribunal administratif de Montpellier n° 1403406 du 18 mars 2016 et la décision du 26 juin 2014 par laquelle le préfet de l'Hérault a rejeté la demande de regroupement familial de M. C... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de l'Hérault de réexaminer la demande de regroupement familial présentée par M. E... C...dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de M. C... est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera transmise au préfet de l'Hérault.

2

N° 16MA02945


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Marseille
Formation : 5ème chambre - formation à 3
Numéro d'arrêt : 16MA02945
Date de la décision : 02/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Étrangers - Séjour des étrangers - Refus de séjour.

Procédure - Introduction de l'instance - Formes de la requête - Obligation de motiver la requête.


Composition du Tribunal
Président : M. BOCQUET
Rapporteur ?: Mme Marie-Laure HAMELINE
Rapporteur public ?: M. REVERT
Avocat(s) : BAUDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 10/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.marseille;arret;2017-10-02;16ma02945 ?
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